Dîner avec mon fils et Krug années 50 et Hermitage 1929 vendredi, 10 avril 2015

Mon fils fait sa visite habituelle à Paris pour gérer l’entreprise industrielle que j’ai gardée. Je lui demande : « veux-tu que ce soir on ouvre du grand ?». L’avantage de ces questions, c’est qu’elles n’ont qu’une seule réponse. Ma femme et mon fils ont fait chacun de leur côté des emplettes aussi est-ce un repas où l’on va picorer plus qu’un repas à menu.

Il y aura des crevettes grises, des queues d’écrevisses, du jambon Pata Negra, du foie gras et de nombreux fromages. Mon choix de vin n’a pas été concerté.

J’ai pris en cave un Krug Private Cuvée probablement années 50. Pour dater, j’ai croisé ce que je peux observer de la couleur des étiquettes, de la couleur de la capsule et de la forme du bouchon et ces indices suggèrent que ce vin pourrait être des années 60 ou 50, mais plus probablement des années 50.

Le pschitt est faible mais la bulle est là. La couleur m’étonne, car le vin n’est quasiment pas ambré. En bouche, ce champagne est colossal. Car il y a une myriade de fruits, entre des jaunes et des rouges, et surtout, une combinaison entre fruits frais et fruits confits. Le vin est vif, incroyablement vivant et complexe, avec en plus une rondeur et une cohérence que seul l’âge peut donner. Fascinant, envoûtant, c’est un champagne de haute volée. Un vrai bonheur.

Il n’a peut-être pas la tension de certains champagnes plus vifs, mais sa rondeur et sa complexité extrême en font un champagne mémorable, dans le club très fermé des très grands champagnes.

Mon deuxième choix est un vin qui m’émeut car il est très peu probable que je retrouve un jour sur ma route un autre Hermitage Marquise de la Tourette Audibert et Delas rouge 1929. J’ouvre la bouteille qui a un niveau un peu bas. Le bouchon se brise en de nombreux morceaux, le bas du bouchon étant gras et noir. En l’ouvrant au dernier moment avant qu’on la boive, je sais que l’on prend un risque. Le premier nez est un peu torréfié. Et puis, c’est comme le soleil qui se lève à l’aube, nous allons vivre une éclosion ahurissante.

Le vin se caractérise par une densité de trame extraordinaire. C’est un vin lourd, charpenté, mais aussi ciselé. Et c’est cela qui est remarquable. Mais il y aussi une chose qui me fascine, c’est que malgré sa densité, le vin est d’une grande fraîcheur. Et cela signe un grand vin. Il a du fruit, de la truffe, et c’est sa richesse en bouche qui est hallucinante. Quand je me suis versé le fond de la bouteille, presque noir, je n’ai quasiment pas eu de lie et le vin gardait une grande pureté.

A l’analyse on pourrait chercher tel ou tel défaut, mais la densité de la trame, plus la fraîcheur, conduisent à se dire que l’on est face à un immense 1929. C’est vraiment une année exemplaire, l’année que je chéris le plus avec 1900.

Ouvrir ces raretés avec mon fils est un accomplissement. C’est la récompense de ma passion.

DSC00212 DSC00213 DSC00214 DSC01190

DSC01192 DSC01193 DSC01194 DSC01198

un bon fromage superbe sur le Krug

DSC01191

Dîner avec Dom Pérignon 1988 vendredi, 10 avril 2015

Le lendemain, le programme du dîner promet d’être sage. Ma femme a voulu un repas tout orange : des tomates oranges avec des petites écrevisses nichées dans des feuilles d’endives et une fleur comestible et bio, une pensée orange, du saumon presque cru en dés, et une salade de mangues avec des kumquats confits. Le thème de l’orange est brisé deux fois, pour la salade roquette puis pour les fromages. L’eau est au programme mais j’ouvre un Champagne Dom Pérignon 1988. Dans ma mémoire vive, l’année 1988 est une immense année en champagne. Et ce n’est pas ce champagne qui me fera dire le contraire, car il est exceptionnel. Il est une forme quasi idéale d’un rêve de champagne. Il a un dosage que l’on ressent mais en même temps il a une acidité rafraîchissante et pénétrante. Il a aussi bien du miel que du beurre, des agrumes, mais ce n’est pas la peine de chercher car on est conquis par sa structure glorieuse. Richard Geoffroy a récemment créé le concept de « plénitude » qui s’applique à des Dom Pérignon qui sont dégorgés à un moment de leur vie qui est un pic d’excellence. Alors que ce concept concerne des dégorgements tardifs, le mot plénitude s’impose pour ce 1988 au sommet de son art. J’aurais volontiers tendance à dire que ce 1988 est un Dom Pérignon idéal, comme on parle de « gendre idéal ». Deux heures après le repas, j’ai encore l’empreinte indélébile en bouche d’une magnifique acidité et de beaux agrumes.

