Voyage à Madère – jour 1 dimanche, 5 octobre 2014

Des sommeliers, dont deux meilleurs sommeliers du monde, se sont constitués en un groupe amical pour faire des visites sérieuses de régions viticoles et aussi pour être moins sérieux et profiter de leur amitié. Avec un petit clin d’œil aux Masters of Wine, ils se sont appelés Mad Wine Waiters, MWW. Joao, l’un d’entre eux, habite à Londres et est originaire de Lisbonne. Je l’avais rencontré au fabuleux déjeuner au siège du champagne Salon où avait été ouvert Salon 1943, vin de mon année.

C’était un tel cadeau dont j’avais une responsabilité indirecte, puisque j’avais la chance d’être né une année où Salon a été produit (je n’avais qu’une chance sur trois), Joao, pour me remercier, m’a proposé de me joindre à son groupe MWW pour une visite des vins de Madère. Une telle proposition ne se refuse pas.

Me voilà partant sur TAP vers Funchal, la ville principale de Madère, via Lisbonne. Si Air France a cessé de recruter ses hôtesses avec un premier critère qui serait leur beauté, puisqu’il faut lutter contre les stéréotypes du genre – sans toutefois la rendre interdite – il est bien agréable de constater qu’Air Portugal conserve la beauté comme critère. Sur les deux vols Paris Lisbonne et Lisbonne Funchal, la promotion de la beauté portugaise a fonctionné à plein. Et l’amabilité aussi.

Les vents qui lèchent cette île volcanique ont secoué l’avion à l’arrivée, ce qui m’a fait penser à l’arrivée sur l’île de Pâques, elle aussi volcanique, avec des reliefs de même nature. L’urbanisation est débridée et anarchique mais cette île est à taille humaine. A peine débarqués, et sans avoir eu le temps de défaire nos valises, nous partons à l’institut des vins de Madère, IVBAM, Instituto do Vinho do Bordado e do Artesanato da Madeira.

Au seuil de l’institut on nous dit : « vite, vite, vite, la télévision veut interviewer Joao et Olivier Poussier », meilleur sommelier du monde 2000, présent dans notre groupe. Notre dégustation sera filmée.

Nous avons devant nous quinze vins qui exhalent des parfums extraordinaires. La directrice de l’institut présente les missions de l’institut. Rubina, charmante et jolie experte de l’institut nous parle des vins de Madère et des réglementations qui dirigent les appellations. C’est extrêmement intéressant. Du niveau de la mer et jusqu’à 200 mètres d’altitude, on cultive surtout la banane. De 200 mètres à 700 mètres, c’est le domaine de la vigne qui pousse en pergola, en espalier ou à ras du sol. Lorsque la vigne est en pergola, il y a d’autres cultures au sol, à l’ombre de la vigne. Et lorsque la vigne est en espalier, on peut cultiver dans les allées de la pomme de terre.

Rubina précise les cépages qui interviennent dans l’appellation, l’usage de chaque cépage dans les vins à dénomination spécifique. Elle rappelle ce que sont les Colheita, Frasqueira, Vintage et selon quelles règles se font les soleiras. Chaque étape du processus de vinification est détaillé et c’est passionnant. Elle définit les dry, medium dry, medium sweet et sweet.

Elle explique la phase cruciale « estufagem » qui veut que le madère soit chauffé entre 45 et 50° pendant au moins trois mois.

Mais les papilles s’impatientent, car nous avons devant nous quinze vins dont quatre du 19ème siècle qui sont de redoutables tentations.

Nous sommes sept sous la bannière de Mad Wine Waiters, MWW. Les membres viennent de Grande Bretagne, d’Allemagne, de Belgique, du Portugal et de France. Ils ont tous un passé de sommelier et exercent divers métiers du vin. Un belge est vigneron au Portugal.

Mes notes sont prises à la volée. Je n’ai pas la compétence de mes amis, et mes jugements différeront parfois de ceux d’Olivier Poussier. Il donnent mes impressions de voyage.

Madère Colheita Tinta Negra 1995. Tinta Negra est le cépage dominant sur l’île de Madère avec environ 250 hectares sur les 450 hectares de l’appellation. Ce vin a une couleur foncée. Le nez est d’alcool et lacté. Il convient de dire que les vins nous ont été servis beaucoup trop chauds, avec au moins dix degrés de trop, ce qui veut dire que dans ces notes, l’alcool sera souvent cité, qui efface beaucoup des subtilités des vins du fait de la chaleur. Le vin, comme tous les madères, a une belle acidité. Il a un bel équilibre et une fraîcheur de zeste d’orange. S’il y a du lacté, le zeste domine dans le final.

Madère Boal 1984. Dans le nez, il y a de la crème caramel, mais aussi une évocation de fraise tagada. Belle acidité, du gras, plus prononcé que dans le 1995. Pruneau et impressions lactées. Le final est frais.

Madère Malvasia 1989 nez beaucoup plus doux car le vin est medium dry. Il est floral, vineux, raisin de Corinthe, pruneau. Il est séduisant, le plus féminin des trois.

Madère Terrantez 1976 nez discret avec un peu de poussière. Un peu de fruit rose frais en bouche, attaque fraîche, léger caramel. La structure ne me paraît pas très précise mais le final est plus structuré, voire séduisant. Il y a du pruneau frais.

Madère Sercial 1969. L’alcool est fort. Le nez est très pur. L’attaque est claire, le vin est bien dessiné. En bouche, ce n’est que du bonheur. Le vin est fluide, l’alcool est équilibré. Le final est merveilleux.

