Archives de catégorie : vins et vignerons

Dégustation des 2021 du domaine de la Romanée Conti mercredi, 11 décembre 2024

Comme chaque année la société Grains Nobles reçoit des amateurs pour goûter un millésime récent. Cette dégustation est présentée par Aubert de Villaine depuis le début et cette année Bertrand de Villaine qui gère le domaine depuis 2022 accompagne Aubert. Michel Bettane et Bernard Burtschy sont présents et feront des commentaires.

Le rythme de la dégustation est géré par Pascal Marquet, gérant de Grains Nobles et l’on regrettera cette année qu’il n’y ait pas comme d’habitude, des étudiants qui apportent les verres à chacun. Le service a été lent et comme j’étais parmi les plus tard servis, j’entendais des commentaires sur un vin que je n’avais toujours pas. Cela n’a pas empêché malgré tout une belle dégustation du millésime 2021.

Aubert de Villaine évoque l’année 2021. L’hiver fut clément et les travaux d’hiver se sont faits facilement. Le début d’année était marqué par du « confort » jusqu’à ce qu’arrivent les journées des 5, 6 et 7 avril avec de la gelée. Ce furent trois nuits de combat car le gel a détruit une bonne partie de la récolte. Ces nuits ont été marquées de terribles et incroyables luttes.

Le printemps fut pluvieux mais assez chaud et les maladies se sont développées, surtout l’oïdium. Le temps s’est amélioré et la pousse était de grande vigueur. On n’arrivait pas à suivre cette vigueur.

L’été a été meilleur et début septembre les choses se sont améliorées. Le 23 septembre a marqué le début des vendanges qui se sont déroulées avec du beau temps permanent. Face à une telle situation on se demandait quoi faire. Aubert nous propose de le vérifier en goûtant. Les récoltes ont été très inférieures aux moyennes.

Le Corton Grand Cru Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti 2001 a une couleur clairette, d’un léger violet, d’un mordoré délicat. Le vin a un joli parfum, d’un nez délicat.

L’attaque est gourmande, et il y a de l’astringence dans le final. Le vin est un peu serré. Le vin est élégant et subtil, mais j’ai un peu de mal avec son côté serré. Il faudra du temps pour qu’il s’épanouisse, mais il deviendra grand. C’est assez curieux de voir qu’il est à la fois serré et gourmand. Il y a plus de vin de jeunes vignes, car les vieilles vignes ont été plus attaquées par le gel. Plus le temps passe et plus le vin devient aérien.

Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2021. A l’œil le vin a plus de couleur framboise que le précédent. Le nez est intense et percutant. L’attaque est douce et pleine de charme. Le final est gourmand. Il a une belle mâche. J’aime son élégance. Il est très intéressant et j’adore son côté sauvage. J’aime le côté ‘blessé’ que l’on ressent dans ce vin. Il est émouvant. Il y a une fraîcheur végétale en fin de bouche.

Grands-Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2021. Les couleurs sont proches entre les vins, les plus grands crus étant plus sombres, aussi je ne les commente plus.

Le nez est puissant et je ressens une verdeur végétale. Le nez est intense.

En bouche, l’attaque est généreuse et gourmande. On sent le grand vin, très prometteur. La finale est vigoureuse. Ce vin deviendra grand et subtil. J’ai beaucoup de plaisir à le boire et je ressens sa belle pureté.

Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2021. Le nez très végétal est encore fermé. La bouche est riche. C’est un vin noble, qui combine gourmandise et retenue car il est noble. Le final est riche et rêche du fait de la vendange entière. Il est conquérant et fonceur. Alors que le Grands-Echézeaux est très agréable à boire, celui-ci est une bombe à retardement. Malgré sa vivacité, il est difficile pour l’instant car il est austère.

Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2021. Le nez est très végétal. L’attaque est élégante et légère mais elle masque ce vin qui en milieu de bouche est puissant et conquérant. Il y a beaucoup de promesses car il est grand et puissant mais il n’est pas encore réellement prêt à boire. Il a des petites notes poivrées. Il faut attendre car il sera grand.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2021 a un nez délicat, soyeux et charmant. L’attaque est soyeuse et tellement séduisante. Le final est plus rêche, moins joyeux. Le vin ne joue pas sur la puissance. Il joue sur le charme de La Tâche. Il est gourmand car riche. Avec le temps il devient de plus en plus séduisant. Je ressens les notes de roses de ce vin très charmeur.

Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 2021. C’est le seul nez qui a un tel fruit rouge si délicat. Le nez est élégant et plein de charme. Ce parfum est unique.

Le vin est soyeux, magique, élégant et tellement agréable. C’est le seul vin où l’on ne sent pas la force de la rafle. C’est un vin de méditation, d’élégance et de douceur. Il est magique.

Michel Bettane dit qu’il a un « corps parfumé ». Il est velouté, aérien, tout en douceur. Quel plaisir. J’ai dit aux participants mon sentiment que cette année pour la Romanée Conti est celle où l’écart entre la Romanée Conti et les autres vins du domaine est le plus grand. Ce vin est totalement magique.

Le Corton-Charlemagne Domaine de la Romanée Conti 2021 a un nez étonnamment accueillant, superbe, riche et puissant. Le vin est gourmand et immédiatement buvable. Le final est un peu discret mais c’est un grand vin. Il est agréable à boire, très sec mais charmant. Il ne joue pas sur la puissance. Il a une très belle longueur. C’est un vin profond très agréable, plus riche quand il est plus aéré.

Contrairement aux vins rouges, ce ne serait pas un crime de le boire à table maintenant !

Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2021. Sa couleur est très claire. Le nez est d’une intensité incroyable. Il est profond, noble, immense mais aussi en retenue. Ce parfum est magique.

En bouche, l’attaque est très rude, complexe. Ce vin puissant est déjà génial. C’est vin immense qu’on pourrait considérer comme totalement accompli. Il combine fraîcheur et grandeur. Il n’a pas encore l’opulence qu’il aura, mais sera grand. Il n’y a pas la moindre trace de botrytis. Ce vin n’est que du bonheur, avec une persistance extrême.

Michel Bettane a vanté la qualité des raisins, qui ne cesse de s’améliorer depuis des décennies.

Il est clair que deux vins émergent de tout ce brillant aréopage de vins d’exception. Ce sont la sublime Romanée Conti et le Montrachet. Les quantités produites sont tellement faibles que bienheureux seront ceux qui les boiront.

Selon la tradition quelques personnes sont retenues à dîner au restaurant de Grains Nobles qui comme la Romanée Conti a une qualité de cuisine qui ne cesse de s’améliorer. Aubert et Bertrand de Villaine, Michel Bettane et Bernard Burtschy sont les invités de marque et Pascal Marquet a invité un vigneron d’Uruguay qui présente ses vins et ses procédures.

Si je m’imagine vigneron, raconter mes méthodes devant le plus grand vigneron du monde et devant le plus grand connaisseur du vin au monde, je resterais muet ! Ce jeune vigneron nous a fait goûter des vins très intéressants et bien faits. Un autre convive a apporté des vins italiens eux aussi bien faits dont un Barolo Sandrone Le Vigne 2004 très gourmand et vif et un vin blanc Mario Schiopetto bianco 2004 avec une curieuse mention sur l’étiquette : « échantillon qui ne peut être vendu ». Vin très agréable aussi et d’une grande profondeur et puissance.

J’avais apporté avec moi un Château Gazin Pomerol 1959 que j’avais choisi pour son niveau dans le goulot. Quelle ne fut pas ma surprise en ouvrant la bouteille avant la dégustation des vins de la Romanée Conti, que de lire sur le bouchon : rebouché en 1998. Au moment de le boire, un léger goût de bouchon est apparu et il est évident pour moi que ce goût de bouchon est apparu au rebouchage et non à la mise en bouteille initiale. Cela me conforte dans l’idée qu’il ne faut jamais acheter de vins rebouchonnés, mais hélas aucune mention n’existait sur la bouteille.

