Visite de la maison Vinhos Barbeito Madeira lundi, 6 octobre 2014

Nous nous rendons au siège de la maison Barbeito. Nous sommes reçus par Ricardo Diogo V. Freitas, qui est le vinificateur de cette maison en 1946. Il nous fait faire une visite très détaillée de ses installations et expose ses réflexions sur la vinification des madères, pour laquelle il a des visées assez avant-gardistes. Il est précis, réfléchi, et ambitieux pour son appellation et pour sa maison. C’est lui-même qui conduit la dégustation. Ses explications ravissent mes amis sommeliers.

Je dois avouer que je suis probablement passé à côté de certains vins de ce domaine, sans doute influencé par le premier vin qui m’a poussé sur de fausses pistes. Les sommeliers ont unanimement célébré la qualité des vins jeunes de cette maison alors que je n’ai apprécié que les vins anciens. On doit donc lire mes notes en sachant que je suis sans doute passé à côté des premiers vins. Je reproduis ici mon ressenti sans le changer, sachant que certaines critiques ne sont pas confirmées par mes amis.

Madère Barbeito Bastardo 2014 Tank 24 Foot treading : ce vin est plus qu’un bébé ! Il a été fortifié il y a deux semaines. Sa couleur est irréellement rose, celle d’un jus de fraise. Le nez évoque un jus de fruit sucré. L’acidité est forte et fait penser à la grenade. Le final est celui d’un bonbon anglais amer. Il n’y a aucune référence pour ce vin

Madère Barbeito Bastardo 2013 Cask 50 Foot treading : nez d’alcool, de camphre et de menthol très frais. Le goût est très curieux. Il y a aussi du bonbon anglais. Le final n’est pas agréable, chimique, avec alcool et amertume.

Madère Barbeito Bastardo 2012 Cask 161 Direct Pressing : nez identique à celui du 2013 médicinal. La bouche est beaucoup plus civilisée. Il y a de la douceur et de l’équilibre. Le final a un peu de médicinal.

Madère Barbeito Malvasia 2012 Cask 155 Lagar + Pneumatic Press : nez de marc, alcool un peu imprécis. Bouche de vin assez calme, final rêche de barbe d’artichaut. Le vin est difficile avec un peu de quinquina.

Madère Barbeito Malvasia 2010 Cask 203 Pneumatic Press : ce vin qui a trois ans de fût a un nez poussiéreux un peu coincé. La bouche est beaucoup plus plaisante. Il y a de la cohérence, avec des notes de gentiane, de pamplemousse confit. Le final est rêche, amer, mais on sent que le vin a un beau potentiel de vieillissement.

Madère Barbeito Sercial 1992 Frasqueira : il a passé vingt ans en fût. Il est aussi sans concession. La bouche est claire, pure, très élégante. On sent les pomelos et les oranges. Le final est plaisant, de très grand longueur. Il est intéressant car énigmatique et sans concession.

Madère Barbeito Verdelho 20 years old, Ribeiro Real. Ce vin a 85% de Verdelho et 15% de Tinta Negra comme le permet la législation. Le nez comme d’autres a de la grappa, mais ici avec des fruits blancs et roses comme litchi et fraise. La bouche est très pleine, bien intégrée. C’est un vin de soleil. De belle mâche il évoque des fruits jaunes. Il a une belle persistance sucrée. C’est un vin élégant.

Madère Barbeito Verdelho 1992 Frasqueira. Le nez évoque l’alcool et les fruits jaunes. La bouche est cohérente mais pas très complexe. Le final est très agréable, pas très long mais intelligent. Il n’y a pas beaucoup d’émotion mais le vin est bien fait.

Madère Barbeito Boal 1992 Frasqueira. La bouche est très épicée. C’est un vin sans concession au final très frais, sans défaut. Vin de grande fraîcheur dont on sent l’alcool et de jolis fruits confits.

Madère Barbeito Boal 20 years old Ribeiro Real. Le vin comprend 85% de Boal de vingt ans et 15% de Tinta Negra de 1952, 1953 et 1954. Pourquoi a-t-on mis des Tinta Negra si vieux ? C’est en fonction du goût recherché. Le nez est flatteur et plus parfumé que les vins précédents. On sent qu’avec ce vin, on franchit une étape. Plus charmeur, plus gras, il a de jolies épices et un beau final de pomelos et de fraîcheur.

Madère Barbeito Malvasia 20 years old Lot 14050 : le nez est monolithique d’alcool et de fruits jaunes. La bouche est très élégante, cohérente, avec un final frais et mentholé et de pamplemousse. Ce vin sans concession est de très grande qualité. Il est gourmand.

Madère Barbeito Malvasia 40 years old Mae Manuela : le vin porte le nom de la mère de Ricardo. Le nez est charmant, floral et menthe. La bouche est complètement intégrée. Encore un saut qualitatif énorme. Le vin est cohérent avec des épices, du caramel, du café, des agrumes. Le final est très long avec des agrumes et des épices. C’est un très grand vin à la persistance infinie.

Madère Barbeito Malvasia 1880 : vin de jeunesse dont l’énergie et la puissance sont incroyables. Le nez est d’alcool et d’un caramel léger. La bouche est grasse, de caramel, café épices. Il est complexe, au final d’une jeunesse folle. L’alcool paraît incroyablement jeune et cela me surprend. Le vin est gourmand avec des notes d’orange confite et de zeste.

A ces treize vins se rajoute un Madère Barbeito Boal 1982 au joli nez calme, intégré, fait d’épices de café et de caramel.

Si je me suis régalé des vins plus anciens, j’ai été plus circonspect sur les vins plus jeunes contrairement à mes amis. J’admets volontiers avoir pu passer à côté. J’ai préféré garder mes notes comme elles étaient. L’accueil de cette maison incarnée par son propriétaire a été l’un des plus chaleureux et complet.

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le patron qui nous reçoit, extrêmement brillant

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des couleurs parfois surprenantes pour les plus jeunes vins

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notre groupe

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visite de la maison Pereira d’Oliveira Vinhos, déjeuner et visite de vignes lundi, 6 octobre 2014

Le troisième jour sur l’île de Madère a commencé pour certains par une visite du marché. J’étais trop fatigué de la journée aux 51 vins pour me lever aux aurores. Le groupe se reforme pour la visite de la maison Pereira d’Oliveira Vinhos fondée en 1850.

L’immeuble est contigu de l’université de Funchal et juste à côté de l’hôtel de ville. On est donc au centre de la ville. Une immense salle servant de boutique et de lieu de dégustation accueille des groupes. Felipe, le vinificateur, nous salue comme une délégation importante mais ce sera sa seule action car cette visite sera la seule où aucun responsable ne nous parlera de sa maison, de ses vins, et ne donnera aucune indication de la sucrosité ou toute autre donnée dont les autres maisons ne furent pas avares.

Nous sommes assis dans cette grande salle bruyante car les groupes se succèdent à une cadence infernale. Dès qu’un groupe de touristes en provenance d’Hawaï s’en va, c’est un groupe d’allemands qui s’assoient sans perdre une seconde et dès que les allemands sont partis, des français les remplacent et jettent des regards incrédules devant les bouteilles qui se regroupent sur nos tables. Car nous allons être gâtés.

Hélas, la température de service, comme à la présentation de l’institut du vin de Madère, est insupportable. Nous trempons nos verres de madère dans les verres d’eau fraîche qui nous sont servis, pour tenter de les refroidir. Les serveuses réagiront à notre demande et les derniers verres servis seront presque à la température idéale.

Nous commençons par les « dry » (seco). Madeira d’Oliveira Tinta Negra 10 years old. La couleur est d’un bel acajou. Le nez est d’un bel alcool fruité. Le vin est bien fluide, sec, d’un beau fruit avec un final agréable et bien équilibré.

Madeira d’Oliveira Sercial 1989. L’ambre est prononcé. Le nez est discret mettant en avant l’alcool. Lorsque je dis que j’ai écrit : « belle bouche d’armagnac », mes amis rient mais c’est la traduction du fait que la température de service entraîne la mise en avant de l’alcool. Le final du vin est agréable et sans aspérité. Le vin fluide est doux, bien qu’il soit dry. Il se boit bien.