Madère Boal 1958. Le nez est à la fois discret et intense, c’est-à-dire complexe. Il y a du caramel et la bouche est influencée par la chaleur. Le vin est lacté, avec des notes de thé. Il est très sec. Le final est fruité, de fruits de toutes les couleurs. Le final est de pomelos et pruneaux.

Madère Sercial 1940 nez de lilas, de fleurs. La bouche est lactée, caramel, roudoudou, amande grillée. Le final est distingué, écorce d’orange et peau de pomme. Ce vin rebondit comme un ricochet, sa longueur est infinie.

Madère Malvasia 1933. Le nez est incroyable, presque mentholé. En bouche le vin est très civilisé et doux, pâte de fruits et caramel. On retrouve la menthe et le fenouil dans le final. Ce vin est magistral.

Madère Bastardo 1927. Le nez est discret et ne fait pas apparaître l’alcool. Il évoque la pierre mouillée par un torrent. La bouche est lactée, d’une distinction rare. Le final est noble et racé. Il est enchanteur. On pense à une pêche de vigne ou un fruit baignant dans l’alcool. Avec le 1933, ils sont les plus grands à ce stade.

Madère Verdelho 1912. Le nez est discret. Le vin est lacté et racé mais il a un peu moins de personnalité et de typicité. Il a de la fraîcheur et des évocations de pomelos dans le final.

Madère Boal 1903. Le nez est très racé, la bouche voluptueuse, complètement intégrée. Il y a de la pâte de fruit, de la noix, du bois. Le final évoque café, caramel. Ce vin est terriblement séduisant et de plaisir.

Après ces onze vins, c’est le grand moment d’émotion, car les quatre vins sur la table sont du 19ème siècle.

Madère Verdelho 1890. Le nez est raffiné, élégant, l’alcool semble mesuré. La bouche est d’une noblesse rare, le vin est très cohérent entre les tendances fruits, noix, pâtes de fruits, épices. Le final est très fort, en fanfare. C’est un vin noble, très grand.

Madère Moscatel 1875. L’alcool est présent au nez mais le vin en bouche est frais. L’attaque est très caramel, fruits confits. Le vin a de la puissance. On ressent un immense sentiment de plaisir car tout est cohérent. Ce vin est très grand.

Madère Sercial 1862. Le nez est discret. Ce vin fait plus léger et plus calme mais il a de la cohérence et de l’élégance. Thé, épices, bois des îles sont présents. Le final est plus court et moins gratifiant que les autres.

Madère verdelho 1850. Le nez est indéfini. La bouche est peu précise et amère. Il n’a pas trop de typicité mais il apporte du plaisir. On en ferait bien son ordinaire !

A l’issue de cette fascinante dégustation, ce qui me frappe, c’est l’incroyable diversité des vins de Madère. Il n’y en a pas deux qui se ressemblent. Ce qui veut dire qu’on ne peut jamais dire que madère, on connaît ! La richesse aromatique des vins est extrême.

Mon classement sera : 1 – Malvasia 1933, 2 – Verdelho 1890, 3 – Bastardo 1927, 4 – Boal 1903. Ce qui est à remarquer, c’est que dans mon classement, je retiens quatre cépages différents. Et si j’ajoutais un cinquième, ce serait le Moscatel 1875, ce qui fait une variété de plus. Il est à noter qu’étant à l’institut du vin de Madère, les noms des domaines n’ont pas été cités sur nos feuilles de dégustation.

A ce propos, il y a environ 2000 viticulteurs dont la parcelle moyenne ne dépasse pas 3.000 mètres carrés qui vendent leurs raisins à huit grands groupes dont certains n’ont pas de vignes en propre. Il faut dire que les vignes sont tellement difficiles d’accès, sur des pentes inimaginables, que la cueillette ne peut se faire que dans un cadre familial où l’on ne compte pas son temps. Dans un groupe, les coûts de vendange seraient astronomiques.

Ebloui par cette dégustation, je suis sur un petit nuage. Le programme étant dense, j’ai à peine le temps de défaire ma valise lorsque nous faisons un crochet par notre hôtel. Nous partons à l’hôtel Choupana Hills où nous allons dîner, invités par l’institut IVBAM.

L’hôtel est de construction récente, très audacieuse et s’adressant à une clientèle internationale qui recherche le luxe. La vue sur la mer est grandiose. Le restaurant Xôpana est joliment décoré.

Le menu : sardines marinated in sea water, tomato jam and smoked eggplant / scabbard fish scallop in carpaccio with seaweed Nori, passion fruit vinaigrette, vanilla olive oil / fish of the Atlantic in Thai soup / flank with honey and soy sauce, mashed Cassava and cauliflower / chocolate and brandy filled with tangerine ice cream, lime crumble and sea salt.

Le Madère Henriquès & Henriquès Dry 5 years a un nez unidirectionnel. L’alcool est lacté, avec des noisettes. L’attaque est belle et franche, le vin s’installe, confortable avec du lacté et de l’alcool. Le final rebondit mais le vin est un peu limité en complexité. Une superbe sardine réveille le vin, mais il est trop simple.

Le Madère Verdelho 10 years a un nez frais car le vin est frais. Enfin des températures de service correctes. L’alcool se ressent avec la pondération qui convient. Le vin est très sucré, a une belle attaque. Il a beaucoup de charme et de douceur. Olivier Poussier qui est capable de trouver des évocations que mon imagination n’est pas capable d’envisager parle de sésame grillé. Le final du vin est un peu court et un peu ingrat. L’accord ne fonctionne pas du tout avec le poisson cru flanqué de coquilles Saint-Jacques, car le final est trop doux.