Je n’avais pas pu assister à la dégustation Romanée Conti de l’année dernière. Il ne faut surtout pas que je rate celle de l’an prochain avec les vins sublimes de 2022, mais pour l’instant, je me réjouis d’avoir participé à cette dégustation de légende.

Magnifique dégustation chez Krug à Reims mercredi, 11 décembre 2024

Quelques amateurs de vins et moi-même sommes reçus dans le « maison de famille » de la maison Krug à Reims. Nous sommes un petit groupe de six ou sept personnes. Après un café matinal, nous allons visiter les caves de la maison Krug ainsi que l’œnothèque de vieux vins que l’on ne peut voir qu’à travers des grilles qui ne s’ouvriront pas pour nous, sécurité oblige.

Dans la belle salle de dégustation nous allons goûter huit années du Krug millésimé en même temps que le Krug Grande Cuvée qui est mis à disposition des amateurs lors de la même année. J’ai pris des notes à la volée et sans mise en récit. Je les retranscris telles quelles.

Champagne Krug Grande Cuvée 172ème édition : nez très agréable, finale un peu rêche liée à la jeunesse. Vin prometteur.

Les vins vont venir maintenant par paires, avec le millésimé en premier et le Grande Cuvée distribué la même année à sa suite.

Champagne Krug 2011 : nez très fin, belle finesse et vivacité, mais jeune. Assez gourmand.

Champagne Krug Grande Cuvée 167ème édition : nez plus riche. Le vin est plus riche et sympathique. Beau final. Il est à noter que ce champagne comporte des vins de réserve allant jusqu’à 1995, ce qui explique que dans chaque paire, le Grande Cuvée a plus de maturité.

Champagne Krug 2008 : couleur très claire. Belle attaque. Puissant et gourmand.

Champagne Krug Grande Cuvée 164ème édition : nez puissant et joyeux. Vin généreux et de belle fluidité.

Champagne Krug 2006 : un peu strict et réservé au moment où il est servi.

Champagne Krug Grande Cuvée 162ème édition : magnifique équilibre. Vin gourmand.

Champagne Krug 2004 : très joli nez et élégant. Vin direct et franc. Grand vin.

Champagne Krug Grande Cuvée 160ème édition : nez riche, vin généreux et bien construit. La gourmandise est là.

Champagne Krug 2003 : assez amer et devient plus civilisé. Devient plus élégant et subtil.

Champagne Krug Grande Cuvée 159ème édition : belle fraîcheur, élégant et subtil.

Champagne Krug 2002 : solide et puissant. N’a pas la longueur du 2004.

Champagne Krug Grande Cuvée 158ème édition : bien équilibré et gourmand.

Champagne Krug 2000 : beau et gourmand.

Champagne Krug Grande Cuvée 156ème édition : nez superbe. Vin généreux, puissant et long.

Champagne Krug 1998 : nez superbe, belle expression de chardonnay. Vin fluide, agréable, de belle fraîcheur. Grand vin très jeune, c’est mon préféré des millésimés.

Champagne Krug Grande Cuvée 154ème édition : fabuleux et gourmand. Alors qu’il est grand, je trouve le millésimé presque plus grand.

Les 17 vins que nous avons dégustés sont manifestement des vins racés et nobles. On est dans l’aristocratie du champagne. Les Grande Cuvée sont plus complexes et plus riches que les millésimés, et le temps joue un rôle crucial. Plus une Grande Cuvée est ancienne et plus elle est riche et délicieuse.

Les millésimés sont plus différents les uns des autres avec de belles personnalités, le 2003 étant très différent du 2008 par exemple.

Nous passons à table et le repas a été conçu par Arnault Lallement, le chef trois étoiles de l’Assiette Champenoise et grand ambassadeur de Krug. Le thème du moment est : un plat une saveur, pour accompagner les champagnes.

Justin, grand amateur, a apporté un Mesnil Nature Vin Nature de la Champagne, vin de raisins blancs Julien Tarin années 60. Ce vin tranquille de l’ancien propriétaire du Clos du Mesnil m’émeut au plus haut point car il est sauvage et fabuleux. Il est tellement hors norme que je suis ému. Il a un nez de framboise.

Le Champagne Krug Clos du Mesnil 1998 fait très jeune avec une bulle forte. Il est tranchant, pointu et il est très grand. Je l’aime beaucoup.

Mais le Champagne Krug Clos d’Ambonnay 1998 est un géant. Il a la puissance du pinot noir dans une expression d’une noble infinie et un fruit totalement bluffant. Quel grand vin.

Le Champagne Krug rosé 22ème édition magnum est fait de vins de 2010 et de vins plus vieux. Il est élégant et fluide.

Mes notes s’arrêtent là car arrivent deux vins gigantesques. Le premier est le Champagne Krug Grande Cuvée étiquette olive (qui est la première) que j’ai apporté. A l’ouverture, le vin a fait un joli pschitt. Le bouchon portant un numéro 38 la maison Krug a put retrouver qu’il s’agit de la 140ème édition issu de la vendange 1984 et qui a reçu son bouchon en 1988. Ce vin a une rondeur extrême et il montre à quel point le temps forge les grands vins.

En même temps est servi le Champagne Krug Collection 1981 d’une richesse gustative infinie. Comment est-il possible que ce vin soit aussi puissant. C’est une bombe de grandeur et de bonheur.

De ce repas je mets en premier le Collection 1981 pour une maturité exceptionnelle, en deuxième le Vin Nature de Julien Tarin car j’ai eu une émotion extrême devant un vin qui n’existera plus jamais, en troisième mon apport, le Grande Cuvée 140ème édition qui est la synthèse de tout ce que la Grande Cuvée peut offrir avec l’âge et en quatrième l’Ambonnay 1998.

Eric Lebel qui a été depuis 1998 le chef de cave a animé cette dégustation avec compétence et une grande générosité. La cuisine a été sublime et l’accueil de toute l’équipe de Krug a été chaleureux et « familial », même si Olivier Krug nous a manqué. Ce fut un grand moment qu’aurait aimé Joseph Krug fondateur génial de cette grande maison de champagne.

Grand Tasting de Bettane & Desseauve dimanche, 1 décembre 2024

Le Grand Tasting de Bettane & Desseauve est le plus grand événement annuel pour les vins de qualité. Cette année est la 19ème édition sous ce nom, mais le Grand Tasting est en continuité avec le Salon des Grands Vins qui a existé plus d’une décennie auparavant.

C’est le regretté Nicolas de Rabaudy qui m’a introduit au Salon des Grands Vins puis au Grand Tasting et j’ai eu la chance de pouvoir animer certaines dégustations ou simplement y assister. C’est amusant de remarquer l’influence d’Instagram où je jouis de plus de 94.000 abonnés car je suis souvent reconnu et certaines personnes me demandent même de faire des selfies avec moi. Dans tous les cas les contacts sont chaleureux.

Je vais à la séance dont le titre est « assemblage et millésime : l’art du champagne selon Krug ». Cette dégustation est animée par Julie Cavil, chef de cave, qui avait reçu mes conscrits et moi à Reims pour une dégustation et un dîner d’une grande émotion. C’est un souvenir indélébile.

Julie Cavil va commenter les vins qui ont été mis sur le marché en 2011.

Le Champagne Krug 2004 a un nez noble et une bouche de grande tension. Il est vif. Il est d’une année de grande production qui vieillit bien. La maison Krug aime à définir un vin par des mots. Le 2004 est « Fraîcheur lumineuse ». Il est ciselé, de belle salinité, très pointu et de structure précise.

Le Champagne Krug 2006 a un nez beaucoup plus doux. Le vin est beaucoup plus souple et calme. Le nom qui lui est donné est « Gourmandise capricieuse ». Il est rond et tout en douceur.

Le Champagne Krug 2011 a un nez plus marin et minéral, avec une douceur parfumée. Il est très fluide. Il est baptisé « Rondeur ciselée » mais je ne ressens pas la rondeur. Il est plus en fluidité et douceur, mais la rondeur apparaît maintenant, avec des épices exotiques.