Madeira d’Oliveira Sercial 1969. L’ambre est joli. L’alcool est bien intégré. On sent du thé, du caramel, de beaux fruits. Le vin est très complexe et subtil au final gracieux. Il est long. C’est un bon vin.

Madeira d’Oliveira Sercial 1928. L’ambre est foncé. Le nez est très complexe, avec une fraîcheur mentholée. Le vin est très doux, caramel, café, réglisse, de bel équilibre, charmant. Le bois apparaît. C’est nettement un grand vin très agréable et intégré.

Nous poursuivons avec les « medium dry » (Meio Seco). Madeira d’Oliveira Verdelho 2000. L’ambre est foncé. Le nez est de fruits compotés et marinés. Il y a dans le goût beaucoup de fruits confits et de caramel. Ce vin manque de complexité. Son final n’est pas très net et court.

Madeira d’Oliveira Terrantez 1988. L’ambre est clair. Le nez est assez discret. La bouche est de caramel et de bois, pas très complexe. Le final est boisé, un peu pâteux. Il y a trop d’alcool.

Madeira d’Oliveira Verdelho 1973. Le vin est sombre, beaucoup plus qu’un 1973 bu la veille. Le nez est lourd de caramel. La bouche a du caramel salé, du bois. Le final boisé est plus agréable.

Madeira d’Oliveira Terrantez 1971. Le vin est plus clair. Le nez est assez pur. Ce vin est plus doux, plus madère. J’aime bien son équilibre. Il a un beau final complexe de caramel et de fraîcheur.

Madeira d’Oliveira Bastardo 1927. Le vin est ambré et on constate que le caramel qui peut être ajouté dans les vins rend les couleurs assez uniformes. Le nez est fermé. Le caramel du vin est lourd, à la limite fatigant. Lourdaud au premier contact, il se civilise et montre de la fraîcheur.

Madeira d’Oliveira Verdelho 1905. Le vin est ambré, le nez est discret, avec un alcool bien dosé. Dans le goût c’est la première fois que je sens aussi nettement l’orange dans les vins de cette maison. Le final est très beau, avec des zestes d’orange. Même si le caramel est présent, j’aime beaucoup ce vin. Lorsque j’y reviens après deux ou trois minutes, je le trouve très élégant.

Nous passons maintenant aux « Medium Sweet » (Meio Doce). Madeira d’Oliveira Boal 15 years old. Vin ambré, au nez frais et peu distinctif. La bouche est agréable, caramel et crème brûlée, le final est assez frais mais le vin est quand même assez lourd. Olivier l’assassine.

Madeira d’Oliveira Boal 1987. Le nez est fermé. Le caramel et l’alcool ne sont pas bien intégrés. On ne sent presque que le caramel dans le final.

Madeira d’Oliveira Boal 1958. Le vin est plus clair, le nez est incertain. Le vin est pataud mais les conditions de dégustation ne sont pas bonnes.

Madeira d’Oliveira Boal 1922. La couleur est assez claire, le nez est frais. Le vin est très frais, agréable, de bel équilibre et de beau final frais. Le caramel est bien intégré et ne nuit pas à la fraîcheur. C’est un grand vin que j’apprécie.

Madeira d’Oliveira Boal 1908. Il est très sombre et le caramel domine, pour la première fois salé. Ce n’est pas un vin très agréable.

C’est maintenant le tour des « Sweet Madeira ». Le Madeira d’Oliveira Malvasia 15 years old est de couleur acajou. Le nez est assez frais et épicé. Le caramel est assez frais rendant le vin assez agréable.

Madeira d’Oliveira Malvasia 1990. Ambre clair. Nez discret qu’Olivier ne trouve pas très net. Le vin est frais, charmeur, au final sur la fraîcheur qu’Olivier conteste.

Madeira d’Oliveira Malvasia 1907. Nez de fruits frais dont figue. Goût médicinal, pruneau, caramel et soja. Le final est frais marqué de caramel. C’est un beau vin mais très sur la réduction. Il manque un peu de finesse.

Madeira d’Oliveira Malvasia 1875. Ça, c’est vraiment un vin de 1875, car on sent qu’il est cohérent avec son âge. Il est parfait, magique, avec un beau pruneau. J’adore ce vin authentique qui ne m’apporte que du bonheur. Il a de la fraîcheur mentholée, un beau fruit. Il est au top.

Sans doute pour se faire pardonner de la température des vins et du brouhaha que nous aurions évité si une salle de dégustation nous avait été proposée, Felipe fait servir, hors programme, Un Madeira d’Oliveira Verdelho 1850. Il est très foncé, avec un nez très dense de caramel. Il y en a beaucoup et le vin très réduit évoque le vinaigre balsamique. Le vin est toutefois sympathique, au final très frais. Il est très bon même s’il est plus monolithique que le 1875 qui le précède. Il a des tons de café.

Le 1907 me semble avoir été rajeuni, le 1875 gardé dans son intégrité et pour le 1850 je m’interroge car il est quand même très pur, très concentré. Le Boal 1922 sur lequel je reviens est tellement agréable à boire, avec son acidité si bien dosée.

Une ajoute ne semblant pas suffisante, arrive alors un Madeira d’Oliveira Moscatel 1875. C’est le même que celui que nous avons goûté le premier jour à l’institut, que j’avais beaucoup aimé, même s’il n’était pas dans mon top 5. Le nez est réduit, de caramel de fruit. Le vin est énorme, joyeux, au final en fanfare. Café, moka, cacao, balsamique, il nous fait la danse des sept voiles pour nous conquérir. Je l’adore avec sa gourmandise naturelle.

En définitive, le seul contact que j’aurai eu avec Felipe, c’est lorsque j’ai acheté une bouteille de Madeira d’Oliveira Moscatel 1875, car tous ces vins sont disponibles à la vente. L’impression qui reste après cette dégustation, c’est l’absence du directeur à nos côtés, c’est la température inacceptable des vins, mais c’est surtout une incroyable générosité qui nous a fait approcher des vins dont certains sont transcendantaux. Une nouvelle visite de cette maison dans de bonnes conditions s’impose. Voilà que j’invente un prétexte pour revenir dans cette île merveilleuse.

Nous partons déjeuner au restaurant « O Lagar » qui est en hauteur et permet d’avoir une vue panoramique sur la côte sud de l’île. La salle est immense, très « famille ». Nous commençons par des morceaux de poulpe coupés en dés, puis des poissons en beignets, et le clou de ce restaurant, c’est que la viande est servie sur d’immenses piques accrochées à un anneau de grande taille qui est centré à la verticale du centre de notre table ronde, à environ 1,5 mètre au dessus. La sauce suinte le long de chaque pique et l’on doit se servir en faisant glisser la viande le long de ces gargantuesques brochettes. La viande est délicieuse. J’ai essayé de boire le moins possible, car le dîner de gala est ce soir. Le Vinho Verde Muralhas de Monçao est juste frais, sans plus, et je ne me souviens plus du rouge, trop moderne à mon goût.

Nous sommes partis ensuite au nord de l’île, où le climat est résolument différent, le soleil perçant rarement les épais nuages. La mer est sauvage, les couleurs sont sombres. Le but de cette visite est de voir les vignes. C’est saisissant. Sur des parcelles minuscules et sur des pentes abruptes, l’idée de mécaniser quoi que ce soit est une hérésie. Tout se fait à la main, dans des conditions où il est presque impossible de se tenir debout. Il faut avoir vu ces vignes pour comprendre l’importance de l’homme et de cette nature ingrate et si belle. Les vignobles du sud sont aussi escarpés mais semblent plus faciles à exploiter.