Nous buvons ensuite un vin tranquille titrant 11,5° qui est un Verdelho 2013. Il a un nez de vin jeune, très clair. Sa couleur est tellement claire qu’on dirait de l’eau. Il est assez astringent, il mange les joues ! vin de soif, aussi amer qu’un citron pressé sans eau. Sur des gambas bien cuites, c’est-à-dire peu, avec une soupe, ce n’est pas ce vin qui marche, mais le Verdelho 10 years. En fait, il aurait fallu échanger les deux vins pour avoir des accords justifiés sur ces deux plats.

Vient ensuite un vin rouge titrant 13° dont je n’ai pas noté le nom, qui évoque le clou de girofle. Je le trouve très adapté à une bavette délicieuse. Le vin glisse bien en bouche, évoquant un fruit noir mariné au vin. Sa longueur est assez agréable.

Le Madère Boal 10 years a un nez intense et raffiné, car servi à la température idéale. Il est doux, beaucoup plus fumé que ce que nous avons bu jusqu’alors. Il a un beau fruit confit. Son final a une belle palette de complexités. Olivier Poussier ne l’aime pas car il estime que l’ajoute de caramel dans le vin, pratique qui est autorisée, détruit son originalité.

Le Madère Terrantez 20 years de l’institut IVBAM a un nez que je ne trouve pas très cohérent entre l’alcool et le fruit. Il n’est pas très complexe et n’est pas aidé par le dessert au chocolat. Son final est très dry.

Nous avons discuté avec la directrice générale de l’institut et avec Rubina, la technicienne qui nous avait fait le brillant exposé de présentation du vin de Madère. Ce dîner se voulait démonstratif de la capacité des madères à être gastronomique. Il faudrait travailler cet exercice, car certaines audaces se sont révélées contraires au but recherché.

Après cette journée très remplie, il ne fut pas difficile de tomber dans les bras de Morphée.

Pour poursuivre la lecture des articles sur le voyage à Madère il faut lire les sujets un a un en remontant et non en descendant.

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premières vues de madère

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dégustation à l’institut du vin de Madère

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dîner au restaurant Xôpana

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Rieslings allemands, champagnes d’Aÿ, saké mercredi, 1 octobre 2014

Une agence de communication organise une dégustation des vins de trois domaines : les champagnes Henri Giraud, les vins de Sarre du domaine Egon Müller et les sakés de Ryuichiro Masuda. Cette juxtaposition est particulièrement intéressante. Je me rends sur une barge des bords de Seine pour saluer Egon Müller qui participera au dîner de vignerons traditionnel de décembre.

Egon Müller fait goûter ses vins ou ceux de sa femme puisque je commence par un vin Château Belà, Riesling de Slovaquie 2013. Ce vin très jeune a un nez de jeunesse. En bouche il est très joliment construit et d’un bel équilibre.

Le Scharzhof Riesling Egon Müller 2013 a plus de matière mais il est encore tout fou et non structuré. De ce fait, je préfère le vin slovaque, même si le Scharzhof est plus grand.

Le Scharzhofberger Kabinett Egon Müller 2012 titre 9°. Il faut absolument l’attendre quelques années avant qu’il ne montre ses qualités.

J’ai l’impression inverse avec le Scharzhofberger Auslese Egon Müller 2011 d’un charme extrême et qui est d’une grâce idéale dans sa grande jeunesse. Sa douceur lui promet une grande carrière gastronomique. Il est frêle, doux, désaltérant et rafraîchissant.

Ce qui frappe d’emblée, c’est la recherche esthétique développée par le Champagne Henri Giraud, représenté par Claude Giraud.

On goûte d’abord le Champagne Henri Giraud Aÿ Grand cru fût de chêne. Puis le Champagne Henri Giraud Aÿ Grand cru Hommage à François Hémart et enfin le Champagne Henri Giraud Aÿ Grand cru Argonne 2004. N’ayant pas pris de notes, je ne pourrais pas donner beaucoup de détails. Ayant personnellement un appétit marqué pour les champagnes de la Côte des Blancs, je suis moins réceptif à ces champagnes, même si je reconnais qu’ils sont bien faits.

N’étant pas connaisseur de Saké, je n’ai goûté qu’un seul saké titrant 17°, Saké Masuizumi 2005. On n’est pas du tout dans les contrées gustatives que j’aime explorer.

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le saké porte le nom de Giraud qui fournit les fûts

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184ème dîner de wine-dinners au restaurant Garance mercredi, 1 octobre 2014

Le 184ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant Garance. Nous avons réservé l’agréable salon privé du premier étage. Nous sommes sept dont deux nouveaux. J’ouvre les vins assez tard, vers 18 heures, et aucune surprise désagréable n’est à signaler. Les vins vont aimablement s’épanouir.

Tout le monde est à l’heure, ce qui est appréciable. Le Champagne Veuve Clicquot Ponsardin 1975 sert d’apéritif de bienvenue. Il est ambré, il n’a plus de bulle, mais on sent le pétillant. Ce qui est intéressant, c’est qu’il nous fait voyager dans un monde de saveurs inconnues. Son alcool est très présent et fort et l’on pense à des Xérès, à des vins jaunes, mais il change de bord d’attaque à chaque gorgée. Il est manifestement évolué mais sa complexité est très intéressante.