C’est un champagne emblématique, au sommet de son art, glorieux et idéal. Une forme ultime du champagne dans le registre des champagnes chaleureux.

DSC01200

symphonie d’orange

DSC01199 DSC01202 DSC01203

Déjeuner au restaurant Garance vendredi, 10 avril 2015

Un déjeuner doit avoir pour thème le luxe et l’excellence, et plus particulièrement au Japon. D’instinct, je choisis le restaurant Garance de mon ami Tomo.

Je n’ai pas noté les intitulé des plats. L’entrée de spaghettis de pommes de terre, d’herbes, de calamars et de jambon bien gras, est un régal de saveurs délicates. Le plat principal un poulet, est d’une tendreté de rêve. La cuisine de Guillaume Iskandar cherche à rester modeste mais sa qualité d’exécution est exemplaire. Le dessert au chocolat, avec un sorbet à la betterave réussi, est agréable.

J’ai choisi un Champagne Egly-Ouriet 2002 dégorgé en novembre 2011 à la couleur déjà ambrée, riche, plein en bouche et seigneurial. Il est là, il s’impose avec une évidence absolue. Plus on le boit, plus on l’aime, gourmand, généreux, riche de complexités. Ce sont des fruits jaunes de fin d’été qui traversent l’esprit.

Le Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 1998 a un nez agréable aussi j’approuve le vin sans l’avoir goûté. Mais en bouche le vin est torréfié, cuit, comme après un passage en cave chaude. Or Guillaume Muller
me dit que le vin vient directement de la propriété. Pourquoi est-il aussi plat et limité, je ne peux le dire, mais le vin, où l’on sent que la matière est présente, avec des accents bourguignons que l’on retrouve souvent chez Rayas, est anesthésié par ce coup de chaleur indéterminé.

Pour compenser cette contreperformance, Guillaume Muller nous fait servir à chacun un verre de Château Prieuré Lichine Margaux 1981. L’attaque beaucoup plus fraîche met encore plus la lumière sur la torréfaction du Rayas, mais le vin est court, très court, ce qui ne pansera pas nos plaies. J’eus l’heureuse surprise d’être invité. Le principal cadeau fut l’agrément des conversations.

La cuisine de Guillaume Iskandar me séduit de plus en plus.

DSC01176 DSC01177 DSC01183

DSC01179 DSC01180 DSC01181 DSC01185

casual Friday au restaurant Hiramatsu vendredi, 10 avril 2015

Jamais je n’ai vu un casual Friday avec autant de rebondissements. Cette fois-ci il est un vendredi, ce qui devrait nous porter chance. Mais suivons le fil de sa gestation. Nous sommes cinq à postuler pour ce déjeuner. J’ai en outre une candidate potentielle qui pourrait venir avec une bouteille de haute volée qui me fait particulièrement envie, un Côtes du Jura que l’on peut dater autour de 1850. Je n’en parle pas à mes amis et j’attends leurs propositions. Aucune ne m’excite vraiment, car je vise haut, et je commence à dire que je préférerais reporter notre rendez-vous. Mais les mails amicaux qui me sont adressés m’indiquent que je ne devrais pas annuler. Je demande à nouveau les apports de chacun et faute de grives, ma proposition personnelle est plus de merles que d’ortolans. Et les désistements arrivent un à un, tous ayant des raisons qui se justifient. Si bien qu’à la veille du repas, nous nous retrouvons à deux. Le fidèle qui reste du groupe initial est un des plus généreux. Je lui dis : « comme nous sommes deux, visons plus haut, oublions nos vins déjà livrés au restaurant et lâchons-nous ». Nous passons l’un et l’autre des coups de fils et nous sommes trois, puis quatre. L’un des amis du groupe initial qui annonçait sa possible absence revient dans le groupe ce qui fait qu’après avoir été 5 puis 4 puis 3 puis 2 nous avons fait le chemin inverse en remontant jusqu’à 5 avec une distribution de vins très différente et deux convives nouveaux.

