Archives de catégorie : vins et vignerons

Visite de deux caves londoniennes et dégustation de cognacs Martell dimanche, 26 avril 2015

Le ciel est incertain en ce samedi à Londres, mais pas suffisamment pour empêcher les rues d’être envahies par des milliers et des milliers de londoniens et de touristes. Une bonne partie des participants au dîner de vins anciens de ce jour se retrouvent à 11 heures dans les locaux du caviste le plus ancien de Londres, Berry Brothers & Rudd fondé en 1765. Les locaux sont fascinants, ayant gardé quasi intacte l’atmosphère d’il y a 250 ans. Nous parcourons les caves regorgeant de trésors et les salles de réunion, dont la grande salle Napoléon où se font de belles dégustations.

Après la visite qui fait rêver, nous allons déjeuner juste à côté au restaurant l’Avenue incroyablement bruyant dont la large majorité des clients sont des clientes attirées sans doute par le fait que le Proseco, ce pétillant italien y coule à volonté, sans limite, pour un prix fixe attractif. L’effet premier de cette offre est d’augmenter les décibels, tant le pétillant réchauffe les cœurs et les rires. La nourriture est convenable sans plus et nous réservons nos forces, car tout à l’heure et ce soir, nous serons très sollicités.

A la cave Hedonism, créé par un jeune russe aux moyens financiers qui semblent sans limite, nous somme accueillis par Alexander, un des participants du dîner, qui a organisé et nous offre une dégustation de Cognacs de la maison Martell. Il est en effet l’un des représentants du groupe Pernod Ricard en Grande-Bretagne. Nous allons goûter trois cognacs.

Le Cognac X.O. Martell a un nez très doux et suave. Ce parfum est pur et subtilement doux.

Le Cognac Cordon Bleu Martell a un nez moins doux et plus épicé mais pas beaucoup plus structuré malgré l’aura qui entoure ce cognac anniversaire.

Le Cognac Création Grand Extra Martell a un nez beaucoup plus profond et je le trouve floral.

Après l’examen des parfums vient celui des goûts. Le X.O. est étonnant car on ne l’attendrait pas à ce niveau. Il est très élégant et très pur. On sent des amandes dans le final. Le Cordon Bleu a été fait pour le trois-centième anniversaire de Martell. Les vins ont de dix à vingt-cinq ans ce qui est plus jeune que le X.O., mais les vins sont de meilleures origines. Je ressens du tabac. Il est plus long, plus profond et son final est plus grand.

Le « Création » est composé d’alcools pouvant aller jusqu’à 65 ans. C’est un cognac plus confortable, séducteur. Il est large doux, très élégant. La douceur vient de l’âge des composants. Cette douceur s’accompagne d’un peu d’amertume ce qui pourrait paraître paradoxal. Plusieurs des personnes de notre groupe préfèrent le X.O. pour sa douceur. Mon classement est : 1 – Cordon Bleu, 2 – Création Grand Extra, 3 – X.O., classement qui est le même que celui du présentateur de ces beaux cognacs.

Dans la cave Hedonism les prix sont fous, et ma collaboratrice, qui manipule fréquemment des flacons que l’on trouve dans ces rayons s’imagine veiller sur une fortune. Je calme son vertige en lui disant que les prix de cette cave sont plus de trois ou quatre fois supérieurs à une valorisation raisonnable. On est parfois au niveau de la folie pure.

Quelques photos de Berry Bros

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sur la photo ci-dessus on voit une bouteille de 1710 dont la forme est très proche de celle de 1690 que j’ai dans ma cave.

A l’Avenue, l’annonce que l’on peut boire sans limite attire la gent féminine !!!

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dégustation de cognacs Martell à Hedonism

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Dégustation de grand crus classés au Ministère des Affaires Etrangères jeudi, 23 avril 2015

Au courrier, je reçois une invitation sur un carton fort épais, émanant de trois invitants : Philippe Castéja, président du conseil des grands crus classés en 1855, Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international et Jacques Glénat sobrement appelé éditeur. L’objet est la présentation du livre « Bordeaux, les grands crus classés 1855 » à l’occasion du 160ème anniversaire de cette classification.

Le cocktail aura lieu au ministère des affaires étrangères, au quai d’Orsay. J’ai déjà été reçu à l’Elysée, à Matignon et dans des ministères mais le quai d’Orsay où je vais pour la première fois est de loin le palais le plus luxueux de tous. Dans les immenses salons de réception des tables portent alignées les bouteilles de 88 grands crus qui font l’objet du livre. Tous les vins classés du Médoc et de Sauternes sont représentés. Sur deux grandes tables, des fromages ont été apportés par trois MOF (meilleurs ouvriers de France) dont le truculent Bernard Mure-Ravaud, meilleur fromager du monde avec lequel je vivrai une complicité bien sympathique, j’y reviendrai.