Guillaume Iskandar, le brillant chef du lieu, a comme signature la brioche d’accueil. Elle change chaque fois selon ses humeurs. Elle accompagne le Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Spéciale Diamant Bleu 1979. La couleur du champagne est jaune vert, d’une folle jeunesse. La bulle est active et dynamique. En bouche le champagne est un rayon de soleil. Il est joliment citronné mais ce qui frappe le plus, c’est sa cohérence. Tout est assemblé, agencé pour notre plaisir. Alors que quatre ans seulement séparent les deux champagnes, tout les oppose. Le 1979 est resté d’une jeunesse que l’on pourrait croire éternelle. Tout le monde est conquis par ce 1979. L’un des convives, amoureux de ce champagne, usera de toutes les ruses de sioux pour essayer de me convaincre de lui en fournir une bouteille mais le grand Manitou n’a pas eu d’influence sur moi.

Le premier plat, de girolles et autres champignons avec fregola et jus de foin accompagne à ravir le Château Ferran Graves Martillac Béraud-Sudreau blanc 1964 qui est une immense surprise pour tout le monde. Le niveau dans la bouteille est au goulot. La couleur du vin est d’un jaune clair, d’une rare jeunesse. Et en bouche, la plénitude du vin est extrême. Il est pur, précis, évoquant mirabelle ou reine-claude, mais aussi de grandes complexités. C’est un vin qui se situe très au dessus de ce que l’on pourrait attendre. Un blanc de cinquante ans de cette tenue, c’est toujours une grande surprise.

La viande de bœuf du Limousin est ferme, d’un goût riche et profond. Elle convient à merveille à deux bordeaux très dissemblables. Le Château Petit Gravet Saint-Emilion Grand Cru 1970 claque comme un coup de fouet. C’est un vin viril, imposant, racé et noble. Il évoque la truffe. Il a une légère amertume que corrige très bien la viande.

A côté de lui, le Château Brane-Cantenac 1978 a la grâce féminine d’un margaux. On imagine une odalisque qui s’allonge lascivement sur sa couche. Tout en ce vin est grâce et velours. Alors, passer d’un vin à l’autre est chose difficile. Il faut repasser impérativement par la viande pour aller de l’un à l’autre. Le margaux aura la faveur des votes, mais les deux vins aux robes d’un beau sang de pigeon méritent un égal intérêt.

Le pigeon est de grande qualité et traité avec intelligence pour le vin de Bourgogne. Le Morey-Saint Denis Grivelet Père & Fils 1976 offre au nez une séduction tétanisante. En bouche, il est tout en charme, joliment épanoui et gourmand. Comme souvent, il y aura autour de la table les Horaces et les Curiaces, les tenants des bordeaux ne comprenant pas que d’autres puissent adorer le bourgogne. Ces joutes sont toujours amicales. Ce qui est amusant au niveau des votes, c’est que sur sept convives trois ont voté pour un bordeaux et pas pour le bourgogne, trois ont voté pour le bourgogne et pour aucun bordeaux. Un seul convive a voté pour un bordeaux et un bourgogne. Ce qui montre que les préférences pour une région sont le plus souvent exclusives.

On attendait Comté et c’est Laguiole qui est venu sur notre table pour accompagner le Vin Jaune du Château de l’Etoile Vandelle 1982. L’accord est un peu moins percutant qu’avec le comté mais il est pertinent. Le vin jaune explose d’alcool tant il est fort. Il est tellement tranchant qu’on aimerait le confronter à des plats. Je pense qu’avec le bœuf si goûteux, il aurait créé un bel accord. Les évocations de noix de ce beau vin jaune sont enthousiasmantes.

Le Domaine de Poulvère Monbazillac 1929 a un niveau presque dans le goulot. Sa couleur est noire, d’un acajou foncé. Le nez est délicat tout en subtilité et lorsque j’ai ouvert la bouteille, je suis allé la faire sentir à Guillaume Iskandar pour qu’il adapte le dessert à cette odeur subtile. C’est ainsi que l’on a supprimé le sorbet et le fruit de la passion pour ne garder que la pêche de vigne rouge sang et un financier à l’amande qui a créé, très certainement, le plus bel accord du repas. Car le financier fait rebondir ce liquoreux presque sec, qui a un peu mangé son sucre. Evoquant du thé, du café, du caramel, ce vin est tout en délicatesse, suggérant plus qu’imposant son message. C’est un très grand liquoreux.

Nous avons tous remarqué que la force extrême du vin jaune rendait encore plus séduisante la gracilité du 1929. Les convives, tous de la finance, ont noté le choix d’un vin de 1929, année terrible pour la finance, qui plus est sur un financier !

C’est le moment des votes. Nous sommes sept pour désigner nos quatre préférés parmi huit vins. Les votes ont été concentrés sur seulement cinq vins. Deux vins figurent dans tous les bulletins de vote, le Heidsieck 1979 et le Monbazillac 1929. Trois vins ont eu des places de premier, le Château Ferran 1964 trois fois, le Heidsieck 1979 deux fois, comme le Poulvère 1929 deux fois.

Le classement du consensus serait : 1 – Château Ferran Graves Martillac Béraud-Sudreau blanc 1964, 1 ex aequo – Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Spéciale Diamant Bleu 1979, 3 – Domaine de Poulvère Monbazillac 1929, 4 – Morey-Saint Denis Grivelet Père & Fils 1976, 5 – Château Brane-Cantenac 1978.

Mon classement est : 1 – Domaine de Poulvère Monbazillac 1929, 2 – Château Ferran Graves Martillac Béraud-Sudreau blanc 1964, 3 – Morey-Saint Denis Grivelet Père & Fils 1976, 4 – Champagne Heidsieck Monopole Cuvée Spéciale Diamant Bleu 1979.