Benoit Vayssade, le sommelier du restaurant Hiramatsu, a suivi ces valses ou plutôt ces pas de tango avec une compréhension exemplaire. Il a proposé un menu sans tenir compte des vins, puisqu’il ne les connaissait pas, qui est le menu du déjeuner où, au lieu de choisir entre deux options par plat, nous aurons des demi-portions de chaque plat possible, ce qui donne : noix de Saint-Jacques à la plancha, beurre blanc au yuzu et légumes de saison / ris de veau poêlé, purée de topinambours et capuccino de champignons sauce madère / barbue à la plancha, mousseline d’oignons rose rôti et sauce matelote / cochon ibérique rôti, déclinaison de carotte et jus de citron / tarte tatin, pomme royale gala et feuilleté caramélisé, glace romarin.

Nous commençons sur des gougères et des pistaches grillées par un Champagne Bollinger Grande Année 1985 dégorgé en 2003. Décidément, je n’ai pas beaucoup de chance avec les 1985 pris de la cave d’Hiramatsu, car le dernier 1985 que j’ai bu ici n’était pas parfait, et celui-ci, tout en étant agréable, donne une impression de pomme surette qui neutralise la vivacité. On le boit bien, mais il ne procure pas le plaisir attendu.

Dans ma première proposition j’avais inclus un Chablis Caves Prunier 1955 au niveau en vidange, en l’annonçant sans illusion. Quand je l’ai ouvert, le bouchon est tombé dans la bouteille ce qui m’a obligé à le carafer. Et cette oxydation rapide a empêché un retour à la vie qui n’aurait de toute façon pas eu lieu. Nul d’entre nous n’en a bu. Il m’a suffi de le sentir pour l’écarter.

Le cinquième larron avait fait livrer un Château Grillet mais nous n’allions pas le boire sans lui aussi avons-nous commandé un Champagne Delamotte Blanc de Blancs 2004 toujours aussi civilisé et agréable. Le champagne est à l’aise en toute circonstance. Mais le cinquième larron arrive. On ouvre vite son vin.

Le Château Grillet 1992 a une jolie couleur et un nez plutôt agréable. J’aime les Château Grillet car ils sont toujours étonnants, offrant à chaque millésime un profil différent. Mais ici, même en cherchant ce qui fait la grâce de ce vin, je bute sur des sensations de cire, de glycérine, qui paralysent le palais. Il y a des réminiscences, quelques allusions, mais le déclic ne se fait pas.

Le Clos de Tart 1989 de Tim, invité de la dernière heure, avait un parfum qui m’avait fait peur à l’ouverture et maintenant il est glorieux. C’est fou ce qu’il est bourguignon. Il a une belle richesse et ce qui fait le charme des vins bourguignons bien nés, où tout est suggestion, subtilité, élégance. Mais il y ajoute une richesse de fruits, une puissance remarquable. C’est un grand Clos de Tart.

Le vin que j’ai substitué à ma première proposition est une Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2002. A l’ouverture, le parfum était une magnifique promesse avec une intensité et une profondeur remarquable. A table, le vin va passer par deux phases. La première est toute de fruits. Des fruits rouges et noirs, en fruits et en compotes. Avec un bouquet de complexité. Le fruit est noble, mais on est sur le fruit. Puis, tout-à-coup, arrive la signature de la Romanée Conti. On sent le sel typique du domaine et le romantisme propre à la Romanée Saint-Vivant. Du fait de la jeunesse de ce vin, on est plus sur l’affirmation que sur la suggestion. Nous buvons un vin de très grande élégance et de magnifique subtilité.

Le vin de Bruno est un Vega Sicilia Unico 1960. Le nez évoque le café, caractéristique de ce vin, quel que soit l’âge. Le vin est riche, franc, et la cohabitation avec les deux excellents autres rouges se fait sans difficulté. On peut passer de l’un à l’autre sans problème. Le vin espagnol est serein, facile à vivre, pas extrêmement long mais tellement riche et franc. On est sur de belles notes de café, d’automne, et la richesse triomphe.

