Dîner chez ma fille avec La Tâche 1995 jeudi, 20 novembre 2014

A l’occasion de l’anniversaire de ma fille cadette, nous lui avions offert des Silex de Dagueneau, vins qu’elle adore. Elle a envie d’en ouvrir un pour nous et nous invite chez elle. Le prétexte est idéal pour que je sorte de ma cave une grande bouteille.

Le Pouilly-Fumé Silex de Louis-Benjamin Dagueneau domaine Didier Dagueneau 2011
a un nez superbe de fruits blancs. En bouche il est tranchant comme un silex – justement – et se montre très civilisé. C’est du plaisir avec des sensations très minérales, une acidité superbe et bien dosée et un final long et cohérent. Le vin se boit avec beaucoup de plaisir. Il n’est pas trop l’ami des olives et de la poutargue. Il s’accorde bien avec le pain des amis, celui qu’utilise David Toutain. Je suis frappé par la gourmandise de ce blanc bien dessiné.

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1995
a un nez qui promet monts et merveilles. Il est très évocateur de délices. En bouche, il faut s’habituer pour entrer dans un univers de subtilité, un peu comme lorsqu’on entre dans une cathédrale. Venant d’un monde païen, il faut du temps pour communier avec un monde de ferveur. C’est un peu cela, l’approche de cette Tâche, dont on peine à faire le tour de toutes les complexités. Alors, on se concentre, on écoute le message du vin. J’y retrouve petit à petit toutes les vibrations des vins du domaine. Le sel est là, discret, les fruits roses noirs délicats et les variations gymnopédiques à la Eric Satie. Ce n’est pas une Tâche qui passe en force, même si elle a du volume, c’est une Tâche sérieuse qui suggère. Le mieux à faire c’est d’écouter et de capter tout ce que l’on est capable de saisir. Sur un gigot d’agneau juste rose, des pommes de terre rissolées et des champignons, se crée une atmosphère paysanne que La Tâche aime bien. Les champignons conversent bien avec ce grand vin. Autour de la table le silence se fait car nul ne voudrait manquer une partie du message. J’ai plus reconnu ce qui fait la richesse suggestive du domaine que la spécificité de La Tâche car ce vin demanderait quelques années de plus pour prendre l’assurance qui sera la sienne.

Les amis ont apporté des tombereaux de pâtisseries plus engageantes les unes que les autres, dont un paris-brest qui nous entraîne sur des rails de bonheur. Le Vin de Paille La Vignière Côtes du Jura Henri Maire 1999 est un vin frais, sucré, sans lourdeur, gourmand comme une compote de raisins de Corinthe, qui accompagne agréablement les desserts.

Que dire des vins ? Si l’on juge sur la noblesse et la complexité, La Tâche reçoit la palme. Mais si l’on juge du plaisir immédiat et gourmand, c’est le Silex qui gagne. Les amis que je verrai le lendemain chez Michel Rostang pour un dîner de truffes blanches sont émus par La Tâche. C’est le Silex que je retiens. Mais le plus fort est bien la chaude atmosphère de ce dîner avec ma fille, ma femme et des amis.

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Le bouchon du vin de paille s’est brisé en deux. Le bas du bouchon porte des cristaux.

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le Paris-Brest

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Dégustation des vins du groupe Vega Sicilia à Lavinia mercredi, 19 novembre 2014

Xavier Ausàs œnologue et directeur technique de Vega Sicilia présente des vins du groupe Vega Sicilia au restaurant de la boutique Lavinia
à Paris. Vega Sicilia, la célèbre maison qui produit l’emblématique Vega Sicilia Unico, a été fondée en 1864. En 1991 elle a commencé à commercialiser le vin Alion, en 1993 elle a commercialisé les vins de Tokay d’Oremus en Hongrie, en 2001 elle a créé Pintia et en 2009 elle a fondé une association avec une branche de la famille Rothschild pour exploiter les vins Macan dans la Rioja.

Xavier Ausàs nous fait découvrir plusieurs vins du groupe, donnant des perspectives sur ce que nous goûtons.

Oremus Dry Mandolas 2001
est un Tokay Dry, fait de 100% furmint. La couleur d’un jaune clair est belle. Le nez est fruité et très doux. En bouche le vin est bien sec, avec l’alcool présent, des évocations de pâte de fruit. En première approche il est assez court. Il a du poivre, une amertume agréable, un goût de pierre à fusil. Minéral, sans concession, strict, il ne cherche pas à flatter. Il a une belle acidité, des fleurs blanches et citronnées. Son final est celui d’un bonbon acidulé. Je le trouve moins étoffé que le 2007 que j’avais bu au siège de Vega Sicilia.

Alion 2011. Ce vin ne sera commercialisé qu’en 2015. Nous le goûtons donc avant mise sur le marché. Sa couleur est noire. Le nez est de cassis et de poivre. Il a toutes les caractéristiques d’un vin moderne, vif et élégant. On sent des feuilles de cassis et il est rêche comme une feuille d’artichaut. Il est agréable à boire avec un final gourmand et gastronomique. La bouche est ample, même si le vin est rêche.

Macan Clasico Rioja 2010. Contrairement à d’autres appellations, le Clasico est le second vin du Macan. 2010 est la seconde année faite sous la direction de Vega Sicilia, ce qui fait que l’on n’est pas encore au niveau de qualité que recherche Xavier Ausàs. La couleur est noire, le nez est très doux. La bouche est gourmande. On sent les fruits de cassis broyés. Le final est rêche et assèche la bouche. Il est très astringent. C’est un vin avec une belle attaque et un final rêche.