La cuisine de Guillaume Iskandar a été remarquable de justesse et de précision pour les vins. Les accompagnements des champignons pour le Graves Martillac ont été superbes, la chair du Limousin est intensément puissante. Le pigeon est de grande qualité et le financier un régal pour le vin. Tout a été réussi.

Si on ne change pas les équipes qui gagnent, il faudra vite recommencer.

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Article du Point du 25 septembre 2014 sur ma cave et ma passion lundi, 29 septembre 2014

Il est toujours agréable d’être le sujet d’un article, surtout lorsque l’on dit du bien de moi.

A la réserve du mot « quille » dont chacun sait que je le considère irrespectueux et qu’en conséquence je n’utilise jamais, merci au journaliste, Thibaut Danancher, d’avoir écrit élégamment cet article décrivant ma passion.

Je regrette que la valorisation de ma cave, surréaliste dans son ampleur, fausse dans l’esprit, occulte le reste du message qui est très positif.

Tous mes vins sont faits pour être bus. c’est leur seule motivation et ma seule philosophie. Les seuls vins que j’ai revendus l’ont été lors de mes dîners, mais ces vins sont bus au moment où ils sont vendus. Ils ne peuvent donc en aucun cas se retrouver par la suite dans la spéculation. Avec quelques autres  collectionneurs amoureux je fais partie de ceux qui n’alimentent jamais la spéculation par des reventes sur le marché. Evaluer une cave qui a pour seule vocation d’être bue est donc un exercice qui ne me convient pas.

Merci Thibaut Danancher, merci Le Point, de contribuer ainsi à propager l’idée que les vins anciens méritent d’être bus et partagés dans des dîners gastronomiques.

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3ème jour à Venise et dîner au Cipriani dimanche, 28 septembre 2014

Troisième jour à Venise. Nous visitons le musée de François Pinault. Le lieu, une ancienne douane, est extraordinaire, avec des volumes qui coupent le souffle. Ce qui est exposé me décontenance. C’est un art pour initiés, assez ésotérique.

A l’inverse, au musée de Peggy Guggenheim, je me sens de plain pied avec la collection. Picasso, Miro, Dali, Modigliani, Léger, Chirico, Kandinsky, et tant d’autres, représentés par leurs œuvres sur une période très concentrée des années de 1910 à 1930. Là, les yeux se remplissent de mille émotions.

Davide Bissetto, le chef du restaurant Oro de l’hôtel Cipriani nous a donné rendez-vous à 18h45 pour nous faire visiter l’hôtel. Nous nous présentons à une entrée différente ce celle de la veille, et le service d’ordre, sans doute excité par la présence de George Clooney et de sa clique, nous considère plus comme de dangereux intrus que comme des visiteurs. La vérification de la pertinence de notre présence prend un bon quart d’heure dans une ambiance policière.

Davide nous fait visiter les jardins, où pousse une vigne, où des poules des lapins et des canards forment une basse-cour et où légumes et herbes poussent de-ci-de-là, abîmés par des grêles récentes. La piscine de l’hôtel est impressionnante. Pas de trace des invités de George Cloonez partis festoyer ailleurs. Nous aurons ainsi la chance de dîner dans un hôtel presque vide et de disposer de l’attention charmante de tout le personnel.

Nous prenons l’apéritif avec Davide Bissetto qui a rejoint notre table en plein air. Teseo Geri le sommelier a prévu un champagne qui sera sabré par le chef. Le premier champagne lui résiste et Teseo le sabre. Le second est réussi par le chef. Nous bavardons avec lui de ses ambitions pour ce lieu où les habitués veillent jalousement au maintien des traditions.

Notre table est en plein air dans le beau jardin le long de l’eau. Davide a conçu le menu et nous nous laisserons guider car Teseo proposera les vins qu’il juge les plus pertinents. L’un des amis a noté les intitulés des plats, mais ce n’est pas facile tant les ingrédients abondent. On excusera les fautes d’orthographe qui peuvent exister.

Voici le menu noté à la volée : Croûton de pain de potiron, foie gras, truffe blanche / Assiette de légumes de la région, betterave rouge et jaune salsifis, panais, courgette jaune, quenelle, radis avec un vinaigre balsamique Malpighi de 25 ans / Carpaccio de seiche et coquillages de la pêche du jour, pain d’encre, glace de moule marinière / Crevette sur lit de tomates, sauce de crevette, mousse de ruccola citron (verdello), gingembre cube de taggliolini cuit puis frit, or 18 carats et huile de réduction de crustacés / Lasagnetta champignons porcini, fondue de fromage briaco al barollo, ail noir / Bisque, cigale de mer (canoccia avec thym) de la lagune, boulette de crabe et gambas rouge de Sicile, bergamote / Ecume de panais, canard au miel, boulette de cuisse de canard / Intermède avec le chef pour une dégustation d’huiles / Sorbet réglisse gelée sambucca sorbet café / Perle du Japon grenade, rooibos, pamplemousse, ricotta, caramel / Feuilleté et crème chocolat et café.

On comprendra aisément que sans prise de notes, j’aurai du mal à commenter ce feu d’artifice de saveurs. Davide est en recherche permanente de saveurs nouvelles et de combinaisons surprenantes. Sa recherche est aussi celle de l’authenticité et des produits régionaux. Le plat le plus exceptionnel pour moi est celui des champignons, suivi de celui des légumes et enfin celui des crevettes.