Pour le dessert nous avons le choix entre plusieurs vins mais la curiosité nous pousse vers une demi-bouteille de Cabernet Sauvignon Vendanges Tardives Van der Heyden Vineyards Napa Valley 1997 qui titre 14,5°. Le vin est très curieux car il n’est en rien doucereux. Il est extrêmement fruité, avec de la cerise, du pruneau, il habille bien la bouche et convient bien au dessert, surtout la glace au romarin. C’est une découverte de goûts inhabituels.

Ce qui est remarquable, c’est la performance des trois vins rouges. Le Clos de Tart 1989 est très bourguignon, avec une complexité enthousiasmante. La Romanée Saint-Vivant est romantique, toute en séduction élégante et le Vega Sicilia Unico est riche, pénétrant, intense. Ce serait bien difficile de hiérarchiser ces vins si différents et aussi grands les uns que les autres. Mon classement sera : 1 – Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2002, 2 – Vega Sicilia Unico 1960, 3 – Clos de Tart 1989, mais on pourrait tout aussi bien les mettre ex-aequo.

Le menu n’a pas été conçu pour les vins, mais cela s’est bien passé, la cuisine étant franche et agréable. L’accord de la barbue avec la Romanée Saint-Vivant a été le plus intéressant. Le service du restaurant Hiramatsu est attentionné et plaisant. Ce fut un casual Friday à rebondissements, mais ce fut un vrai succès.

DSC01215 DSC01216

DSC00216 DSC00218

DSC01224

DSC01225

pas de photo du Clos de Tart, sauf le bouchon

DSC01207

DSC00224 DSC01204 DSC01206

DSC01226 DSC01209

DSC01228 DSC01210

DSC01214 DSC01217 DSC01219 DSC01220

menu Hiramatsu 150410 001

dîner chez des amis dans le sud samedi, 4 avril 2015

Nous allons dîner chez des amis dans le sud. L’apéritif se prendra avec du saucisson et du pâté de tête. Nous aurons ensuite un carpaccio de saumon, puis de la lotte avec une sauce vierge et une belle et complexe purée de tomates pour finir sur des fromages.

Le Champagne Substance Jacques Selosse a été dégorgé un jour de printemps, le 20 mars 2007. Sa couleur est très ambrée. Il est très surprenant, car son acidité est très prononcée, avec des fruits jaunes un peu surets. Ce n’est pas un champagne confortable, c’est un champagne de méditation. Sur le pâté de tête, l’accord arrondit le champagne qui montre une force certaine. Il faut se concentrer pour essayer de le comprendre et lorsqu’on y arrive, on se rend compte de sa force, de sa complexité et d’une matière vineuse de grande distinction.

La bouteille étant finie au cours du long apéritif, il faut ouvrir un Champagne Mumm Cordon Rouge de mise récente qui est, lui, très confortable et lisible, et se boit bien. Il fait prendre conscience encore plus du raffinement du Substance, mais le Mumm tient bien sa place, court mais sans problème.

La Côte Rôtie La Mouline Guigal 1997 est un vin comme je les aime. Car l’année, plus frêle que d’autres, met en valeur la délicatesse des qualités de ce vin. Tout est en finesse, en raffinement. Il convient bien à la lotte, puis aux fromages, et c’est un régal. Contrairement à une année puissante comme 1996 qui laisse exploser le fruit glorieux, on est ici sur le terrain de l’élégance et de la courtoisie. Bien sûr, le vin a aussi de la puissance, mais ce vin m’évoque les gymnopédies d’Erik Satie.

Par une nuit de pleine lune qui argente la mer, nos discussions nous ont gardés éveillés très tard, avec en bouche le goût de cette belle Côte Rôtie.

