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262ème dîner au restaurant Pages jeudi, 21 avril 2022

Le 262ème dîner se tient au restaurant Pages. Le dirigeant d’une entreprise américaine ayant des connections avec la France invite certaines de ses relations françaises. L’un de ses cadres français me contacte pour organiser un dîner pour des amateurs éclairés. Il y aura en effet autour de la table une majorité de membres du club des cent, ce club de celèbres gourmets. Le nombre de convives a pendant longtemps dansé le tango, un pas en avant et deux pas en arrière, me poussant à préparer un repas pour treize convives devenus douze le jour du dîner puis onze seulement du fait de la défection non annoncée d’un inscrit.

A 16 heures je me présente au restaurant Pages pour ouvrir les vins du dîner, avec l’aide compétente du sommelier Matthieu, qui fait aussi office de directeur de salle pendant l’arrêt-maladie du nouveau directeur.

Le parfum du Laville Haut-Brion 1953 est invraisemblable de puissance et de perfection. C’est le seul vin que je rebouche après ouverture pour ne pas perdre la générosité de ses fragrances. Le nez du Bâtard-Montrachet 1993 est subtil quand celui du Montrachet 1989 est large et puissant. Le nez du Palmer 1959 est divinement bordelais quand celui du Pétrus 1953 est celui d’un vin guerrier. Le nez de l’Echézeaux 1974 a le charme absolu des vins du domaine de la Romanée Conti. Les deux vins du Rhône ont des senteurs calmes et épanouies. Le Château Chalon 1962 est une bombe de parfums conquérants. Le Lafaurie-Peyraguey 1926 est une danse des sept voiles, avec des parfums aux complexités infinies et le Sherry du Cap 1862 est d’une finesse extrême en un message pénétrant.

Aucun parfum ne pose question. Les plus complexes et puissants sont les plus anciens, de 1926 et 1862. Viennent ensuite le Laville 1953, le Palmer 1959 et l’Hermitage la Chapelle 1962 qui sont au-dessus du lot.

Les ouvertures sans problème sont terminées à 17h20. Il me reste un peu moins de trois heures à attendre l’arrivée des convives. Je bavarde avec l’équipe de cuisine, heureuse de créer de beaux plats et quand ils vont dîner à 18 heures au 116, la brasserie qui appartient aux propriétaires de Pages, je les suis pour, selon la tradition, boire une bière et grignoter des édamamés.

Nous serons onze dont deux femmes. Pour ne pas démarrer par un champagne très ancien, j’ai ajouté au dernier moment un Champagne Salon 2004. Il joue bien son rôle d’entrée en matière (de luxe dira un convive passionné de Salon) car il est d’une belle droiture et promet de grandes complexités dans quelques années. Ce champagne me permet de faire le discours traditionnel au début de chaque repas.

Le menu composé par le chef Ken et son équipe est : choux au parmesan / carpaccio de barbue / homard sauce bisque / rouget sauce civet / pigeon sauce salmis / bœuf wagyu / comté 18 mois / tarte aux agrumes / mignardises. Ayant imprimé les menus et ayant traduit en anglais les intitulés des plats, toute l’équipe de Pages s’est gaussée de ma traduction du chou au Parmesan en Parmesan cabbage ! j’ai utilisé trop vite Google Traduction. Ma faute.

C’est le Champagne Mumm Cordon Rouge 1937 qui accompagne les choux qui ne sont pas des choux. Sa couleur est d’un bel or légèrement ambré. Il n’y a pas de pschitt mais le pétillant est là. Le champagne est fruité, cohérent, rond et bien assemblé et se boit avec plaisir. Je vois l’étonnement de plusieurs convives pour qui un champagne de 85 ans ne devrait pas avoir cette rondeur.

J’ai voulu associer un champagne et un vin blanc sur le poisson cru, car j’ai souvent remarqué que les deux se fécondent. Nous le vérifions car le Château Laville Haut Brion 1953 au parfum diabolique de présence et de puissance propulse le Champagne Krug 1982 à des hauteurs qu’il n’atteint pas quand il est bu sans être précédé par le vin bordelais. Le Krug qui m’avait offert à l’ouverture un très joli pschitt est idéal et d’un bel équilibre. Il est particulièrement courtois et subtil. Le Château Laville Haut Brion 1953 d’une couleur nettement plus claire que celle du Mumm est un bordeaux blanc parfait, dynamique puissant, aux suggestions exotiques et beaucoup plus intéressant par sa complexité que des bordeaux blancs parmi les plus prestigieux. Il fait partie des très grands Laville. L’accord avec le poisson goûteux et discret est superbe.

Le homard est cuit idéalement. Il accompagne deux blancs de Bourgogne. Le Bâtard-Montrachet Pierre Morey 1993 est tout en finesse et subtilité. Le Montrachet Bouchard Père & Fils 1989 est au contraire tout en affirmation et en puissance. Et malgré le plus grand prestige du Montrachet je préfère la sensibilité du Bâtard.

C’est une de mes coquetteries de faire servir du rouget dès qu’il y a un Pétrus. Les deux bordeaux rouges seront servis ensemble. Le Château Palmer Margaux 1959 correspond à la définition du bordeaux parfait, archétypal. Il est riche, plein et d’un équilibre rare. On sent la truffe mais légère et sa densité est subtile.

Au contraire, le Pétrus pomerol 1953 est une bombe. C’est un Pétrus guerrier, large et conquérant. Seul, on l’applaudirait, mais je préfère la subtilité d’un Palmer sans l’ombre d’un défaut, alors que le Pétrus est grand. La sauce civet est idéale pour les deux vins.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1974 est servi seul sur le pigeon à la cuisson parfaite. Le nez était à l’ouverture l’image même de la Romanée Conti. Ce vin subtil, fin, raffiné est un moment de pur bonheur. Et l’accord est doctrinal. Nous vivons tous un moment rare qui couronnera ce vin du plus grand nombre de places de premier. 1974 est une année que je chéris particulièrement pour les vins du domaine. J’ai bu treize vins du domaine de ce millésime.

Le wagyu est le compagnon idéal des deux vins du Rhône. Le Châteauneuf-Du-Pape Montredon 1952 est très agréable et convivial mais il va vite être oublié car notre attention est attirée par l’Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1962 qui pourrait probablement jouer dans la même cour que son légendaire aîné, le mythique 1961. Car cet Hermitage est parfait. Il n’a pas l’ombre d’un défaut et sa facilité dans sa complexité en fait un vin au charme insolent. Quel grand vin.

Le Château Chalon Fruitière Vinicole des Producteurs de Château Chalon 1962 est d’une grande puissance aussi bien olfactive que gustative et l’accord avec un Comté est l’un des piliers de la gastronomie. Il y a à notre table des grands amateurs de vins jaunes. Ils sont ravis par la longueur extrême de ce vin.

Il y a parmi les participants l’un des propriétaires d’un grand sauternes. C’est tout naturellement qu’il nommera premier le Château Lafaurie Peyraguey Sauternes 1926 qui est brillantissime. Presque noir, il est complexe et pénétrant. Il a un charme fou que seuls les grands liquoreux peuvent avoir. La tarte que la charmante Yuki a préparée a une acidité idéale pour ce vin opulent qui est d’un accomplissement parfait.

Le Sherry du Cap 1862 est fondamentalement dry, mais l’âge a adouci et arrondi son message. Les financiers de Yuki, qu’elle appelle « financiers François » parce que nous les avons mis au point ensemble adoucissent la force de l’alcool et rendent le Sherry éblouissant.

Les convives ont été le plus souvent admiratifs des accords tout au long du repas. Il est l’heure de voter pour les cinq vins que chacun a préféré. Aucun champagne n’a eu de vote ce qui peut se comprendre par le fait qu’en fin de repas, avec tant de merveilles, on oublie les vins du début. Quand on pense que Krug 1982, l’un des plus grands champagnes qui soient, n’a obtenu aucun vote, cela laisse songeur et laisse penser que les autres vins ont été exceptionnels. Le seul vin qui n’a pas eu de vote est le Châteauneuf-Du-Pape Montredon 1952, qui est resté dans l’ombre du sublime Hermitage.

Cinq vins ont eu des votes de premier, l’Echézeaux 1974 cinq fois, l’Hermitage 1962 trois fois, et le Palmer 1959, le Château Chalon 1962 et le Lafaurie Peyraguey 1926 chacun une fois.

Le vote du groupe est : 1 – Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1974, 2 – Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1962, 3 – Château Lafaurie Peyraguey Sauternes 1926, 4 – Pétrus pomerol 1953, 5 – Château Palmer Margaux 1959, 6 – Château Laville Haut Brion 1953.

Mon vote est : 1 – Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1974, 2 – Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1962, 3 – Château Palmer Margaux 1959, 4 – Château Laville Haut Brion 1953, 5 – Château Lafaurie Peyraguey Sauternes 1926.

Je suis content que des gourmets émérites de cette table aient pu être impressionnés par les accords et aussi par la qualité des vins, épanouis par la méthode d’ouverture que j’utilise. Il est plus que probable que nous allons nous revoir.

Champagne Salon 2004

Champagne Mumm Cordon Rouge 1937

Champagne Krug 1982

Château Laville Haut Brion 1953

Bâtard-Montrachet Pierre Morey 1993

Montrachet Bouchard Père & Fils 1989

Château Palmer Margaux 1959

Pétrus pomerol 1953

Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1974

Châteauneuf-Du-Pape Montredon 1952

Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1962

Château Chalon Fruitière Vinicole 1962

Château Lafaurie Peyraguey Sauternes 1926

Sherry du Cap 1862

les préparatifs

photo avec le chef Ken et le sommelier Matthieu

le repas

la table en fin de repas

les votes

Déjeuner à la brasserie restaurant Tout Paris jeudi, 7 avril 2022

Prochainement, je vais enfin réaliser le dîner dont le thème est la Romanée-Conti que je voulais faire depuis des années. Et il sera fait par le chef Arnaud Donckele avec lequel j’ai une relation d’amitié particulière. Je viens donc au restaurant Plénitude pour mettre au point le menu avec Arnaud, avec Bertrand le chef de cuisine de Plénitude, Alexandre le directeur du restaurant et Emmanuel, le sommelier des restaurants de Cheval Blanc Paris.

Parallèlement, je dois déjeuner avec un ami qui a choisi le restaurant Tout Paris qui se situe au septième étage de l’immeuble de Cheval Blanc Paris. J’ai promis d’apporter une bouteille. Je trouve amusant d’apporter un Cheval Blanc et j’en prends un ancien afin de le faire goûter aux participants de la réunion de travail, afin de se remémorer le goût des vins anciens.