Teseo nous a proposé des accords très pertinents.

A l’apéritif, Ca’del Bosco, spumante 2009 non dosé, juste pour se faire la bouche avant le sabrage. A titre de boutade j’ai dit que ce Spumante ne mettrait pas en danger les vins de Champagne, car il se ferme très vite en bouche.

Le Champagne le Clochard à Damery que Davide a sabré en biais, par opposition au sabrage droit de Teseo est un agréable champagne simple au dosage mesuré.

Le Champagne Françoise Bedel Cuvée Roger Winer brut 1996 est très adaptable et flexible. Il a accompagné beaucoup de plats dont le foie gras à la truffe blanche.

Le Champagne Substance de Selosse de la veille s’est montré encore plus brillant qu’il y a 24 heures.

Le Villa Bucci Reserva blanc 2009 et le Cerasuolo d’Abruzzo rosé 2012 de la veille, toujours aussi pertinent, ont accompagné les crevettes

Un Montepulciano d’Abruzzo Emidio Pepe 1985 incroyablement jeune et perlant d’une grande vivacité et pertinence, a brillé lui aussi sur les crevettes, mais a accompagné plusieurs plats. Jamais on ne pourrait imaginer qu’un vin de 29 ans ait cette jeunesse de fruit.

La Gioia toscana rouge Riecine 1999 est très agréable sur le canard. Lors de la dégustation d’huiles, il est apparu que l’huile de légumes était idéale avec ce vin, formant un bel accord.

Escenzia Bianco Pojer E Sandri, vendanges tardives des Dolomites titrant 9,5° est très agréable, vin tout jeune et tout frais pour les desserts, sur la piste des vins de glace.

La cuisine de Davide Bissetto est très inventive, en création permanente, puisque, depuis que nous le connaissons, il n’y a jamais eu deux repas de la même inspiration. Il y a du talent, peu tourné vers les vins, même si le chef y est sensible. Il faudra sans doute qu’il ajoute quelques plats plus « rassurants », pour que les guides lui donnent les plus belles notes, qu’il mérite.

Le cadre du Cipriani est somptueux. Davide a tout pour que le restaurant Oro devienne une table incontournable.
Le retour en bateau jusqu’à la place Saint-Marc est un grand moment, fascinant par la virtuosité du pilote qui se joue de tous les obstacles.

Venise est une ville unique, riche de trésors architecturaux, d’art, de musique, de joie de vivre. Espérons que malgré le réchauffement climatique, elle sera toujours l’une des villes les plus inspiratrices du génie humain. Longue vie à cette ville éternelle.

Quelques vues de Venise

2014-09-27 11.50.04 2014-09-27 12.21.46 2014-09-27 13.04.46 2014-09-27 13.06.03 2014-09-27 14.53.50 2014-09-27 15.43.58

départ pour une visite et dîner au Cipriani

2014-09-27 18.25.58 2014-09-27 18.31.02 2014-09-27 18.31.43 2014-09-27 18.33.29 2014-09-27 18.34.58

visite du Cipriani avec Davide Bissetto

2014-09-27 18.41.34 2014-09-27 18.41.38 2014-09-27 18.45.49 2014-09-27 18.48.59 2014-09-27 18.54.45 2014-09-27 19.00.39

apéritif et sabrage

2014-09-27 19.04.25 2014-09-27 19.11.24 2014-09-27 19.14.53 2014-09-27 19.20.10-2 2014-09-27 19.20.47

les huiles à choisir

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les vins

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les plats

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Venise, dîner au Cipriani, mais où est George Clooney ? samedi, 27 septembre 2014

Nous sommes à Venise et il fait beau. Venise accueille la quatorzième biennale d’architecture avec une multitude de lieux à visiter. Nous en choisissons deux. L’un est une corderie maritime, immense usine étalée sur des hectares et des hectares où l’on présente l’architecture de nombreux pays. L’imagination des architectes est sans limite. Les volumes des salles d’exposition sont impressionnants, avec des colonnes aux hauteurs infinies. Une pause déjeuner est faite au Ristorante Bombarde au sein de l’usine, avec des nourritures végétariennes. Le deuxième lieu d’exposition est dans un parc qui a été le site d’une exposition universelle. Il y a des pavillons pour chaque nation. C’est un site magique, longeant la lagune. Un café s’appelle Paradiso et mérite son nom.

Nous nous faisons beaux, car ce soir c’est fête. Nous allons dîner à l’hôtel Cipriani et nous sommes les seules personnes ne résidant pas à l’hôtel qui seront admises car George Clooney a réservé tout l’hôtel pour son mariage. On nous a jugés suffisamment importants pour qu’une entorse soit faite à cette réquisition. Lorsque nous nous présentons à l’embarcadère, des préposés font barrage à toute demande, mais le nom de notre ami est un sésame compris instantanément par le capitaine du bateau à l’invraisemblable dextérité dans les manœuvres d’accostage.

A l’approche du Cipriani, une bonne dizaine de bateaux de paparazzi sont en attente et lorsque nous débarquons, les flashs crépitent. Les photographes seront bien embêtés lorsqu’il faudra mettre des noms sur nos visages.

Nous sommes conduits au restaurant du Cipriani par Carlo Tofani, directeur du restaurant qui, briefé par Davide Bissetto, le chef que nous connaissons bien, nous traite avec des égards marqués, comme si nous étions plus importants que la cohorte qui va bientôt arriver.