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la salle et la boutique

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notre dégustation

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la 1875 que j’ai achetée

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les environs et la mairie

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déjeuner au restaurant « O Lagar »

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les gigantesques brochettes verticales

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visite des vignes du nord de l’île

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les vignes en pergola et un cep de vigne impressionnant

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Visite au siège de la maison Henriquès & Henriquès à Madère lundi, 6 octobre 2014

Nous nous rendons au siège de la maison Henriquès & Henriquès pour une visite et une dégustation. La personne qui nous fait visiter est le responsable de la vinification. Il insiste beaucoup sur le choix des tonneaux, qu’il achète déjà utilisés pour d’autres vins et qu’il revend pour la vinification d’autres vins. Il nous montre l’outil qu’il a inventé pour nettoyer des fûts usagés en préservant la capacité du bois à exprimer les odeurs et parfums qui participeront aux qualités de ses madères. Il y a un stockage impressionnant de tonneaux d’âges canoniques qui ont fait le tour de l’Europe, à Bordeaux ou en Ecosse. Les vins que nous allons boire sont tous des madères Henriquès & Henriquès.

Le Tinta Negra 3 years Henriquès & Henriquès vinifié en blanc, c’est-à-dire non fortifié a un nez camphré. Le vin est léger, frais, évoque des fruits jaunes. Le vin est très sec, agréable.

Le Madère Henriquès & Henriquès Tinta Negra 3 years fortifié a une belle définition. On sent le bois, l’alcool, le final est très doux, de belle présence et gourmand.

Le Madère Henriquès & Henriquès Tinta Negra 1997 a été élevé dans des barriques à whisky, pour y trouver le côté vanille. Le nez est très élégant avec de la douceur de fraise et de loukoum. La bouche est très douce, de vanille et fraise. Le final est comme un bonbon pétillant.

Le vin suivant est bu à l’aveugle. Le nez a de l’alcool. Il y a du poivre, du pruneau, de l’alcool. C’est un Madère Henriquès & Henriquès Tinta Negra 50 years. Le final est explosif, pruneau, très riche et gourmand. Délicieux caramel charmeur, café, orange confite. Ce vin n’est pas délicat mais gourmand.

Madère Henriquès & Henriquès Tinta Negra medium dry 3 years. Nez d’alcool et de bois. Bouche très douce et de bel équilibre. Beau final de thé, délicat et frais. Vin plutôt sec malgré sa dénomination.

Madère Henriquès & Henriquès Sercial 2001. Le nez est plus fruité. Le vin est plus sec, plus strict. Peu flatteur mais on sent qu’il vieillira bien.

Madère Henriquès & Henriquès Sercial 1971. Nez assez fermé, de foin. Le vin est strict aussi, astringent comme le précédent. Vin sans concession, foin et malt. Dans le final apparaît un joli pruneau. Il semble gastronomique avec une belle acidité.

Madère Henriquès & Henriquès Verdelho 20 years. Couleur plus brune. Nez élégant, sans alcool apparent. On sent les agrumes. La bouche est belle, élégante, raffinée, féminine. Bel équilibre de beaux fruits. Final très pamplemousse. Gourmandise et fraîcheur de bonbon acidulé.

Madère Henriquès & Henriquès Boal 15 years, nez dont l’alcool est très fort. Café, vin ample, généreux, puissant. Caramel, bois, épices, moka, cacao, tabac. Ce vin de grande complexité va bien vieillir.

Madère Henriquès & Henriquès Boal 1957. Nez très élégant, subtil, de fruits caramélisés. Bouche fluide, élégante, et complexe. Le vin a du caramel, de la crème brûlée, du zan. Notre mentor évoque le métal des pièces métalliques que l’on ressent sur les gencives. Je ressens café brûlé ou crêpe brûlée.

Madère Henriquès & Henriquès Terrantez 20 years. Nez droit, peu développé, attaque superbe en bouche, très grande complexité, fruits caramélisés. Très élégant et poivré final très poivré qui nuit à la complexité malgré de jolies notes d’agrumes, de café et de caramel.

Madère Henriquès & Henriquès Malvasia 20 years nez élégant, fluide, léger. Grande douceur, élégance, pruneau, café et caramel. Très élégant et gastronomique.

Madère Henriquès & Henriquès Soleira Malvasia 1894. Nez très jeune avec alcool bien présent. Fraîcheur mentholée, bouche très intégrée, élégante, caramel, moka, paris-brest. Final charmeur, complexe, frais. C’est un vin magnifique, mis en bouteille en 2008.

Madère Henriquès & Henriquès Terrantez 1954 couleur vert olive foncé. Nez pruneau et olive noire. Incroyable concentration, comme de la glycérine. Gras comme de la mélasse, comme un vinaigre balsamique. C’est la quintessence de la complexité du madère car en plus il est frais. Déconcertant mais tellement bon. Le vin le plus étonnant qui évoque un peu les Chypre 1845. A l’issue de cette dégustation, le responsable de Henriquès & Henriquès nous invite à déjeuner dans un site montagnard de sa société où les vignerons viennent livrer leurs raisins.

Nous visitons les installations de réception des raisins et une voiture se présente. Deux vignerons versent les grappes de raisins de quelques cageots puis s’en vont. C’est la fin des vendanges, avec des quantités infimes par livraison.

La maisonnette où nous nous rendons ne paie pas de mine. C’est simple, probablement un réfectoire, mais les bouteilles présentées sur les murs montrent que c’est aussi un lieu de réception, à la bonne franquette. On nous verse un Madère Henriquès & Henriquès Sercial 10 years très facile à vivre, d’un beau fruit jaune simple et agréable. Deux énormes plats sont posés sur des rampes de cuisinière à gaz pour être servis chauds. Il s’agit d’une Feijoada, plat de riz, haricots et boulettes de viande. C’est simple, gourmand, et nous mangeons de bon cœur. Le plat est idéal pour les vins. Le Douro blanco Dalva 2012 est frais, de belle structure, bien jeune et sec.

Un Douro Dalva rouge 2011 est beaucoup plus dur et plus amer, brutal et difficile à boire. Finalement le meilleur accord avec le plat est créé par le Sercial. Cette pause sans chichi en pleine campagne nous a tous ravis.

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les fûts dont beaucoup ayant servi au mûrissement des bourbons

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dégustation et boutique

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le déjeuner

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l’ami Christian, auteur de plusieurs photos mises sur ce reportage du voyage à Madère (jolie photo)

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dîner de gala au restaurant Il Gallo d’Oro à Madère et fin du voyage lundi, 6 octobre 2014

Il est recommandé de lire les sujets sur Madère dans l’ordre chronologique, c’est-à-dire en remontant de bas en haut les articles qui sont consacrés à ce voyage.

Le dîner de gala se tient à l’hôtel Cliff Bay, au restaurant Il Gallo d’Oro, dont le chef, un aixois, est Benoît Sinthon. On sent que toute l’équipe est heureuse de nous accueillir, chef, sommeliers, serveurs, car c’est l’occasion de parler avec des grands professionnels de MWW. Nous sommes reçus par la directrice générale de l’institut qui nous avait accueillis il y a deux jours.

L’apéritif s’est fait au Campolargo Brut rosé Spumante Portugal 2000 qui est fort agréable.

Le menu conçu par le chef est : lobster medallion, gravlax salmon, dill and iodized cream sauce / local sea bream « spring 2014″, scallops and leek tortellini, watercress cream and yuzu tartare / premium fillet, veal cheek confit, black truffle juice / golden chocolate ball, Valrhona chocolate, pineapple, vanilla ice cream.

La cuisine du chef est de très haut niveau. Les cuissons sont exactes et les produits de haute qualité. Je n’ai pas aimé l’amuse bouche au foie gras broyé en fine poudre et froid. Tout le reste a été parfait.

Le Madeira Henriquès & Henriquès Verdelho 20 years old est tout en douceur. Le final est très doux, de beaux fruits.

Le Madeira Barbeito Ribeiro real 20 years old a de belles complexités. Il est moins charmant mais très raffiné. C’est le Barbeito que je préfère. C’est lui qui l’emporte sur le foie gras, qui n’arrive pas à devenir gourmand sur ces deux vins.