Avant de déguster tout cela, il y a les speechs. D’abord celui de Jacques Glénat, l’éditeur du livre, qui fait un discours sobre et efficace, propos d’un chef d’entreprise qui va droit au but. Il y a ensuite le speech de Philippe Castéja qui comme tout président d’une institution, est très consensuel et porteur de bonnes paroles sur le rayonnement du bordeaux dans le monde. Enfin il y a le discours de ministre Laurent Fabius, très politique et très rodé, qui bien sûr agit pour le vin de bordeaux comme nul ne l’a fait avant lui. Chacun joue son rôle brillamment. Mon passé de chef d’entreprise me met plus dans le sillage du discours de l’éditeur. Il est à noter qu’à aucun moment la loi Evin n’a été évoquée, ce qui signifie que l’on était là entre amis. Lors de la réception de l’invitation, je n’aurais pas imaginé que le ministre eût été présent. C’est à mettre à l’actif des organisateurs de l’événement.

Dès que les speechs sont finis, on se précipite aux tables pour boire les vins. Je m’étais planté devant l’endroit où attendait le Château Haut-Brion 2011, merveille de subtilité et de grâce. Le Château Latour 2011 est grand et j’ai été impressionné par la puissance du Château Palmer 2009, incroyablement expansif et expressif. Le Cos d’Estournel 2008 est très élégant. Tous les vins que j’ai bus se présentaient sous un bon jour, malgré la chaleur ambiante.

Venons à la complicité. L’un des fromagers MOF présents, que je connais de longue date parle de mon amour des vins anciens à Bernard Mure-Ravaud. Il évoque son roquefort pour les sauternes et je lui dis que pour les liquoreux, je préfère de loin leur adjoindre un stilton et, quand j’en trouve, un bleu de Termignon dont je suis amoureux. Ce que je ne savais pas, c’est que Bernard est de Grenoble et achète aux seuls quatre producteurs de ce bleu confidentiel. Il me regarde, me jauge et me dit : « j’ai dans ma valise un morceau d’un bleu de Termignon exceptionnel que je dois livrer à un grand restaurant parisien célèbre. Je me ferai gronder, mais je vais vous en donner un morceau ». Il ouvre sa valise, découpe délicatement les emballages et coupe une large portion du cœur du fromage qu’il me donne sur une assiette. Il faut s’imaginer que pendant ce temps-là, de nombreuses personnes qui faisaient la queue pour se faire servir, assistaient à ce manège.

J’ai pu goûter ce bleu exceptionnel et magnifique avec Château d’Yquem 2011 très plaisant dans son jeune âge, Château La Tour Blanche 2008 qui a déjà une maturité resplendissante et Château Climens 2011 romantique et délicieux.

L’intérêt de ces cocktails, c’est aussi les discussions que l’on peut nouer. Dans les ors de la République, nous avons pu déguster de grands vins. La promotion que fait Glénat de ce livre mérite le respect.

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Discours Laurent Fabius Cocktail grands crus classés 21 avril 2015

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Ministère des Affaires Etrangères, Paris le 21 avril 2015.

Malbec World Day avec dégustation de vins argentins samedi, 18 avril 2015

C’est à l’Ambassade de l’Argentine à Paris que se tient la cinquième édition du « Malbec World Day ». Au premier étage de l’immeuble de l’ambassade, on peut découvrir des malbecs argentins de divers producteurs.

Dans la bibliothèque de l’ambassade, Jean-Guillaume Prats, président directeur général de Estates & Wines, la société du groupe LVMH qui regroupe tous les vignobles de Moët Hennessy, présente des malbecs argentins de son groupe.

Le Terrazas Single Vineyard Malbec Argentine 2010 titre 15°. Le nez est de cassis, marqué par un peu de poussière. La bouche est aussi cassis et le final est de punaise, poussiéreux comme au nez. Mais il faut que le vin s’ouvre dans le verre et le fruit prend le dessus, le vin devenant plutôt plaisant, même si cette expression du vin international n’est pas l’objet de mes recherches. Le final devient feuille de cassis, un peu rêche.

Le Terrazas Malbec 2012 a un nez de cassis avec beaucoup plus d’épices. Il est plus rond, avec des fruits épicés. On sent le clou de girofle. Le final est un peu astringent.

Le Cheval des Andes 2010 a une attaque très fraîche, de cassis, pruneau, quetsche fraîche. Le final est astringent. L’attaque est très belle de fraîcheur mais le final est lourd et plombant.

Le Cheval des Andes 2008 a un nez voluptueux, très séduisant, tout en épices orientales. La bouche est moins précise, partant dans toutes les directions, avec une sensation de lacté. Le final est frais et rafraîchissant. On a donc un profil à l’opposé du 2010.

Le Cheval des Andes 1999 a une approche subtile et raffiné, mais très vite on constate un léger goût de bouchon, qui n’empêche pas de sentir ce qu’il pourrait être, avec une belle structure de maturité.

Ces vins ont sans doute une clientèle, car beaucoup de pays font les mêmes vins, lourds, boisés, alcoolisés, porteurs de cassis à volonté. J’avoue que j’ai du mal à mordre à de tels vins dont je pense qu’ils doivent être peu digestes. Leur qualité est d’être très lisibles, rassurants. Il semble qu’ils se vendent bien.

L’accueil fut charmant dans ce bel immeuble. Il est de toute façon intéressant de savoir ce qui se fait dans le monde. Avec l’amélioration des démarches, allant vers moins de bois et d’extraction, l’Argentine produira des vins de garde. A suivre.