DSC01159 DSC01157 DSC01155 DSC01162

DSC01171 DSC01172 DSC01173

DSC01166 DSC01167 DSC01168

DSC01163 DSC01169 DSC01170 DSC01175

Déjeuner au restaurant Paloma à Mougins jeudi, 2 avril 2015

Cela fait presque douze ans qu’un journaliste, Patrick Flet, avait fait un article sur l’un de mes dîners auquel il avait participé et qu’il avait apprécié. Entre autres activités, il travaille avec l’office de tourisme de Mougins pour l’organisation d’une grande fête populaire : « les Etoiles de Mougins, festival international de la gastronomie ». Pendant trois jours, Mougins devient une capitale de la gastronomie, avec des animations, des événements, des stands de dégustation à tous les coins de rue et la présence de nombreux grands chefs. Par certains côtés, cela ressemble à la Percée du Vin Jaune, fête populaire que j’adore, mais centrée ici sur les mets, les saveurs et la gastronomie.

L’idée est née que j’organise un dîner à Mougins pendant « les Etoiles de Mougins » qui se tiendra les 18, 19 et 20 septembre 2015.

Considérant cela comme une nouvelle aventure, je me rends à Mougins pour rencontrer les responsables de l’office de tourisme de Mougins et étudier avec eux la cuisine du chef du restaurant Paloma, où devrait se tenir l’un de mes dîners le vendredi 18 septembre. Nicolas Decherchi, jeune chef de 32 ans, a été très rapidement couronné d’une étoile.

J’arrive dans la vieille ville de Mougins par un beau soleil et le panorama est saisissant, car d’un côté on peut voir la baie de Cannes et de l’autre les Alpes aux sommets encore couverts de neige.

Je choisis trois plats différents pour juger non pas le talent du chef, car je ne suis pas là pour ça, mais pour vérifier que sa cuisine peut être compatible avec les vins anciens. Il y aura : langoustines en deux façons, tartare de langoustines à l’orange et citron vert accompagné d’une langoustine rôtie au kumquat et carpaccio d’orange au poivre / noix de coquilles Saint-Jacques label rouge rôties au beurre demi-sel fumé, saupoudré d’orange confite, accompagnées d’une fine mousseline de topinambour à la truffe et gnocchi de pomme ratte / pomme de ris de veau du Sud-Ouest surmontée d’un craquelin de parmesan, accompagnée d’une mijotée de riz aux olives vertes et speck fumé et de sa pomme de terre confite aux oignons caramélisés et reblochon fermier / tarte citron yuzu, tartelette sablée garnie d’une dacquoise amande et d’un confit citron, rehaussée d’une mousse au yuzu..

Les intitulés indiquent que chaque plat est une addition de saveurs qui pourraient se contrarier, d’où l’intérêt de vérifier.

Les trois beurres Bordier sont une invitation à la gourmandise ! L’amuse-bouche commence par une barbe à papa de foie gras (si ma mémoire est bonne) qui est ludique, amusante et évocatrice de souvenirs d’enfance, revisités. C’est bon. Les trois petits amuse-bouche sont délicieux et goûteux. Comme dans tous les restaurants, cela plante le décor et permet de se dire qu’on va se régaler.

La mise en bouche est une agréable gelée très cohérente, qui conviendrait parfaitement lors d’un dîner de vins anciens.

Le tartare de langoustine ne met pas assez en valeur la chair, masquée par ce qui l’entoure. La langoustine est superbement cuite et de grande qualité, mais la sauce au kumquat, généreusement servie, étouffe la chair brillante. Il faudrait ne garder que la langoustine, avec une suggestion infime de l’agrume.

Les Saint-Jacques sont de grande qualité et le plat est excellent. La purée de topinambour est cohérente avec le plat mais devrait être un peu plus discrète. Voici un plat que les vins anciens comprendraient.

Le ris de veau apporte la troisième preuve que le chef se fournit de produits de qualité. Il faudrait alléger la lourde sauce et les à-côtés qui ont, comme pour le premier plat, un peu tendance à étouffer le produit principal.

Le dessert est très bon, et pourrait convenir à d’antiques liquoreux.

Le Champagne Bollinger Grande Année 2004 est toujours aussi solide, brillant, confortable et sans problème. Il n’a aucune difficulté de message, car il est franc, emplit bien la bouche et se boit avec plaisir.