J’ouvre donc pour les participants de la réunion de travail un Château Cheval Blanc 1966. Le bouchon se brise en peu de morceaux et la première odeur est bouchonnée, mais cette sensation disparaîtra en moins d’une minute. Il reste un parfum puissant et profond, très riche.

Lorsque nous goûtons le vin on ressent une trace très longue continue, d’une rare complexité. On est dans des tons de charbon et de truffe, avec une grande noblesse et une forte densité. Il y a des accents de vin ancien mais d’une belle élégance. Et le fait de le goûter tout en réfléchissant au menu est une bonne chose car on prend conscience que les plats doivent suivre la ligne tracée par le vin.

Je suis toujours fasciné par la créativité d’Arnaud Donckele. Il suffit que j’esquisse une suggestion et Arnaud voit déjà le plat qu’il va créer. Et je remarque aussi la connivence qui existe avec Bertrand qui a déjà anticipé ce qu’Arnaud allait dire. Quel bonheur que de composer un menu dans une telle ambiance. Je joue un peu le rôle du Père Fouettard, car je suis celui qui dit non lorsque des propositions sont faites, anticipant ou imaginant qu’un accord ne se ferait pas avec la piste proposée. Le travail est accompli avec les suggestions de tous et la vision du chef.

Avec mon ami nous nous rendons à la brasserie restaurant Tout Paris, accueillis par Sarah toute souriante qui a un talent certain pour orienter nos choix. Nous prendrons la tarte tourteau, avocat, cédrat confit et coriandre / le homard bleu au barbecue / le soufflé mandarine et son sorbet. Arnaud Donckele est présent en ces lieux et rencontre de nombreuses personnes, sollicité et affairé. Il est intervenu personnellement pour nous faire servir des préparations délicieuses. Le Château Cheval Blanc 1966 est large. Mon ami le trouve excellent mais ne le trouve pas très long. Ceci ne me gêne pas car sa trace en bouche, large, est aussi linéaire. Il est riche et noble avec un finale marqué par le charbon et la truffe, très prégnants. L’accord avec le homard est superbe. Le homard est servi généreusement. Il est de grande qualité.

Mon ami a commandé un Champagne Dom Ruinart rosé 2007 qui est très équilibré, solide et de belle émotion. Il n’est pas d’une grande complexité mais il se montre gastronomique. Je le bois avec plaisir.

Ce repas fut bon, avec un service impeccable. Le restaurant Tout Paris est à recommander, d’un niveau de belle et bonne brasserie.

261st meal of wine-dinners in restaurant Plénitude mardi, 29 mars 2022

The 261st meal of wine-dinners begins in a very curious way. The confinement or its consequences had slowed down the pace of meals so I wanted to create a dinner thinking of two loyal friends whose company I appreciate. I submit my project to them and one of them says to me: « for once we would like a meal where there would be only legendary wines, like the Hermitage La Chapelle 1961 ». I tell them that such a meal would lead us into an area of ​​budgets that are difficult to access, but they encourage me to do a project.

When I expose it to them, they make me think of a sketch by Fernand Raynaud (a famous comic of the 60ies) where a naive man has been instructed to pass packets of sugar through customs (or at least designated as such). Arrested by customs officers, he calls his uncle on the phone and after having betrayed all their secrets, he says to him: « say, Uncle, why are you coughing ». Their reaction would have prompted me to say to them: « my friends why are you coughing », because they declined my offer as I suspected.

The project having been designed, I was not going to give it up and it was thanks to Instagram that I was able to put together an almost complete table since I was led to invite my two daughters so that we could be ten.

It seemed obvious to me that this meal had to be done with Arnaud Donckele talented chef. I had no idea while working with him on the menu, that he was going to go from three to six stars in the red guide. It was announced two days before our meal. The atmosphere on the day of the event was particularly cheerful.

I arrived at the Plénitude Arnaud Donckele restaurant at the Cheval Blanc Paris hotel at 9:30 a.m. to open the wines. The cork of the 1959 white Lafite has broken into several pieces and gives off a sublime fragrance. The cork of the Mouton 1945 very strongly stuck to the glass came off in lint. The scent is magical. The Lafite 1869 has a recent label and has no indication of the date of recorking. When I take out the cork, which is probably around fifty years old, I am reassured because it seems completely authentic to me. And the perfume of the wine is of a balance that strongly suggests a prephylloxera wine. I am happy.

The nose of the Romanée Conti 1999 has all the components of a great Romanée Conti but the wine is a little discreet. Next to it, the perfume of Echézeaux Henri Jayer 1990 in magnum has all the finesse I expected. It is of rare subtlety.

The flavors of the two Rhône wines are generous and brilliant. We will feast. The Yquem 1858 shows by the smell that it has eaten its sugar and it reminds me of the Filhot 1858 that I drank which also had eaten its sugar. We will therefore be in refined flavors that are more than conquering.

On the contrary, the Constantia « Red » with the cork that disintegrates is a bomb of fragrances. What power and what richness in this wine. The richest flavors are those of Constantia and Lafite white wine. The finest are those of Mouton 1945, La Chapelle 1961 and Ermitage Cuvée Cathelin 1991.

Finishing this crucial opening session, I can say that all the wines show what I expected and they promise the qualities I was hoping for. The two 1943 champagnes are opened at 11 a.m. and the young champagne is opened at 10 a.m.

The beautiful dining room on the first floor of La Samaritaine, offering a view of the Seine and the Pont Neuf is reserved for us. Special attention awaited us. When I had a dinner at the Yacht Club of Monaco, the restaurant had a table built according to my recommendations, elliptical in shape. The restaurant Plénitude had the same attention for this meal, to the point of calling this table my name. The facts will prove that this table is ideal.

I had thought that starting our meal with two champagnes from 1943 might not put them in an ideal situation so, without having announced it, I had a Champagne Salon 2006 served. One of the guests will say: if a Champagne Salon serves clear the mouth, we are in pure luxury. This 2006 pleases me with its width and balance. It is solid and will age well.

The menu created by Arnaud Donckele for the wines is worded as follows: Langoustine, artichoke, caviar, for Carnelian vinaigrette / Red mullet, Boulangère, crocus, for Sabayon Borgne / sweetbread, sweet onion, celery, for rogue jus / pigeon, giblets, herbettes, for delicate juice / satiny composition / rose financier.

We notice that each dish is presented in three words and that the dish only exists « for » the sauce. The chef is a sauce wizard and we are going to check it out.

We sit down to eat. We are ten. The only French people are my two daughters and a loyal guest. There is a Belgian, British by birth or at heart, Swiss and an American. The meal is held in English.

The appetizers are wonderful and especially the oysters which are probably the finest I have ever tasted. Champagne Dom Pérignon 1943 shows its age but also its very fine qualities. It has the charm and largeness of the great Dom Pérignons.

The Champagne Salon 1943 has the same panache as the Salon 1943 drunk at the Champagne Salon headquarters, which I consider to be my greatest Salon. We are here at the same level of perfection. The cork indicates that it is a recent disgorgement made at the estate. Its square, solid structure, made to stand the test of time, is impressive. Because of its greater freshness, I much prefer the Salon, and to my great surprise I hear three table neighbors to my right who prefer the Dom Pérignon. We will see in the votes that the balance weighed on their side. Amazing to me. Apart from these differences, they are two exceptional champagnes, noble and imposing.

On the divine langoustine (it rhymes), there are two whites that everything opposes. But what a brilliance. This is the first time I have drunk this extremely rare 1959 Lafite white wine. Its nose is rich and generous and on the palate it is incredibly seductive and even bewitching. I would gladly say that this white wine outclasses all the dry white wines of Bordeaux. Why was it abandoned, I don’t know, but what a pity. This wine is imperial.

Next to it, the Montrachet Domaine Leflaive 1996 is impressive in largeness and smoothness. It is rich but airy. My guests, some of whom had problems with Burgundy whites with disastrous corks, admired the perfect condition of this great wine and its breadth in the mouth.

Throughout the meal we will notice that in the pairs of wines associated with a dish, one wine is more welcoming to the meat and the other more welcoming to the sauce. Not having taken notes, I would not be able to restore it, which is a pity.

Arnaud Donckele, all smiles, comes to greet us and explains the interest he finds in cooking for rare and old wines and the pleasure of our exchanges. He even said at one point: « the chef is actually François Audouze ». It’s nice, but the immense chef is him, without further ado.

On the exceptional red mullet we taste two Bordeaux reds separated by 76 years. Château Lafite 1869 is solid and refined. It has the robust structure of pre-phylloxera wines and the truffle taste found in the great Lafites.

Next to it, Château Mouton-Rothschild 1945 lives up to its legend. This is the definition of the perfect Bordeaux where all the components of the tastes are assembled. It is one of the greatest wines in the world and this bottle is at the peak of its quality. These two Bordeaux wines are exceptionally expressive in their straightness. Two treasures.

Calf sweetbreads will rub shoulders with two exceptional wines. La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1999 has all the assets of a great Romanée Conti. Like the fanatic of legendary cars who knows how to recognize a McLaren from a kilometer away solely by the sound of the engine, I know how to decipher the subtleties of this wine in an exceptional vintage. But he is still too young for my taste and a little too discreet. It is big, but it will be so much bigger in twenty years that my pleasure is a little diminished.

Before the meal, I thought that the wine that would impress me the most would be the Echézeaux Henri Jayer Magnum 1990, an extremely rare bottle. On the nose, I am satisfied, because all the finesse is there. On the palate, I am also overwhelmed by its refined expression. But I made a mistake. I usually like to drink Romanée Conti wines with a simple poached foie gras. For this meal, I suggested a sweetbread and I think my suggestion was not accurate, although the dish is remarkable, because there was more power in the dish than the two lovely wines could support. This does not detract from the qualities of these two legendary wines.

The pigeon is a marvel. During my long trip in the world of wine, the Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1961 seemed to me to be the greatest and most moving red wine. And yet the competition is fierce. I find in this bottle today the same reasons to place it in the firmament. It has it all, generosity, openness, readability, assurance, and an insistent charm. It’s a marvel of balance. He will be my winner.

The Ermitage Cuvée Cathelin Chave 1991 is for me the greatest vintage of this wine. What youth, what nobility, what enjoyment. A pure marvel of gourmet youth. There, everything comes together for perfect happiness, pigeon and these two Hermitages. A great moment of emotion.

Château d’Yquem 1858 has a beautiful amber color but with rays of sunshine. The satiny composition of the pastry chef is a total success with a perfect dosage of acidity. This Yquem has eaten its sugar, which means that it is drier than it should be. It lacks the intoxicating opulence of the great Yquems. I am lucky enough to accept dry Sauternes in which I find other subtleties, but I also understand that one may regret the lack of breadth.