Macan Rioja 2010. La couleur est noire. Le nez est plus vif et plus cinglant, évoquant la feuille de cassis. En bouche l’attaque est plus stricte que celle du second vin, plus légère. Le vin est plus aérien. Le final est aussi astringent. Ces deux Riojas sont des vins poivrés qui « mangent les joues ». Le Macan est plus profond que le Clasico, plus long. Xavier nous dit que ces deux vins sont plus minéraux, plus fins et plus soyeux que le reste de la gamme de Vega Sicilia. L’association avec les Rothschild est venue du fait que les deux maisons font partie des Primum Familiae Vini, familles qui détiennent leurs propriétés viticoles depuis plus d’un siècle.

Valbuena 5° 2009. Alors que les deux Macan sont à 100% tempranillo, le Valbuena est à 95% tempranillo et 5% merlot. Le nez est extrêmement élégant, tout en subtilité. L’attaque est d’une grande ampleur et le final est beau. Le vin est rêche, mais derrière cet aspect se dégage un charme très convaincant. L’attaque est gourmande, la feuille de cassis est présente, avec du poivre. Lui aussi il mange les joues !

Vega Sicilia Unico 2004. La couleur est très noire mais sur le disque on voit une infime trace de tuilé. Le nez est profond, rassurant, car on pressent la richesse à venir. Le nez est ensorcelant, au point que j’hésite à porter le vin en bouche. L’attaque du vin est opulente, presque grasse. Le vin est noble. Il envahit la bouche. On se sent bien, car il n’y a pas d’excès, pas d’astringence et le final est gourmand. Le vin est tellement bon. Jeune et léger, plein de grâce et de fluidité. Il transcende les vins que nous avons bus auparavant. C’est du velours. Bien sûr, il faudra attendre au moins dix ans avant d’en boire toutes les potentialités.

Une discussion s’instaure car Xavier considère que Valbuena n’est pas un second vin de Vega Sicilia Unico mais un vin autonome, alors que ce vin ne provient pas de parcelles bien déterminées mais d’un choix qui est fait en goûtant les vins des différentes parcelles. On est plutôt dans l’acception française d’un second vin. Ce qui est fascinant, c’est la vision à long terme de Xavier, qui se projette toujours dans le futur. Par exemple, pour Macan dont c’est seulement le deuxième millésime sous son autorité, il dit : le travail sera réellement accompli dans vingt ans. A un autre moment il dit : il faudra juger de la pertinence de nos choix dans cinquante ans. Je partage son opinion quand il dit que les meilleurs Vega Sicilia Unico à boire en ce moment sont ceux des années soixante.

Il nous dit que le 2004 est d’une très grande année, la plus grande qui fait suite à 1970. A bon entendeur … Le menu de Lavinia qui nous permet de revenir sur les différents vins est : jambon Pata Negra à partager / bavette accompagnée de pommes de terre grenaille et champignons / fromage manchego / bavarois à la framboise. C’est simple, c’est bon, et nous nous régalons.

Les deux vins qui ressortent de ce déjeuner, c’est évidemment Vega Sicilia Unico, le seigneur, puis l’Alion, dont la vivacité et le sens gastronomiques s’expriment bien. C’est d’ailleurs ce vin qui s’exprime mieux sur la viande au goût prononcé que le Vega Sicilia qui a besoin de nourritures plus douces pour délivrer ses subtilités.

Xavier Ausàs est passionnant, comme je l’avais déjà constaté en visitant Vega Sicilia en Espagne. Sicilia est en fait une écriture déviée de Cécile, la sainte patronne des musiciens. La musique de l’Unico chante à mon cœur.

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à Lavinia, on ne perd pas le nord !

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Dîner au château de Beaune dimanche, 16 novembre 2014

La veille de la traditionnelle vente aux enchères des Hospices de Beaune, la 154ème, Joseph Henriot, son épouse et l’équipe de Bouchard reçoivent à l’Orangerie du Château de Beaune. Les invités sont nombreux et la représentation étrangère est plus large que d’habitude, avec des suédois, des norvégiennes, une lettone, et des représentants de pays hors Europe, d’Asie notamment.

L’apéritif se prend dans le délicieux salon du château, avec un Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1998. Le premier verre que je bois est marqué par une forte présence alcoolique, inhabituelle pour ce champagne. Le vin est bon, mais excessif. Avec une deuxième bouteille je retrouve la personnalité attachante de ce beau champagne, avec une spontanéité agréable. Ce champagne se boit avec plaisir, présent, fluide, et ample en final avec de beaux fruits jaunes.

Nous bavardons en français et en anglais et les conversations vont bon train avec des gens que je ne connais pas. Nous passons à table et j’ai la chance et l’honneur d’être placé à la droite de Dominique Henriot, la maîtresse de céans. Michel Bettane est un tel puits de science que tout le monde l’écoute avec le sentiment d’apprendre des choses que peu de gens savent.

Le menu préparé par le chef attaché au château est : royale de foie gras au pain d’épices / langoustines rôties, champignon du moment, émulsion cèpes et truffe de Bourgogne / filet de veau servi rosé, artichaut en farigoule, potiron, jus à la noisette croquante / plateau de fromage / dôme mandarine-marron sur un lit de dacquoise, râpé de citron vert.