Le Palacio da Brajueira Vinho Branco 2012 n’est pas mal du tout pour un vin blanc aussi jeune. Le homard est très bon mais servi un peu froid. Le vin blanc strict va bien avec le côté iodé, mais j’aimerais un blanc plus opulent.

Le Nossa Calcario Vinho Branco 2010 est un vin fait par William du groupe MWW. Il est très bon pour accompagner le pageot cuit à merveille. Il crée un très bel accord.

Le Quinta do Ribeirinho Vinho Tinto 2006 est le vin de beau-père de William. Il est très bon et arrive à se marier à l’oursin ! Chapeau pour un vin rouge.

Le Doda Alvaro Castro Dirk Niepoort 2010 est un vin rouge plus rêche, plus strict, astringent et moins agréable. La viande est superbe.

Nous revenons aux madères. Le Madeira Pereira de Oliviera Boal 1968 évoque le thé, le caramel et le bois dans le final. Il n’est pas mal avec ses accents de thé.

Le Blandy’s Madeira Wine Malvasia 1988 a une grande élégance. Il est raffiné, au final frais.

Le Madeira Barbeito Malvasia 40 years old Mae Manuela a un fruit très curieux de fraise. Il a de la fraîcheur. C’est le plus compliqué à comprendre. Il diffère de celui que nous avons goûté chez Barbeito.

Il restait de la Chartreuse jaune 1996 retour d’Italie. Nous en avons à nouveau pris une belle gorgée, pour sceller un peu plus notre amitié. Nous nous sommes tous félicités d’être ensemble.

Des amis décident de rentrer à pied à l’hôtel. La directrice me propose de me déposer à l’hôtel, ce que j’accepte. Arrivé à l’hôtel, je considère que je n’ai pas assez remercié mes amis aussi prends-je à l’envers le chemin vers le restaurant pour les croiser. Je remonte plus de la moitié du chemin, ce qui me paraît anormal. Aussi, je scrute à travers les vitres d’un bar animé à cette heure tardive. Je les reconnais et je m’attable à leur côté en leur offrant une boisson de bonne soif et d’amitié. Ils commandent des cocktails alcoolisés. Les discussions sont chaleureuses et s’éternisent. Il est temps que je rentre me coucher. J’ai compris qu’ils resteraient pour une deuxième tournée. Quelle santé !

Ce séjour à Madère est une illumination. L’île est magnifique, luxuriante, aux sites innombrables. Les vins de madère me fascinent par la diversité de leurs goûts. Il y a toujours un madère qui me surprendra. Ces vins sont digestes, gastronomiques sur des pistes bien précises. Grâce à la notoriété des membres du MWW nous avons joui d’un accueil exceptionnel.

Ce séjour à Madère fut une moment d’une rare intensité. Boire 25 vins de plus de cinquante ans sur trois jours, c’est exceptionnel, dont plus d’une dizaine de vins du 19ème siècle. Quel week-end !

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le lendemain, départ par la route

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dernières images de Madère vues d’avion

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approche vers Lisbonne

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Vive Madère et ses vins de bonheur

Dégustation et dîner à la maison Blandy’s Madeira lundi, 6 octobre 2014

Nous nous rendons à la maison Blandy’s Madeira qui possède un ensemble immobilier qui semble avoir été figé dans ce qu’il était à sa création en 1811. C’est un véritable musée avec un enchevêtrement de halls, de maisons, de pièces de toutes tailles où l’on se perdrait tant l’ensemble est immense. Le travail de conservation de l’originalité des lieux est considérable. Dans des greniers qui paraissent fragiles, des centaines de fûts font vieillir de précieux nectars. Comment des fûts si lourds ont-ils pu grimper aussi haut, c’est un mystère. Une immense salle où nous dînerons plus tard est organisée comme une bibliothèque où, derrière des grillages boisés, des centaines et des centaines de bouteilles de toutes les années sont autant d’archives de la maison. C’est un lieu de rêve.

Ana Soares est une personne exubérante qui nous fait partager sa fierté de représenter cette maison vénérable. Francisco Albuquerque, œnologue et directeur du département vins, va conduire la dégustation organisée en deux séries de six verres ou sept. Nous allons parfois comparer les vins deux à deux.

Le Madeira Blandy’s Sercial 10 years old a un nez équilibré entre l’alcool et des senteurs médicinales. La bouche a de l’alcool car il fait chaud, du thé et de la noix. Le final est agréable.

Madeira Blandy’s Sercial 1998 que l’on compare a un nez assez doux même si le vin est sec. Il est très agréable et ne donne pas la sensation d’alcool. La bouche est plaisante, flatteuse mais pas très complexe. L’alcool apparaît dans le final. Le 10 ans d’âge est un peu plus énergique que le 1998.

Madeira Blandy’s Verdelho 10 years old a un nez assez discret. Le vin est plaisant, plus fruité que les Sercial.

Madeira Blandy’s Verdelho 1998 a un nez légèrement plus marqué. La bouche est très agréable. Il est plus complexe et plus fruité que le 10 years old. Il a un beau final. Ce vin très proche du précédent est peut-être un peu plus rond.

Madeira Blandy’s Bual 10 years old a un nez capiteux, riche, qui correspond à la couleur. Le vin riche a un final mentholé. C’est un vin lourd au caramel fort.

Madeira Blandy’s Bual 2002 a un nez avec un fort alcool. Il est charmeur en bouche, fluide, mais pas aussi précis que le précédent. Je préfère le 10 years old, plus équilibré.

La deuxième série commence avec un Madeira Blandy’s Malvasia 10 years old. Le nez est très doux et frais. Le vin est riche et de forte personnalité, très fruit et pâte de fruit. Le final évoque un caramel de fruit.

Le Madeira Blandy’s Malvasia 1996 a un nez plus discret. Il est moins riche, plus sec. Elégant il fait ressortir son alcool dans le final. Cette comparaison concerne deux vins qui sont les plus différents : le premier est très doux et le second est sec.

Le Madeira Blandy’s Malvasia Vintage 1988 a un nez plus proche du Malvasia dix ans. Il est très doux. C’est un vin riche et élégant. Lourd d’épices et d’alcool dans le final, il est de persistance aromatique extrême.

Le Madeira Blandy’s Sercial 1975 a un nez très discret. Il est très fluide en bouche, beau vin frais au final marqué d’alcool et de thé. C’est un vin intéressant.

Le Madeira Blandy’s Verdelho 1973 a un nez élégant et discret, la bouche est toute en douceur. Le vin est très intégré et cohérent. Il a un beau final de madère. C’est un beau vin.

Le Madeira Blandy’s Boal 1969 a un nez discret. La bouche est généreuse, bien construite. Il y a du poivre, un beau fruit. Le final très long est épicé.

Le Madeira Blandy’s Boal 1920 a un nez élégant, c’est-à-dire que l’alcool n’est pas dominant même si on le sent. Il ya un peu de pâte de fruit dans ses suggestions. En bouche le vin est superbe car tout est cohérent. Il y a du caramel, du fruit caramélisé, de la fraîcheur. Il y a beaucoup de noblesse dans le final très long. Ce vin mis en bouteille en 2006 évoque le pain d’épices, le miel et le caramel. On sent la cohérence de l’âge. Il n’est pas très complexe mais il est très élégant. C’est un bon vin.

Le vin mystère qui nous est servi est un Madeira Blandy’s Tinta Negra 1995. Le nez a un fort alcool et du caramel. La bouche est gourmande. Très beau vin au final généreux de pruneau, caramel et alcool.

Lorsque cette dégustation parfaitement orchestrée et riche de vins superbes est finie, nous nous rendons dans la bibliothèque où peut-être plus d’un millier de bouteilles nous contemplent. Le personnel de restauration a installé une table magnifique. Le menu composé par le chef de la maison Blandy’s est : poultry consommé flavored with Sercial, vermicelli pasta and quail egg / braised tuna with sesame seeds and rose pepper crust over celery root purée and saffron threads / leg of lamb confit in spicy olive oli, mashed sweet potatoes and croutons of fried maze / chocolate brownie with nuts, focaccia of mascarpone with almond and pistachio ice cream with apricot coulis / cheese platter with pumpkin and walnut compote.