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10ème Dîner des Chefs des éditions Glénat au Pavillon Ledoyen mardi, 17 mars 2015

A 18 heures, je reçois un appel, « qu’est-ce que tu fais ce soir ? ». Je demande de quoi il s’agit et à 20 heures, je me présente cravaté au Pavillon Ledoyen pour la dixième édition du « Dîner des Chefs » organisé par Jacques Glénat et les éditions Glénat. Ce sont cent cinquante personnes qui se retrouvent, les chefs qui ont publié des livres avec les éditions Glénat – et ils sont nombreux – des vignerons qui sponsorisent le dîner, des éditeurs et libraires qui travaillent avec Glénat, des journalistes et des amis. L’apéritif se prend debout sur de délicieuses gougères au parmesan avec le Champagne Louis Roederer brut premier magnum. C’est un agréable champagne qui coule bien en bouche, très adapté à ce type de cocktail. Nous ne sommes pas là pour en peser les subtilités.

Le menu est réalisé par cinq chefs totalisant huit étoiles au Michelin. Le chef est cité ici avant le plat qu’il a réalisé, avec son nombre d’étoiles : Arkadiusz Zuchmanski* artichauts poivrade en fin velours, Gambero Rosso juste raidies et salade folle de pousses / Yannick Alléno*** tarte friande de langoustine au caviar / Jean-Michel Lorain** noix de Saint-Jacques et raviole de « cul noir » à la truffe, crème de mâche, céleri et lait de pomme / Hamada Noriyuki cabillaud mariné au sel de Koji, ail noir et légumes de saison, parfum de yuzu / Jean Sulpice** carré d’agneau de lait, grattons de noix de Grenoble et pimprenelle / fromages des alpages de Bernard Mure-Ravaud, MOF 2007 / Hamada Noriyuki riz au lait aux fleurs de cerisier, gaufrette japonaise et thé matcha / Jean Sulpice** Chartreuse flambée, chocolat et sorbet mûre.

La Petite Arvine Tradition Domaine des Muses Robert Taramarcaz Valais 2013 est d’un jaune clair plaisant. Le nez indique un vin beaucoup trop jeune. En bouche on constate deux choses. D’abord l’extrême précision de la Petite Arvine qui évoque un peu celle du riesling, cépage magnifiquement ciselé. Ensuite, je suis gêné de boire un vin aussi jeune, dont l’acidité occupe l’espace. De ce fait, alors que ce vin est bien fait, il me prive de plaisir. Il n’y a aucune accroche réelle avec les crevettes.

L’impression de gêne du vin suisse est confirmée dès l’apparition du Corton Charlemagne Bonneau du Martray magnum 2007 qui est un festival de complexité. Dans ce vin, il y a un panier rempli de tous les fruits exotiques juste suggérés et un bouquet de toutes les épices elles aussi suggérées. C’est un vin racé, noble et très frais. C’est un grand cru exemplaire. Sur la tarte à la langoustine le vin brille absolument. Le vin joue sur son élégance.

La transition avec le Puligny-Montrachet 1er cru Les Folatières Drouhin 2009 se fait très bien. Ce 2009 est fruité, plus gras. Il n’a pas la noblesse du grand cru mais il se distingue par un final très long, où la complexité de fruits blancs se montre généreuse. Il convient parfaitement au cabillaud.

Le Château Lagrange Saint-Julien 2005 a un nez inexistant ou du moins plat. En bouche, il est aussi plat et manque d’émotion. A aucun moment le dialogue ne se forme avec mon palais. Même le délicieux carré d’agneau n’arrive pas à l’émouvoir.

Le Château Boyd Cantenac Margaux 2002 en revanche, malgré une année jugée plus faible, est beaucoup plus accueillant. Il n’est pas tonitruant, mais l’exceptionnelle sélection de fromages lui va comme un gant.

Le Château Coutet Barsac 1989 est d’une couleur étonnamment ambrée pour son âge. Il est joyeux, gras, plein, sans excès. C’est un très agréable vin à boire comme cela dans sa jeunesse puisque pour les liquoreux, 25 ans est encore l’adolescence.

Et les plats maintenant ? Les crevettes sont très joliment croquantes mais le plat manque un peu d’expression et cela est accentué par le fait que le vin suisse est trop jeune. La tarte de langoustine est une merveille de justesse et le caviar nous est servi avec une profusion invraisemblable qui me fait penser au loup au caviar du père d’Anne-Sophie Pic, où le caviar débordait sur le plat. C’est un caviar chinois ce soir, aux gros grains gris de très bon goût. Avec le Corton-Charlemagne, on se régale.

Les coquilles Saint-Jacques sont merveilleusement cuites et les accompagnements sont un peu forts quand je pense aux accords mets et vins. Le cabillaud est joliment croquant et pourrait accueillir un vin rouge. Mais le plat japonais part dans trop de directions contraires et la crème de yuzu est beaucoup trop forte et écrase le plat. J’ai l’impression que ce plat sophistiqué devrait se manger avec le chef, seul à seul et non à 150. Le chef expliquerait pas à pas ses intentions, et là, on serait conquis.

Le carré d’agneau est une merveille mais je manque d’objectivité, car j’ai les yeux de Chimène pour la cuisine de Jean Sulpice, talentueux et brillant chef d’à peine trente printemps.

Les fromages des alpages forment un plateau exceptionnel. Toutes mes félicitations vont à ce brillant fromager. Un beaufort de 2013 m’a stupéfait par sa jeunesse de goût qui démontre que la cave de vieillissement doit être exceptionnelle.