The Great Constantia Red J.P. Cloete South Africa circa 1860 has a pretty amazing old copper color that shines in the sun. The nose is invasive, lush. In the mouth we have all the most seductive flavors of the world. Dense, rich, complex, this wine is on another taste planet.

There are so many extraordinary wines that ranking them is almost impossible. As far as I’m concerned, I don’t think I would do the same ranking if I was asked to do it again an hour later. The 2006 Salon is not included in the voting field. All wines had at least one vote. The wine that received the most votes was Vin Blanc de Lafite 1959. What a nice surprise.

Five wines were named first which is a great result, the Hermitage la Chapelle three times, like the Hermitage Cathelin. The Mouton 1945 was named first twice. The Echézeaux Henri Jayer and the Dom Pérignon were voted first once each.

The consensus vote is: 1 – Ermitage Cuvée Cathelin Chave 1991, 2 – Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1961, 3 – Lafite white wine 1959, 4 – Château Mouton-Rothschild 1945, 5 – Echézeaux Henri Jayer Magnum 1990, 6 – Champagne Dom Perignon 1943.

My vote is: 1 – Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1961, 2 – Château Mouton-Rothschild 1945, 3 – Ermitage Cuvée Cathelin Chave 1991, 4 – Lafite white wine 1959, 5 – Great Constantia Red J.P. Cloete South Africa circa 1860.

The dishes were presented in English and French in a very elegant way. The food service is perfect. The wine service by Emmanuel was also perfect and intelligent. Instead of going to the smoking room, we went up to the seventh floor to smoke the cigars that I had brought and taste the Nady Martinique Rum that I had also brought. At one moment I realized that I was the only one to smoke which is a paradox because I quit smoking for 31 years. Funny. But at least we had the excuse to continue talking about this unforgettable meal. Arnaud Donckele’s cuisine is extremely sensitive and talented and my wines have shown themselves to be at the top of their art, whatever their age.

I was called upon to organize an extraordinary meal. It was above all my expectations. It is the greatest of the 261 meals I have had the honor of organizing. It’s unforgettable.

A friend of mine reading my report told me: against all prognostics and against nature Rafael Nadal won the Melbourne Open. Make better than this meal would be impossible. Would you accept the challenge to do better? Practicing Britannic understatement I would say: interesting question.

(the photos of this lunch can be seen in the next article in French)

261ème repas de wine-dinners au restaurant Plénitude lundi, 28 mars 2022

Le 261ème repas de wine-dinners commence d’une bien curieuse façon. Le confinement ou ses suites avaient ralenti le rythme des repas aussi j’avais envie de créer un dîner en pensant à deux amis fidèles dont j’apprécie la compagnie. Je leur soumets mon projet et l’un d’eux me dit : « nous aimerions pour une fois un repas où il n’y aurait que des vins de légende, comme l’Hermitage La Chapelle 1961 ». Je leur dis qu’un tel repas nous entraînerait dans une zone de budgets difficilement accessibles mais ils m’encouragent à faire un projet.

Lorsque je leur présente, ils me font penser à un sketch de Fernand Raynaud où un naïf a été chargé de passer à la douane des paquets de sucre (ou tout au moins désignés tels). Interpellé par des douaniers il appelle au téléphone son donneur d’ordre et après avoir trahi tous leurs secrets, il lui dit : « dis, Tonton, pourquoi tu tousses ». Leur réaction m’aurait poussé à leur dire : « mes amis pourquoi toussez-vous », car ils ont décliné mon offre comme je le subodorais.

Le projet ayant été conçu je n’allais pas l’abandonner et c’est grâce à Instagram que j’ai pu constituer une table presque complète puisque j’ai été conduit à inviter mes deux filles pour que nous puissions être dix. Il me paraissait évident que ce repas devait se faire avec Arnaud Donckele chef talentueux. Je ne savais pas en travaillant avec lui au menu, qu’il allait passer de trois à six étoiles au guide rouge. Ce fut annoncé deux jours avant notre repas. L’ambiance le jour dit fut particulièrement enjouée.

Je suis arrivé au restaurant Plénitude Arnaud Donckele de l’hôtel Cheval Blanc Paris à 9h30 pour ouvrir les vins. Le bouchon du Lafite blanc 1959 s’est brisé en plusieurs morceaux et dégage une sublime fragrance. Le bouchon du Mouton 1945 très fortement collé au verre est venu en charpie. Le parfum est magique. Le Lafite 1869 a une étiquette récente et n’a pas d’indication de date de rebouchage. Lorsque je sors le bouchon qui a probablement une cinquantaine d’années, je suis rassuré car il me paraît totalement authentique. Et le parfum du vin est d’un équilibre qui suggère fortement un vin préphylloxérique. Je suis heureux.

Le nez de la Romanée Conti 1999 a toutes les composantes d’une grande Romanée Conti mais le vin est un peu discret. A côté de lui le parfum de l’Echézeaux Henri Jayer 1990 en magnum a toute la finesse que j’attendais. Il est d’une subtilité rare.

Les parfums des deux vins du Rhône sont généreux et brillants. On va se régaler. L’Yquem 1858 montre à l’odeur qu’il a mangé son sucre et cela me rappelle le Filhot 1858 que j’ai bu qui lui aussi avait mangé son sucre. On sera donc dans des saveurs raffinées plus que conquérantes.

Au contraire, le Constantia « Red » au bouchon qui se désagrège est une bombe de fragrances. Quelle puissance et quelle richesse en ce vin. Les parfums les plus riches sont ceux du Constantia et du Vin blanc de Lafite. Les plus nobles sont ceux du Mouton 1945, de La Chapelle 1961 et de l’Ermitage Cuvée Cathelin 1991.

Finissant cette séance si cruciale des ouvertures, je peux dire que tous les vins montrent ce que j’attendais et ils promettent les qualités que j’espérais. Les deux champagnes de 1943 sont ouverts à 11 heures et le jeune champagne est ouvert à 10 heures.

La belle salle du restaurant au premier étage de la Samaritaine, offrant une vue sur la Seine et sur le Pont Neuf nous est réservée. Une attention toute particulière nous attendait. Lorsque j’avais fait un dîner au Yacht Club de Monaco, le restaurant avait fait construire une table selon mes recommandations, de forme elliptique. Le restaurant Plénitude a eu la même attention pour ce repas, au point d’appeler cette table de mon nom. Les faits prouveront que cette table est idéale.

J’avais pensé que commencer notre repas avec deux champagnes de 1943 pourrait ne pas les mettre en situation idéale aussi, sans l’avoir annoncé, j’ai fait servir un Champagne Salon 2006. Un des convives dira : si un Champagne Salon sert à éclaircir la bouche, on est dans le luxe pur. Ce 2006 me plait par sa largeur et son équilibre. Il est solide et vieillira bien.

Le menu créé par Arnaud Donckele pour les vins est ainsi rédigé : Langoustine, artichaut, caviar, pour vinaigrette Cornaline / Rouget, Boulangère, crocus, pour Sabayon Borgne / ris de veau, oignon doux, céleri, pour jus dévoyé / pigeon, abattis, herbettes, pour jus délicatesse / composition satinée / financier à la rose.

On remarque que chaque plat est présenté en trois mots et que le plat n’existe que « pour » la sauce. Le chef est un magicien des sauces et nous allons le vérifier.

Nous passons à table. Nous sommes dix. Les seuls français sont mes deux filles et un convive fidèle. Il y a un belge, des britanniques de naissance ou de cœur, des suisses et un américain. Le repas se tient en anglais.

Les amuse-bouches sont merveilleux et notamment des huîtres qui sont probablement les plus raffinées que je n’aie jamais dégustées. Le Champagne Dom Pérignon 1943 montre son âge mais aussi ses très belles qualités. Il a le charme et l’ampleur des grands Dom Pérignon.

Le Champagne Salon 1943 a le même panache que le Salon 1943 bu au siège du champagne Salon que je considère comme mon plus grand Salon. On est ici au même niveau de perfection. Le bouchon indique qu’il s’agit d’un dégorgement récent fait au domaine. Sa structure carrée, solide, faite pour braver le temps est impressionnante. Du fait de sa plus grande fraîcheur je préfère de loin le Salon, et à ma grande surprise j’entends trois voisins de table à ma droite qui préfèrent le Dom Pérignon. On verra aux votes que la balance a pesé de leur côté. Etonnant pour moi. A ces différences près, ce sont deux champagnes d’exception, nobles et imposants.

Sur la divine langoustine (ça rime), il y a deux blancs que tout oppose. Mais quel brio. C’est la première fois que je bois ce rarissime Vin blanc de Lafite 1959. Son nez est riche et généreux et en bouche c’est incroyable de séduction et même d’envoûtement. Je dirais volontiers que ce vin blanc surclasse tous les vins blancs secs de Bordeaux. Pourquoi a-t ‘il été abandonné, je ne sais pas, mais quel dommage. Ce vin est impérial.

A côté de lui le Montrachet Domaine Leflaive 1996 est impressionnant d’ampleur et de suavité. Il est riche mais aérien. Mes convives dont certains ont eu des problèmes avec des blancs de Bourgogne aux bouchons désastreux sont admiratifs de l’état parfait de ce grand vin et de sa largeur en bouche.

Tout au long du repas nous allons remarquer que dans les paires de vins associés à un plat un vin est plus accueillant à la chair et l’autre plus accueillant à la sauce. N’ayant pas pris de notes, je ne saurais pas le restituer, ce qui est dommage.

Arnaud Donckele tout sourire vient nous saluer et explique l’intérêt qu’il trouve à cuisiner pour des vins rares et anciens et le plaisir de nos échanges. Il dit même à un moment : « le chef en fait, c’est François Audouze ». C’est gentil, mais le chef immense, c’est lui, sans autre forme de procès.

Sur le rouget exceptionnel nous goûtons deux bordeaux rouges que 76 ans séparent. Le Château Lafite 1869 est solide et raffiné. Il a la structure charpentée des vins préphylloxériques et le goût de truffe que l’on retrouve dans les grands Lafite.

A côté de lui le Château Mouton-Rothschild 1945 est conforme à sa légende. C’est la définition du Bordeaux parfait où toutes les composantes des goûts sont assemblées. C’est un des plus grands vins du monde et cette bouteille est au sommet de sa qualité. Ces deux vins de Bordeaux sont dans leur rectitude d’une expression exceptionnelle. Deux trésors.

Le ris de veau va côtoyer deux vins hors norme. La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1999 a tous les atouts d’une grande Romanée Conti. Comme le fanatique de voitures mythiques qui sait reconnaître une McLaren à un kilomètre de distance uniquement par le bruit du moteur, je sais décrypter les subtilités de ce vin dans un millésime exceptionnel. Mais il est encore trop jeune pour mon goût et un peu trop discret. Il est grand, mais il le sera tellement plus dans vingt ans que mon plaisir s’en ressent.