Le sommelier Teseo Geri dit qu’il est allé voir mon blog et me montre un respect lui aussi marqué. Davide vient nous saluer, demande si nous voulons commander à la carte ou le laisser faire. Selon une coutume respectée à chaque voyage à Casadelmar lorsque Davide y officiait, nous laissons Davide choisir ce qu’il veut.

Un ami va noter le menu car aucun intitulé ne nous sera donné. Voici ce qu’il a griffonné : Granité de concombre, aspic pamplemousse, fraise et gingembre, tourteau de la lagune, Bloody mary distillé à froid, poivre Tabasco Worcester sauce / Julienne de tomate verte, concombre, pointe de menthe / Thon marine 8 heures avec du sucre, ventrèche, salade Wakamé, écume de clams, pain cuit vapeur au persil / Tortellini à l’osso bucco, gelée de whisky tourbé et bouillon dégraissé, fleur de safran / Risotto, mulet rouge, Porto, poire / Loup de mer confit à l’huile olive 60 degrés, côte de blette, réduction / Entrecôte Wagyu, sauce de ornella, salade choux rouge, oignon cuit au sel marin au vinaigre, glace de Burrata, réduction oursin, crevettes / Pomme rouge acide, bergamote, sorbet framboise, mousse groseille / Cassata amande, figue fraîche et sorbet, white and red grapes, Ricotta / Friandise datte pistache lime fève de cacao / Cacao et chocolats divers.

Davide est un chef à l’imagination débordante, aimant mêler des saveurs surprenantes, ce qui parfois pose des problèmes de choix de vins. C’est la première fois que nous le voyons ajouter autant d’alcools dans ses plats, ce qui est parfois difficile et parfois heureux puisque le Wagyu a été préparé au même vin que celui que nous avons commandé.

Avec l’aide de Teseo nous avons commandé trois vins, un champagne, un blanc et un rouge, mais Teseo, heureux de nous recevoir, en a ajouté cinq !!! La carte des vins comporte beaucoup de choix possibles. La collection de vins italiens est impressionnante. Certains prix sont raisonnables. D’autres s’adressent à une clientèle internationale aux moyens illimités.

J’ai choisi un Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en 2008 alors que j’avais le choix possible d’un 2010. Au premier contact une petite amertume déviée me fait regretter d’avoir choisi le Substance au dégorgement le plus ancien, mais le champagne va se reconstituer dès qu’il est en présence des plats. Le champagne très typé, ambré, légèrement fumé, aime les saveurs qui le provoquent et il est mis à belle épreuve, au point qu’il se marie divinement avec la sauce au Bloody Mary.

Le vin blanc suggéré par Teseo est un Sterpi Derthona Vigneti Massa 2011 gentil mais trop court et trop jeune. Après avoir discuté sur ce qui pourrait le remplacer, nous avons eu une incompréhension car je voulais un riesling sec et le Clos Saint Urbain Rangen de Than domaine Zind Humbrecht 2006 est en fait terriblement botrytisé, avec le goût d’une vendange tardive. Il évoque Yquem, l’abricot, et n’a pas le tranchant qui conviendrait aux plats. Tant pis.

Le rouge que j’ai commandé est Ornellaia Bolgheri 2005. Ça c’est une bonne pioche. Le vin est d’un charme rare. Affirmé, avec un lourd alcool, il réussit l’exploit d’être d’un superbe velours. Sur les raviolis il fut divin ainsi que sur le bœuf plus ferme que ce que Wagyu suggère.

La vedette, c’est le Clos de la Coulée de Serrant Nicolas Joly 2011 vin glorieux dont l’accomplissement est très étonnant tant la Coulée de Serrant a besoin d’années pour s’exprimer. Le vin magnifique et joyeux a accompagné le plus beau plat du dîner, le loup qui vaudra à son auteur un beau paquet d’étoiles lors du prochain guide.

Nous avons eu  un Cerasuolo d’Abruzzo 2012 vin rosé, suggestion extrêmement pertinente du sommelier qui a accompagné parfaitement le risotto au rouget.

La ronde des vins ajoutés a été si dansante que je ne sais plus très bien à quel moment chacun est apparu. Un Vecchio Samperi Ventennale Marco di Bartoli titrant 17,5°, vin liquoreux sec qui fait penser à un vin jaune ou à un Xérès, très fort et très percutant, probablement sur la pomme rouge très acide.

Lorsque Davide est venu nous rejoindre et s’est assis à notre table, Teseo nous a offert sur les délicieux chocolats un Porto Graham’s 1945 tout à fait étonnant, car ne montrant aucun signe d’âge et aucun indice de mûrissement. Un véritable régal avec des notes très fortes de tabac.

Nous avons été choyés, chouchoutés. La cuisine de Davide est talentueuse, mais difficile pour les vins. Il foisonne d’idées de combinaisons qui doivent être des casse-têtes pour les sommeliers. Nous avons eu un beau dîner avec le loup, les raviolis et le risotto qui sont des plats merveilleux comme le dessert mauve, signature colorée du chef.

Les plus beaux vins sont La Coulée de Serrant 2011, l’Ornellaia 2005 et le Selosse, sans oublier le gourmand Porto 1945. Le service fut exceptionnel et nous avons été royalement traités.

Bon, c’est bien tout ça, mais George Clooney, où est-il ? En fait la joyeuse bande du mariage de George, avec les flashs qui crépitent, est passée bien loin de nous au point qu’aucun bruit n’est parvenu jusqu’à nous. Seul Bill Murray a pointé son nez dans notre salle. Nous l’avons revu plus tard, lorsque la navette nous a fait accoster sur la place Saint Marc. Il titubait hors de l’eau, mais peut-être était-ce de la comédie ?