Le dessert du chef japonais est un chef d’œuvre de complications qui mériteraient encore une fois d’être explorées dans le recueillement et pas dans une telle atmosphère. La boule de chocolat flambée à la chartreuse n’est qu’un prétexte pour s’enivrer d’une Chartreuse VEP Jaune ou verte. Pour moi, ce fut la jaune.

Nommons deux gagnants. Pour les vins ce sera le Corton Charlemagne et le Château Coutet. Pour les plats ce sera la tarte de langoustine au caviar et le carré d’agneau.

Du fait des très nombreux discours des vignerons et des chefs commentant leurs créations, ce sympathique dîner nous a entraînés fort tard dans la nuit. Vive les chefs très créatifs et vive les vignerons qui nous régalent et vive la maison Glénat qui organise si bien ce Dîner des Chefs.

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j’ai tremblé pour prendre les photos des vins car d’autres que moi se pressaient pour photographier les vins exposés dans une salle voisine :

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pour avoir une autre vision de ce dîner, vous pouvez aller lire ce message de « Greta garbure » : https://gretagarbure.com/2015/03/18/tout-frais-pondu-9/

Visite à la maison de champagne Mumm vendredi, 27 février 2015

Lors d’un dîner de la fondation Michel Chasseuil j’avais rencontré une femme politique très intéressée par les sujets de gastronomie. Elle m’a mis en contact avec une personne en charge, dans le groupe Pernod-Ricard, d’une enquête sur le luxe et la gastronomie. J’ai répondu à ses questions. De fil en aiguille il fut décidé que nous nous retrouverions tous les trois au siège de la maison de champagne Mumm, qui fait partie de ce groupe depuis 2005, pour une visite et un déjeuner.

Nous sommes accueillis par Didier Mariotti, œnologue et chef de caves de Mumm qui nous entraîne dans les caves creusées dans la craie qui couvrent vingt kilomètres de travées. C’est assez impressionnant. Les murs sont tantôt en craie brute, tantôt recouverts de petites briques. Au fond d’un des bras de ces innombrables tentacules, une sculpture en craie représente la nouvelle étiquette de la cuvée R. Lalou qui fait suite à la légendaire cuvée René Lalou à la si belle bouteille biseautée, dont le moule n’appartient plus à la maison Mumm et devrait, à mon avis, lui revenir. Pour l’histoire.

Sur un tonneau sont placés une bouteille et un magnum. Nous commençons à boire le Champagne Mumm Cuvée R. Lalou 2002. Son nez est de miel. L’attaque est un peu rêche mais c’est la première gorgée de la matinée. Je ressens en buvant ce vin de la pâtisserie, du pain d’épices, de la nonette. Il y a de beaux amers qui donnent de la longueur en bouche. Ce champagne a beaucoup d’équilibre, une belle matière. Il enrobe la bouche. Je vois aussi apparaître des fruits confits, alors que Didier Mariotti nous impressionne en citant des myriades d’évocations. Je sens ce champagne très gastronomique.

Le Champagne Mumm Cuvée R. Lalou magnum 1999
a un nez très puissant et expressif. On sent des fruits frais, un panier de fruits. Le 1999 est très différent du 2002. Je le trouve plus strict, plus évocateur de l’automne. Il est aussi plus fluide. Didier le trouve plus gourmand. Je sens des noisettes qui corroborent l’impression d’automne. Mon cœur va plus du côté du 2002.

Nous nous rendons en voiture au moulin de Verzenay
qui est implanté au sommet d’une colline qui offre un panorama exceptionnel. Le moulin qui déploie ses ailes, contrairement à Valmy, est reconstitué. La petite maison adjacente offre une salle à manger qui sur trois côtés laisse voir la Champagne à perte de vue. Nous sommes accueillis par un Champagne blanc de blancs Mumm Cramant magnum sans année qui souffre un peu de passer juste après des R. Lalou, mais ça ne dure pas car il est agréable et de belle fraîcheur. C’est un champagne de soif. Les petites cuillers d’apéritif, d’un saumon au caviar ou de foie gras conviennent bien au champagne et lui donnent de l’ampleur.

Le menu composé par la charmante cuisinière de l’endroit est : amuse-bouche / dos de cabillaud cuit vapeur, petits légumes croquants, pesto de cresson à l’huile de citron / veau en croûte de nougatine de truffe, sablé de parmesan, tombées de légumes de saison / vieux comté et parmesan / Tatin de pomme, quenelle de calisson.

J’ai apporté avec moi un Côtes du Jura blanc Bruno Vincent 1982
à la magnifique couleur dorée. Je demande qu’il soit servi avec les champagnes du repas pour que l’on voie la complémentarité gustative des champagnes et du vin du Jura qui se fécondent et s’élargissent de leurs différences.

Le Champagne Mumm Brut Sélection sans année
est fait de cinq grands crus sur une base de vins de 2008 et de vins de réserve allant jusqu’à 2002. Il a une belle ampleur et un joli corps. Il est servi en même temps que le Champagne Mumm millésimé 2006
qui est subtil et joyeux, dans les fruits rouges.

