Un ami m’a invité à rencontrer un philosophe d’une université de la science gastronomique de Pollenzo pour que nous parlions de l’approche du vin. J’ai proposé d’apporter du vin. Mon ami a suggéré une dégustation à l’aveugle et j’ai décidé de choisir des vins de grande diversité dont j’espère que personne ne pourra les trouver.
Je suis arrivé de bonne heure au restaurant le Sergent Recruteur, mais comme la cérémonie d’ouverture de la nouvelle Notre Dame de Paris sera demain, et comme Donald Trump va venir aujourd’hui, il y a des interdictions de circuler un peu partout. Paris fait tout pour dégouter les automobilistes.
Avec mes vins, j’ai apporté une carafe et des bouteilles vides pour transvaser quelques vins, non pas juste après l’ouverture mais lorsque l’oxygénation lente aura fait son effet. Aurélien, le très compétent directeur et sommelier, servira quelques vins avec une serviette qui cachera les étiquettes.
L’ouverture des vins ne pose pas de problème, les transvasements se font au dernier moment. Tout est prêt pour le déjeuner. L’ami qui arrive avait dit au restaurant que nous serions sept et non pas six comme je le pensais. Quand il arrive il annonce huit convives, puis le chiffre redevient sept. Il y a l’universitaire que mon ami voulait me faire rencontrer, un entrepreneur qui aide des sociétés de la branche alimentaire à trouver des financements et des débouchés, un journaliste du vin et une avocate férue de gastronomie.
J’ai apporté le Martini rosé qui avait été ouvert il y a deux jours. Il est toujours fantastique et se marie bien avec les rillettes. Ses variations d’agrumes et d’épices sont d’une grande vigueur.
Le vin qui est servi ensuite est le Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Diamant Bleu 1971. Il a une parfaite maturité. C’est un grand champagne long et expressif. Beaucoup pensent que c’est un champagne alors qu’ils n’avaient aucune idée pour le Martini.
La Roussette de Savoie Marestel Altesse Dupasquier 2004 a une personnalité magnifique. C’est un vin si différent de tout autre vin blanc que l’on a l’habitude de boire. Je l’ai adoré pour sa complexité et son aromatique si étrange. Bien sûr personne n’a trouvé de quel vin il s’agissait. La seule piste proposée était la Loire.
Le Chinon les Varennes du Grand Clos Charles Joguet 1990 est un vin intense et expressif. C’est un grand vin d’une région que l’on n’explore pas assez. Là aussi, les saveurs sont inhabituelles par rapport à la palette Bordeaux / Bourgogne.
Vient maintenant sur la chartreuse de gibier à plume le Vin Fin de la Côte de Nuits Champy Père & Cie 1949. La chartreuse n’est pas faite d’une tourte, mais de légumes. Le plat est splendide. Alain Pégouret a du talent.
Tout le monde est impressionné par ce merveilleux vin, qui sera mon gagnant. Qui peut imaginer un vin de petite appellation, pas même de Villages, avec une telle jeunesse et une telle personnalité. Tout le monde est impressionné, car cela remet en cause les idées préconçues sur la longévité des vins.
Mon dernier apport à ce repas est un Monbazillac sans nom et sans indication, certainement des années 50. Délicat, plein de grâce, il est évidemment moins solide qu’un sauternes, mais sa douceur le rend charmant et son âge le rend rond et cohérent.
Je suis heureux d’avoir montré une belle diversité de vins, tous intéressants et tirant profit de leurs âges. Quelques autres vins ont été apportés dont un grand Musar 2005 que j’ai adoré et un vin italien de 2007 apporté par le philosophe. Je n’ai pas noté le nom mais c’était fabuleux. Un vin d’une immense qualité.
La sélection fut intéressante, avec un vainqueur, un vin simple de Bourgogne, de 1949 et la surprise d’un 2007 italien. Ce fut un très beau déjeuner intéressant.