J’avais lu sur la carte des vins que l’on propose un Beaucastel Œnothèque 2000. Je connais le Beaucastel normal et le fameux hommage à Jacques Perrin, mais d’œnothèque, je n’en ai aucune idée. En fait l’étiquette porte la mention « Œnothèque famille Perrin » mais qui ne correspond à aucune différence par rapport au Châteauneuf-du-Pape traditionnel. Le Châteauneuf-du-Pape Château de Beaucastel 2000 est une magnifique surprise. Je n’aurais pas imaginé qu’il ait atteint un tel stade de maturité. Il est riche. Tout en lui est brillant, l’équilibre, la mâche, la persuasion, la longueur. C’est un vin de grand caractère, et pour mon goût, c’est sa sérénité qui est son atout de séduction. Avec le ris de veau, c’est une merveille. C’est un très grand Châteauneuf-du-Pape.

Pour les desserts un verre de Champagne rosé de blancs Pierre Gimonnet & Fils Brut est franc, superbe, goûteux comme il convient.

Le repas est superbe et j’ai félicité le chef. Mais les plats tels qu’ils sont, doivent être retravaillés pour des dîners de vins anciens. Le chef a parfaitement compris ma demande et nous trouverons sans difficulté les plats qui feront apprécier son talent tout en se montrant « à l’écoute » des vins anciens.

La vue de la salle du restaurant est magnifique. La décoration est chargée mais elle a un style. Le service est attentionné mais commet de petites erreurs comme de carafer le vin sans me l’avoir demandé. On sent une équipe qui veut bien faire et un chef talentueux et ambitieux. Ce sera un plaisir de faire un de mes dîners dans ce bel écrin.

la barbe à papa

DSC01128

les beurres Bordier

DSC01130

DSC01126 DSC01131 DSC01132 DSC01133 DSC01136 DSC01138 DSC01142 DSC01144

DSC01152

DSC01150 DSC01151

DSC01153

Magie de vins anciens au restaurant l’Oustau de Baumanière mercredi, 1 avril 2015

Par échange de mails, j’ai acheté des vins à un amateur qui vit dans le Gard. Pour en prendre livraison une idée me vient : se rejoindre aux Baux de Provence lorsque je serai dans le sud. Ce qui me donnerait l’occasion de déjeuner à l’Oustau de Baumanière.

Nous nous présentons au restaurant l’Oustau de Baumanière, ma femme, une amie et moi, par un beau soleil et un grand vent. Le personnel nous accueille avec le sourire, se souvenant de beaux repas que j’ai eu l’occasion de faire en ce lieu.

La carte des vins est très riche et comprend des vins anciens sagement gardés depuis des décennies. C’est donc une invitation à casser sa tirelire et à rendre hommage à la gestion de cave remarquable de cette maison. Jean-André Charial n’est pas présent car il s’occupe de ses autres restaurants. Je demande qu’on lui transmette mes amitiés. Le sommelier Gilles Ozello accompagnera avec talent notre dégustation.

Trois petites mises en bouche nous proposent palourde, dé de saumon et une crème de rouget délicieuse. L’amuse-bouche consiste en des pâtes en ravioli trempant dans un bouillon délicieux.

Mon repas sera : foie gras de canard, fine gelée d’agrumes / pigeon des Costières, viennoise aux olives vertes, céleri et salade d’abats / saint-nectaire / millefeuille.

Le Champagne Moët & Chandon 1914 se présente dans une bouteille qui paraît saine. Le niveau a un peu baissé mais pas trop. A travers le verre assez sale et coloré, la couleur est difficile à deviner mais paraît ambrée. On imagine qu’il n’y a plus de bulle, mais je confirme ma commande. Le bouchon sort sans effort et sans pschitt. Le vin dans le verre est très ambré. Le nez est assez joli. En bouche, le vin est riche, sans aucun pétillant, ce que je regrette un peu. Des agrumes forts apparaissent comme des zestes d’oranges ou de pomelos. Le vin est assez court, manquant un peu d’équilibre et j’attendais sans doute un peu mieux de ce vin que je souhaiterais adorer tant car je considère Moët 1914 comme l’un des plus grands Moët qui ait été fait, au-dessus même du mythique 1911.