Le Côtes du Jura a une magnifique acidité et des évocations de noix comme un vin jaune. Mais il est plus fluide qu’un vin jaune, moins oxydatif et crée des ponts fascinants avec les deux champagnes, lorsque l’on passe de l’un à l’autre et le cabillaud d’une cuisson très réussie est un merveilleux révélateur des goûts des champagnes.

Didier avait pris en cave pendant notre visite un Bouzy Mumm 1959. Sa couleur est clairette. Ce vin est magnifique. Le nez est cendré, poussiéreux mais cela disparaît. La bouche est agréable, très typée, aigrelette avec un formidable caractère. C’est un vin de connaisseur car beaucoup de gens seraient rebutés par sa fragilité si subtile. A l’aveugle, que de contresens seraient commis ! Il me plait énormément.

A côté de lui, on nous sert un champagne « de compétition », le Champagne Mumm magnum 1961. Sa couleur est magique, d’un or jeune et glorieux. En bouche il est puissant, serein, équilibré et très réconfortant. Il joue avec le vin du Jura une danse de séduction. Sur le veau, c’est le Bouzy qui s’exprime le plus. A noter que le 1959 et le 1961 cohabitent ensemble sans se nuire.
C’est alors qu’arrive un vin tout simplement exceptionnel. Le Champagne Mumm magnum 1953
marque un saut qualitatif gigantesque par rapport au 1961 qui nous plaisait tant. Il fait prendre conscience de ce qu’est la perfection. L’année 1953 n’est pas une année légendaire mais ce Mumm est dans un état de grâce qui m’émeut. Il est invraisemblable d’émotion, car on ne peut pas le boire sans penser qu’il représente une forme de l’absolue perfection. Tout y est, acidité, mâche superbe, fruits suggérés, longueur infinie. Que du plaisir.

Alors, le Champagne Mumm Carte Classique magnum sans année, vin assez doux qui accompagne le dessert passe inaperçu, d’autant qu’il a un léger goût de bouchon.

Le moins que l’on puisse dire c’est l’honneur qui nous fut fait de goûter autant de vins de si belle qualité. Chacun des vins avait son intérêt, y compris le Mumm de Cramant. Le 1961 est un grand champagne, de très grande jeunesse et de bel équilibre, et le R. Lalou 2002 est un grand champagne qui vieillira bien. Et l’illumination de ce beau jour, c’est le fantastique 1953. Et je mettrai en second le si expressif Bouzy.

Nous avions avec nous le responsable marketing de plusieurs unités du groupe Pernod-Ricard et notamment en charge de l’implication de Mumm en Formule 1. Cette image associée à Mumm ne doit pas faire oublier qu’un champagne qui peut produire un 1953 de cette stature est incontestablement un très grand champagne.

Dégustation de Pontet-Canet au restaurant Il vino mercredi, 25 février 2015

De bon matin je pars au restaurant Il Vino
d’Enrico Bernardo, l’entreprenant meilleur sommelier du monde, où se déroule une présentation des vins du château Pontet-Canet. C’est Enrico lui-même qui sert les verres de chaque millésime et Alfred Tesseron, le propriétaire de ce Pauillac nous suggère de commencer par le plus vieux, pour voir l’évolution du travail fait au château.

Le Château Pontet-Canet 2001
a un nez très joli de fruits rouges et noirs. La bouche est assez neutre. C’est un vin bien construit, droit, mesuré, mais sans grande folie.

Le Château Pontet-Canet 2007
a un nez un peu plus profond et moins fruité. Il a plus de fluidité, il est assez agréable. Sa matière n’est pas abondante. C’est un joli vin dont j’aime le final.

Le Château Pontet-Canet 2010
a un nez subtil et raffiné. Il a plus de matière et se montre plus boisé. Il perd un peu du caractère que j’ai en mémoire de Pontet-Canet car il devient un peu plus conventionnel. Le final est plus rêche et boisé.

Le Château Pontet-Canet 2011
a un nez un peu plus fermé mais on sent toute sa subtilité. Il a une très jolie attaque avec beaucoup de charme. C’est un vin très agréable et parfaitement équilibré. Le final est un peu rêche ce qui est lié à sa jeunesse. Je pressens que ce sera un grand vin.

Le Château Pontet-Canet 2012
a un nez très clair mais peu typé. Son parfum évoque le velours. Il y a une fluidité de l’attaque qui ressemble à celle du 2007. En bouche il y a une petite âpreté. Le final est agréable. C’est un joli vin qui manque un peu de corps et de matière. Je l’aime assez.

Il se trouve que j’étais l’un des premiers à déguster des vins qui venaient juste d’être ouverts. Aussi en y revenant, l’écart de sensation est très fort, car les vins se sont réchauffés et aérés. Et chose curieuse, je vois apparaître chez tous ces vins des évocations de café.

Le 2001 gagne en fluidité et se montre nettement plus généreux, mais c’était mon premier vin du matin, avec un palais non encore aiguisé. Le 2007 montre maintenant un joli fruit et se montre chaleureux. Le 2011 devient nettement plus large. Et le 2012, plus large aussi est plus doux avec un joli poivre.

Comme le deuxième tour est nettement plus favorable, je n’aurais qu’une envie, c’est de goûter ces vins à table, car ils se révéleraient sans doute encore plus opulents. Lors de cette dégustation je n’ai pas eu l’émotion que pourrait procurer un très grand vin. Les vins sont bien faits mais il n’y a pas cette étincelle qui caractérise un très grand vin. La raison en est peut-être que la Côte Rôtie La Turque d’hier est encore fortement présente dans ma mémoire.