Le Beaune premier cru Clos Saint Landry blanc Bouchard Père & Fils 2008
a une belle attaque épicée. Le vin est riche et pénétrant. Le final est vineux, très puissant. Le vin est frais, friand, immédiatement plaisant. Ce vin provient d’une parcelle achetée en 1791 par un ancêtre Bouchard. Christophe Bouchard ajoute : « c’est un vrai clos, ceint de murs. Cette parcelle était plantée de pinot blanc et c’est une rare parcelle bourguignonne à être plantée de blanc depuis deux cents ans ». La maison Bouchard est particulièrement fière d’avoir réussi les blancs de 2008. Ce Beaune est très beau, à boire maintenant mais il vieillira bien, grâce à un équilibre rare et une belle acidité.

Avec Dominique Henriot, nous avions tous les deux peur du pain d’épices annoncé sur le menu. Fort heureusement on ne le sent pas ce qui rend l’accord avec la royale de foie gras très agréable. Ayant gardé un peu du champagne, je constate à quel point le foie gras accentue l’énergie de l’Enchanteleur 1998.

Le Chevalier-Montrachet Grand Cru La Cabotte Bouchard Père & Fils 2003
crée un accord superbe avec le plat de langoustines, surtout avec les champignons et avec la lourde émulsion. Il faut en effet un plat puissant pour s’accorder avec ce vin gras mais frais, très percutant, fruité et gourmand. Le final est superbe. Le vin est atypique, noble, imposant, vin de plaisir. Et c’est une réussite de l’année 2003.

Le Beaune premier cru Clos de la Mousse Bouchard Père & Fils magnum 1990 a un nez superbe, subtil, qui anticipe la qualité du travail que l’on va retrouver en bouche. L’accord avec le veau est magique. Le vin a un peu d’amertume, le bois est présent et je lui trouve un petit côté salin, très bourguignon. Il n’a pas de signe d’âge et son final est joliment épicé. Michel Bettane dit que ce vin doit dépasser les 14° et qu’on lui trouve des accents de Châteauneuf-du-Pape, alors que je le voyais bourguignon. J’aime ce vin délicat et subtil.

Le Beaune-Grèves premier cru Vigne de l’Enfant Jésus Bouchard Père & Fils 1961
a un nez qui montre son alcool, comme la première bouteille de champagne. Michel Bettane et moi avons instantanément la même réaction : ce n’est pas le vin que nous attendons. Une deuxième bouteille nous plaît car on a le velouté si caractéristique de ce grand vin. Ce vin est généreux, de grande pureté, de grande classe, avec l’amertume exactement dosée. Une troisième bouteille est aussi superbe mais très différente. Il y a moins de velours, mais plus de tension. Tout le monde à notre table préfère le second, ce que je comprends, mais j’ai un petit faible pour l’énergie du troisième, même si le second est plus dans la ligne historique du Beaune Grèves que nous aimons. Le vin a été associé à de beaux fromages de la région mais la subtilité du vin serait peut-être mise en valeur par une viande.

Le délicieux dessert a été accompagné d’eau, car Joseph et Dominique n’aiment pas boire de champagne au dessert.

Le repas a été superbe et les accords particulièrement réussis. Les quatre vins sont si différents qu’il serait difficile de les hiérarchiser. S’il faut en choisir un, ce sera le Chevalier-Montrachet La Cabotte 2003 qui est aussi responsable du plus bel accord.

L’atmosphère au château de Beaune est toujours aussi amicale. Ce fut une belle soirée.

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Dîner de gala de l’académie du vin de France vendredi, 14 novembre 2014

L’Académie du Vin de France tient son assemblée en son siège, le restaurant Laurent. Avant le dîner de Gala, à 19 heures, une paulée est organisée au premier étage du restaurant dont le principe est simple : chaque vigneron fait goûter l’un de ses vins de la dernière année qui vient d’être mise en bouteilles. Ce sera, selon les régions ou les maisons, 2012 ou 2011. On peut goûter Romanée Saint-Vivant Domaine de la Romanée Conti 2011 à la subtilité pleine de grâce, Vosne Romanée 1er Cru aux Malconsorts domaine Dujac 2012 de belle construction et de bel équilibre, Morey-Saint-Denis domaine Dujac 2012 un peu plus dur et jeune que le Vosne Romanée, Volnay-Santenot du Milieu 1er Cru domaine des Comtes Lafon 2011 d’une très forte personnalité dans la séduction, Crozes-Hermitage Alain Graillot 2012 aussi souriant et convaincant que l’académicien qui l’a fait, Côte-Rôtie Maison Rouge domaine Georges Vernay 2011 très plaisante, L’Hermitage domaine Jean-Louis Chave 2011 éblouissant de pétulance, Château Gazin Pomerol 2012 superbe de construction, Château Corbin-Michotte Saint-Emilion 2012 que je trouve absolument superbe, Château Calon Saint-Georges Saint-Emilion 2012
qui se cherche encore un peu, Château Montrose Saint-Estèphe 2012 très prometteur, Mas Jullien Terrasses du Larzac 2011 de grande gourmandise et charnu, Châteauneuf-du-Pape Château de Beaucastel famille Perrin 2011 très bien construit et chaleureux, Château Simone Vin de Provence 2011 brillant au possible. Beaucoup d’autres rouges étaient présentés.

J’ai pu me souvenir des millésimes grâce aux photos que j’avais prises. Les blancs étant dans des seaux, je n’ai pas de photos permettant de signaler les années. Dans ce que j’ai goûté, les plus grands blancs sont l’Hermitage Chave, le Riesling Clos Saint-Hune de Trimbach, le Riesling Rangen de Thann de Zind-Humbrecht, le Condrieu du domaine Georges Vernay et le Beaucastel. Mais il y en avait beaucoup d’autres. Pour les liquoreux, seulement deux vins, le Jurançon Quintessence du Petit-Manseng Cauhapé au final incroyable de longueur et de charme et le Château de Fargues 2009 royal et imposant.