Avant le repas, je pensais que le vin qui m’impressionnerait le plus serait l’Echézeaux Henri Jayer Magnum 1990, bouteille rarissime. Au nez, je suis comblé, car toutes les finesses sont là. En bouche, je suis aussi comblé par son expression raffinée. Mais j’ai commis une erreur. D’habitude j’aime boire les vins de la Romanée Conti sur un foie gras poché tout simple. Pour ce repas, j’ai suggéré un ris de veau et je pense que ma proposition ne fut pas la bonne, même si le plat est remarquable, car il y avait plus de puissance dans le plat que ce que les deux ravissants vins ne pouvaient soutenir. Cela n’enlève rien aux qualités de ces deux vins mythiques.

Le pigeon est une merveille. Lors de mon parcours dans le monde du vin c’est l’Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1961 qui m’est apparu comme le plus grand et émouvant vin rouge. Et pourtant la compétition est rude. Je retrouve dans cette bouteille aujourd’hui les mêmes raisons de le placer au firmament. Il a tout, la générosité, l’ouverture, la lisibilité, l’assurance, et un charme insistant. C’est une pure merveille d’équilibre. Il sera mon vainqueur.

L’Ermitage Cuvée Cathelin Chave 1991 est pour moi le plus grand millésime de ce vin. Quelle jeunesse, quelle noblesse, quelle jouissance. Une pure merveille de jeunesse gourmande. Là, tout est réuni pour le bonheur parfait, pigeon et ces deux Hermitages. Un grand moment de bonheur.

Le Château d’Yquem 1858 a une belle couleur ambrée mais avec des rayons de soleil. La composition satinée du pâtissier est une réussite totale avec un dosage des acidités parfait. Cet Yquem a mangé son sucre c’est-à-dire qu’il se présente plus sec qu’il ne devrait. Il manque de l’opulence enivrante des grands Yquem. J’ai la chance d’accepter les sauternes secs auxquels je trouve d’autres subtilités, mais je comprends aussi que l’on puisse regretter le manque d’ampleur.

Le Great Constantia Red J.P. Cloete South Africa circa 1860 a une couleur assez incroyable de vieux cuivre qui brille au soleil. Le nez est invasif, luxuriant. En bouche on a toutes les saveurs du monde les plus séductrices. Dense, riche, complexe ce vin est sur une autre planète gustative.

Il y a tellement de vins extraordinaires que faire un classement est quasiment impossible. En ce qui me concerne, je ne crois pas que je ferais le même classement si on me demandait de le refaire une heure plus tard. Le Salon 2006 n’est pas inclus dans le champ des votes. Tous les vins ont eu au moins un vote. Le vin qui a eu le plus de votes est le Vin Blanc de Lafite 1959. Quelle belle surprise.

Cinq vins ont été nommés premiers ce qui est un beau résultat, l’Hermitage la Chapelle trois fois, comme l’Ermitage Cathelin. Le Mouton 1945 a été nommé premier deux fois. L’Echézeaux Henri Jayer et le Dom Pérignon ont été votés premier une fois chacun.

Le vote du consensus est : 1 – Ermitage Cuvée Cathelin Chave 1991, 2 – Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1961, 3 – Vin blanc de Lafite 1959, 4 – Château Mouton-Rothschild 1945, 5 – Echézeaux Henri Jayer Magnum 1990, 6 – Champagne Dom Pérignon 1943.

Mon vote est : 1 – Hermitage La Chapelle Paul Jaboulet Aîné 1961, 2 – Château Mouton-Rothschild 1945, 3 – Ermitage Cuvée Cathelin Chave 1991, 4 – Vin blanc de Lafite 1959, 5 – Constantia South Africa circa 1860.

Les plats ont été présentés en anglais et en français d’une façon très élégante. Le service des plats est parfait. Le service des vins par Emmanuel a été lui aussi parfait et intelligent. Au lieu d’aller au fumoir nous sommes montés au septième étage pour fumer les cigares que j’avais apportés et gouter le Rhum Nady Martinique que j’avais aussi apporté. A un moment je me suis rendu compte que j’étais le seul à fumer alors que j’ai arrêté de fumer depuis 31 ans. Cocasse. Mais au moins nous avons eu le prétexte pour continuer à parler de ce repas inoubliable. La cuisine d’Arnaud Donckele est d’une sensibilité et d’un talent extrêmes et mes vins se sont montrés au sommet de leur art quel que soit l’âge qu’ils eussent.

J’ai été appelé à organiser un repas hors norme. Il le fut au-dessus de toutes mes espérances. C’est le plus grand des 261 repas que j’ai eu l’honneur d’organiser. C’est inoubliable.


La vue du restaurant Plénitude

la table fabriquée pour ce repas, appelée la table François Audouze

les bouchons des deux 1943

le cadeau offert à Arnaud Donckele pour ses 6 étoiles : un Vin de l’Etoile pour lequel j’ai écrit sur l’étiquette : le vin des six étoiles

 

le rhum bu au 7ème étage de l’hôtel Cheval Blanc Paris

260th wine-dinner in restaurant Taillevent samedi, 26 février 2022

Since the beginning of my dinners, I have had 27 with the restaurant Taillevent. I want to do a new one in this place that I like, but I don’t know the new chef, Giuliano Sperandio. Director Baudoin Arnould creates contact with the chef so that we can develop the menu for the 260th wine-dinner. Immediately we understand each other. The chef understands and approves the fact that each dish must be consistent for the wine. Hence a search for simplicity that is not a limitation of creativity. On the dishes that I proposed, the chef made relevant additions and suggestions.

The wines were brought to the restaurant a week in advance. When the day comes, I arrive to open the wines at 4 p.m. By a rare chance, all the corks come out whole, except that of the Chypre 1870 because believing that the cork is short, I did not use the long wick, which resulted in the cork tearing. The aromas of the wines are all promising, the Nénin 1961 needing to blossom. The flavors of sweet wines are by far the most powerful and the one that moves me the most is that of Ausone 1937 with a depth of truffle taste. Having finished at 5 a.m., I have three hours ahead of me to think, meditate and rest, chatting with the friendly sommelier manager Paul Robineau. The chef comes to greet me and we finalize the final adjustments. His suggestions appeal to me. At 6 p.m. I open the magnum of champagne and at 7 p.m. the older champagne.

There will be ten of us, including ten males, which should earn us a heavy fine for not respecting parity. There are six new ones, which I really appreciate.

The aperitif is taken standing up in the beautiful, elegant wood-paneled Saturn lounge. Champagne Veuve Clicquot Ponsardin magnum 1989 has a strong bubble. In my opinion, it is an archetypal champagne because it has everything we love in a balanced and expressive champagne. If we had to define the champagne we would like to drink, it would be this one. It is consensual and pleasant. The truffle gougères are powerful and the relatively soft ham highlights this beautiful champagne.

To show that the chef wanted to cook for wine, here is how he worded his menu: appetizer / scallops / turbot / lobster / pigeon / stilton / mango / rose financier. I love the intentions expressed in this clean presentation.

Champagne Moët et Chandon Brut Impérial 1966 has a pretty color of pink amber. The palate is round, consistent, very smooth. The evocations of pink citrus fruits are of a certain charm. It is a great champagne from a year that I consider to be one of the greatest of the century. I read on the faces of my guests the astonishment to see that a 56-year-old champagne can be so lively and brilliant.

The pairing of the turbot with the two whites is spectacular. The Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992 is a marvel of white, complex, noble racy. This white is at the top of its game. It is the most subtle of the wines of this meal logically crowned with the place of first.

If the Ramonet is Louis XV, the Château Rayas Châteauneuf du Pape white 1985 is Usain Bolt, because this wine is a bomb of energy, but of subtle energy. This Rayas is joyful and lively and it goes best with turbot. Rayas knows how to combine power and complexity.

The lobster is truffled which will create a bridge with the Château Ausone Saint-Emilion 1937 whose nose and mouth exude truffles. This wine which cannot hide that it is old is of a rare subtlety. To many around the table, it’s a surprise that an 85-year-old wine can have this energy and refinement.

As soon as I raise the glass of Château Nénin Pomerol 1961 to my lips, I know that I am in front of a perfect wine. Its structure is so well assembled that it is in perfect condition. He will no doubt improve further with time, but he is already in ideal shape. It does not have the charm of Ausone, but it is large. The pairing of simple, cooked-to-the-second lobster is perfect with both wines.

The Nuits-Saint-Georges Clos des Corvées General Gouachon 1945 Tasteviné 1950 is a wine full of subtlety and velvet. The year 1945 gave him a solid balance. It is the expression of a refined Burgundy. It’s Lamartine or Chateaubriand. He’s got everything.

While I had feasted on the promise of La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1992 when I smelled it more than five hours ago, I find this wine too discreet. It is subtle but it does not have the aura of La Tâche, such a noble and conquering wine. Should it have been opened several hours before, it is possible, because this wine has no faults, it is just a little too timid. The rich pigeon failed to tickle him as he found the right partner with the elegant 1945 Burgundy.

When I announced that we were going to drink Château Climens Barsac 1949 first with stilton and then with a mango dessert, I saw the astonishment of the guests that one could look for such opposite pairings. Their astonishment will be even greater when they have found that these agreements are of absolute relevance. The Climens is quite simply the perfect wine, dynamic, powerful but charming like the snake which knew how to push Eve to eat the apple. Everything about this Barsac is luxury, pleasure, refinement. It is drunk greedily.

The financier with the rose is one of my coquetries and it is remarkably executed. And this is the first time that I feel as strongly that the Vin de Chypre 1870 tastes of rose. This heavy, powerful, high-alcohol wine is both sweet and dry, with strong spice. It has an inextinguishable length.

We are all amazed because no wine was weak, even though La Tâche lacked its usual prestige, and all the pairings were brilliant.

I don’t think I’ve ever seen such diversity in the votes. It’s incredible. If some imagine that I influence the votes, they will see that they are wrong. Let us judge: we are ten to vote for the five best of ten wines. All the wines had at least two votes, which is very rare because very often there are one or two wines that do not receive any votes. Then six wines were named first, which is really rare. Rayas had three first votes, Ramonet and Climens each had two first votes and Ausone, Nuits-Saint-Georges and La Tâche each had one first vote. Such a diversity of votes is hard to imagine.

The classification of the whole table is: 1 – Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992, 2 – Château Climens 1949, 3 – Château Ausone Saint-Emilion 1937, 4 – Château Rayas Châteauneuf du Pape white 1985, 5 – Champagne Moët et Chandon Brut Imperial 1966, 6 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1992.