Alfred Tesseron nous a raconté l’implication de son père et lui-même dans l’évolution de ce vin et le rôle important de Jean-Michel Comme, l’homme qui fait le vin et a initié depuis 2004 la transition vers la biodynamie. Un travail important a été fait dans la vigne et dans les processus. On sent une volonté de faire bien. Cela se ressent dans la précision des vins que j’ai bus dont j’ai préféré 2007 et 2011 qui révèlent plus que d’autres les qualités de ce beau Pauillac. Connaissant quelques ancêtres de Pontet-Canet dont un grand 1870 je peux sans risque prédire un beau futur à ce Pauillac subtil.

Déjeuner au restaurant Le Train Bleu jeudi, 19 février 2015

Jean-Luc Colombo est un dynamique vigneron de Cornas qui a créé les Automnales qui réunissent une quantité impressionnante de restaurateurs, de sommeliers d’entrepreneurs dans le monde du vin et de la restauration et aussi beaucoup de copains. Ça se passe chez Jean-Luc et c’est festif.

A son invitation, je me rends au restaurant Le Train Bleu de la gare de Lyon où sont conviés des personnages de l’alimentation, de la restauration et aussi des amis dans des activités diverses. C’est éclectique et fécondant.

A l’apéritif on peut avoir des vins de trois couleurs. Je choisis une Clairette Les Anthénors domaine Jean-Luc Colombo. Le vin est franc, joyeux, et plein d’un joli fruit. Il est bien sûr très jeune, mais il est plaisant à boire.

Dans le menu composé à notre intention, seule l’entrée est optionnelle. Le menu que j’ai choisi est timbale de ris de veau et foies de volaille, sauce madère, salade d’herbes / lotte rôtie vigneronne, lentilles du Puy en vinaigrette persillée de gingembre, poireaux fondants / gigot d’agneau de nos régions rôti, gratin dauphinois.

Au Train Bleu, on est fasciné par le plafond absolument magique et impressionné par le gigantisme du lieu. Le service est professionnel et attentionné. La cuisine peut donner lieu à des jugements divers. La timbale a plus de foies de volaille que de ris de veau et elle est croquante et sèche. Le poisson a passé pas mal de temps sous la salamandre. C’est avec l’agneau que l’on a le sourire et la satisfaction de retrouver ce qu’était il y a cinquante ans la cuisine du lieu, avec des cuissons d’une exactitude parfaite. Le gigot a sauvé le repas. Il y avait ensuite du Brie de Meaux et une fine meringue au pavot mais j’ai dû m’éclipser avant leur arrivée sur table pour cause de rendez-vous auxquels je m’étais engagé.

Les retrouvailles avec ce lieu mythique sont finalement positives, mais il faudrait un peu plus s’accrocher à l’excellence d’il y a un demi-siècle.

Le Côtes du Rhône rouge Les Forots domaine Jean-Luc Colombo 2011 est un vin de pays, franc, direct et authentique. Je l’aime bien pour sa franchise, car il ne cherche pas à en faire trop. Il est jeune bien sûr et je regrette toujours que l’on boive des vins si puceaux, mais ce sont les contraintes du monde moderne qui les imposent.

La Côte Rôtie La Divine domaine Jean-Luc Colombo 2011 me pose problème, car plus un vin est grand, plus j’ai du mal à l’apprécier lorsqu’il est encore dans une phase ingrate de sa jeunesse. Je n’ai pas réussi à accrocher avec ce vin.

C’est le contraire avec le Cornas Les Ruchets domaine Jean-Luc Colombo 2006 qui me plait instantanément. Il est plaisant, goûteux, joyeux, coordonné et se boit avec une grande facilité. Et on en redemande.

Jean-Luc Colombo est un hôte dynamique, entreprenant et foisonnant d’idées. Les discussions sont allées bon train avec des convives charmants. Ce déjeuner au Train Bleu fut un bon moment.

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Ventes de bouteilles rares de Dom Pérignon à Artcurial lundi, 22 décembre 2014

Il y a quelques semaines, j’avais participé à un déjeuner de lancement du concept de « Plénitude » pour le champagne Dom Pérignon, à l’invitation de Richard Geoffroy. Quelques jours après un cocktail à Artcurial annonçait une vente prochaine de bouteilles très rares de Dom Pérignon. Lorsque j’ai reçu le catalogue, je n’étais pas très inspiré, car les prix me sont apparus élevés. Mais l’amicale invitation de Stanislas, du groupe Moët, m’a conduit à venir à la vente aux enchères à Artcurial. Alors que j’avais dit aux experts avant la vente que je trouvais les estimations élevées, les prix ont explosé. J’ai tenté à de nombreuses reprises d’acquérir des lots et chaque fois, au téléphone, quelqu’un s’exprimant en anglais, relançait. Je suis allé au-delà des limites de la raison et chaque fois le téléphone prenait le lot. Pour Dom Pérignon c’est un succès. Pour le consommateur que je suis, c’est un regret de voir les niveaux qui sont atteints. Longue vie aux Plénitudes, qui se substituent aux « Œnothèque ». Mais j’espère que cette fièvre d’un jour (à laquelle j’ai concouru) ne deviendra pas la norme.