J’ai noté en une synthèse courte : 2004 le dynamique, 2006 pour jouir de l’instant et 2011 le consensuel.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 167ème édition a été mis sur le marché en 2011. C’est le désir de Joseph Krug, fondateur du domaine que de faire des vins d’assemblage. Il y a dans ce vin 13 années de 2011 à 1995 et 191 vins différents. La magie de Krug est d’en faire une synthèse.

Ce champagne est beaucoup plus complet – à mon goût – que les millésimés. C’est un vin complet, parfait et gourmand.

Plus tard, me promenant d’un stand à l’autre, j’ai retrouvé Julie Cavil et je lui ai dit que c’est la première fois que j’ai pu mesurer à quel point la Grande Cuvée est plus complexe que les millésimés. J’ai pu voir à quel point elle en était heureuse.

Une autre « master class » est ainsi présentée : « la maison Laurent-Perrier à l’avant-garde de la Champagne ». Elle est présentée par Michel Fauconnet, le chef de cave qui a commencé à travailler au domaine en 1973, ce qui lui donne une expérience et une vision uniques.

Il rappelle que Bernard de Nonancourt a repris Laurent-Perrier en 1948 et a défini des objectifs de fraîcheur, d’élégance et de support des accords mets et vins. Le chardonnay a été choisi pour sa fraîcheur sa finesse et son élégance. Le pinot noir apporte une aromatique unique.

Michel présente le Champagne Laurent-Perrier Cuvée Héritage qui est un assemblage de vins de réserve et seulement d’eux. Il y a 250 éléments d’assemblage sur 7 à 8 millésimes. Le nez est très doux et en bouche il y a fraîcheur et élégance avec des notes d’agrumes. Ce vin de 55% chardonnay et 45% pinot noir est d’une belle complexité, fin, gourmand, marqué par la craie. Les années sont 2014, 2016, 2018 et 2019.

Le Champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle Itération n° 26 est beaucoup plus large, solaire et éclatant. Il est fait de trois millésimes : 10% de 2007, 25% de 2008 et 65% de 2012. C’est un vin qui a beaucoup de caractère, vin parfait, porteur de bonheur avec 60% de chardonnay. Il est dosé à 6 grammes et est vendu depuis le début 2024.

Le Champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle Itération n° 25 est fait de trois millésimes, 2006, 2007 et 2008. Il est gourmand et beaucoup plus large que l’itération n° 26. Il est plus soyeux en bouche. Il a été dégorgé il y a 24 mois.

Le Champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle Itération n° 23 est présenté en magnum. Quelle fraîcheur, quelle élégance ! Il est onctueux et soyeux. Il est fait de 2002, 2004 et 2006, dont 20% de 2002. Il est noble, gourmand et gastronomique. Quelle belle cuvée !

Le Champagne Laurent Perrier Alexandra 2012 est un rosé de macération. Le nez est assez discret. Le goût est imprégnant, profond et gourmand. Il a une belle complexité et une belle vigueur mais je le trouve encore trop jeune.

Le Champagne Laurent Perrier Alexandra 2004 a lui aussi un nez discret. Il est gourmand et rond. Il a un charme aérien. Les yeux bandés, j’aurais du mal à dire que c’est un rosé, tant il a une personnalité très particulière et spécifique.

Lorsque j’ai quitté la salle de dégustation, je me suis dit : « mon Dieu, pourquoi ne bois-je pas plus de Cuvée Grand Siècle ? ». Il va falloir arranger cela.

Le point culminant du Grand Tasting est la Master Class « Le Génie du Vin », présentée par Michel Bettane et Thierry Desseauve et bien sûr les vignerons qui ont fait les vins que nous buvons.

Le couple Bettane et Desseauve est amusant à voir, mais avec respect car ce sont deux personnes dont l’influence est colossale dans le monde du vin et des amateurs. Thierry est souriant, jovial, plein d’humour et ambassadeur des vignerons. Michel est celui qui sait tout, incomparable de connaissance et qui souvent sait mieux que les vignerons eux-mêmes. La façon dont ils animent ces présentations est inimitable.

Voici mes notes prises à la volée. Si un mot est utilisé deux fois, c’est parce que cette qualité du vin me semble importante.

Jean Garandeau présente le Champagne Jacquesson Aÿ Grand Cru Vauzelle Terme 2013. Il dit que 2013 est un très beau millésime en Champagne. Le domaine appartient à Artémis, société du groupe François Pinault. Le champagne a une belle couleur, un nez droit et strict et une bouche très agréable et gourmande. Le vin est vraiment très agréable, à l’acidité salivante. La parcelle Vauzelle Terme est microscopique, avec un maximum de trois mille bouteilles, 100% en pinot noir. Le champagne dégorgé en 2022 à dosage zéro est très noble.

Thibaut Jacquet présente le Corton-Charlemagne Bonneau du Martray 2022 dont le propriétaire nouveau possède – entre autres – le club de football Arsenal et aime le sport. Le vin a une belle couleur dorée. Le nez est d’une force extrême, intense. Le vin est très fluide et sera sur le marché en fin 2025. Marqué par la droiture et la clarté, ce vin superbe sera très grand. C’est de l’eau de roche dit Michel. Ce vin jeune mais brillant, très tendu est de grande pureté.

Jacques Devauges présente le Clos des Lambrays Domaine des Lambrays 2022. Jacques a fait le vin du Clos de Tart et maintenant ce Clos des Lambrays qui appartient au groupe de Bernard Arnault. La couleur est discrètement violette. Le nez est fin et délicat. La bouche est gourmande et généreuse. C’est très bon, très gourmand. C’est bluffant. Je note : pureté, perfection, finesse et délicatesse.

Davide Rosso devait présenter le Barolo Giovanni Rosso Ester Canale 2020 mais il n’a pas pu venir. C’est le spécialiste des vins italiens de l’équipe Bettane & Desseauve qui le présente. Ce vin n’est produit qu’à moins de mille bouteilles. La couleur est claire. Le nez ne me plait pas parce que je le trouve trop acide. La bouche est beaucoup plus sympathique. Le finale est un peu rêche et un peu amer. Est-ce un problème de bouteille, je ne sais pas.

Jean Luc Chapel présente l’Hermitage La Chapelle Domaine de la Chapelle 2016. Il est dans la maison depuis des décennies puisqu’il a connu deux générations de Jaboulet. Il dit que 2016 est un millésime de pureté et de fraîcheur. Le premier millésime de cette cuvée est de 1905.

Le vin a une couleur très foncée. Le nez est charmant et charmeur, herbacé. La bouche est un peu trop jeune pour moi. Il a une grande persistance aromatique. Il faut attendre un peu pour que la bouche devienne plus gourmande.

Alexandre Thienpont présente le Vieux Château Certan Pomerol 2010. Sa famille est propriétaire depuis plus d’un siècle. Le domaine fait 14 hectares. Le vin a une couleur assez sombre. Le nez est très noble et très grand. Il est fantastique et gourmand, très grand. Je note : ça c’est du vin gourmand. Il est élégant. Top de top.

Olivier Bernard présente Domaine de Chevalier Pessac-Léognan 2005. Avant cela il fait un grand discours sur la biodynamie et ses contraintes. Les pluies invraisemblables de 2024 ont obligé à traiter le mildiou. Olivier justifie son attitude et parle du futur qui le pousse à remettre en cause, non pas pour maintenant mais pour dans vingt-cinq ans, la densité de plantation dans les vignes.

Le vin a une belle couleur foncée. Le nez est très élégant et pur. La bouche est fraîche, légère et élégante ce qui peut se combiner au fait qu’il est gourmand. C’est un vin si bon à boire. Il a fraîcheur et équilibre.