My ranking is: 1 – Château Climens 1949, 2 – Cyprus wine 1870, 3 – Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992, 4 – Champagne Moët et Chandon Brut Impérial 1966, 5 – Château Ausone Saint-Emilion 1937.

The six new participants are of a certain enthusiasm and have promised to return to new dinners. As usual at Taillevent, the food and wine service was perfect. The chef gave a performance worthy of all praise because he put his talent at the service of the wine. This 260th was a particularly successful dinner.

260ème dîner au restaurant Taillevent samedi, 26 février 2022

Depuis le début de mes dîners, j’en ai fait 27 avec le restaurant Taillevent. J’ai envie d’en faire un nouveau en ce lieu que j’apprécie, mais je ne connais pas le nouveau chef, Giuliano Sperandio. Le directeur Baudoin Arnould crée le contact avec le chef pour que nous mettions au point le menu du 260ème dîner de wine-dinners. Immédiatement nous nous comprenons. Le chef comprend et approuve le fait que chaque plat doit être cohérent pour le vin. D’où une recherche de simplicité qui n’est pas une limitation de la créativité. Sur les plats que j’ai proposés, le chef a fait des ajoutes toutes pertinentes.

Les vins ont été apportés au restaurant une semaine à l’avance. Le jour venu, je viens ouvrir les vins à 16 heures. Par un hasard rare, tous les bouchons sortent entiers, sauf celui du Chypre 1870 car croyant que le bouchon est court, je n’ai pas utilisé la longue mèche, ce qui a entraîné que le bouchon se déchire. Les parfums des vins sont tous prometteurs, le Nénin 1961 ayant besoin de s’épanouir. Les parfums des liquoreux sont de loin les plus puissants et celui qui m’émeut le plus est celui de l’Ausone 1937 avec une profondeur de goût de truffe. Ayant fini à 5 heures, j’ai devant moi trois heures pour penser, méditer et me reposer, bavardant avec le sympathique responsable de la sommellerie Paul Robineau. Le chef vient me saluer et nous mettons au point les derniers ajustements. Ses suggestions me plaisent. A 18 heures j’ouvre le magnum de champagne et à 19 heures le champagne plus ancien.

Nous serons dix, dont dix mâles, ce qui devrait nous valoir une forte amende pour non-respect de la parité. Il y a six nouveaux, ce que j’apprécie beaucoup.

L’apéritif se prend debout dans le beau salon Saturne lambrissé et élégant. Le Champagne Veuve Clicquot Ponsardin magnum 1989 a une forte bulle. C’est à mon sens un champagne archétypal car il a tout ce que l’on aime dans un champagne équilibré et expressif. Si l’on devait définir le champagne que l’on aimerait boire, ce serait celui-ci. Il est consensuel et agréable. Les gougères à la truffe sont puissantes et le jambon relativement doux met en valeur ce beau champagne.

Pour montrer que le chef a voulu cuisiner pour le vin, voici comment il a libellé son menu : mise en bouche / Saint-Jacques / turbot / homard / pigeon / stilton / mangue / financier à la rose. J’adore les intentions qui s’expriment dans cette présentation épurée.

Le Champagne Moët et Chandon Brut Impérial 1966 a une jolie couleur d’un ambre rose. La bouche est ronde, cohérente, toute en douceur. Les évocations d’agrumes roses sont d’un charme certain. C’est un grand champagne d’une année que je considère comme l’une des plus grandes du siècle. Je lis sur les visages de mes convives l’étonnement de constater qu’un champagne de 56 ans peut être aussi vif et brillant.

L’accord du turbot avec les deux blancs est spectaculaire. Le Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992 est une merveille de blanc, complexe, noble, racé. Ce blanc est au sommet de son art. C’est le plus subtil des vins de ce repas couronné logiquement de la place de premier.

Si le Ramonet est Louis XV, le Château Rayas Châteauneuf du Pape blanc 1985 est Usain Bolt, car ce vin est une bombe d’énergie, mais d’énergie subtile. Ce Rayas est joyeux et entraînant et c’est lui qui s’accorde le mieux au turbot. Le Rayas sait combiner puissance et complexité.

Le homard est truffé ce qui va créer un pont avec le Château Ausone Saint-Emilion 1937 dont le nez et la bouche exsudent la truffe. Ce vin qui ne peut pas cacher qu’il est ancien est d’une subtilité rare. Pour beaucoup autour de la table, c’est une surprise qu’un vin de 85 ans puisse avoir cette énergie et ce raffinement.

Dès que je porte le verre du Château Nénin Pomerol 1961 à mes lèvres, je sais que je suis en face d’un vin parfait. Sa structure est tellement bien assemblée qu’il est dans un état parfait. Il va sans doute s’améliorer encore avec le temps, mais il est déjà dans une forme idéale. Il n’a pas le charme de l’Ausone, mais il est grand. L’accord du homard simple et cuit à la seconde près est parfait avec les deux vins.

Le Nuits-Saint-Georges Clos des Corvées Général Gouachon 1945 Tasteviné 1950 est un vin tout en subtilité et en velours. L’année 1945 lui donne un équilibre solide. Il est l’expression d’un Bourgogne raffiné. C’est Lamartine ou Chateaubriand. Il est tout en mesure.

Alors que je m’étais régalé des promesses de La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1992 au moment où je l’ai senti il y a plus de cinq heures, je trouve ce vin trop discret. Il est subtil mais il n’a pas l’aura de La Tâche vin si noble et si conquérant. Aurait-il fallu l’ouvrir plusieurs heures avant, c’est possible, car ce vin n’a pas de défaut, il est juste un peu trop timide. Le pigeon riche n’a pas réussi à le titiller alors qu’il a trouvé le bon partenaire avec l’élégant bourgogne de 1945.

Lorsque j’ai annoncé que nous allions boire le Château Climens Barsac 1949 d’abord avec du stilton puis avec un dessert à la mangue, j’ai vu l’étonnement des convives que l’on puisse chercher des accords aussi opposés. Leur étonnement sera encore plus grand quand ils auront constaté que ces accords sont d’une pertinence absolue. Le Climens est tout simplement le vin parfait, dynamique, puissant mais charmeur comme le serpent qui a su pousser Ève à manger la pomme. Tout dans ce Barsac est luxure, plaisir, raffinement. Il se boit goulûment.

Le financier à la rose est une de mes coquetteries et il est remarquablement exécuté. Et c’est la première fois que je ressens aussi fort que le Vin de Chypre 1870 a un goût de rose. Ce vin lourd, puissant et fort en alcool est à la fois doux et sec, avec de fortes épices. Il a une longueur inextinguible.

Nous sommes tous émerveillés car aucun vin n’a été faible, même si La Tâche n’avait pas son prestige habituel, et tous les accords ont été brillants.

Je crois n’avoir jamais vu une telle diversité dans les votes. C’est incroyable. Si certains imaginent que j’influence les votes, ils verront qu’ils sont dans l’erreur. Qu’on en juge : nous sommes dix à voter pour les cinq meilleurs de dix vins. Tous les vins ont eu au moins deux votes, ce qui est très rare car il y a très souvent un ou deux vins qui ne recueillent aucun vote. Ensuite, six vins ont été nommés premiers, ce qui est vraiment rare. Le Rayas a eu trois votes de premier, le Ramonet et le Climens ont eu chacun deux votes de premier et l’Ausone, le Nuits-Saint-Georges et La Tâche ont eu chacun un vote de premier. Une telle diversité de votes est difficile à imaginer.

Le classement de l’ensemble de la table est : 1 – Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992, 2 – Château Climens 1949, 3 – Château Ausone Saint-Emilion 1937, 4 – Château Rayas Châteauneuf du Pape blanc 1985, 5 – Champagne Moët et Chandon Brut Impérial 1966, 6 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1992.

Mon classement est : 1 – Château Climens 1949, 2 – Vin de Chypre 1870, 3 – Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992, 4 – Champagne Moët et Chandon Brut Impérial 1966, 5 – Château Ausone Saint-Emilion 1937.

Les six nouveaux participants sont d’un enthousiasme certain et se sont promis de revenir à de nouveaux dîners. Comme à l’accoutumée au Taillevent le service des plats et des vins a été parfait. Le chef a fait une prestation digne de tous les éloges car il a mis son talent au service du vin. Ce 260ème fut un dîner particulièrement réussi.

Champagne Veuve Clicquot Ponsardin magnum 1989

Champagne Moët et Chandon Brut Impérial 1966

Bâtard-Montrachet Grand Cru Domaine Ramonet 1992

Château Rayas Châteauneuf du Pape blanc 1985

Château Ausone Saint-Emilion 1937

Château Nénin Pomerol 1961

Nuits-Saint-Georges Clos des Corvées Général Gouachon 1945

La Tâche Domaine de la Romanée Conti   1992

Château Climens 1949

Vin de Chypre 1870

je n’ai jamais vu des verres aussi vides en fin de repas !

259th dinner in Restaurant Pages samedi, 5 février 2022

At 4:10 p.m. at the Pages restaurant, the opening of the wines for the 259th dinner begins. The ambient atmospheric conditions will make certain corks difficult to extract, including that of the Vega Sicilia Unico 1960 which will fall into the liquid and force the wine to be decanted to remove the cork and put the wine back in its bottle. It is no longer slow oxygenation but oxygenation at a forced rate. The Lynch Bages 1924 has a beautiful, engaging fragrance, which will no longer be the case when served. Volnay 1937 also has a beautiful fragrance. The decanted and then re-bottled Vega Sicilia is reassuring and the Royal Kebir 1947 has a marked coffee nose and shows great promise.

In the program that I had proposed, the star was to be a Romanée Conti 1965. If there is a wine that should have no inventory error in my cellar, it is Romanée Conti. However, while preparing the wines for dinner, I did not find the Romanée Conti 1965. Unthinkable! I then decided to put in a Romanée Conti 1962, from a year with a better reputation than 1965, and so that no one would express regret, I added a bottle of La Tâche 1965. Now is the time to open these two wines from Romanée Conti. La Tâche 1965 has a nose of earth and dust so intense that I have the greatest doubts about its future performance.

The Romanée Conti 1962 has no capsule but wax, largely cracked. The cork is black and the flavor is worse than that of La Tâche, with sour and vinegary notes. AIE Aie Aie ! I wanted to please and that may not be the case. The Yquem 1948 and the Chypre 1870 have noses of a perfection unattainable by other wines.

At 6 p.m. I open the magnum of Dom Pérignon 1993 and at 6:45 p.m. I open the Pommery 1973 which offers me an incredible surprise. I pull the cork which jumps out of my hands and falls more than four meters further from the table where I operate. How is it possible that an almost 50-year-old champagne is so explosive? I cannot believe it.