Le vin avait besoin de s’aérer car tout-à coup, au moment où je reçois le foie gras, le nez du champagne devient vibrant, sensuel et riche, évoquant de lourds fruits exotiques. Et en bouche, la transformation est spectaculaire. Le champagne prend de l’ampleur et surtout de la longueur. Il est riche, profond, complexe, jouant sur un registre de fruits confits, tantôt agrumes rouges, tantôt prunes gorgées de soleil. On sait que nous ne sommes plus sur le terrain des champagnes et plus sur celui des liquoreux légers, mais plus encore sur une combinaison des deux, et je suis pris d’un grand amour pour ce 1914 qui n’est pas le plus grands de ceux que j’ai bus, mais qui est d’une émotion extrême.

J’ai choisi sur la carte le Corton rouge Bonneau du Martray 1961 car je n’ai jamais rencontré ni bu des cortons de ce prestigieux domaine de cet âge. Le niveau est assez bas mais c’est la dernière bouteille du restaurant. Je décide de la prendre malgré une couleur que je suppose non parfaite. Gilles ouvre la bouteille et le bouchon noir vient en mille miettes. Le nez du vin est relativement neutre. La couleur est tuilée et peu engageante. A la dégustation, les promesses sont beaucoup plus grandes. Et, comme pour le champagne, il faut attendre le réveil du vin.

Il évoque la truffe, la mine de crayon et sa matière est riche et épaisse. Sa plénitude, sa construction bien assemblée, son équilibre vont me conduire à l’adorer car, en plus, le pigeon est probablement le meilleur de ceux que j’ai mangés depuis quelques années. La chair est exceptionnelle et le pigeon se confond avec le vin car l’olive rejoint son goût truffé. Je suis sur un petit nuage, car la fusion entre pigeon et le vin les soude comme l’on soude les plaques d’acier de la carène d’un bateau. Mon plaisir est inextinguible.

Je fais verser dans un autre verre la lie qui est noire d’encre et superbement goûteuse, accompagnée du saint-nectaire.

Le service est parfait, le sommelier est d’une attention permanente et c’est un plaisir de discuter avec lui, la nourriture est superbe et le pigeon m’a enthousiasmé ainsi que les fruits confits extraordinaires que j’ai choisis de la même couleur que le champagne, melon, abricot, kumquat, pour qu’ils forment avec le reste du Moët un accord couleur sur couleur du plus bel effet.

C’eût été un péché de ne pas choisir des vins dans la caverne d’Ali Baba de l’Oustau de Baumanière, étape indispensable des amateurs de bonne chère et de grands vins.

DSC01105 DSC01106

DSC01076 DSC01078 DSC01079 DSC01080

DSC01091 DSC01092 DSC01094

DSC01072 DSC01073 DSC01075

DSC01081

DSC01083 DSC01087 DSC01089 DSC01090 DSC01095 DSC01101 DSC01103 DSC01108

ma femme a pris un cochon de lait dont les pommes de terre sont cuites dans un rouleau de graisse découpé devant nous