N’ayant pas retrouvé mes notes, je ne peux que citer les vins avec quelques flashs de ma mémoire. Le Madeira Blandy’s Sercial 10 anos a très bien profité du consommé qui lui a donné de l’ampleur. Le Prazo de Roriz Douro 2009 et le Pombal do Vesuvio Douro 2009 sont d’honnêtes vins de table adaptés aux plats.

Le Madeira Blandy’s Colheita Malmsey 1996 est très agréable et a essayé de jouer son rôle sur des fromages qui ne lui conviennent pas, car seule une pâte bleue réagirait.

Il se trouve que Christian, l’un des plus remuants et drôles des membres de MWW a son anniversaire le jour même. Nos hôtes réagissent de bien belle façon en faisant ouvrir un vin de son année, un Madeira Blandy’s Bual 1968 très agréable et gourmand.

Christian de son côté est venu avec une Chartreuse jaune V.E.P. 1996 « retour d’Italie » qui lui a été offerte par des amis pour qu’il la boive avec les Mad Wine Waiters. Cette Chartreuse est absolument exceptionnelle, opulente, grasse, pure explosion de fleurs et d’herbes, forte de ses 130 plantes dont la composition n’est pas révélée. Ana Soares grimace devant la force des 42° mais elle est rapidement conquise par cette diabolique complexité. Malgré la fatigue d’un jour où nous avons dégusté cinquante et un vins, nous avons fait honneur à cet alcool, la meilleure des médecines qui soit.

L’accueil de la Maison Blandy’s a été exceptionnel. Vive le vin de Madère, aux diversités infinies.

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la « bibliothèque » qui accueillera le dîner

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la dégustation

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le dîner

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et la fameuse Chartreuse, offerte par Christian dont c’est l’anniversaire

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Voyage à Madère – jour 1 dimanche, 5 octobre 2014

Des sommeliers, dont deux meilleurs sommeliers du monde, se sont constitués en un groupe amical pour faire des visites sérieuses de régions viticoles et aussi pour être moins sérieux et profiter de leur amitié. Avec un petit clin d’œil aux Masters of Wine, ils se sont appelés Mad Wine Waiters, MWW. Joao, l’un d’entre eux, habite à Londres et est originaire de Lisbonne. Je l’avais rencontré au fabuleux déjeuner au siège du champagne Salon où avait été ouvert Salon 1943, vin de mon année.

C’était un tel cadeau dont j’avais une responsabilité indirecte, puisque j’avais la chance d’être né une année où Salon a été produit (je n’avais qu’une chance sur trois), Joao, pour me remercier, m’a proposé de me joindre à son groupe MWW pour une visite des vins de Madère. Une telle proposition ne se refuse pas.

Me voilà partant sur TAP vers Funchal, la ville principale de Madère, via Lisbonne. Si Air France a cessé de recruter ses hôtesses avec un premier critère qui serait leur beauté, puisqu’il faut lutter contre les stéréotypes du genre – sans toutefois la rendre interdite – il est bien agréable de constater qu’Air Portugal conserve la beauté comme critère. Sur les deux vols Paris Lisbonne et Lisbonne Funchal, la promotion de la beauté portugaise a fonctionné à plein. Et l’amabilité aussi.

Les vents qui lèchent cette île volcanique ont secoué l’avion à l’arrivée, ce qui m’a fait penser à l’arrivée sur l’île de Pâques, elle aussi volcanique, avec des reliefs de même nature. L’urbanisation est débridée et anarchique mais cette île est à taille humaine. A peine débarqués, et sans avoir eu le temps de défaire nos valises, nous partons à l’institut des vins de Madère, IVBAM, Instituto do Vinho do Bordado e do Artesanato da Madeira.

Au seuil de l’institut on nous dit : « vite, vite, vite, la télévision veut interviewer Joao et Olivier Poussier », meilleur sommelier du monde 2000, présent dans notre groupe. Notre dégustation sera filmée.

Nous avons devant nous quinze vins qui exhalent des parfums extraordinaires. La directrice de l’institut présente les missions de l’institut. Rubina, charmante et jolie experte de l’institut nous parle des vins de Madère et des réglementations qui dirigent les appellations. C’est extrêmement intéressant. Du niveau de la mer et jusqu’à 200 mètres d’altitude, on cultive surtout la banane. De 200 mètres à 700 mètres, c’est le domaine de la vigne qui pousse en pergola, en espalier ou à ras du sol. Lorsque la vigne est en pergola, il y a d’autres cultures au sol, à l’ombre de la vigne. Et lorsque la vigne est en espalier, on peut cultiver dans les allées de la pomme de terre.

Rubina précise les cépages qui interviennent dans l’appellation, l’usage de chaque cépage dans les vins à dénomination spécifique. Elle rappelle ce que sont les Colheita, Frasqueira, Vintage et selon quelles règles se font les soleiras. Chaque étape du processus de vinification est détaillé et c’est passionnant. Elle définit les dry, medium dry, medium sweet et sweet.

Elle explique la phase cruciale « estufagem » qui veut que le madère soit chauffé entre 45 et 50° pendant au moins trois mois.

Mais les papilles s’impatientent, car nous avons devant nous quinze vins dont quatre du 19ème siècle qui sont de redoutables tentations.

Nous sommes sept sous la bannière de Mad Wine Waiters, MWW. Les membres viennent de Grande Bretagne, d’Allemagne, de Belgique, du Portugal et de France. Ils ont tous un passé de sommelier et exercent divers métiers du vin. Un belge est vigneron au Portugal.

Mes notes sont prises à la volée. Je n’ai pas la compétence de mes amis, et mes jugements différeront parfois de ceux d’Olivier Poussier. Il donnent mes impressions de voyage.

Madère Colheita Tinta Negra 1995. Tinta Negra est le cépage dominant sur l’île de Madère avec environ 250 hectares sur les 450 hectares de l’appellation. Ce vin a une couleur foncée. Le nez est d’alcool et lacté. Il convient de dire que les vins nous ont été servis beaucoup trop chauds, avec au moins dix degrés de trop, ce qui veut dire que dans ces notes, l’alcool sera souvent cité, qui efface beaucoup des subtilités des vins du fait de la chaleur. Le vin, comme tous les madères, a une belle acidité. Il a un bel équilibre et une fraîcheur de zeste d’orange. S’il y a du lacté, le zeste domine dans le final.

Madère Boal 1984. Dans le nez, il y a de la crème caramel, mais aussi une évocation de fraise tagada. Belle acidité, du gras, plus prononcé que dans le 1995. Pruneau et impressions lactées. Le final est frais.

Madère Malvasia 1989 nez beaucoup plus doux car le vin est medium dry. Il est floral, vineux, raisin de Corinthe, pruneau. Il est séduisant, le plus féminin des trois.

Madère Terrantez 1976 nez discret avec un peu de poussière. Un peu de fruit rose frais en bouche, attaque fraîche, léger caramel. La structure ne me paraît pas très précise mais le final est plus structuré, voire séduisant. Il y a du pruneau frais.

Madère Sercial 1969. L’alcool est fort. Le nez est très pur. L’attaque est claire, le vin est bien dessiné. En bouche, ce n’est que du bonheur. Le vin est fluide, l’alcool est équilibré. Le final est merveilleux.

Madère Boal 1958. Le nez est à la fois discret et intense, c’est-à-dire complexe. Il y a du caramel et la bouche est influencée par la chaleur. Le vin est lacté, avec des notes de thé. Il est très sec. Le final est fruité, de fruits de toutes les couleurs. Le final est de pomelos et pruneaux.

Madère Sercial 1940 nez de lilas, de fleurs. La bouche est lactée, caramel, roudoudou, amande grillée. Le final est distingué, écorce d’orange et peau de pomme. Ce vin rebondit comme un ricochet, sa longueur est infinie.

Madère Malvasia 1933. Le nez est incroyable, presque mentholé. En bouche le vin est très civilisé et doux, pâte de fruits et caramel. On retrouve la menthe et le fenouil dans le final. Ce vin est magistral.