Definitely the openings were marked by surprises in all directions and the table service will offer us others.

The guests are all on time at 8 p.m. We are ten including three women. There are two new participants from Dubai for this dinner.

The menu prepared by chef Ken and his team is: parmesan cabbage / scallops in two ways / lobster with red wine bisque sauce / pigeon, black garlic gnocchi, salmis sauce / grilled wagyu / poached foie gras / stilton / exotic tart / financial.

Champagne Pommery Brut 1973 is exceptional. It combines a beautiful maturity with a crazy youth because its bubble is active as announced by the explosion of the cork. In my opinion, this is the very definition of beautiful mature champagne.

Champagne Dom Pérignon P2 magnum 1993 pleases my neighbor very much, who adores its youth, whereas I personally find it very difficult to like it. It is strongly dosed and seems to me too rejuvenated compared to the original 1993. The scallops are presented first raw then just pan-fried. I prefer the champagne over the seared shells while other diners prefer it over the raw shell.

I like to make unlikely combinations such as putting a Bordeaux and a Burgundy together on lobster. The noses of both wines have cork sketches. Château Lynch Bages 1924, whose fragrance I liked when it opened, now has a cork nose that will not disappear.

The Volnay Santenots Joseph Drouhin 1937, on the contrary, very quickly loses the tiny trace of cork and shows an extreme charm, voluptuous and all in suggestion. This delicate and subtle wine is beautifully young. I am happy that it had several votes when the number of great wines is important.

On the pigeon, we taste a Spanish wine and an Algerian wine. Both are flawless and generous. The Vega-Sicilia Unico 1960 is splendid and of very young fruit, with an extreme freshness in the finish.

The Royal Kebir Frédéric Lung red Algeria 1947 is very exotic compared to the Vega. It is much more enigmatic and shows a rare breadth. It is a splendid wine, probably the most robust of the Algerian wines that I have had the chance to drink. Both wines go well with the perfectly cooked pigeon.

The originality of this dinner is that we programmed the rich wines of Spain and Algeria before the wines of Romanée Conti, while the reverse order would have been more logical. So that our palates are ready to welcome Burgundy wines, I asked Matthieu, the excellent sommelier, to keep some Dom Pérignon 1993 which is served with a brioche. So we’re ready for what’s next.

I took so many precautions to prevent any unpleasant surprises that no one believes that La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1965 could have been dusty when opened, because it presents itself with a salty scent so representative of the wines of the Romanée Conti and Romanée Conti itself. The wine is sublime, as if the faults of six hours ago had not existed. This 1965 is more typical Romanée Conti than La Tâche as it is delicate. It is a superb and long wine. The association with wagyu has something unnatural because the fat in the meat is very strong. But in fact the agreement is found judiciously.

Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1962 will not have the chance of La Tâche. It no longer has vinegary notes, it is coherent, but it lacks emotion. She’ll still get two votes, but I consider her an extinct wine. Poached foie gras is one of my coquetries to accompany a Romanée Conti (a guest created a word for my coquetries; he calls them audouzades). Tonight the poached foie gras is a little too discreet and lacks the vibrancy to wake up the 1962.

Château d’Yquem 1948 has a glorious golden color. The wine is superbly serene. The Yquems, when they are big, are very big. The stilton from the Barthélémy house is exactly what is needed, refined but not too much. Yuki‘s mango pie is of a rare lightness. And Yquem is grandiose in both chords.

Yuki’s Financier is ideal for the 1870 Cyprus Wine, sweet on the attack and dry on the finish. This 152-year-old wine has a freshness that time does not moderate.

It’s time to vote for our five favorite wines out of the ten of the meal. La Tâche 1965 is the clear winner with five first places. I am very happy that the 1973 Pommery got two first places because generally at the end of the meal we forget to vote for the wines at the start of the meal. The Château d’Yquem 1948 also has two first places and the Royal Kebir 1947 has one.

The overall vote is: 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1965, 2 – Royal Kebir Frédéric Lung red Algeria 1947, 3 – Château d’Yquem 1948, 4 – Champagne Pommery brut 1973, 5 – Cyprus wine 1870, 6 – Volnay Santenots Joseph Drouhin 1937.

My vote is: 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1965, 2 – Royal Kebir Frédéric Lung red Algeria 1947, 3 – Vega-Sicilia Unico Vino Fino 1960, 4 – Château d’Yquem 1948, 5 – Cyprus wine 1870.

The kitchen of the Pages restaurant is refined and it is exactly what is needed for old wines. The cooking is divine, like that of the lobster and that of the pigeon. The service is competent and attentive. Unfortunately, we will no longer find Lumi who will fly towards new adventures. She had a significant part in the success of the thirteen dinners that I had the pleasure of organizing in this restaurant which is so attentive to the needs of the wines. Lumi will be replaced by Antoine, whom I have known in other places.

The wine service by Matthieu was of great relevance.

The Romanée Conti 1962 which took the place of a 1965 was not there. La Tâche 1965 satisfied us. The charming guests, from all walks of life, brought their smiles to make this meal one of the nicest I have organized.

259ème dîner au restaurant Pages vendredi, 4 février 2022

A 16h10 au restaurant Pages, commence l’ouverture des vins du 259ème dîner. Les conditions atmosphériques ambiantes vont faire que certains bouchons vont être difficiles à extraire, dont celui du Vega Sicilia Unico 1960 qui va tomber dans le liquide et obliger à carafer le vin pour enlever le bouchon et remettre le vin dans sa bouteille. Ce n’est plus de l’oxygénation lente mais de l’oxygénation à rythme forcé. Le Lynch Bages 1924 a un beau parfum engageant ce qui ne sera plus le cas au moment du service. Le Volnay 1937 a lui aussi un beau parfum. Le Vega Sicilia carafé puis remis en bouteille est rassurant et le Royal Kebir 1947 a un nez marqué de café et montre une belle promesse.

Dans le programme que j’avais proposé, la vedette devait être une Romanée Conti 1965. S’il est un vin qui devrait n’avoir aucune erreur d’inventaire dans ma cave, c’est bien la Romanée Conti. Or en préparant les vins du dîner, je ne retrouve pas la Romanée Conti 1965. Impensable ! Je décide alors de mettre une Romanée Conti 1962, d’une année de plus belle réputation que 1965 et pour que personne n’exprime de regret, j’ajoute une bouteille de La Tâche 1965. C’est maintenant le moment d’ouvrir ces deux vins de la Romanée Conti. La Tâche 1965 a un nez de terre et de poussière à un point tellement intense que j’ai les plus grands doutes sur sa future prestation.

La Romanée Conti 1962 n’a pas de capsule mais de la cire, largement craquelée. Le bouchon est noir et le parfum est pire que celui de La Tâche, avec des notes suries et vinaigrées. Aïe, aïe, aïe ! J’ai voulu faire plaisir et ce ne sera peut-être pas le cas. L’Yquem 1948 et le Chypre 1870 ont des nez d’une perfection inatteignable par d’autres vins.

A 18 heures j’ouvre le magnum de Dom Pérignon 1993 et à 18h45 j’ouvre le Pommery 1973 qui m’offre une surprise incroyable. Je tire le bouchon qui me saute des mains et va retomber plus de quatre mètres plus loin de la table où j’opère. Comment est-ce possible qu’un champagne de presque 50 ans soit aussi explosif ? Je n’en reviens pas.

Décidément les ouvertures ont été marquées par des surprises dans tous les sens et le service à table va nous en offrir d’autres.

Les convives sont tous à l’heure à 20 heures. Nous sommes dix dont trois femmes. Il y a deux nouveaux participants venus de Dubaï pour ce dîner.

Le menu préparé par le chef Ken et son équipe est : choux au parmesan / Saint-Jacques en deux façons / homard sauce bisque vin rouge / pigeon, gnocchi ail noir, sauce salmis / wagyu grillé / foie gras poché / stilton / tarte exotique / financiers.

Le Champagne Pommery brut 1973 est exceptionnel. Il combine une belle maturité avec une folle jeunesse car sa bulle est active comme l’annonçait l’explosion du bouchon. C’est à mon sens la définition même du beau champagne mature.

Le Champagne Dom Pérignon P2 magnum 1993 plait énormément à ma voisine qui adore sa jeunesse alors que j’ai personnellement beaucoup de mal à l’aimer. Il est fortement dosé et me semble trop rajeuni par rapport au 1993 d’origine. Les coquilles Saint-Jacques sont présentées d’abord crues puis juste poêlées. Je préfère le champagne sur les coquilles poêlées alors que d’autres convives le préfèrent sur la coquille crue.

J’aime faire des associations improbables telles que de mettre un bordeaux et un bourgogne ensemble sur du homard. Les nez des deux vins ont des esquisses de bouchon. Le Château Lynch Bages 1924 dont le parfum m’avait plu à l’ouverture a maintenant un nez de bouchon qui ne disparaîtra pas.

Le Volnay Santenots Joseph Drouhin 1937 au contraire perd très vite l’infime trace de bouchon et se montre d’un charme extrême, voluptueux et tout en suggestion. Ce vin délicat et subtil est d’une belle jeunesse. Je suis content qu’il ait eu plusieurs votes alors que le nombre de grands vins est important.

Sur le pigeon, nous goûtons un vin espagnol et un vin algérien. Les deux sont sans défaut et généreux. Le Vega-Sicilia Unico 1960 est splendide et d’un fruit très jeune, avec une extrême fraîcheur dans le finale.

Le Royal Kebir Frédéric Lung rouge Algérie 1947 est très exotique par rapport au Vega. Il est beaucoup plus énigmatique et montre une ampleur rare. C’est un vin splendide, probablement le plus charpenté des vins algériens que j’aie eu la chance de boire. Les deux vins s’accordent avec le pigeon parfaitement cuit.

L’originalité de ce dîner c’est que l’on a programmé les vins riches d’Espagne et d’Algérie avant les vins de la Romanée Conti, alors que l’ordre inverse eût été plus logique. Aussi pour que nos palais soient prêts à accueillir les vins bourguignons, j’ai demandé à Matthieu, l’excellent sommelier, de garder du Dom Pérignon 1993 qui est servi avec une brioche. Nous sommes donc prêts pour la suite.

J’ai tellement pris de précautions pour prévenir toute mauvaise surprise que personne ne croit que La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1965 ait pu être poussiéreuse au moment de l’ouverture, car elle se présente avec un parfum salin si représentatif des vins de la Romanée Conti et de la Romanée Conti elle-même. Le vin est sublime, comme si les défauts d’il y a six heures n’avaient pas existé. Ce 1965 est plus typée Romanée Conti que La Tâche tant il est délicat. C’est un vin superbe et long. L’association à du wagyu a quelque chose d’antinaturel car le gras de la viande est très fort. Mais en fait l’accord se trouve judicieusement.