DSC01084 DSC01085

Académie des vins anciens – vins du groupe 1 samedi, 28 mars 2015

AVA VINS GROUPE 1

Champagne Le Brun de Neuville Brut sans année

Champagne Charles Heisieck mis en cave en 1997

DSC00131 DSC00132

Champagne Ruinart 1992

DSC00106

Chablis Thomas Bassot 1929

DSC00193 DSC00194 DSC00192

Puligny-Montrachet Clos de la Garenne Vincent Vial 1962

DSC00133 DSC00134

Château Laville Haut-Brion 1943

DSC00119 DSC00120

Clos de la Coulée de Serrant Savennières Mme Joly 1987

DSC00101 DSC00102

Château La Gaffelière Naudes 1962

DSC00123

Château Gruaud Larose 1943

DSC00113

Château Carbonnieux rouge 1961

DSC00121 DSC00121 - Copie

Château Pavie #1929

DSC00147

Château Latour 1924

DSC00195 DSC00196 DSC00198

Château Lafite Rothschild 1958

DSC01018 DSC01022

Moulin à Vent Louis Chevallier 1926

DSC00141 DSC00142

Gevrey Chambertin P Misserey 1923

DSC00152 DSC00153

Chambolle Musigny Pasquier-Desvignes 1934

DSC00187 DSC00188 DSC00190

Corton Bressandes Grand cru Jaboulet-Vercherre 1971

DSC00116

Latricières-Chambertin Jaboulet-Vercherre 1971

DSC00111 DSC00112

Pommard Louis Affre 1961

DSC01042 DSC01043 DSC01044

Savigny les Beaune Fromageot Langlais # 1915

DSC00155 DSC00154 DSC00157

Vouvray sec pétillant cave coopérative de Vouvray 1964

DSC00117 DSC00118

Silvaner Eiswein Franken wein Ernst Popp à Iphofen 1992

DSC01047 DSC01045 DSC01048

Monbazillac Supérieur A. Moueix #1940

DSC00104 DSC00097 - Copie DSC00098 - Copie

Château Myrat 1937

DSC00158 DSC00159 DSC00160

les vins presque complets du groupe 1

DSC00202 DSC00203

DSC00204 DSC00205 DSC00206

Déjeuner Tradition au restaurant Taillevent vendredi, 27 mars 2015

La famille Gardinier a repris il y a quelques années le restaurant Taillevent en rachetant les parts de la famille Vrinat et a joué la carte de la continuité historique. L’âme du Taillevent est encore fortement imprégnée de l’apport considérable de la famille Vrinat dont Jean-Claude qui a construit la perfection du service. Des piliers du restaurant portent cette continuité, Jean-Marie Ancher et Alain Solivérès. Pour marquer encore plus cette volonté stratégique, Thierry et Laurent Gardinier invitent chaque année des fidèles historiques du Taillevent et logiquement Valérie Vrinat et son mari sont invités.

Le déjeuner va s’appuyer sur des recettes elles aussi historiques : épeautre du pays de Sault en risotto à la truffe noire / homard bleu, truffe noire et céleri / fraîcheur d’agrumes, parfait glacé au citron vert.

L’interprétation de ces plats emblématiques est magistrale et nous sommes particulièrement gâtés car la truffe abonde et elle est goûteuse.

L’apéritif se prend dans le salon raffiné du premier étage avec un Champagne Cuvée William Deutz magnum 2000. Il a une belle acidité, il est un peu dosé pour mon goût. Son pinot noir est dynamique. C’est un champagne de forte personnalité qui forme avec les gougères superbes et aériennes une combinaison gourmande et apéritive.

Le Mercurey En Pierrelet Château de Chamirey magnum 2011 m’impressionne par sa maturité. Il a beaucoup d’ampleur, il est vif et plein en bouche. Je ne m’attendais pas à le trouver si grand, avec des évocations de fruits jaunes d’été. Ce qui est étonnant, c’est que l’épeautre, par son épaisseur, freine le vin et le bride. Lorsque le plat est parti, le Mercurey reprend sa vivacité et un final noble. Ce Mercurey est une belle surprise, qui s’exprime beaucoup mieux sur le homard.

Le Château Phélan-Ségur Saint-Estèphe magnum 2001 a un nez superbe. L’attaque est belle mais le final est assez court. Avec l’abondante truffe mais plus encore avec la sauce du diabolique homard, le Phélan-Ségur prend de la longueur. Il faut peut-être le laisser encore vieillir.

Le Château Les Justices Sauternes 2007 dont l’étiquette porte « Collection Taillevent » a un nez qui annonce un vin opulent et gras. Le vin est joli, gras, joyeux, de belle ampleur. Il y a beaucoup de fruits dont la mangue et le fruit de la passion. Il est profond tout en gardant la légèreté primesautière du millésime. L’accord avec le dessert est parfait.

Le cognac servi en fin de repas, dont je n’ai pas regardé le nom, n’a pas la vivacité à laquelle Jean-Marie Ancher nous a généreusement habitués.

Ce déjeuner permet de faire connaissance avec d’autres fidèles du restaurant. L’atmosphère est amicale, le personnel est tout sourire et très professionnel. La cuisine d’Alain Solivérès est talentueuse. Le plat gagnant est pour moi le homard et le vin gagnant est le Mercurey. Merci à la famille Gardinier d’avoir aussi intelligemment assuré l’avenir d’un des restaurants les plus chaleureux de la grande cuisine française.

DSC00993 DSC00994 DSC00995 DSC00996

DSC00998

DSC00989 DSC00990 DSC00992

MENU TAILLEVENT 150326 001

MENU TAILLEVENT 150326 C 001