Jérôme Moitry présente Château Climens Barsac 2005 qu’il a racheté récemment avec son frère. Le vin est 100% en sémillon. La couleur est d’un jaune jeune. Le nez est très épicé, riche mais pas puissant. Quelle fraîcheur ! le finale qu’on croirait de caramel est riche. C’est un bonbon sucré. Il est magnifique et gourmand. Il est presque mentholé et donne envie d’en reprendre. Il est frais et très puissant, très atypique. L’équipe de vinification l’appelle « le monstre ».

Ce qui est passionnant dans cette Master Class, c’est la diversité des régions, des cépages et des âges. Cela m’a permis de boire des 2022 délicieux alors que jamais je ne me harderais à boire des vins si jeunes.

Les vignerons sont passionnants et tellement engagés dans une démarche de perfection. C’est impressionnant. Plusieurs des présents m’ont invité à les visiter. Cette Master Class m’y encourage.

Il y a eu un monde fou dans le Carrousel du Louvre pour goûter des vins merveilleux.

Il fut un temps où les propriétaires des vignobles venaient eux-mêmes faire goûter leurs vins. Maintenant ce sont le plus souvent des équipes commerciales. Mais quand on voit Jean-Pierre Perrin de Beaucastel ou Jean-Michel Deiss du domaine Marcel Deiss, ça fait un infini plaisir.

Le Grand Tasting est définitivement le rendez-vous du vin que l’on ne peut pas manquer.

Dîner au restaurant de Lauzun et verticale de 27 mas de Daumas Gassac vendredi, 21 juin 2024

Probablement en 2003 j’ai rencontré, lors d’un dîner autour du vin, Aimé Guibert le créateur du Mas de Daumas Gassac qui avec l’appui de l’œnologue Emile Peynaud a eu l’idée de faire du vin en utilisant le cabernet-sauvignon, ce que personne n’avait fait avant lui. Nous avions bavardé et une amitié épistolaire est née car Aimé, qui lisait chacun de mes bulletins, les commentait dans des lettres dithyrambiques, m’inondant de compliments que je ne méritais sans doute pas. J’en cite un, juste pour que l’on situe : « quel talent d’écrivain, comme un mélange de Colette et de Dumas. Vos phrases sautent au visage ou à la bouche, mais d’abord à l’esprit ».

C’est cette amitié sans doute qui a fait que je suis invité, avec la fine fleur des experts en vins et journalistes du vin à une dégustation de 27 millésimes du Mas de Daumas Gassac à Aniane.

Ayant ouvert il y a plus de dix ans toutes les bouteilles d’une mythique dégustation de 56 millésimes du Clos de Tart, j’ai proposé de participer à l’ouverture des bouteilles, mais en fait Roman Guibert, l’un des quatre enfants d’Aimé qui travaillent au domaine, a préféré utiliser sa méthode et j’ai compris lors de l’événement les raisons de ce choix. Les bouteilles sont ouvertes la veille à partir de 17 heures et rebouchées avec un bouchon spécial et un Coravin qui permet de faire le vide dans le goulot. Les bouteilles sont rouvertes le jour de la dégustation à 8 heures, versées dans les verres que l’on recouvre d’une coiffe en carton. La dégustation démarre à 9 heures.

Je suis invité à assister à l’ouverture des vins et à valider des bouteilles, soit en sentant les vins, soit en goûtant s’il y a un doute. Compte tenu du nombre de dégustateurs il y aura trois bouteilles par millésime, ce qui veut dire que les résultats de la dégustation pourront varier. Mais on saura à qui chaque bouteille est attribuée ce qui permettra de recouper les avis. Une quatrième bouteille de chaque millésime sera en réserve, non ouverte, pour le cas où.

Il y a cinq ou six ouvreurs et cela va très vite. Les millésimes après 1991 sont ouverts au tirebouchon classique et les millésimes de 1991 à 1978, date du premier millésime du domaine sont ouverts soit au bilame soit au Durand. Je demande de pouvoir faire une expérience, celle d’ouvrir l’un des vins selon ma méthode et de comparer le lendemain entre la bouteille officielle et celle que j’ai ouverte. Ce sera un vin de 1986.

Avec Roman nous nous rendons à l’hôtel Restaurant de Lauzun au prieuré Saint-Jean de Bébian à Pézenas, tenu par le chef étoilé Matthieu de Lauzun. Comme nous sommes arrivés en avance, nous buvons un Champagne Larmandier-Bernier Vieille Vigne du Levant Grand Cru 2008. C’est un blanc de blancs extra brut. Il a une personnalité impressionnante et une longueur quasi infinie. C’est un grand blanc de blancs très expressif.

Les invités arrivent et notre table est très cosmopolite. Il y a des journalistes connus qui écrivent sur le vin dans les revues les plus lues, une critique du vin anglaise, une Master of Wine chinoise, un français Master of Wine qui officie en Chine, un autre Master of Wine allemand, d’autres professionnels anglais, un homme du vin de Nouvelle-Zélande et un Instagrammeur français très actif. Ils sont tous experts en vins.

Le menu préparé pour les vins est : saumon de fontaine de la ferme aquacole de Condax, concombre, cacahuète et pulpe d’échalote confite / cabillaud de ligne de Bretagne sur l’idée d’une tielle, safran tomate et poulpe en beignet / le faux-filet de pure race Aubrac grillé, gâteau d’aubergine et condiment menthe, feta, crispy tandoori. Le jus simple / pêches et brugnons d’ici comme une tarte, amandes amères et financier à la pâte d’amande.

Le chef a du talent et de beaux produits. On sent que les plats ont été étudiés pour se marier avec les vins, mais bien souvent une palette d’ingrédients trop vaste rend l’accord moins lisible, sauf pour le dessert qui épouse les complexités du vin.

Nous commençons par un Mas de Daumas Gassac rosé Frizant 2022 qui est pétillant et de belle fraîcheur, un agréable début de repas. Le service des vins est fait par Matthieu Baas, sommelier très compétent.

Le Mas de Daumas Gassac blanc 2021 est d’une grande richesse et d’un équilibre parfait. En le buvant, j’ai pensé que si ce vin était présenté sur les tables des restaurants de la Côte d’Azur il ferait un tabac, car à cet âge, il a une maturité qui surpasse tous les blancs de Côtes de Provence. Je m’en suis ouvert à Roman qui m’a dit qu’il aurait du mal à fournir les quantités nécessaires pour s’imposer dans cette région. Le saumon est superbe et colle bien au vin blanc

Le Mas de Daumas Gassac blanc 2004 se marie divinement au cabillaud parfait. Alors que le 2004 a 20 ans quand le 2021 a 2 ans, je trouve des maturités très proches, vins solides et riches. Les deux sont excellents, l’accomplissement du 2021 étant étonnante.

L’Aubrac est brillant et le Mas de Daumas Gassac rouge Cuvée Emile Peynaud 2015 est éblouissant. Quelle richesse. L’étiquette indique que ce vin est du cabernet-sauvignon de la parcelle la plus pauvre du Mas de Daumas Gassac, la vigne de Peyrafioc, en hommage à Emile Peynaud. Une fois de plus je suis enthousiaste pour la sérénité et l’équilibre de ce vin riche et gourmand. A ce stade, je n’ai que des avis plus que positifs.

Le Mas de Daumas Gassac vin de Laurence 2021 est un de ces vins de liqueur aux vendanges en surmaturité que les vignerons aiment à ajouter à leur gamme de vins. Il est charmant, aimable, combinant amertumes et douceurs, et se marie totalement aux amers et douceurs du dessert.

Après une nuit dans un hôtel de Pézenas, nous nous rendons au Mas de Daumas Gassac pour la dégustation verticale de 27 millésimes des rouges du domaine, depuis le premier vin de 1978. La préparation est impressionnante, chacun ayant 27 verres devant lui, posés sur des ronds dessinés à la dimension des pieds de verre, avec le numéro du millésime inscrit devant le verre, et un chapeau de carton couvrant les verres. C’est une très belle organisation.