La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1962 n’aura pas la chance de La Tâche. Elle n’a plus de notes vinaigrées, elle est cohérente, mais il lui manque l’émotion. Elle recevra quand même deux votes, mais je la considère comme un vin éteint. Le foie gras poché est une de mes coquetteries pour accompagner une Romanée Conti (un convive a créé un mot pour mes coquetteries ; il les nomme des audouzades). Ce soir le foie poché est un peu trop discret et manque de vibration pour réveiller le 1962.

Le Château d’Yquem 1948 est d’une couleur d’un or glorieux. Le vin est superbe de sérénité. Les Yquem, quand ils sont grands, sont très grands. Le stilton de la maison Barthélémy est exactement ce qu’il faut, affiné mais pas trop. La tarte à la mangue de Yuki est d’une rare légèreté. Et l’Yquem est grandiose dans les deux accords.

Le financier de Yuki est idéal pour le Vin de Chypre 1870, doucereux à l’attaque et sec sur le finale. Ce vin de 152 ans a une fraîcheur que le temps ne modère pas.

Il est temps de voter pour nos cinq vins préférés sur les dix du repas. La Tâche 1965 est le gagnant incontestable avec cinq places de premier. Je suis très heureux que le Pommery 1973 ait eu deux places de premier car généralement en fin de repas on oublie de voter pour les vins du début de repas. Le Château d’Yquem 1948 a lui aussi deux places de premier et le Royal Kebir 1947 en a une.

Le vote global est : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1965, 2 – Royal Kebir Frédéric Lung rouge Algérie 1947, 3 – Château d’Yquem 1948, 4 – Champagne Pommery brut 1973, 5 – Vin de Chypre 1870, 6 – Volnay Santenots Joseph Drouhin 1937.

Mon vote est : 1 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1965, 2 – Royal Kebir Frédéric Lung rouge Algérie 1947, 3 – Vega-Sicilia Unico Vino Fino 1960, 4 – Château d’Yquem 1948, 5 – Vin de Chypre 1870.

La cuisine du restaurant Pages est épurée et c’est exactement ce qu’il faut pour les vins anciens. Les cuissons sont divines, comme celle du homard et celle du pigeon. Le service est compétent et attentif. Nous allons hélas ne plus retrouver Lumi qui va voler vers de nouvelles aventures. Elle a eu une part significative dans la réussite des treize dîners que j’ai eu le plaisir d’organiser dans ce restaurant si attentif aux besoins des vins. Lumi sera remplacée par Antoine que j’ai connu en d’autres lieux.

Le service des vins par Matthieu a été d’une grande pertinence.

La Romanée Conti 1962 qui prenait la place d’une 1965 n’était pas au rendez-vous. La Tâche 1965 nous a comblés. Les convives charmants, de tous horizons, ont apporté leurs sourires pour que ce repas constitue l’un des plus sympathiques que j’aie organisés.

Réveillon de fin d’année samedi, 1 janvier 2022

Le réveillon de fin d’année se tiendra pour une fois à notre domicile de la région parisienne. Avec des amis et des membres de ma famille nous serons huit. Le choix des mets et des vins a été fait en collaboration avec mon épouse avec des ajustements progressifs.

Vers midi je décide d’ouvrir les deux magnums du repas pour qu’ils profitent d’une bonne aération. A 16 heures c’est le tour des bouteilles. Le parfum du Richebourg de la Romanée Conti est un miracle, tant il est l’idéal des parfums de ce domaine. Le sauternes a aussi un parfum généreux. Tous les bouchons viennent sans problème. Et c’est à 18 heures que j’ouvre le champagne de 1955 pour qu’il jouisse d’une aération qui l’épanouira.

Des amis qui dormiront à la maison sont arrivés vers 18 heures aussi pour attendre les autres invités j’ouvre un champagne non prévu au programme, un Champagne Comtes de Champagne Taittinger 2007. Quelle belle surprise de voir ce champagne à ce niveau. Il est jeune mais offre une largeur généreuse du plus bel effet. Il est gourmand, ce qui est sympathique.

Lorsque tous les invités sont présents, je sers le Champagne Salon magnum 1995. Il a une bulle active, une couleur claire et l’on sent d’emblée que c’est un seigneur, plus complexe que le 2007 mais aussi plus serré. Il est vif et tranchant avec une belle longueur. J’attendais sans doute un peu plus de rondeur de ce champagne. Cela viendra avec le temps.

Nous grignotons des amandes au sel truffé, une gougère présentée en une couronne torique, une jolie préparation à base d’œufs de saumon de taille respectable, du jambon Pata Negra, de la mimolette bien douce, et surtout des tranches de boudin blanc poêlé qui créent le plus bel accord avec le beau champagne.

L’idée me vient d’essayer le boudin blanc sur le deuxième champagne d’apéritif, le Champagne Charles Heidsieck Royal 1955 qui se présente dans un flacon de toute beauté. Ce champagne est grandiose, large, épanoui et d’une complexité extrême qui montre à quel point l’âge profite aux champagnes, car ce 1955 est transcendant par rapport au 1995 qui devra attendre de longues années avant d’offrir autant de plaisir que celui-ci. En buvant, je me demande si ce Heidsieck ne se situerait dans le haut de la hiérarchie des champagnes que j’ai bus. Il est exceptionnel, rond et accueillant et forme avec le boudin blanc un accord magique.

Nous passons à table. Selon une tradition bien ancrée, chaque convive doit trouver sa place en résolvant une énigme qui donne son prénom. Comme chaque année c’est introuvable mais donne l’occasion de s’amuser. Chacun trouve sa place et selon la même tradition je fais un discours de moins de quatre minutes, pour le plaisir d’accueillir mes amis et parents.

Pour le caviar Osciètre Kaviari au lieu des habituels champagnes, j’ai prévu deux Chablis que l’on va s’amuser à comparer. Le Chablis Grand Cru Valmur Vocoret 1971 et le Chablis Grand Cru Les Clos Vocoret 1971. Il ne s’agit pas de décortiquer les avantages respectifs de Valmur et des Clos mais de voir si ces vins nous plaisent avec le caviar. Le Valmur est un vin vertical, droit, tranchant, alors que Les Clos est un vin horizontal ou plutôt rond. Autour de la table certains préfèreront le tranchant alors que d’autres dont moi préfèreront la rondeur des Clos. Mais le plus important est ailleurs, c’est que les deux chablis de 50 ans sont parfaits avec le caviar, et que les deux vins sont intemporels. Et c’est, à mon sens, lié à l’ouverture des vins longtemps à l’avance, ce qui les rend larges et équilibrés et dotés de leur vivacité originelle. Ces deux chablis sont superbes. Ils sont vifs et charmants.

Ils accompagnent aussi des cœurs de saumon particulièrement goûteux et le champagne de 1955 est presque supérieur dans l’accord avec le saumon.

A l’ouverture du Richebourg du Domaine de la Romanée Conti 1956 au niveau superbe, j’avais failli m’évanouir de plaisir tant le parfum était archétypal, ‘rose et sel’, si représentatif du domaine. Au service maintenant, le vin est un miracle. Il est clairet sur les premiers verres, et foncera au fur et à mesure jusqu’à devenir presque noir en fin de bouteille laissant une lie dont je me suis régalé. Tout en lui est finesse et subtilité. J’ai un amour particulier pour le millésime 1956, si difficile lorsqu’il a été fait, mais qui a trouvé avec l’âge une vraie résurrection. J’en ai bu 23 fois. Le Wagyu bien gras et goûteux met en valeur la subtilité du vin à la belle longueur. Je suis aux anges et mes invités aussi.

Le Vega Sicilia Unico Magnum 1998 ouvert à midi, donc bu plus de onze heures après, combine des contraires. Il est en effet extrêmement puissant et riche mais il est aussi frais, fluide, rafraîchissant. Il a même un finale qui a des accents mentholés. C’est un vin que j’adore pour ses contrastes. Le bœuf Angus est riche et sanguin et forme un accord plus que pertinent.

Le vin espagnol côtoie quelques fromages et nous allons associer un beau stilton sec et salé au Château d’Arche Sauternes 1955. Je l’ai choisi parce qu’il a la même année que le champagne Heidsieck et c’est un bon choix car ce sauternes précis, ample mais réservé est d’une belle élégance. L’accord est toujours parfait.

Ma femme a composé selon une recette de Valérie Costa un dessert au chocolat assorti de quelques grains de caviar ce qui excite joliment le dessert. Le Rivesaltes Collection Cazes 1935 provoque un bonheur gustatif inégalable car le goût du chocolat et le goût du vin sont strictement identiques. C’est impressionnant et j’adore lorsque cela se produit. C’est rare mais totalement gratifiant quand mets et vin se confondent. Certains amis ont associé le dessert à un Madère Sec João Marcello Gomes vers 1950. Ils n’ont pas vécu la même fulgurance sauf un convive qui a mis le Madère premier de son vote.

Nos votons et le temps passant, puisque nous avons changé d’année, j’ai mis quatrième le champagne 1955 que j’aurais dû mettre second. La mémoire oublie souvent les premiers vins.

Le classement global est : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956, 2 – Champagne Charles Heidsieck Royal 1955, 3 ex aequo – Chablis Grand Cru Les Clos Vocoret 1971 et Rivesaltes Cazes Collection 1935, 5 – Vega Sicilia Unico Magnum 1998.

Mon classement est : 1 – Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1956, 2 – Rivesaltes Cazes Collection 1935, 3 – Chablis Grand Cru Les Clos Vocoret 1971, 4 – Champagne Charles Heidsieck Royal 1955.

Ce repas parfait pour les accords, la cuisine et les vins mérite par sa conception d’être classé dans mes dîners. C’est le 258ème.

le 257ème dîner se tient au restaurant Maison Rostang dimanche, 12 décembre 2021

Un ami fidèle de mes dîners avait invité en 2018 des camarades de classe. C’était le 227ème dîner. Il avait voulu recommencer en 2020 mais c’est le Covid qui n’a pas voulu et a fait repousser ce dîner deux fois. La troisième tentative est la bonne et ce sera le 257ème dîner qui se tiendra au restaurant Maison Rostang.