Bien sûr on pense plus à bavarder avec les vignerons présents qu’à analyser en détail ces vins, mais comme chaque fois, on est favorablement impressionné par la qualité des vins des académiciens. On redescend de l’étage pour l’apéritif. Le Champagne Pol Roger Brut Réserve sans année
est agréable à boire, gentiment titillé par des toasts à l’anguille, au foie gras et au pied de porc.

Malgré les appels pressants du personnel du restaurant, personne ne passe à table, tant il est agréable de discuter avec les uns et les autres, Eric Orsenna, Bernard Pivot, le président de l’académie Jean-Robert Pitte, Michel Bettane et tant d’autres.

A la table où je suis placé, il y a, entre autres, Anne et Jean Charles de la Morinière du domaine Bonneau du Martray, venus avec un couple d’amis bourguignons, Monsieur Delmas, l’homme qui a fait Haut-Brion pendant tant d’années, Pierre Trimbach, Anne de Laguiche. Antoine Pétrus est venu rejoindre notre table un peu plus tard, rattrapant les plats qu’il n’avait pas eus.

Le menu du dîner de gala de l’académie du vin de France, préparé par un groupe d’académiciens pour coller aux vins, avec la collaboration de Philippe Bourguignon et du chef Alain Pégouret
est : huîtres spéciales n°3 David Hervé, gelée iodée et salicornes / queues d’écrevisses, mousseline de brochet et bisque légère / caille dorée en cocotte, rôtie aux abats, pommes soufflées « Laurent » / Saint-nectaire / marron Mont-Blanc, litchis.

Les vins du repas sont ceux des vignerons les plus récemment entrés à l’académie. Le Riesling Clos Sainte-Hune maison Trimbach 2005 n’a pas l’ampleur du magnifique 2002 que j’avais bu la veille mais il a comme lui une incomparable précision. Le riesling est brillant et l’accord avec les huîtres mais surtout la gelée iodée est magique. C’est à mon sens le plus bel accord du dîner car la continuité gustative est parfaite, rafraîchissante.

Le Condrieu « Coteau de Vernon » domaine Georges Vernay 2011 est un solide gaillard avec une belle mâche gourmande et un peu de fumé. Avec le plat, il prend encore plus de coffre. Les queues d’écrevisse sont goûteuses, la mousseline de brochet apporte sa douceur face à la bisque divine qui excite le vin par ses épices joyeuses. Le plat est pour moi le plus beau et l’accord sur la bisque est exaltant.

La Côte Rôtie Maison Rouge domaine Georges Vernay 2007 a un nez d’une générosité extrême. Il promet des bonheurs gourmands. Mon avis va différer de celui d’autres convives dont Philippe Bourguignon à qui j’en ai parlé, car une amertume un peu prononcée sur la fin de bouche limite mon plaisir. Philippe est au contraire enthousiaste pour ce vin. La caille est belle et c’est surtout la sauce qui donne des ailes non pas à la caille mais au vin.

Le Mas Jullien Coteaux du Languedoc 2007 est joli dans sa simplicité généreuse, main de fer dans un gant de velours, droit et expressif. Du fait de sa jeunesse, j’ai trouvé une impression de granulé dans sa matière. C’est un beau vin qui devrait vieillir avant que l’on n’y touche.

Le Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles Hors Choix maison Trimbach 2007 est une merveille de fraîcheur et de glisse. Il se boit si facilement ! Pierre Trimbach nous explique que « Hors Choix » a été inscrit pour exprimer que dans ce vin, il y a non seulement la sélection des grains nobles, mais la crème de la crème des raisins. On le croit sur parole tant le vin au fruit infini est bon. Le litchi lui va bien , comme l’ensemble du dessert.

Dans ce repas, mon classement serait : 1 – Gewurztraminer, 2 – Riesling, 3 – Condrieu. Tous les accords ont été réussis, ce qui veut dire que la commission nommée pour préparer le repas de l’académie a contribué à un réel succès. L’accord de la gelée iodée avec le riesling est magique. La bisque avec le Condrieu n’en est pas loin.

Comme chaque année Jacques Puisais a décrit les vins du repas avec une audace dalinienne. Qui d’autre que lui pourrait digresser ainsi ? Il a été applaudi, comme Philippe Bourguignon à qui l’on doit ce superbe repas et un service impeccable. Tous les plats ont été d’une réalisation parfaite. Quand le Michelin s’en apercevra-t-il ?

Après le repas les discussions allaient bon train. J’avais raté à l’apéritif le Champagne Billecart-Salmon cuvée François Billecart 1999 aussi ai-je rattrapé cette erreur au moment du café. Le champagne est guerrier, solide, campé sur ses assises fortes. C’est un très bon champagne puissant, idéal pour finir agréablement cette belle soirée d’amitié avec de grands vignerons et leurs amis.

 

Quelques vins présentés à la « paulée » :

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les vins du repas (préparés par un sommelier du Laurent, il y a une erreur de millésime pour le Sainte-Hune qui est un 2005 au dîner et non 2009)

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Déjeuner de famille et dîner au restaurant Garance jeudi, 13 novembre 2014

Avec ma fille, pour un repas de famille, nous buvons un Champagne Billecart-Salmon Brut 2000. Ayant en mémoire l’extraordinaire Billecart-Salmon 1961 en magnum bu il y a peu, je suis un peu déçu que ce champagne, qui est bien fait, dégage aussi peu d’émotion. Il ne communique pas vraiment avec nous et reste sur un service minimum, comme le gréviste d’un service d’Etat. Dommage. Il faudrait vérifier si c’est ce millésime ou cette bouteille qui n’est pas au rendez-vous.