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Dîner au siège de « Grains Nobles » mercredi, 17 décembre 2014

Après la dégustation des vins de la Romanée Conti de 2011, Pascal Marquet, le gérant de Grains Nobles, retient à dîner Aubert de Villaine au siège de sa société. Michel Bettane, Bernard Burtschy et quelques amis participent au repas. Nous dînerons d’un délicieux velouté de champignons, de dés de thon au quinoa et cosses de petits pois, de divers fromages et d’une panacotta aux fruits rouges. La cuisine est sympathique et amicale.

Le Champagne De Souza & Fils Brut Millésime 1988 est charnu et plaisant. Il se boit bien, avec des évocations un peu fumées. La mâche est belle et on sent l’effet de l’âge qui rend les fruits bruns et compotés. Sa plénitude est belle.

Le vin qui suit est très difficile à trouver à l’aveugle et c’est rare que Michel Bettane ne trouve pas la région. Je n’ai pas été meilleur. Il faut dire que ce vin n’est pas typique. Il s’agit d’un Volnay Les Mitans 1er cru Hubert de Montille 1990. C’est un ami qui a eu la pensée délicate d’apporter ce vin en hommage à Hubert de Montille, récemment décédé. Aubert de Villaine était avec lui lorsqu’ils ont goûté un vin juste au moment de mourir de la meilleure des morts, sans la moindre souffrance et en buvant un de ses vins. Ce 1990 est un peu torréfié, évoque la truffe. Il n’a pas la fluidité que l’on attendrait d’un vin de Montille, même s’il est bon.

Le Barolo Sori Ginestra Conterno Fantino 1996 est joyeux, de belle présence sur les fromages. Michel Bettane et Aubert de Villaine ont parlé de musique, d’instruments et d’interprètes avec une érudition qui m’a impressionné, aussi grande que leur érudition en vin. Ce qui me conduit à citer l’anecdote qu’Aubert de Villaine a racontée pour expliquer que dans les « climats » de Bourgogne, dont on attend le classement par l’UNESCO au patrimoine de l’humanité, il y a la terre, le climat mais aussi l’exploitation de la terre par les hommes : à la fin d’un concert, une femme approche David Oïstrakh et lui dit : « ah, le Stradivarius, quel son prodigieux ! ». David colle le violon à son oreille et dit à la dame : « c’est curieux, je n’entends rien ». Le terroir sans l’homme ne peut pas s’exprimer.

Le Champagne Egly-Ouriet Grand cru Extra Brut Vieillissement Prolongé dégorgé en mai 2007 après 58 mois de cave est superbe et me rassure – je n’en avais pas besoin – sur les qualités de cette excellente maison. Le champagne est riche, clair, précis et agréable. Un beau champagne qui conclut une belle soirée avec la Romanée Conti.

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Dégustation des vins de 2011 du domaine de la Romanée Conti mardi, 16 décembre 2014

Comme chaque année, Aubert de Villaine, co-gérant de la Romanée Conti, vient présenter au siège de la société « Grains Nobles » le dernier millésime qui vient d’être mis sur le marché. Il est assisté de Michel Bettane et Bernard Burtschy. Les participants sont des fidèles. Aubert de Villaine nous présente les 2011 qui sont de la 46ème vendange suivie par lui. Il parle du millésime et de sa vision. Un vigneron doit prendre des risques et avoir de la chance. Le début de saison avait été précoce. Un très beau temps en avril a duré presque jusqu’à la floraison le 20 mai ce qui est très tôt, comme en 2003 et 2007. Le retournement du temps s’est produit au moment de la floraison. Il y a eu du millerandage. Pluies, vents tournants, orages ont perduré. Juillet n’a pas été beau et a donné lieu à des attaques de botrytis qui ont fort heureusement cessé car il a fait froid. Au 15 août, nouveau retournement avec chaleur et orages, ce qui a compliqué le travail en vigne. Il y a eu une maturité très rapide et une baisse des acidités. Il y a eu de la grêle à Volnay et Gevrey mais Vosne Romanée a été épargné. Fin août on sentait que la maturité était proche et il fallait prendre le risque d’attendre et de voir apparaître le botrytis. La chance a été d’avoir des peaux épaisses qui ont permis de retarder les vendanges au 2 septembre pour le Corton et au 5 septembre à Vosne, sans avoir d’explosion du botrytis. La vendange a été difficile, avec le souci d’éliminer les baies à botrytis ou grillées. Ce fut une vendange très sélective et l’on a laissé de côté les ceps qui portaient les grappes les plus grosses. On a essayé une table vibrante et on a éliminé beaucoup de larves et de coccinelles. Les raisins de cette récolte ont été parfaits. Il y a eu beaucoup moins de botrytis dans le Montrachet que dans les rouges.

Après cet exposé passionnant, nous avinons nos verres avec un Vosne Romanée Dominique Laurent 2011. Le vin est violet clair, sent des fruits aigrelets. Il est de belle mâche, bon, franc, sans complexité.