Les vins ont été livrés il y a une semaine. Le jour venu, je prends la trousse avec mes outils d’ouverture. Il se trouve que j’ai deux trousses de même forme et de même couleur. Je soupèse l’une d’elles. Au poids, au toucher elle me semble la bonne. Un taxi me conduit jusqu’au restaurant où j’arrive à 16 heures. Jérémie, le sympathique sommelier va chercher la caisse des bouteilles qu’il a mises à la verticale la veille, comme je le lui avais demandé. J’ouvre la trousse. Catastrophe, ce n’est pas la trousse avec les longues mèches mais une autre avec des accessoires utiles, mais sans mèches. Je n’arriverais jamais à lever les bouchons déchirés. Fort heureusement j’ai pris un Durand, qui est un astucieux tirebouchon qui combine la mèche d’un tirebouchon avec un bilame, qui officient ensemble. Cet outil est extrêmement pratique mais il a un défaut : ses lames latérales blessent le bouchon, ce que je ne souhaite pas puisque je collectionne les bouchons.

Nécessité fait loi, j’utilise le Durand. L’avantage de cet outil, c’est que l’on va dix fois plus vite qu’avec mes mèches, mais l’on n’éprouve pas les mêmes sensations. J’ai un petit doute sur le nez du Puligny-Montrachet qui pourrait être bouchonné. Le nez du Rayne Vigneau est absent. Au moment d’ouvrir l’Yquem 1980, je me dis que ce vin étant jeune, je pourrais l’ouvrir avec un limonadier classique alors que j’ai utilisé le Durand pour tous les autres. Patatras ! La partie basse du bouchon toute humide et imprégnée ne monte pas avec le haut du bouchon. Impossible de la rattraper. Avec Jérémie nous transvaserons le vin dans une carafe, Jérémie extirpera le bouchon « à la ficelle », technique que j’ai utilisée de nombreuses fois, ce qui permet ensuite de remettre le vin dans sa bouteille. Pendant ces opérations le parfum de l’Yquem inonde la pièce. Il est divin. Parmi les parfums les plus engageants il y a celui du Brane-Cantenac 1928, du Chambertin Clos de Bèze 1961, du Château Rayas 1988 et du Paternina Rioja 1928.

J’ai fini les opérations d’ouvertures avant 17 heures. Il me reste trois heures avant l’arrivée des convives. Jérémie m’offre une bière blonde de la Parisienne, mais je n’ai pas grand-chose à faire. Aussi j’envoie un message à Charles, l’organisateur de ce repas, lui demandant de venir plus tôt s’il le peut. Très gentiment il le fera.

Nous bavardons sur les qualités potentielles des vins ouverts et je dis à Charles qu’il ne m’étonnerait pas que le Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 soit dans les premiers ou premier, car chaque fois que je l’ai mis dans mes dîners, probablement une douzaine de fois, il a été dans les premiers ou premier.

Charles m’annonce que deux amis pourraient avoir un léger retard et suggère que l’on prenne un vin de la cave du restaurant malgré le fait que j’ai prévu quatorze vins pour onze convives. Charles commande un Champagne Jacques Selosse millésimé 2007 qui a été dégorgé en novembre 2019.

Il ne paraît pas choquant que nous le goûtions avant les premières arrivées. Le champagne a un ambre très léger, une bulle active. En bouche il est extrêmement atypique. Je lui trouve un goût de vieux parchemin. Il a le charme de la visite d’une vieille église. On est face à un champagne d’un autre temps, d’une autre planète.

Les invités qui arrivent goûtent ce champagne qui ne laisse pas indifférent tant il sort des sentiers battus. Les retardataires ne le sont pas tant que cela aussi nous nous asseyons pour prendre l’apéritif, Covid oblige. Nous sommes onze dont quatre femmes.

Le Champagne Perrier Jouët Belle Epoque 1982 est d’un charme et d’un équilibre enthousiasmants. Il est mis en valeur par le 2007 car il rassure, fluide, large, et d’une belle sérénité. Les petits amuse-bouches de début de repas ont des goûts prononcés superbes.

Le Champagne Dom Ruinart Blanc de Blancs 1964 a un nez légèrement imprécis qui va disparaître assez rapidement. J’avais ouvert les champagnes à 19 heures. J’aurais dû les ouvrir à 18 heures. Le goût de ce champagne est d’une personnalité extrême, un pur velours. Il est large et doux, calme et subtil. Un vrai bonheur qui trouble plusieurs convives car il leur est difficile d’imaginer qu’un champagne de 57 ans puisse avoir une aussi belle jeunesse.

Le menu composé par Nicolas Baumann est ainsi conçu : langoustines pochées dans un consommé puis rôties, coques au bouillon, sarrasin soufflé, bouillon de langoustines mousseux / homard bleu laqué au barbecue, coussins de céleri et chèvre frais de chez Fabre, jus de la presse lié au corail / dos de chevreuil rôti, la gigue confite, salsifis rafraîchis à la menthe, jus d’airelles au vin de syrah / suprême de pigeon, petit chou farci et jus d’un salmis / stilton / ananas rôti et en fines lanières à cru, sorbet ananas / mignardises.

Les deux blancs sont associés à la langoustine. Le Château Haut Brion blanc 1966 est d’une couleur claire, frais et riche. Il offre une densité forte et une belle longueur. C’est un grand vin blanc noble.

Le Puligny-Montrachet Clos de la Mouchère 1980 est aussi très clair et il n’a pas du tout le nez de bouchon que je redoutais. Il a même un parfum plus épanoui que celui du bordeaux. La juxtaposition montre que le vin bourguignon n’a pas le coffre et la densité du bordelais qui surclasse le Puligny, même s’il est agréable.

L’association homard et bordeaux rouge est un de mes plaisirs. Le crustacé aura trois compagnons que j’ai voulu de périodes distinctes. Le Château Haut-Brion 1980 est droit, classique, bien né et construit mais manquant un peu de folie pour mon goût.

Le Château La Gaffelière Naudes Saint-Emilion 1953 a une couleur presque noire et une richesse doublée d’une énergie peu commune. Il est puissant et conquérant.

Le Château Brane-Cantenac Margaux 1928 a le charme féminin des vins de Margaux et il ajoute l’équilibre et la prestance de l’année 1928. C’est un vin élégant qui ne fait pas son âge. Pour mon goût le classement de ces trois vins irait du plus ancien au plus récent. Les votes des convives ne diront pas la même chose.

Sur le chevreuil il y a un bourgogne et un vin du Rhône. Le Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 a un nez d’une expressivité extrême. En bouche, son charme est infini. Il est délicat, racé, subtil. On n’arrêterait pas de boire un vin aussi équilibré et parfait. C’est un ange.

Le Château Rayas Châteauneuf du Pape 1988 est d’un millésime que j’adore pour ce vin. Son parfum fait clairement la différence avec celui du chambertin en étant résolument rhodanien. Il a beaucoup de charme, il est solide et bien fait, mais ne peut pas lutter avec le chambertin.

L’Hermitage de Boissieu 1959 est un vin solide, bien construit, mais qui manque un peu de flamboyance. Il aura quelques votes de six convives mais le vin espagnol lui fait de l’ombre.

Le Rioja Ollauri Paternina 1928 a un nez d’une rare délicatesse et je ressens des fruits roses dans son parfum. En bouche il combine élégance et puissance dans un registre très affirmé. Comme pour le Brane Cantenac on peut constater qu’un vin de 93 ans peut avoir une énergie exceptionnelle. Ce vin aura les faveurs de mon vote.

Le Château d’Yquem 1980 est un sauternes magnifique dont le parfum est le plus exubérant de tous les vins tout en étant raffiné. Il est nettement plus riche et subtil que ce qu’on lit dans les livres pour son année. L’accord avec un beau stilton est un vrai bonheur.

Le Château Rayne Vigneau 1942 souffre hélas d’un nez bouchonné. Il se pourrait qu’il disparaisse mais à ce stade du repas nous n’avons pas le temps d’attendre.

J’ai apporté un Marc de Champagne Oudinot & Fils 45° années 40 dont la bouteille avait déjà été ouverte il y a quelques mois. Il est particulièrement fort mais dès qu’on s’est habitué à sa puissance on s’aperçoit qu’il est frais, fluide, fruité et joliment ensorceleur. C’est probablement l’un des meilleurs marcs que j’aie bus.

Nous sommes onze à voter pour nos cinq préférés de 13 vins, le Selosse et le Marc ne participant pas au concours. Cinq vins seront nommés premiers, le chambertin quatre fois, le Haut-Brion blanc deux fois, comme le Haut-Brion rouge ainsi que le Rioja 1928 et l’Yquem quant à lui aura un vote de premier.

Tous les vins auront eu au moins un vote sauf le Rayne-Vigneau et il est apparu une diversité des votes qui tient à la forme de la table. La table est en longueur, Charles est en face de moi, et il y a quatre convives à ma gauche et cinq convives à ma droite formant des groupes qui vont voter différemment. Ainsi, cinq votants à ma gauche ont glorifié le Haut-Brion 1980 alors que les cinq à ma droite ne lui ont donné aucun vote. Pour le Dom Ruinart 1964 les quatre votes sont tous à ma droite et rien à ma gauche. De même l’Hermitage 1959 a eu six votes dont cinq à ma droite et un à ma gauche. Il est certain que lorsqu’il y a une table en longueur, trois conversations se forment, à droite, à gauche et au centre, et dans chaque groupe il y a un convive qui va influencer la vision des autres. C’est une constatation que j’ai déjà faite, mais peut-être pas aussi nettement que ce soir.

Le vote global est : 1 – Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961, 2 – Château Haut-Brion 1980, 3 – Rioja Ollauri Paternina 1928, 4 – Château d’Yquem 1980, 5 – Château Brane-Cantenac 1928, 6 – Château Rayas Châteauneuf du Pape 1988.

Mon vote est : 1 – Rioja Ollauri Paternina 1928, 2 – Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961, 3 – Château Rayas Châteauneuf du Pape 1988, 4 – Château Brane-Cantenac 1928, 5 – Château d’Yquem 1980.

Ce n’était pas facile de servir tous ces nombreux vins à onze convives. Jérémie le sommelier s’en est très bien chargé après un démarrage un peu difficile, vite oublié. La cuisine a été pertinente et magnifiquement réalisée par un chef heureux de cuisiner et une équipe soudée. L’ambiance joyeuse créée par ce groupe d’amis a fait de ce repas un repas réussi.

Champagne Perrier Jouët Belle Epoque 1982

Champagne Dom Ruinart Blanc de Blancs 1964

Château Haut Brion blanc 1966

Puligny-Montrachet Clos de la Mouchère 1980

Château Haut-Brion 1980

Château La Gaffelière Naudes 1953

Château Brane-Cantenac 1928

Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961

Château Rayas Châteauneuf du Pape 1988

Hermitage de Boissieu 1959

Rioja Ollauri Paternina 1928

Château d’Yquem 1980

Château Rayne Vigneau 1942

Marc de Champagne Oudinot & Fils 45° années 40

le chef fait du repassage