Madère Bastardo 1927. Le nez est discret et ne fait pas apparaître l’alcool. Il évoque la pierre mouillée par un torrent. La bouche est lactée, d’une distinction rare. Le final est noble et racé. Il est enchanteur. On pense à une pêche de vigne ou un fruit baignant dans l’alcool. Avec le 1933, ils sont les plus grands à ce stade.

Madère Verdelho 1912. Le nez est discret. Le vin est lacté et racé mais il a un peu moins de personnalité et de typicité. Il a de la fraîcheur et des évocations de pomelos dans le final.

Madère Boal 1903. Le nez est très racé, la bouche voluptueuse, complètement intégrée. Il y a de la pâte de fruit, de la noix, du bois. Le final évoque café, caramel. Ce vin est terriblement séduisant et de plaisir.

Après ces onze vins, c’est le grand moment d’émotion, car les quatre vins sur la table sont du 19ème siècle.

Madère Verdelho 1890. Le nez est raffiné, élégant, l’alcool semble mesuré. La bouche est d’une noblesse rare, le vin est très cohérent entre les tendances fruits, noix, pâtes de fruits, épices. Le final est très fort, en fanfare. C’est un vin noble, très grand.

Madère Moscatel 1875. L’alcool est présent au nez mais le vin en bouche est frais. L’attaque est très caramel, fruits confits. Le vin a de la puissance. On ressent un immense sentiment de plaisir car tout est cohérent. Ce vin est très grand.

Madère Sercial 1862. Le nez est discret. Ce vin fait plus léger et plus calme mais il a de la cohérence et de l’élégance. Thé, épices, bois des îles sont présents. Le final est plus court et moins gratifiant que les autres.

Madère verdelho 1850. Le nez est indéfini. La bouche est peu précise et amère. Il n’a pas trop de typicité mais il apporte du plaisir. On en ferait bien son ordinaire !

A l’issue de cette fascinante dégustation, ce qui me frappe, c’est l’incroyable diversité des vins de Madère. Il n’y en a pas deux qui se ressemblent. Ce qui veut dire qu’on ne peut jamais dire que madère, on connaît ! La richesse aromatique des vins est extrême.

Mon classement sera : 1 – Malvasia 1933, 2 – Verdelho 1890, 3 – Bastardo 1927, 4 – Boal 1903. Ce qui est à remarquer, c’est que dans mon classement, je retiens quatre cépages différents. Et si j’ajoutais un cinquième, ce serait le Moscatel 1875, ce qui fait une variété de plus. Il est à noter qu’étant à l’institut du vin de Madère, les noms des domaines n’ont pas été cités sur nos feuilles de dégustation.

A ce propos, il y a environ 2000 viticulteurs dont la parcelle moyenne ne dépasse pas 3.000 mètres carrés qui vendent leurs raisins à huit grands groupes dont certains n’ont pas de vignes en propre. Il faut dire que les vignes sont tellement difficiles d’accès, sur des pentes inimaginables, que la cueillette ne peut se faire que dans un cadre familial où l’on ne compte pas son temps. Dans un groupe, les coûts de vendange seraient astronomiques.

Ebloui par cette dégustation, je suis sur un petit nuage. Le programme étant dense, j’ai à peine le temps de défaire ma valise lorsque nous faisons un crochet par notre hôtel. Nous partons à l’hôtel Choupana Hills où nous allons dîner, invités par l’institut IVBAM.

L’hôtel est de construction récente, très audacieuse et s’adressant à une clientèle internationale qui recherche le luxe. La vue sur la mer est grandiose. Le restaurant Xôpana est joliment décoré.

Le menu : sardines marinated in sea water, tomato jam and smoked eggplant / scabbard fish scallop in carpaccio with seaweed Nori, passion fruit vinaigrette, vanilla olive oil / fish of the Atlantic in Thai soup / flank with honey and soy sauce, mashed Cassava and cauliflower / chocolate and brandy filled with tangerine ice cream, lime crumble and sea salt.

Le Madère Henriquès & Henriquès Dry 5 years a un nez unidirectionnel. L’alcool est lacté, avec des noisettes. L’attaque est belle et franche, le vin s’installe, confortable avec du lacté et de l’alcool. Le final rebondit mais le vin est un peu limité en complexité. Une superbe sardine réveille le vin, mais il est trop simple.

Le Madère Verdelho 10 years a un nez frais car le vin est frais. Enfin des températures de service correctes. L’alcool se ressent avec la pondération qui convient. Le vin est très sucré, a une belle attaque. Il a beaucoup de charme et de douceur. Olivier Poussier qui est capable de trouver des évocations que mon imagination n’est pas capable d’envisager parle de sésame grillé. Le final du vin est un peu court et un peu ingrat. L’accord ne fonctionne pas du tout avec le poisson cru flanqué de coquilles Saint-Jacques, car le final est trop doux.

Nous buvons ensuite un vin tranquille titrant 11,5° qui est un Verdelho 2013. Il a un nez de vin jeune, très clair. Sa couleur est tellement claire qu’on dirait de l’eau. Il est assez astringent, il mange les joues ! vin de soif, aussi amer qu’un citron pressé sans eau. Sur des gambas bien cuites, c’est-à-dire peu, avec une soupe, ce n’est pas ce vin qui marche, mais le Verdelho 10 years. En fait, il aurait fallu échanger les deux vins pour avoir des accords justifiés sur ces deux plats.

Vient ensuite un vin rouge titrant 13° dont je n’ai pas noté le nom, qui évoque le clou de girofle. Je le trouve très adapté à une bavette délicieuse. Le vin glisse bien en bouche, évoquant un fruit noir mariné au vin. Sa longueur est assez agréable.

Le Madère Boal 10 years a un nez intense et raffiné, car servi à la température idéale. Il est doux, beaucoup plus fumé que ce que nous avons bu jusqu’alors. Il a un beau fruit confit. Son final a une belle palette de complexités. Olivier Poussier ne l’aime pas car il estime que l’ajoute de caramel dans le vin, pratique qui est autorisée, détruit son originalité.

Le Madère Terrantez 20 years de l’institut IVBAM a un nez que je ne trouve pas très cohérent entre l’alcool et le fruit. Il n’est pas très complexe et n’est pas aidé par le dessert au chocolat. Son final est très dry.

Nous avons discuté avec la directrice générale de l’institut et avec Rubina, la technicienne qui nous avait fait le brillant exposé de présentation du vin de Madère. Ce dîner se voulait démonstratif de la capacité des madères à être gastronomique. Il faudrait travailler cet exercice, car certaines audaces se sont révélées contraires au but recherché.

Après cette journée très remplie, il ne fut pas difficile de tomber dans les bras de Morphée.

Pour poursuivre la lecture des articles sur le voyage à Madère il faut lire les sujets un a un en remontant et non en descendant.

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premières vues de madère

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dégustation à l’institut du vin de Madère

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dîner au restaurant Xôpana

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Rieslings allemands, champagnes d’Aÿ, saké mercredi, 1 octobre 2014

Une agence de communication organise une dégustation des vins de trois domaines : les champagnes Henri Giraud, les vins de Sarre du domaine Egon Müller et les sakés de Ryuichiro Masuda. Cette juxtaposition est particulièrement intéressante. Je me rends sur une barge des bords de Seine pour saluer Egon Müller qui participera au dîner de vignerons traditionnel de décembre.

Egon Müller fait goûter ses vins ou ceux de sa femme puisque je commence par un vin Château Belà, Riesling de Slovaquie 2013. Ce vin très jeune a un nez de jeunesse. En bouche il est très joliment construit et d’un bel équilibre.

Le Scharzhof Riesling Egon Müller 2013 a plus de matière mais il est encore tout fou et non structuré. De ce fait, je préfère le vin slovaque, même si le Scharzhof est plus grand.

Le Scharzhofberger Kabinett Egon Müller 2012 titre 9°. Il faut absolument l’attendre quelques années avant qu’il ne montre ses qualités.