L’un des fils Guibert explique qu’une fois tous les dix ans le Mas de Daumas Gassac veut vérifier où il en est de sa démarche en faisant goûter les vins rouges par des experts. C’est une remise en question. Plusieurs experts ont assisté à la précédente verticale d’il y a dix ans et certains ont fait plus d’une verticale. Nous avons deux heures pour jauger ces vins et fournir en fin de session les cinq préférés.

Les années goûtées sont :

22 21 20 18 16 15 12 11 10 09 08 07 05 03 01 98 97 95 94 91 88 86 85 84 82 81 78.

J’ai bu les vins du plus jeune au plus ancien.

Ma façon de juger est très différente de celle des experts comme je le constaterai en écoutant leurs explications très sérieuses, documentées et compétentes. J’ai personnellement analysé en fonction de cette question : « aimerais-je boire ce vin maintenant ? ». C’est donc une approche très différente puisque les experts jugent sur le potentiel du vin quand je regarde ce que le vin m’offre à l’instant. De ce fait, comme il est arrivé lorsque je passais les examens du baccalauréat et les concours des grandes écoles, j’ai remis ma copie le premier. Ce n’est pas un signe de compétence évidemment.

D’une façon générale j’ai trouvé que l’effet d’épanouissement d’un vin par l’âge joue très peu. Le vin prend très vite sa structure et la garde au fil des années. La solidité est là très vite, comme j’ai pu le constater au dîner d’hier. Ma réponse à la question « comment qualifiez-vous ces vins ? » a été : « vins de caractère, solides, très droits, vins de gastronomie ». Je pense que la bonification par l’âge arrivera plus tard, car les vins, même le 1978 sont encore dans une belle éclosion.

J’ai fait un premier tri de ceux que je préfère : il s’agit de 16 12 09 03 94 91 86 85 84 82.

Voici mes commentaires sur les cinq premiers de mon vote, dans l’ordre :

1985 : nez intense, très beau vin qui a tout pour lui. Large, équilibré, grand. Très grand équilibre.

1982 : attaque très plaisante, vin agréable et joyeux. Joli nez élégant. Très agréable et accompli

1991 : nez assez riche, belle fluidité, élégant. Bouche équilibrée. Vin très agréable, plus original que les précédents

1994 : nez beaucoup plus plaisant, vin accueillant, agréable et d’un beau final. Vin différent, pas typique et séduisant peut-être par ses petits défauts

2003 : nez très vert. Belle fluidité, belle personnalité. Beau final.

Lorsque j’ai goûté le 1986, j’ai demandé qu’on m’apporte celui que j’avais ouvert moi-même et laissé dehors sans rebouchage. Il est beaucoup plus ouvert et large que le 1986 officiel et j’ai alors compris pourquoi Roman Guibert tenait à sa méthode, parce que les experts jugent la structure et l’avenir de chaque vin et non pas sa prestation du moment. Ma méthode ne correspond pas à l’objectif du jour.

Les nombreux experts ont présenté leurs visions des vins et ont été extrêmement laudatifs. La singularité du Mas de Daumas Gassac impressionne beaucoup d’entre eux.

Chacun a donné ses préférés, je pense que plus d’une vingtaine des vins figurent dans les votes très différents. Les années qui sont présentes le plus souvent dans les votes sont 1982, 1988, 1986, 2011, 2012, 2020. Je recevrai le résultat final dans quelques jours.

J’ai eu la chance de bavarder avec la femme d’Aimé, mère de cinq garçons dont quatre travaillent au domaine. Un repas était prévu ainsi qu’une visite des vignes. J’ai présenté mes excuses car mon fils venait nous rendre visite dans ma maison du sud. Je me devais de le rejoindre.

Accueil charmant, organisation parfaite de la dégustation, grands vins. Tout amateur se doit d’inclure Mas de Daumas Gassac dans sa sélection de grands vins.

Dégustation de Trévallon avec des passionnés dimanche, 28 janvier 2024

Un amateur de vin, Arnaud, qui me suit sur Instagram, m’informe qu’une dégustation aura lieu non loin d’Avignon lors d’un déjeuner autour des vins du domaine de Trévallon, avec les héritiers d’Eloi Dürrbach et peut-être Emmanuel Reynaud. Après avoir échangé des mails, je donne mon accord. Pour me rendre au lieu du rendez-vous, je peux constater qu’un grand nombre d’agriculteurs ont bloqué une sortie d’autoroute, et quand j’arrive à l’adresse indiquée, je me sens perdu car je ne trouve pas le restaurant Le 7 dont le chef est Laurent Guillaumond. Fort heureusement des participants du déjeuner viennent à mon secours.

Le restaurant est haut perché et de sa terrasse on voit les magnifiques structures de pierre d’Avignon. Nous sommes reçus par Marion, aimable et souriante.

Avant que tous les participants ne soient arrivés j’ai le temps d’ouvrir mes deux apports, un Château Chalon Clément 1906 et un vin de Chypre 1870.

Je suis surpris de voir des participants aussi jeunes car je pourrais être le grand-père de plusieurs d’entre eux, mais je constaterai au fil du repas qu’il s’agit d’amateurs particulièrement connaisseurs de vins. Nous sommes quatorze dont dix seulement sont des buveurs. Isoline et Antoine Dürrbach nous font l’honneur de participer à la dégustation des vins de leur domaine de Trévallon.

L’ordre de service des vins se met en place et nous allons commencer par un champagne jeune dont on me dit que le jeune viticulteur est devenu en un temps très court une vedette de la Champagne. Nous buvons un Champagne Pascal Hénin l’Appel de la Forêt non millésimé à majorité de pinot noir et j’avoue que je reste sur ma faim, car ce champagne est très court et son fruit manque de cohésion. On peut supposer que c’est cette bouteille qui n’est pas au rendez-vous.

On verra tout au long du repas que les premiers contacts avec des vins ne sont pas définitifs et que la première impression peut ne pas représenter le vin lorsqu’il est épanoui dans le verre.

L’apéritif consiste en un tartare d’huître de Camargue, friture de jols, saumon gravlax, crème acidulée aux œufs de truite. Il est accompagné de deux champagnes porteurs d’un label du Club des Viticulteurs Champenois (Spécial Club).

Le Champagne Pierre Gimonnet 1982 marque un tel saut gustatif par rapport au champagne précédent qu’on prend conscience de la richesse d’un vin de plus de quarante ans. Le parfum est magique et le champagne est généreux et accompli. Un bonheur.

Le Champagne Edmond Bonville Blanc de Blancs 1979 a un nez moins joyeux et une structure plus tranchante. Ce champagne est strict et émeut beaucoup moins que le 1982, mais il aurait été plus apprécié s’il n’y avait pas le 1982 à côté de lui.

Le menu préparé par le chef est : carpaccio de Saint-Jacques et truffe / magrets de sarcelle de Camargue rôtis, purée de panais et épinards frais, petit jus / cromesquis d’agneau sur houmous en une bouchée / palombe confite aux lentilles vertes du Puy / fromages en deux services / salade d’orange et clémentine corse, sorbet orange sanguine légèrement arrosé.

Je suis allé de surprise en surprise tant la qualité des produits est parfaite et la « façon » intelligente et cohérente avec les vins. Le chef a fait un repas de très haute qualité.

Quand je porte mon nez au Champagne Selosse Lieux-Dits Les Carelles Blanc de Blancs d’une base de vins de 2016 et dégorgé en 2023, j’ai l’impression que je m’envole sur un nuage de félicité. Ce parfum est diabolique. En bouche c’est un champagne solide, percutant, de haute intensité. Mes voisins de table – qui savent tout – me disent que Les Carelles est le plus grand des champagnes parcellaires de Selosse.

Nous passons maintenant aux vins du domaine de Trévallon qui sont l’objet du repas. Plusieurs bouteilles du même millésime ont été servies ce qui fait que les impressions des uns et des autres peuvent avoir divergé.