Le Corton Grand Cru Prince Florent de Mérode Domaine de la Romanée Conti 2011 est de la troisième vendange faite sous l’autorité de la Romanée Conti. Il est fait de trois sous-climats de Corton qui sont les meilleurs selon Michel Bettane. La couleur est rouge clairet. Le nez est assez chaleureux avec des suggestions de fraises écrasées. Le vin est ouvert, très fraise et framboise. Le final est vineux, avec des traces de réglisse et légèrement de thé. Il est plutôt gourmand, agréable et on sent un potentiel gastronomique. Je le trouve plus abouti que les 2009 et 2010, avec un côté terrien, racinaire dit Aubert et un bois bien fondu.

L’Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe d’un rouge plus foncé que celui du corton. Le nez est très pur et c’est celui du domaine, ouvert mais rêche, tout en finesse. L’attaque est gourmande avec des fruits noirs. Le final est végétal avec un peu de réglisse. Le vin est plutôt sucré, délicieux au beau final raffiné. Il semble gastronomique suggère un peu de café tout en étant vineux. Il est de grande fraîcheur et plus facile à comprendre que des Echézeaux d’autres années. Bien sûr les autres vins du domaine sont plus complexes, mais il est plaisant.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe un peu plus sombre encore. Le vin est un peu réduit, ce qui fait qu’il a besoin de plus de temps pour s’épanouir dans le verre. Il est plus intense que l’Echézeaux, plus riche mais un peu plus brut aussi. La mâche est riche, il s’améliore. C’est un vin qu’il faudra attendre plusieurs années.

La Romanée SaintVivant Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe assez proche de celle du Grand Echézeaux. Aubert dit que c’est une robe de Nuits-Saint-Georges. Le nez est délicat. Il n’y a pas une trace de bois, on sent le vin. L’attaque est superbe et élégante. Le vin est gracile, féminin, doux. Le final le rend plus viril, affirmé. Il y a un saut qualitatif par rapport aux deux premiers vins du domaine. Aubert parle de concentration et transparence de ce vin ciselé.

Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe d’un rouge intense, violacé. Le nez est aussi intense, riche, très vineux. Le vin a une attaque d’une puissance rare. Le final est riche et vineux. Il s’impose, il est carré, grandiose, guerrier. A mon goût, il est particulièrement bien fait. Il est joyeux et glorieux.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 2011 a une couleur encore plus noire. Le nez est incroyablement suave et doux. C’est assez étonnant. L’attaque est riche, plus épicée que celle du Richebourg et moins florale. Le final est beaucoup plus ample. Il y a une grande netteté, avec puissance, grandeur, fraîcheur. Le vineux évoque le sureau. Aubert de Villaine évoque le portrait de Richelieu par Philippe de Champaigne où le velours rouge capte le regard. On sent la rafle dans le vin. Il est au-dessus du Richebourg, alors que j’ai adoré le Richebourg. Aubert dit que les grains ont des maturités plus complexes que pour La Tâche 1990 que j’ai évoqué car ce 2011 m’y fait penser, à cause du travail à la vigne qui rend le vin plus fin que le 1990.

La Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 2011 a une couleur plus rouge et plus claire. Le nez est très doux, suave, assez discret et soyeux. L’attaque tintinnabule tant elle est complexe. Le vin pianote dans toutes les directions mais il n’est pas envahissant. Il a vraiment un parcours en bouche en pianotage. Ce vin s’exprime de façon très poétique. Lorsque je reviens aux autres vins, ils paraissent tous très simples. Il y a un éventail de saveurs dont on a du mal à faire le tour. Il est impressionnant, et les fruits rouges et les épices font comme un feu d’artifice. Je me recueille. Alors que tout le monde parle autour de moi, je me renferme dans ma bulle pour essayer de capter le message du vin. Je reste sans voix, captivé par l’ampleur et la complexité du vin.

Si je résume les quatre derniers bus, la Romanée Saint-Vivant est très franche, claire et pure, le Richebourg est affirmé, puissant, direct, La Tâche a une grande complexité et beaucoup de charme et la Romanée Conti est encore plus complexe, à la palette gustative infinie. Si ces vins sont plus faciles à lire que ceux de précédentes années, ils sont loin d’avoir permis de comprendre tous leurs mystères.

Le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2011 a une robe d’un jaune clair avec un peu d’or blanc. Le nez combine agrumes, lait et amandes. Le vin est beaucoup plus sec que d’habitude, sans la moindre trace de botrytis. Il a du citronné et son final est grandiose. C’est dans le final qu’il s’affirme avec citron, amande et noisette. Michel Bettane dit que sur ce millésime il a le style Leflaive. Il est moins monumental que d’autres années car il est plus sec. Il a une grande pureté, une belle présence et une persistance aromatique supérieure à celle des rouges. Son empreinte est d’une grande fraîcheur.

Il est à noter que lorsque le dialogue s’instaure avec la salle, les questions sont essentiellement techniques. Personne n’a parlé de goût. Les explications de Michel Bettane sont toujours pertinentes, la vision d’Aubert de Villaine est d’une grande sagesse et humilité. Cette dégustation est un grand moment. Si je devais donner un avis sur les vins de cette année, le Montrachet est nettement plus sec et sera plus strict que d’autres années. Les rouges sont d’une très grande précision, fruits d’un travail remarquable. Mais il va falloir attendre longtemps avant que ces vins subtils ne délivrent le charme qu’ils recèlent en eux. Je ne connaîtrai sans doute jamais leur maturité.

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