J’ai l’impression inverse avec le Scharzhofberger Auslese Egon Müller 2011 d’un charme extrême et qui est d’une grâce idéale dans sa grande jeunesse. Sa douceur lui promet une grande carrière gastronomique. Il est frêle, doux, désaltérant et rafraîchissant.

Ce qui frappe d’emblée, c’est la recherche esthétique développée par le Champagne Henri Giraud, représenté par Claude Giraud.

On goûte d’abord le Champagne Henri Giraud Aÿ Grand cru fût de chêne. Puis le Champagne Henri Giraud Aÿ Grand cru Hommage à François Hémart et enfin le Champagne Henri Giraud Aÿ Grand cru Argonne 2004. N’ayant pas pris de notes, je ne pourrais pas donner beaucoup de détails. Ayant personnellement un appétit marqué pour les champagnes de la Côte des Blancs, je suis moins réceptif à ces champagnes, même si je reconnais qu’ils sont bien faits.

N’étant pas connaisseur de Saké, je n’ai goûté qu’un seul saké titrant 17°, Saké Masuizumi 2005. On n’est pas du tout dans les contrées gustatives que j’aime explorer.

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le saké porte le nom de Giraud qui fournit les fûts

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184ème dîner de wine-dinners au restaurant Garance mercredi, 1 octobre 2014

Le 184ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Garance. Nous avons réservé l’agréable salon privé du premier étage. Nous sommes sept dont deux nouveaux. J’ouvre les vins assez tard, vers 18 heures, et aucune surprise désagréable n’est à signaler. Les vins vont aimablement s’épanouir.

Tout le monde est à l’heure, ce qui est appréciable. Le Champagne Veuve Clicquot Ponsardin 1975 sert d’apéritif de bienvenue. Il est ambré, il n’a plus de bulle, mais on sent le pétillant. Ce qui est intéressant, c’est qu’il nous fait voyager dans un monde de saveurs inconnues. Son alcool est très présent et fort et l’on pense à des Xérès, à des vins jaunes, mais il change de bord d’attaque à chaque gorgée. Il est manifestement évolué mais sa complexité est très intéressante.

Guillaume Iskandar, le brillant chef du lieu, a comme signature la brioche d’accueil. Elle change chaque fois selon ses humeurs. Elle accompagne le Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Spéciale Diamant Bleu 1979. La couleur du champagne est jaune vert, d’une folle jeunesse. La bulle est active et dynamique. En bouche le champagne est un rayon de soleil. Il est joliment citronné mais ce qui frappe le plus, c’est sa cohérence. Tout est assemblé, agencé pour notre plaisir. Alors que quatre ans seulement séparent les deux champagnes, tout les oppose. Le 1979 est resté d’une jeunesse que l’on pourrait croire éternelle. Tout le monde est conquis par ce 1979. L’un des convives, amoureux de ce champagne, usera de toutes les ruses de sioux pour essayer de me convaincre de lui en fournir une bouteille mais le grand Manitou n’a pas eu d’influence sur moi.

Le premier plat, de girolles et autres champignons avec fregola et jus de foin accompagne à ravir le Château Ferran Graves Martillac Béraud-Sudreau blanc 1964 qui est une immense surprise pour tout le monde. Le niveau dans la bouteille est au goulot. La couleur du vin est d’un jaune clair, d’une rare jeunesse. Et en bouche, la plénitude du vin est extrême. Il est pur, précis, évoquant mirabelle ou reine-claude, mais aussi de grandes complexités. C’est un vin qui se situe très au dessus de ce que l’on pourrait attendre. Un blanc de cinquante ans de cette tenue, c’est toujours une grande surprise.

La viande de bœuf du Limousin est ferme, d’un goût riche et profond. Elle convient à merveille à deux bordeaux très dissemblables. Le Château Petit Gravet Saint-Emilion Grand Cru 1970 claque comme un coup de fouet. C’est un vin viril, imposant, racé et noble. Il évoque la truffe. Il a une légère amertume que corrige très bien la viande.

A côté de lui, le Château Brane-Cantenac 1978 a la grâce féminine d’un margaux. On imagine une odalisque qui s’allonge lascivement sur sa couche. Tout en ce vin est grâce et velours. Alors, passer d’un vin à l’autre est chose difficile. Il faut repasser impérativement par la viande pour aller de l’un à l’autre. Le margaux aura la faveur des votes, mais les deux vins aux robes d’un beau sang de pigeon méritent un égal intérêt.

Le pigeon est de grande qualité et traité avec intelligence pour le vin de Bourgogne. Le Morey-Saint Denis Grivelet Père & Fils 1976 offre au nez une séduction tétanisante. En bouche, il est tout en charme, joliment épanoui et gourmand. Comme souvent, il y aura autour de la table les Horaces et les Curiaces, les tenants des bordeaux ne comprenant pas que d’autres puissent adorer le bourgogne. Ces joutes sont toujours amicales. Ce qui est amusant au niveau des votes, c’est que sur sept convives trois ont voté pour un bordeaux et pas pour le bourgogne, trois ont voté pour le bourgogne et pour aucun bordeaux. Un seul convive a voté pour un bordeaux et un bourgogne. Ce qui montre que les préférences pour une région sont le plus souvent exclusives.

On attendait Comté et c’est Laguiole qui est venu sur notre table pour accompagner le Vin Jaune du Château de l’Etoile Vandelle 1982. L’accord est un peu moins percutant qu’avec le comté mais il est pertinent. Le vin jaune explose d’alcool tant il est fort. Il est tellement tranchant qu’on aimerait le confronter à des plats. Je pense qu’avec le bœuf si goûteux, il aurait créé un bel accord. Les évocations de noix de ce beau vin jaune sont enthousiasmantes.

Le Domaine de Poulvère Monbazillac 1929 a un niveau presque dans le goulot. Sa couleur est noire, d’un acajou foncé. Le nez est délicat tout en subtilité et lorsque j’ai ouvert la bouteille, je suis allé la faire sentir à Guillaume Iskandar pour qu’il adapte le dessert à cette odeur subtile. C’est ainsi que l’on a supprimé le sorbet et le fruit de la passion pour ne garder que la pêche de vigne rouge sang et un financier à l’amande qui a créé, très certainement, le plus bel accord du repas. Car le financier fait rebondir ce liquoreux presque sec, qui a un peu mangé son sucre. Evoquant du thé, du café, du caramel, ce vin est tout en délicatesse, suggérant plus qu’imposant son message. C’est un très grand liquoreux.

Nous avons tous remarqué que la force extrême du vin jaune rendait encore plus séduisante la gracilité du 1929. Les convives, tous de la finance, ont noté le choix d’un vin de 1929, année terrible pour la finance, qui plus est sur un financier !

C’est le moment des votes. Nous sommes sept pour désigner nos quatre préférés parmi huit vins. Les votes ont été concentrés sur seulement cinq vins. Deux vins figurent dans tous les bulletins de vote, le Heidsieck 1979 et le Monbazillac 1929. Trois vins ont eu des places de premier, le Château Ferran 1964 trois fois, le Heidsieck 1979 deux fois, comme le Poulvère 1929 deux fois.

Le classement du consensus serait : 1 – Château Ferran Graves Martillac Béraud-Sudreau blanc 1964, 1 ex aequo – Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Spéciale Diamant Bleu 1979, 3 – Domaine de Poulvère Monbazillac 1929, 4 – Morey-Saint Denis Grivelet Père & Fils 1976, 5 – Château Brane-Cantenac 1978.

Mon classement est : 1 – Domaine de Poulvère Monbazillac 1929, 2 – Château Ferran Graves Martillac Béraud-Sudreau blanc 1964, 3 – Morey-Saint Denis Grivelet Père & Fils 1976, 4 – Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Spéciale Diamant Bleu 1979.

La cuisine de Guillaume Iskandar a été remarquable de justesse et de précision pour les vins. Les accompagnements des champignons pour le Graves Martillac ont été superbes, la chair du Limousin est intensément puissante. Le pigeon est de grande qualité et le financier un régal pour le vin. Tout a été réussi.