Apparaissent le Trévallon blanc 1998 et le Trévallon blanc 1996. Les couleurs des deux vins sont d’un bel or. Le 1998 est délicat, subtil, émouvant alors que le 1996 est plus solide, conquérant et large. Autour de moi et même Antoine Dürrbach préfèrent le 1996 mais je préfère le 1998 gracieux dans sa délicatesse alors que la puissance du 1996 ne me semble pas avoir atteint la précision et la maturité que l’on attendrait. On aurait beaucoup de mal à l’aveugle à trouver la région de ces deux vins délicieux.

Je suis assez déçu par le Trévallon rouge 1985 et le Trévallon rouge 1988 car ils me semblent plus vieux qu’ils ne devraient et souffrent, même si c’est légèrement, de petits problèmes de bouchon. Mais j’ai pu remarquer qu’avec le temps, le 1988 a retrouvé une partie de sa grandeur.

Un phénomène similaire va se produire avec le tant attendu Trévallon rouge 2001. Il apparaît timide, fade, un peu coincé, mais il va prendre une ampleur telle qu’il va progressivement corriger ses incertitudes.

Les choses vont devenir infiniment plus positives avec le Trévallon rouge 1995 et le Trévallon rouge 1990. Le 1995 est grand et le 1990 est une merveille. On a avec ce 1990 tout ce qui a fait la réputation et la gloire de ce vin exceptionnel. Tout y est, le parfum enivrant de subtilité et la force de caractère d’un vin inébranlable. Un régal.

Quand on sent le 1990 et quand on sent ensuite la palombe à la divine cuisson, on ne sait pas qui est le vin et qui est l’oiseau. Leur symbiose est magistrale.

Pour les fromages sont servis le Trévallon blanc 2014 et le Trévallon blanc 2007. Après ces belles et nombreuses séries, j’ai moins d’attention pour ces deux blancs car le souvenir des 1998 et 1996 si brillants m’empêche d’être passionné par ces deux blancs jeunes.

Ceux qui avaient vanté les mérites du jeune vigneron champenois essaient de m’intéresser au Chenin Richard Leroy Les Noëls de Montberault 2017 et je suis assez dubitatif. Je vois mal qu’on puisse aduler ce vin. Mais je suis peut-être trop critique.

On sert maintenant sur un fromage adapté (eh oui, un camembert affiné au calvados peut ne pas être un sacrilège) le Château Chalon Clément 1906 dont la bouteille me semble beaucoup plus vieille et d’un format de 75 centilitres voire plus. On pourrait dire que ce vin est un peu trop discret et peut-être un peu trop aqueux, mais si on cherche à lire ses complexités, on a un vin très attachant. Je n’aurais probablement pas dit Château Chalon à l’aveugle, mais c’est un témoignage intéressant aux complexités séduisantes.

Le Vouvray Le Haut Lieu Moelleux Huet 1990 est exactement ce qu’on peut attendre de ce vin joyeux, équilibré, généreux, de pur plaisir. Sa fraîcheur est magique.

Le Château de Tastes Sainte Croix du Mont 1924 a été offert par un participant qui voulait que nous buvions un vin de juste cent ans. Il est d’un niveau magnifique, d’une couleur presque noire. Son parfum est dense et en bouche, on le situerait au niveau de grands sauternes. Il est parfait comme eux et irréprochable comme eux.

Le Vin de Chypre 1870 avait à l’ouverture un nez moins puissant que celui du château de Tastes mais plus profond. Ce vin où l’on peut trouver du café, du balsamique et mille autres évocations est intense, riche, tout en gardant une fraîcheur extrême. Il a une longueur infinie. J’avais demandé à Marion des pastilles de chocolat qui ont accompagné le vin comme il convient, alors que le dessert aux agrumes était évidemment exclu.

Le programme était déraisonnable, mais nous avons réussi à tout boire grâce à la cuisine idéalement appropriée. J’ai été impressionné par la culture de ces amateurs fous de toutes régions qui sont venus pour cet événement, certains d’entre eux poursuivant le soir avec un dîner à l’Oustau de Baumanière. Passion, quand tu nous tiens…

Il est difficile de classer des vins aussi disparates mais je choisirai : 1 – Selosse, 2 – Trévallon 1990, 3 – Chypre 1870 et peut-être en quatrième soit le vin de 1924 soit le Trévallon blanc 1998, soit le champagne de 1982. Il y a eu tant de grands vins.

Antoine et Isoline Dürrbach ont su apporter tout au long du repas des anecdotes et les préférences de leur père. Le chef a fait un repas de haut niveau. L’ambiance joyeuse et décontractée a fait de ce repas un événement mémorable. Merci Arnaud de l’avoir organisé avec ces généreux passionnés.

Penfolds Grange à Miami vendredi, 15 décembre 2023

Dans un beau restaurant Doma à la cuisine italienne nous buvons un Penfolds Grange Bin 95 2003 apporté par mon fils. J’adore ce vin comme j’adore Vega Sicila Unico, car les deux combinent puissance, fluidité et charme, avec un finale mentholé. C’est le point final de ce beau séjour américain.

Déjeuner au siège des champagnes Salon et Delamotte jeudi, 30 novembre 2023

Didier Depond, président des champagnes Salon et Delamotte reçoit de temps à autre des amis amateurs de ses champagnes pour un déjeuner appelé : « entre privilégiés ». Je reconnais des participants avec qui j’ai déjà fait de belles dégustations. Nous serons nombreux car il y a quatre jeunes personnes de Chine ou du Japon et des têtes nouvelles puisque nous sommes plus nombreux que d’habitude, autour de vingt personnes.

J’avais vu sur Instagram que le compte du champagne Salon a parlé plusieurs fois du millésime 1905. Cela a attiré ma curiosité et, sans savoir si je l’ouvrirais, j’ai pris avec moi une bouteille d’alcool de 1905 sans aucune autre indication que la date.

Lorsque j’arrive au domaine, je demande à Didier à quoi correspond 1905. Il me dit que c’est le premier millésime fait par Aimé Salon. La réponse est claire et m’invite à ouvrir l’alcool 1905. Didier pense que c’est un alcool de prune. Je suis plus circonspect car je sens l’alcool mais je ne vois pas un fruit précis.

Nous allons en salle de dégustation, accueillis par un Champagne Blanc de Blancs Delamotte sans année. Ce champagne est une très belle expression précise et ciselée de ce que doit être un blanc de blancs.

Avant de passer à table Didier fait dégorger dans la cour deux magnums dont il ne donne aucune idée d’âge.

Nous passons à table. Comme chaque fois il y aura des vins à deviner. Les trois premiers champagnes sont servis dans des verres différents. Nous cherchons tous des différences et il est assez consensuel de classer le 2ème puis le 3ème et le 1er. On se torture en conjectures et nous sommes bien attrapés car les trois champagnes sont les mêmes, le Champagne Delamotte 2018. Il est délicieux dans sa jeunesse et on voit l’importance des verres dans la dégustation, puisqu’ils créent des écarts très sensibles.

Didier Depond est très fier car le millésime 2018 est le premier où il a pu inclure dans le vin les six grands crus de la Côte des Blancs, alors qu’il n’y en avait que quatre jusqu’alors.

La deuxième série d’énigmes est une comparaison de deux Delamotte 2007, le Champagne Delamotte 2007 dégorgé d’origine et le Champagne Delamotte 2007 dégorgé il y a six mois. Le dégorgé récent est tout en fraîcheur alors que le champagne initial a plus d’assise et de complexité.

Le menu conçu par un restaurateur célèbre de la Champagne est ainsi rédigé : Langoustine marinée caviar / le saumon de Normandie, mi-cuit, tiède, sauce champagne, émulsion de pomme de terre fumée et caviar / bar de ligne « ikejimé » de pêche artisanale de Vendée, fondu de fenouil et huîtres Gillardeau, sauce champagne / filet de cerf d’Alsace rôti, sauce cassis / bouillon clair de pot au feu / fromage frais et affinés / fine tarte aux pommes, glace vanille / café et mignardises.

Ce menu est raffiné et très bien exécuté. Le plat qui m’a enthousiasmé est celui du saumon.