Nous sommes quatre pour un dîner de travail au restaurant Garance. Ayant l’initiative du dîner, je suis celui qui invite. Tomo, qui est de la partie, m’indique qu’il fournira les vins. N’aimant pas être en reste, je mets dans ma musette un vin de plaisir prêt à boire, pour que les vins ne perturbent pas nos discussions. Etant arrivé en avance pour que mon vin soit ouvert suffisamment à l’avance, je propose à Tomo qui a déjà ouvert ses vins que nous trinquions sur un champagne. Notre choix se porte sur le Champagne Egly-Ouriet Brut Grand Cru 2002
qui a été dégorgé en septembre 2011, après 98 mois de cave. Je ressens la même réserve que pour le champagne d’hier. Il est manifestement bien fait, la matière vineuse est belle, mais je le trouve sans énergie et sans envie de nous communiquer une émotion. Suis-je marqué par les dégustations récentes de très grands champagnes, c’est assez probable, car j’ai normalement un faible pour les champagnes Egly-Ouriet. De temps à autres, sur les brioches de Guillaume Iskandar le chef, le champagne se réveille et s’anime, mais le compte n’y est pas.

Comme chaque fois, je n’arrive pas à obtenir le menu écrit aussi suis-je un peu désemparé pour décrire la première entrée très goûteuse qui a accueilli le Riesling Clos Sainte-Hune Trimbach 2002. Quel vin magnifique ! Je suis toujours impressionné par la précision des grands rieslings et le mot qui me vient pour celui-ci est « cristallin ». Il est tellement brillant, gracieux, d’une acidité suprême très bien dosée, que je suis conquis. Ce 2002 est parmi les plus grands Sainte-Hune, un vrai bonheur.

Le homard aux petits légumes crus est hélas dominé par le gingembre et n’arrive pas à dominer au sein du plat beaucoup trop épicé.

André n’aime que les jeunes bordeaux aussi goûtons-nous un Château Pichon-Longueville Comtesse de Lalande 2009. Tomo, voulant faire un clin d’œil d’amateur de vins anciens, associe à ce vin un Château Pichon-Longueville Comtesse de Lalande 1952. La comparaison est intéressante. Le 2009 a une belle attaque généreuse dans le fruit qui procure un plaisir qui est remis en cause par l’amertume que l’on sent en fin de bouche, un peu trop prononcée. Le vin est franc et généreux, mais ce final lui nuit. Le 1952 a une attaque nettement moins tonitruante, mais il s’installe en bouche et délivre des complexités beaucoup plus grandes et une belle cohérence. Le son de ce vin est moins fort que celui du 2009, mais il apporte beaucoup plus de dialogue à celui qui le boit. Mon cœur va donc nettement vers le 1952 qui n’a pas une amertume aussi prononcée dans le final. Je comprends qu’André soit toujours du côté du 2009, mais ses certitudes vacillent grâce à cette comparaison.

La tête de veau associée à du poulpe est originale et gourmande. Bien grasse, elle cohabite très bien avec les deux vins qu’elle renforce.

Mon vin est servi maintenant, la Côte Rôtie La Landonne Guigal 1996, qui met un terme à toutes les possibles incertitudes : s’il y a un vin qui est au-dessus de tous les autres, c’est bien celui-là. Cette Landonne est absolument exceptionnelle. C’est le vin parfait. Alors que j’ai chanté de nombreuses fois les louanges de La Turque 1996 vin confondant de puissance et de fruit, La Landonne me semble supérieure. Elle est très différente car elle ne passe pas en force. Elle joue les bourguignonnes et tout en elle est subtilité. Je crois bien que cette bouteille est au sommet de ce que peut donner la Landonne de Guigal. Nous sommes sur un petit nuage tant le vin est bon, très au-dessus de ce que j’attendais. Il a du velours, une mâche superbe, et une fluidité impressionnante. C’est un grand bonheur que de boire ce vin. Inutile de dire que le superbe lièvre traité en deux service est un régal avec ce vin.

Sur un brie à la truffe de la ferme des trente arpents, le Vin de l’Etoile Vieilles Vignes Philippe Vandelle 2011 est bien jeune mais judicieux. Il a des intonations de grappa car il est servi un peu chaud. Il a beaucoup de force, une belle présence avec ce côté très oxydatif des vins jaunes, même s’il ne l’est pas.

Le dessert au chocolat est très goûteux et plombant comme il se doit, aussi le Rivesaltes Ambré Fabienne et Pascal Rossignol 2009
est-il le bienvenu pour rafraîchir le palais. La force alcoolique est là, mais ce vin fait de grenache blanc et de grenache gris réussit à être léger avec de beaux fruits confits dans des tons oranges et bruns.

La profusion de plats et de vins n’a pas nui à la qualité de nos travaux. Il n’était pas question de voter dans cette atmosphère studieuse mais je classerai : 1 – Côte Rôtie La Landonne Guigal 1996, 2 – Riesling Clos Sainte-Hune Trimbach 2002, 3 – Château Pichon-Longueville Comtesse de Lalande 1952, 4 – Rivesaltes Ambré Fabienne et Pascal Rossignol 2009.

Ce fut un très beau repas.