Si on ne change pas les équipes qui gagnent, il faudra vite recommencer.

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Article du Point du 25 septembre 2014 sur ma cave et ma passion lundi, 29 septembre 2014

Il est toujours agréable d’être le sujet d’un article, surtout lorsque l’on dit du bien de moi.

A la réserve du mot « quille » dont chacun sait que je le considère irrespectueux et qu’en conséquence je n’utilise jamais, merci au journaliste, Thibaut Danancher, d’avoir écrit élégamment cet article décrivant ma passion.

Je regrette que la valorisation de ma cave, surréaliste dans son ampleur, fausse dans l’esprit, occulte le reste du message qui est très positif.

Tous mes vins sont faits pour être bus. c’est leur seule motivation et ma seule philosophie. Les seuls vins que j’ai revendus l’ont été lors de mes dîners, mais ces vins sont bus au moment où ils sont vendus. Ils ne peuvent donc en aucun cas se retrouver par la suite dans la spéculation. Avec quelques autres  collectionneurs amoureux je fais partie de ceux qui n’alimentent jamais la spéculation par des reventes sur le marché. Evaluer une cave qui a pour seule vocation d’être bue est donc un exercice qui ne me convient pas.

Merci Thibaut Danancher, merci Le Point, de contribuer ainsi à propager l’idée que les vins anciens méritent d’être bus et partagés dans des dîners gastronomiques.

Le Point 20140925 AUDOUZE 1 001 Le Point 20140925 AUDOUZE 2 001 Le Point 20140925 AUDOUZE 3 001

3ème jour à Venise et dîner au Cipriani dimanche, 28 septembre 2014

Troisième jour à Venise. Nous visitons le musée de François Pinault. Le lieu, une ancienne douane, est extraordinaire, avec des volumes qui coupent le souffle. Ce qui est exposé me décontenance. C’est un art pour initiés, assez ésotérique.

A l’inverse, au musée de Peggy Guggenheim, je me sens de plain pied avec la collection. Picasso, Miro, Dali, Modigliani, Léger, Chirico, Kandinsky, et tant d’autres, représentés par leurs œuvres sur une période très concentrée des années de 1910 à 1930. Là, les yeux se remplissent de mille émotions.

Davide Bissetto, le chef du restaurant Oro de l’hôtel Cipriani nous a donné rendez-vous à 18h45 pour nous faire visiter l’hôtel. Nous nous présentons à une entrée différente ce celle de la veille, et le service d’ordre, sans doute excité par la présence de George Clooney et de sa clique, nous considère plus comme de dangereux intrus que comme des visiteurs. La vérification de la pertinence de notre présence prend un bon quart d’heure dans une ambiance policière.

Davide nous fait visiter les jardins, où pousse une vigne, où des poules des lapins et des canards forment une basse-cour et où légumes et herbes poussent de-ci-de-là, abîmés par des grêles récentes. La piscine de l’hôtel est impressionnante. Pas de trace des invités de George Cloonez partis festoyer ailleurs. Nous aurons ainsi la chance de dîner dans un hôtel presque vide et de disposer de l’attention charmante de tout le personnel.

Nous prenons l’apéritif avec Davide Bissetto qui a rejoint notre table en plein air. Teseo Geri le sommelier a prévu un champagne qui sera sabré par le chef. Le premier champagne lui résiste et Teseo le sabre. Le second est réussi par le chef. Nous bavardons avec lui de ses ambitions pour ce lieu où les habitués veillent jalousement au maintien des traditions.

Notre table est en plein air dans le beau jardin le long de l’eau. Davide a conçu le menu et nous nous laisserons guider car Teseo proposera les vins qu’il juge les plus pertinents. L’un des amis a noté les intitulés des plats, mais ce n’est pas facile tant les ingrédients abondent. On excusera les fautes d’orthographe qui peuvent exister.

Voici le menu noté à la volée : Croûton de pain de potiron, foie gras, truffe blanche / Assiette de légumes de la région, betterave rouge et jaune salsifis, panais, courgette jaune, quenelle, radis avec un vinaigre balsamique Malpighi de 25 ans / Carpaccio de seiche et coquillages de la pêche du jour, pain d’encre, glace de moule marinière / Crevette sur lit de tomates, sauce de crevette, mousse de ruccola citron (verdello), gingembre cube de taggliolini cuit puis frit, or 18 carats et huile de réduction de crustacés / Lasagnetta champignons porcini, fondue de fromage briaco al barollo, ail noir / Bisque, cigale de mer (canoccia avec thym) de la lagune, boulette de crabe et gambas rouge de Sicile, bergamote / Ecume de panais, canard au miel, boulette de cuisse de canard / Intermède avec le chef pour une dégustation d’huiles / Sorbet réglisse gelée sambucca sorbet café / Perle du Japon grenade, rooibos, pamplemousse, ricotta, caramel / Feuilleté et crème chocolat et café.

On comprendra aisément que sans prise de notes, j’aurai du mal à commenter ce feu d’artifice de saveurs. Davide est en recherche permanente de saveurs nouvelles et de combinaisons surprenantes. Sa recherche est aussi celle de l’authenticité et des produits régionaux. Le plat le plus exceptionnel pour moi est celui des champignons, suivi de celui des légumes et enfin celui des crevettes.

Teseo nous a proposé des accords très pertinents.

A l’apéritif, Ca’del Bosco, spumante 2009 non dosé, juste pour se faire la bouche avant le sabrage. A titre de boutade j’ai dit que ce Spumante ne mettrait pas en danger les vins de Champagne, car il se ferme très vite en bouche.

Le Champagne le Clochard à Damery que Davide a sabré en biais, par opposition au sabrage droit de Teseo est un agréable champagne simple au dosage mesuré.

Le Champagne Françoise Bedel Cuvée Roger Winer brut 1996 est très adaptable et flexible. Il a accompagné beaucoup de plats dont le foie gras à la truffe blanche.

Le Champagne Substance de Selosse de la veille s’est montré encore plus brillant qu’il y a 24 heures.

Le Villa Bucci Reserva blanc 2009 et le Cerasuolo d’Abruzzo rosé 2012 de la veille, toujours aussi pertinent, ont accompagné les crevettes

Un Montepulciano d’Abruzzo Emidio Pepe 1985 incroyablement jeune et perlant d’une grande vivacité et pertinence, a brillé lui aussi sur les crevettes, mais a accompagné plusieurs plats. Jamais on ne pourrait imaginer qu’un vin de 29 ans ait cette jeunesse de fruit.

La Gioia toscana rouge Riecine 1999 est très agréable sur le canard. Lors de la dégustation d’huiles, il est apparu que l’huile de légumes était idéale avec ce vin, formant un bel accord.

Escenzia Bianco Pojer E Sandri, vendanges tardives des Dolomites titrant 9,5° est très agréable, vin tout jeune et tout frais pour les desserts, sur la piste des vins de glace.

La cuisine de Davide Bissetto est très inventive, en création permanente, puisque, depuis que nous le connaissons, il n’y a jamais eu deux repas de la même inspiration. Il y a du talent, peu tourné vers les vins, même si le chef y est sensible. Il faudra sans doute qu’il ajoute quelques plats plus « rassurants », pour que les guides lui donnent les plus belles notes, qu’il mérite.

Le cadre du Cipriani est somptueux. Davide a tout pour que le restaurant Oro devienne une table incontournable.
Le retour en bateau jusqu’à la place Saint-Marc est un grand moment, fascinant par la virtuosité du pilote qui se joue de tous les obstacles.

Venise est une ville unique, riche de trésors architecturaux, d’art, de musique, de joie de vivre. Espérons que malgré le réchauffement climatique, elle sera toujours l’une des villes les plus inspiratrices du génie humain. Longue vie à cette ville éternelle.

Quelques vues de Venise

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départ pour une visite et dîner au Cipriani

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visite du Cipriani avec Davide Bissetto

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apéritif et sabrage

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les huiles à choisir

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les vins

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les plats

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