Trois champagnes sont bus sans énigme, le Champagne Salon 2013 qui promet énormément et qui est déjà parfaitement expressif et équilibré, le Champagne Salon 2002 dégorgé ce matin dans la cour et le Champagne Salon 1996. Le 1996 est un seigneur éblouissant alors que le 2002 est beaucoup plus sentimental. Si le 1996 m’impressionne, le 2002 m’émeut.

Suivent deux vins rouges à boire à l’aveugle. Beaucoup de réponses allaient vers le bordelais. J’ai été le seul à suggérer l’Espagne pour le premier et j’ai visé juste. Le premier est un Priorat Terrasse Espagne 2007 et le second que j’avais déjà gouté est un vin argentin de 2013 qui est fait en collaboration par Didier Depond et un de ses amis présents que j’apprécie beaucoup.

Le champagne suivant est un Magnum Champagne Delamotte Collection 1983 et j’ai été le premier à donner le bon millésime (si je cite mes prouesses, c’est parce qu’il y en a peu). Ce champagne délicat est absolument charmant et montre à quel point l’âge est un facteur positif.

Nous poursuivons avec deux magnums de Champagne Delamotte Rosé base 1993 que j’adore car il explore des pistes de goûts irréels et énigmatiques. Et je suis conquis par ses subtilités joyeuses.

Le suivant est un magnum de Champagne Salon 1976 dont la couleur est assez proche de la couleur du rosé. Quel grand champagne racé et vif, d’une jeunesse que seuls les grands champagnes peuvent garder.

Sans que j’aie été prévenu huit bougies allumées arrivent devant moi. Quelle gentille attention que de fêter mes dix fois plus d’années que de bougies.

C’est alors que j’explique pourquoi j’ai apporté un alcool de 1905. En le sentant, le parfum m’indique la possibilité d’un armagnac, plus qu’une prune. Et en bouche je suis surpris par un sucre très présent. Et cela me semble une évidence : c’est un Rhum 1905 absolument splendide, d’une force qu’on n’attendrait pas de 118 ans ! Un régal rare.

Didier réussit à créer une ambiance extrêmement amicale qui aide à la dégustation. A part le Rhum sublime, mon cœur ira vers le Salon 1976 et le brillantissime rosé 1983 de Delamotte.

Quelle belle journée d’amitié !

Dégustation et dîner à la maison de famille de la maison Krug jeudi, 19 octobre 2023

Avec mon club de conscrits, nous avions longuement débattu sur la façon de célébrer nos 80 ans. Plusieurs programmes ont été envisagés et à un moment j’ai demandé à Olivier Krug s’il serait possible de dîner dans la maison familiale Krug, dont Olivier m’avait dit tant de bien. Cette maison est celle où il a passé toute sa jeunesse.

Olivier me répond qu’il ne sera pas là le jour que nous souhaitions, mais que nous serions reçus avec plaisir. J’ai fait réserver des chambres à l’Assiette Champenoise et nous avons prévu avec Arnaud Lallement de déjeuner le lendemain du dîner à la maison Krug.

Le jour dit, je me présente à l’Assiette Champenoise avec le secret espoir qu’Arnaud soit présent pour que nous bâtissions le menu du déjeuner du lendemain. Nous nous connaissons bien aussi les échanges sont immédiatement constructifs. Arnaud propose des plats, je regarde quel vin conviendrait et nous bâtissons l’ordre dans lequel les plats doivent être servis.

Plusieurs fois les ordres des plats changeront, certains plats étant remplacés par d’autres et à un moment nous estimons que le projet est cohérent.

Je regarderai le lendemain le programme des vins. C’est un plaisir de construire dans cette ambiance amicale.

Je me rends à la piscine de l’hôtel pour faire quelques longueurs. C’est reposant. A 18 heures j’ai rendez-vous avec mes amis conscrits pour que nous nous rendions à la maison familiale de Krug.

Nous sommes accueillis dans la maison familiale Krug. Cette maison de réception est tenue par une équipe qui s’occupe d’accueillir les invités et d’organiser la visite des caves, la dégustation qui est suivie par un repas. L’histoire de la maison Krug nous est expliquée clairement. Elle est passionnante. Pendant que mes amis font la visite de cave, je vais en cuisine saluer le chef Olivier Mirgalet et ouvrir le vin que j’ai apporté, un Vin Jaune d’Arbois Henri Maire 1943, de notre année de naissance.

Nous entrons dans la salle de dégustation accueillis par Julie Cavil, chef de cave de la maison Krug. Elle explique que sa vie dans le monde du vin n’est apparue que tardivement, après une carrière dans des secteurs bien différents. Elle a suivi des cours d’œnologie, elle a appris à goûter avec un succès tel qu’elle est devenue chef de cave, celle qui dirige les assemblages. Un grand mur expose des centaines de bouteilles de couleurs variées qui symbolisent l’assemblage, la fierté de la maison Krug.

Nous allons goûter quatre champagnes dont la base essentielle est le millésime 2006. Le Champagne Krug Clos du Mesnil 2006 est magnifique. Il est frais, de belle complexité. Il a beaucoup de charme et ce que je ressens, c’est sa fraîcheur raffinée.

Le Champagne Krug Clos d’Ambonnay 2006 est puissant, magique. Quelle personnalité persuasive. C’est la virilité du pinot noir avec une prestance rare.

Le Champagne Krug 2006 est le plus franc, le plus direct. Il est rond. Je l’adore car il représente l’idéal du champagne. Julie nous dit qu’en interne on nomme chaque champagne avec seulement deux mots. Le 2006 est ‘gourmandise capricieuse’ alors que le 2004 est ‘fraîcheur lumineuse’.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 162ème édition est le champagne dont la maison Krug est la plus fière, car tout est dans l’assemblage qui peut conduire à mélanger plus de 130 échantillons. Il est manifestement très complexe, mais je le trouve trop jeune, car pour moi les Grande Cuvée s’expriment mieux avec au moins dix ans de plus. Si j’ai bien compris, si on ajoute 162 à 1844 date de départ des Grande Cuvée ou Private Cuvée on obtient 2006 qui est le vin de base de cette édition. On ajoute 7 ans de mûrissement et on a 2013, date de la mise sur le marché de cette édition.

Mon classement de cette dégustation est : 1 – le 2006, 2 – Ambonnay, 3 – Clos du Mesnil, 4 – Private Cuvée. Mes amis ont mis l’Ambonnay en premier et je serais prêt à me ranger à leur choix.

Julie Cavil est passionnante et naturelle. Ce qui nous a impressionné c’est qu’elle crée une atmosphère de compréhension mutuelle et c’est très agréable.

Nous passons dans la magnifique salle à manger à la décoration raffinée. L’apéritif démarre de façon tonitruante : Champagne Krug magnum 1973. J’ai une amitié particulière pour le millésime 1973 en Champagne, au point de lui avoir consacré le dernier article que je viens de remettre à la revue Vigneron, l’une des plus belles publications pour parler du monde du vin. Ce Krug est d’une délicatesse rare, subtil, d’une longueur infinie toute en suggestion. Un régal de finesse.

Le menu, créé par Arnaud Lallement, chef de l’Assiette Champenoise et réalisé par Olivier Mirgalet est : potée champenoise / carabinero / ravioles végétales / poularde / citron.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 171ème édition est plus jeune de neuf ans que celui que nous avons bu en salle de dégustation, mais se montre plus expressif car il est face à un plat qui lui convient, la délicieuse potée.

J’aime beaucoup le Champagne Krug magnum 2003 car il a une forte personnalité. C’est un poète. Il offre des goûts hors des sentiers battus.

Le Champagne Krug Grande Cuvée 159ème édition montre une belle complexité et j’adore le Champagne Krug Rosé 27ème édition très généreux et élégant.