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Dîner au restaurant Encore avec Latour 1907, La Tâche 1969, Haut-Brion 1926 et beaucoup d’autres samedi, 8 novembre 2014

C’est en mars 2001 que j’ai commencé à écrire sur un forum américain de vins, « Bordeaux Wine Enthusiasts ». L’intérêt d’échanger sur des forums croît lorsque l’on rencontre les membres dans la vie réelle. Des voyages aux USA, en Bourgogne et à Bordeaux ont permis de créer des liens d’amitié. Lorsque Tim s’est installé à Paris, très naturellement, il s’est inscrit aux séances de l’Académie des Vins Anciens. A l’occasion de la présence à Paris de Bill et Janet, un couple de texans avec lequel j’avais il y a dix ans, partagé de belles soirées, Tim me suggère un dîner avec ces amis, et annonce deux bouteilles à niveau assez bas, La Tâche 1969 et Haut-Brion 1926. C’est l’occasion de proposer de mon côté quelques bouteilles à risques, de niveaux qui peuvent représenter un danger, et je remplis mes musettes de sept bouteilles, avec l’idée que s’il y en a deux bonnes, mon apport sera satisfaisant.

Au restaurant Encore, dont le chef japonais est Masahide Ikuta, nous serons cinq, Tim, Bill et Janet, un ami français de Tim et moi. Dès 19 heures Tim et moi ouvrons les vins pour savoir lesquels seront retenus. Pour donner du cœur à l’ouvrage, Florian Perate, le sommelier du lieu me suggère un Champagne Pierre Gerbais l’Originale fait à 100% de pinot blanc. J’adore ce champagne léger, précis, de belle pureté, qui se boit facilement, d’une acidité joyeuse.

Les trois premières bouteilles de mon apport semblent encourageantes. Comme il y a profusion de vins, je n’ouvre qu’une seule autre de mes bouteilles, parce qu’elle est un symbole amusant. L’assiette où s’entassent les bouchons est noire de déchets de bouchons, dont ceux du Latour 1907 qui m’a posé énormément de problèmes, car le goulot de la bouteille est très resserré en haut, interdisant au bouchon de sortir entier .

Le menu nous est imposé, et nous rajoutons au menu de base les suppléments possibles, foie gras et truffe blanche : velouté d’héliantis au foie gras, écume de café / noix de Saint-Jacques au lard noir gascon, mousseline de carotte à l’orange et safran / lieu jaune de l’île d’Yeu nacré sur la peau, poireau, beurre blanc au Tosazu / pigeon, chou Kale, mousseline de panais / Mont-Blanc, crème glacée au pin de Gènes. La truffe blanche très odorante s’est retrouvée dans plusieurs plats.

Le Meursault d’un négociant de Beaune 1950
à la couleur légèrement ambrée a un parfum superbe et intense. Il a une belle acidité et une grande précision malgré ses origines modestes, et se signale par un final extrêmement long. Nous adorons ce vin que j’ai apporté. C’est une surprise.

A côté de lui, le Trebbiano d’Abruzzo Luigi Cataldi Madonna 2005
vin italien qui titre 13°, même s’il est agréable à boire, fait beaucoup trop simple à côté de la complexité du meursault qu’il met en valeur. Le 1950 réagit bien sur l’écume de café et sur le lard des coquilles.

Le lieu jaune n’est pas vraiment idéal pour les bordeaux, mais nous nous en accommodons. Le Château Latour 1907
que j’ai apporté a un nez extraordinaire. Il est impressionnant de personnalité. En bouche, son attaque est assez légère, mais tout se joue dans le final qui est remarquable. Tous les amis sont conquis par ce grand vin, qui aura attendu 107 ans avant d’être bu !

A côté de lui le Château Haut-Brion 1926, d’une année que je considère comme la plus belle que j’aie bu pour Haut-Brion, a une couleur incroyable. On dirait 2006 que l’on ne se tromperait pas sur la couleur. Son parfum est moins expressif que celui du Latour. Il a une belle attaque généreuse, fruitée et veloutée, mais son final est faible. En fait il lui faudra du temps car progressivement le final va s’assembler. Le Latour, de son côté, ne va jamais faiblir, se montrant éblouissant, même si ce n’est pas sur l’attaque ou sur le fruit qu’il brille le plus. C’est sa rémanence gustative et sa subtilité qui emportent nos suffrages.

Le Château Lafite-Rothschild 1988
est un vin bien construit, mais la proximité des 1926 et 1907 montre à quel point il est peu complexe comparé à ces deux anciens, exactement comme le blanc italien à côté du meursault. Lafite rattrapera ses aînés lorsqu’il aura des cheveux blancs !

Juste après les bordeaux et avant la viande, nous buvons le vin que symboliquement j’ai ajouté. C’est un Corbières, VDQS mis en bouteilles à Longjumeau des années 60, car il y a plus de quarante ans que je l’ai acheté dans un lot chez un épicier auvergnat. Il porte encore son prix : 4,00 F. Bien évidemment nous n’en attendons rien, mais nous sommes extrêmement surpris qu’il soit aussi précis, fruité, et agréable à boire. Aucune déviation n’en perturbe le goût. Contrairement à la chanson de Georges Brassens, le temps fait quelque chose à l’affaire, en bonifiant ce petit vin au point de le rendre plaisant. C’est le troisième exemple qui montre que « old is beautiful ».

C’est maintenant le grand moment, car nous allons boire deux vins de la Romanée Conti. Celui de Tim a un niveau très acceptable, alors que le Richebourg que j’ai apporté souffre d’un niveau très bas. Le Richebourg Domaine de la Romanée Conti 1953
a un nez assez époustouflant, nettement plus expressif que celui de La Tâche. Mais il a un côté perlant, avec une impression de pétillant, qui interdit de l’aimer. On ne peut pas demander l’impossible aux très bas niveaux. En revanche, La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1969, s’il n’a pas le parfum superbe du Richebourg a une tenue en bouche exemplaire, avec le caractère salin des vins du domaine et un velouté remarquable. C’est un très grand vin, de belle structure et charme intense.