C’est sur la poularde qu’apparaît mon vin, le Vin Jaune d’Arbois Henri Maire 1943. Il est très brun et offre un beau parfum. On s’attendrait à un vin lourd mais en fait il est presque aérien et très long. Il cohabite très bien avec le Grande Cuvée 159ème. Il est gourmand sur la poularde.

Alors que Krug a fait de 2023 l’année du citron, je trouve que le dessert, un citron recomposé, ne trouve aucun répondant avec aucun Krug, du fait d’une acidité trop prononcée.

La vedette incontestée de ce repas, c’est le Krug 1973 fabuleusement subtil. Tout a été réuni pour nous faire plaisir. Le service impeccable, les attentions permanentes et les échanges passionnants avec Julie Cavil, hôtesse idéale de cette soirée.

Merci Olivier Krug d’avoir permis une soirée aussi généreuse et chaleureuse.


mes apports (l’Hermitage est pour demain)

la mise au point du menu de demain est faite avec Arnaud Lallement

la belle charpente de la maison Krug. Au centre du panneau au dessus de la cheminée, il y a la photo d’Arnaud Lallement, ami inconditionnel de Krug.

dans la salle de dégustation

dans la salle à manger

les vins

visite de la maison Niepoort à Porto samedi, 7 octobre 2023

(commencer la lecture trois sujets plus bas et remonter ensuite)

Le troisième jour de mon séjour à Portugal est une visite de la maison Niepoort l’une des plus prestigieuses maisons de porto. Carlos de Jesus vient me chercher à mon hôtel et étant un peu en avance nous allons regarder la ville de Porto par les fenêtres d’un salon haut perché de l’hôtel Hilton. Nous allons ensuite rencontrer Dirk Niepoort de la cinquième ou sixième génération de cette maison fondée au milieu du 19ème siècle. C’est un homme de haute taille, dynamique et entreprenant. Il a tenu à ce que sa cave reste dans l’esprit de ce que ces ancêtres ont voulu. Lorsque nous visitons sa cave aux trésors, je lui dis que bien souvent, j’ai l’impression que c’est une bouteille qui me demande de la choisir plutôt que mon choix. Il me répond qu’il a la même impression.

Il me demande ma date de naissance et après la visite de cave, nous commençons à boire un Porto Niepoort 1943. C’est à mon sens la définition archétypale du porto, tout en douceur, cohérent et riche d’émotion. Il est charme et plaisir. Dirk ouvre ensuite un porto de 1900 qui n’est pas de son domaine, vin plus sec et fluide.

En un mouvement de générosité infinie Dirk ouvre un Porto Niepoort 1863 qui a été considéré comme le plus grand du monde. En ce porto, tout est exponentiel. Il est plus frais que tout, plus vif que tout, plus expressif, plus long, plus riche. C’est la forme la plus absolue du porto. Quel aboutissement.

J’avais évoqué lors de nos discussions le 2017, que j’avais bu il y a quelque temps et qui m’avait subjugué par sa perfection et sa fraîcheur. Dirk m’a dit qu’il considère 2017 comme le millésime qu’il a le plus réussi et me propose de goûter une cuvée spéciale encore meilleure que celle que j’avais bue. Il s’agit du Porto Niepoort Bioma 2017. Il est effectivement riche et idéal pour un jeune porto, mais je pense que celui que j’avais bu il y a quelques années était plus frais et mentholé que celui-ci. Et le boire après le 1863 est difficile.

Un groupe de six personnes travaillant pour une société suisse de produits de luxe vient déjeuner sur la grande table et nous nous joignons à eux. Des huîtres et des tranches de jambon seront accompagnées d’un Vinho Branco Gonçalves Faria 2013 et d’un autre vin blanc. Les plats que l’on grignote sont délicieux mais mon esprit est encore sous le charme du porto 1863 qui m’a subjugué.

Antonio Amorim vient nous rejoindre ce qui me fait un grand plaisir. J’aurai eu la chance de rencontrer ce grand dirigeant trois jours de suite. C’est un grand privilège.

Je rejoins l’aéroport de Porto l’esprit joyeux, impressionné par la générosité et la gentillesse de toutes les personnes que j’ai rencontrées. Ces trois jours ont été très enrichissants.

Interviews sur ma collection de bouchons et dîner chez Antonio Amorim samedi, 7 octobre 2023

L’heure est venue des contacts avec des journalistes qui vont m’interviewer dans la salle où sont exposés les bouchons. Antonio Amorim est avec moi et répond lui aussi aux questions. L’ambiance est agréable et les journalistes compétents.

Je retourne à l’hôtel et à l’heure dite Carlos de Jesus me conduit dans la maison d’Antonio Amorim. Les murs extérieurs font au moins six mètre de haut. Le large portail a la même hauteur et le jardin luxuriant de plantes exotiques est d’une grande beauté. Nous arrivons au seuil d’une grande maison construite en 1605. La salle d’accueil a des azulejos très similaires à l’azulejos qui existe dans ma maison.

Antonio Amorim a invité trois des plus grands experts du porto. Un anglais expert en porto et deux propriétaires ou maîtres de chais de maisons de porto. Ce qui est fascinant c’est que dès les premiers mots, nous nous comprenons comme si nous étions amis depuis des décennies. Quel plaisir de discuter avec des experts si compétents.

La salle à manger est d’une décoration raffinée avec une table en acajou d’une grande beauté. Les fleurs et l’agencement sont d’un goût certain. Nous commençons par un Champagne Dom Ruinart 2010 dont Antonio nous dit qu’il a été gardé avec un élevage sur liège au lieu de capsule comme on le fait généralement. Il estime que si ce champagne a été désigné meilleur champagne de 2010, c’est à cause de l’élevage sur liège.

Les petits fours sont délicieux et le chef cuisinier attaché à la maison d’Antonio a un talent certain qui atteindra son point culminant avec un canard présenté sous une cloche en pâtisserie.

Le menu tel qu’il est écrit : le pétoncle poêlé aux trois caviars (jaune, noir rouge) (citron, esturgeon, tomate / soupe au melon et jambon croustillant / la salade russe aux crevettes / le canard sous une cloche de pain / deux fromages portugais et toasts, le S. Jorge – Azorès : affinage 7 mois, lait de vache et le Serra Estrela Nord : affinage 40 mois, lait de brebis / mousse au citron jaune / kaki de saison / café et chocolats.

Nous buvons deux vins blancs, un Morgado de Santa Catherina Bucelas 2003 et un autre blanc de 1995. Pour un plat de crevettes aux crèmes complexes, Antonio a prévu un Ribeiro & Ferreira Vinho Tinto 1955, croyant que j’aimais le vin rouge sur les crevettes, et je suis obligé de corriger en rappelant que j’avais parlé de langouste et non de crevettes. L’accord n’est pas là mais qu’importe, la richesse de nos discussions dépasse ce détail.

Nous avons ensuite un Vinho de Collares dont j’ai oublié l’année et un Vinho Pera-Manca Tinto 1995 et un Ferreirinha Tinto Barca Velha 1985. Ces vins pour lesquels je n’ai pas de repères montre que le vin rouge du Portugal a de grandes qualités. Celui qui me plait le plus est le 1955 qui montre que ces vins rouges vieillissent bien.

Tout dans ce repas est fluide et élégant. Vient maintenant l’heure des vins doux. Le Taylor’s Vintage Port 1994 bottled in 1996 est un pur plaisir raffiné. Quelle élégance dans cette jeunesse. C’est David, mon voisin de table qui a fait ce vin de plaisir.

Mon autre voisin de table, ancien rugbyman, n’a pas fait le Porto Van Zellers & Co 1888, mais ce sont ses ancêtres. Ce porto est d’un charme infini et d’un raffinement subtil inimitable.

J’ai apporté un Vin de Chypre 1870 pour honorer Antonio. Il est sec et profond, d’une rémanence infinie. Mais mon cœur ira vers le 1888 beaucoup plus riche et joyeux.

Nous avons bavardé jusqu’à une heure du matin. Ce fut une rencontre passionnante avec des experts du porto et une réception de haute qualité.