Tim sert son Château Pavie 1975
et semble l’apprécier, mais je le trouve déséquilibré.

Le Coteaux du Layon Chaume Domaine Cady 1995
est très agréable, enveloppant, simple mais charmeur et bien réactif sur le dessert. J’adore son fruité très spontané. A côté de lui, le Château Filhot crème de tête 1990 est un grand vin mais trop lourd car le sucre est surabondant. Dans quelques années ce sera une autre affaire lorsqu’il aura tempéré ses ardeurs.

Mes amis ont voté pour Latour 1907 avant La Tâche 1969. J’ai fait le classement inverse. Ensuite, c’est Haut-Brion 1926 et le Meursault 1950 qui complètent le quarté. Avec douze vins pour cinq, nous avons poussé très loin les limites du raisonnable. Florian le sommelier est extrêmement sympathique, la cuisine est excellente. Le lieu est à recommander. L’atmosphère était superbe, ce fut un grand moment.

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la couleur des deux liquoreux (à gauche le 1990)

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il n’y a pas de photo du velouté. Un comté de 36 mois a été ajouté au menu.

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Dom Pérignon lance P2 et P3 à Artcurial mardi, 4 novembre 2014

Dans ma musette, il y a le reste de la bouteille de Corton Charlemagne 1949 du déjeuner que je souhaite partager avec Richard Geoffroy
car je me rends au siège d’Artcurial
où Richard présente cinq vins de Dom Pérignon, dont un P2 et un P3. P2 représente le moment de la deuxième plénitude de Dom Pérignon et P3 la troisième plénitude. Ces concepts vont se substituer aux Dom Pérignon Œnothèque qui indiquaient seulement qu’il s’agit de dégorgements tardifs. Alors que P2 et P3 correspondent à des moments précis dans la vie d’un champagne, qui est marquée par au moins trois pics d’excellence, vers dix ans, vingt ans et trente ans, juste pour fixer les idées, ces sommets n’étant pas les mêmes pour tous les millésimes.

Quelques personnes sont invitées pour une opération commerciale, puisqu’il y aura dans un peu plus d’un mois une vente aux enchères conduite par Artcurial au cours de laquelle seront vendus des P2 et des P3 de Dom Pérignon. C’est une façon de communiquer sur le concept et d’essayer de fixer des niveaux tarifaires élevés. Personne ne s’en cache.

Les experts d’ Artcurial parlent de leur maison de vente, Richard Geoffroy parle de ses vins.

Le Champagne Dom Pérignon 2004
a un nez de caramel et de lait. En bouche il évoque le caramel, la noisette, il est lacté et assez gras, ce qui est lié à une température de service assez élevée. Il a de belles épices et une belle acidité dans le final. L’amplitude est certaine. Le vin a un final qui claque bien.

Le Champagne Dom Pérignon P2 1998
a une bulle lourde, un nez discret. Il est plus tendu que le 2004, plus vineux, plus strict et moins ample. Très fluide, il est très agréable à boire. Il est très champagne, plus fluide et plus tendu que le précédent. Il est à noter que P2 n’est écrit que sur une collerette très haut sur le goulot. Aussi quand on m’a servi, je n’ai vu que Dom Pérignon 1998. Et je le trouvais tellement bon que j’ai posé la question à Richard sur sa date de dégorgement, étonné que le 1998 « normal » soit à ce niveau. Ayant apporté le Corton-Charlemagne Peyret Frères 1949 de ce midi, j’en ai fait profiter mon voisin et c’est inouï comme le vin blanc élargit le champagne et développe sa palette aromatique comme une loupe grossissante. Richard Geoffroy viendra me voir après la présentation et fera la même constatation. La caractéristique du Dom Pérignon P2 1998 est la vivacité.

Le Champagne Dom Pérignon Œnothèque 1996
a un nez très présent, fort, évoquant l’ardoise humide. Fort curieusement l’attaque est très douce, mais ça ne dure pas. Le vin est très minéral, pierre mouillée, fluide, viril, guerrier. Ce vin est énorme, « pushing », d’une grande jeunesse et d’une force de conviction imparable. C’est un très grand vin de tension, tranchant, au final gigantesque. Contrairement à d’autres 1996 qui sont dans des phases ingrates, celui-ci est brillant.

Le Champagne Dom Pérignon Œnothèque 1995
a un nez plus calme. Il l’est aussi en bouche, plus assis, plus archevêque. Il a des fruits confits et des épices, du caramel en traces. Le fruit est ample, le vin est riche et opulent mais il a moins de vibration que le 1996.

Le Champagne Dom Pérignon P3 1970
a un nez sublime, frais, subtil, séducteur et envoûtant. En bouche ce champagne est au sommet de l’expression de Dom Pérignon. C’est un vin abouti, avec une bulle très présente. Il a la fluidité, un envahissement du palais et un final très long. Il est difficile à caractériser mais il est impressionnant de vitalité. C’est un très grand champagne.

Je classerai 1970, 1996, 1998, 1995 et 2004.

A la fin de cette dégustation je me dis que bien sûr, on est en pleine opération de promotion des concepts de P2 et P3. Mais force est de constater que ce qu’on boit est absolument excellent. Richard Geoffroy veut mettre en valeur les moments où le champagne est à un pic d’excellence, et qu’on le veuille ou non, cela correspond à une réalité. Pour justifier une telle stratégie, il va falloir garder des stocks élevés longtemps. Mais on voit à la dégustation que c’est justifié.

Je suis persuadé depuis toujours que les vins n’ont pas une vie linéaire mais un parcours gustatif sinusoïdal avec des pics d’excellence et c’est en en discutant qu’une amitié est née avec Richard Geoffroy. Contrairement à lui j’ai plus de sympathie pour le mot Œnothèque que pour les P2 ou P3 qui évoquent les parkings d’aéroports, mais je souhaite plein succès au lancement de ce concept, s’il ne se traduit pas par une folie tarifaire.

Cette dégustation fut hautement démonstrative de la capacité de Dom Pérignon d’être grand et de conserver, grâce à cette stratégie, jeunesse et vivacité.

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Déjeuner au restaurant Garance avec un Chambertin Louis Latour 1961 sublime mardi, 4 novembre 2014

Mon ami Tomo était devenu papa et nos folies s’étaient arrêtées depuis plus de six mois. Cela nous manquait à l’un et à l’autre. Je propose à Tomo que nous déjeunions ensemble. Il acquiesce et choisit le lieu : le restaurant Garance. Il annonce son vin le premier : Gevrey-Chambertin 1er Cru Clos Saint-Jacques Armand Rousseau 1969.

Je cherche dans ma cave des vins qui pourraient accompagner le sien et je choisis un Corton-Charlemagne Peyret Frères 1949 au beau niveau et dont la couleur est un peu ambrée, puis une bouteille absolument magnifique de couleur et de niveau, un Chambertin Grand Cru Louis Latour 1961. Mon emploi du temps ne me permettra pas d’ouvrir les vins longtemps à l’avance.

A mon arrivée, pendant que j’officie pour ouvrir les vins, Tomo me tend un verre de champagne que je trouve fort bon. Bien que je l’aie bu il y a peu de temps, je ne cherche pas à reconnaître. C’est le Champagne Dom Pérignon P2 1998. Il est intense, équilibré, avec une belle acidité, des fruits jaunes et une bonne mâche. Il a vocation à permettre au Corton Charlemagne de se refroidir dans un seau à glace.

Ayant salué le chef Guillaume Iskandar, j’ai vu sur son plan de travail des champignons qu’il associe normalement avec des seiches. Je lui ai demandé de nous préparer une assiette de champignons sans rien d’autre pour le vin blanc.

Nous commençons par la traditionnelle brioche avec une crème épaisse et goûteuse qui met en valeur le Corton-Charlemagne Peyret Frères 1949. Sa couleur dans le verre est nettement moins ambrée que ce que j’avais vu à travers le verre de la bouteille. Le nez est profond, intense, évoquant des fruits confits. La bouche est gratifiante car le vin est très carré, solide, structuré. Il a des fruits confits, une belle acidité, mais tout se joue dans le final qui expose tous les agrumes que l’on pourrait imaginer : orange, sanguine, pomelos et citron vert, le tout étant suggéré plus qu’imposé.

Les champignons donnent au vin une ampleur extrême. Le vin a relativement peu de complexité malgré ce final excitant mais il est solide et très riche. Il n’évoque pas trop un Corton-Charlemagne mais on peut dire que c’est un grand vin de grande vitalité et sans trace d’âge.

Guillaume le chef qui connaît mes goûts a ajouté aux champignons de fines tranches de saucisse de Morteau et sur ce blanc, c’est un régal incroyable.

Le lièvre sera présenté en deux services. Trois morceaux différents et une sauce diabolique, puis le deuxième service en un effiloché de chair, sur une sauce encore plus forte. C’est un régal complet.

Le Gevrey-Chambertin 1er Cru Clos Saint-Jacques Armand Rousseau 1969
est clairet. Le nez est extrêmement expressif et m’évoque des vins de la Romanée Conti. Et cette impression se retrouve en bouche. Le vin est salin, très bourguignon et je suis sûr qu’à l’aveugle j’aurais dit un vin de la Romanée Conti, par exemple une Romanée Saint-Vivant. Car l’amertume, la rigueur sont très proches de ce que je trouve dans les vins du domaine de la Romanée Conti. Il a une belle longueur, aucun fruit mais de belle variations vineuses sur un message strict.

Ce vin est le jour et la nuit si on le compare au Chambertin Grand Cru Louis Latour 1961. Car le chambertin est rond, riche, fruité, glorieux, plein, d’une mâche conquérante. Sa puissance est étonnante. Il est à l’aise sur toutes les composantes des deux plats de lièvre, mais c’est surtout sur les sauces qu’il trouve un écho fantastique. Tomo, comparant les deux vins, dit que l’on voit bien que le 1961 est un grand cru, comparativement au 1969. Le chambertin est indéniablement la vedette de ce repas. Il est fruité, joyeux, riche.

J’ai rapporté chez moi le reste du chambertin, qui a été chahuté dans les transports. Le dernier cinquième bu au dîner est noir, d’une matière lourde et dense et le vin est tout simplement divin. Ma femme, sentant le vin lui donnerait cinquante ans de moins ! Ce vin est immense.

Par hasard, Tomo avait trouvé un catalogue Nicolas de 1972. Des Grands Crus de 1961 se vendaient dans les 50 Francs, le Chambertin Grand Cru Louis Latour 1961 se vendait 150 F et la Romanée Conti 200 F. Le chambertin que nous avons bu était au sommet du tarif de Nicolas !

Ce déjeuner a relancé la machine qui nous fera partager des grands vins. Vite, lançons le suivant.

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Dom Pérignon P2 1998 et Corton Charlemagne 1949

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