Petit déjeuner sur la terrasse surplombant la place Saint-Marc

2014-09-26 10.13.42 2014-09-26 10.14.50 2014-09-26 10.29.48

happening dans l’un des sites de la biennale d’architecture

2014-09-26 12.48.32 2014-09-26 12.48.52 2014-09-26 13.31.50 2014-09-26 15.04.00 2014-09-26 15.13.27

des vues plus inhabituelles de Venise

2014-09-26 15.30.33 2014-09-26 15.31.59 2014-09-26 15.32.14 2014-09-26 15.33.18 2014-09-26 15.33.51 2014-09-26 16.27.41 2014-09-26 16.36.47

dîner au Cipriani – nous prenons un bateau navette du Cirpiani

2014-09-26 19.40.19

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le chef nous rejoint à table

2014-09-26 23.27.20

2014-09-26 20.13.41 2014-09-26 20.37.02 2014-09-26 20.57.27 2014-09-26 21.21.18 2014-09-26 21.48.27 2014-09-26 22.14.50 2014-09-26 22.41.37 2014-09-26 22.56.35 2014-09-26 23.12.31 2014-09-26 23.13.23 2014-09-26 23.13.28

2014-09-26 21.29.41 2014-09-26 23.48.37

retour par la navette

2014-09-27 00.13.36 2014-09-27 00.24.44

Premier jour à Venise vendredi, 26 septembre 2014

La grève des pilotes d’Air France a remis en cause le voyage que nous voulions faire, ma femme, deux amis et moi à Venise, cadeau que des amis nous avaient fait lors de mon anniversaire il y a deux ans. La solution trouvée est de prendre un vol à Beauvais, par Ryan Air. Branlebas de combat avant l’aurore pour arriver à Beauvais. Pour éviter la circulation du matin, nous partons très tôt, ce qui nous donne deux heures d’avance sur place, auxquelles il convient d’ajouter les deux heures de retard qui sont annoncées. Le low cost, c’est low cost. Mais le service à bord est meilleur que sur Air France, puisque l’on paie.

Un taxi nous conduit de Trévise à Venise et un vaporetto omnibus nous transporte place Saint-Marc. Onze heures pour arriver à Venise, c’est une expédition, une vraie.

Notre hôtel est le Concordia, qui suscite, on l’imagine, quelques jeux de mots (j’ai un penchant pour le Concordia ou bien, voilà où nous échouons). Notre chambre est magnifique, car elle est la seule qui dispose à l’étage, au dessus d’elle, par un escalier intérieur, d’une terrasse en plein ciel qui donne sur la place Saint-Marc et sur la célèbre horloge construite en 1496. C’est un nid de toute beauté.

Un des amis a réservé pour demain et après demain des tables à dîner au célèbre hôtel insulaire, le Cipriani et je téléphone à cet hôtel pour parler au chef Davide Bissetto, qui avait fait pour nous des repas d’anthologie au Casadelmar de Porto-Vecchio.

Lorsque je dis à Davide que nous allons nous retrouver demain il me dit que c’est impossible, car le Cipriani est fermé pour deux jours car réservé au mariage de George Clooney. Il me dit que toute tentative est exclue. Je lui rappelle que nous faisons ce voyage pour le voir, mais rien n’y fait.

Il me demande alors à quel nom la table a été réservée et lorsque je cite le nom de mon ami, je sens Davide soulagé : notre table est la seule qui a été acceptée, alors que George Clooney avait payé pour que toutes les réservations soient remboursées. Serons-nous les seuls à être témoins ? A suivre demain.

A 19 heures nous nous rendons au Théâtre La Fenice qui est celui où Giuseppe Verdi a fait la première représentation de La Traviata et c’est cet opéra que nous allons voir, avec une merveilleuse soprano, Francesca Dotto, qui porte à elle seule le succès de cette représentation.

Des grands airs, ça donne faim, aussi allons-nous souper au restaurant Osteria enoteca San Marco. Le restaurant est sympathique, il y a des vins partout, comme en une boutique de caviste. Je jette mon dévolu sur un vin que j’ai découvert au Grand Tasting en présence du célèbre propriétaire, le Gaja Sperss Barbaresco Langhe 2008. Ce vin de 14,5° a un parfum profond, subtil, élégant. En bouche il est envoûtant de charme. Par beaucoup d’aspects il évoque Vega Sicilia Unico car il y a cette même facilité de lecture combinée à une race extrême. Raffiné, il est d’une grande majesté. Après de fines tranches de jambon, j’ai pris des filets de sole au riz noir, que le vin accepte bien. Ce restaurant est simple mais agréable et ce vin est splendide.

Après une nuit de récupération, le petit déjeuner sur la terrasse surplombant la place San Marco, c’est un grand privilège et un grand moment. Il fait beau, la vie est belle.

2014-09-25 11.56.50

vues classiques de Venise

2014-09-25 15.30.17 2014-09-25 15.30.58 2014-09-25 15.40.26

vues de la terrasse de ma chambre

2014-09-25 16.25.08 2014-09-25 16.26.16 2014-09-25 16.26.21

le théâtre où se joue la Traviata

2014-09-25 18.42.58 2014-09-25 18.50.44

dîner après Opéra

2014-09-25 23.29.45 2014-09-25 22.17.11 2014-09-25 22.22.07 2014-09-25 22.54.55

Dernier dîner avec mon fils avant son retour aux USA vendredi, 26 septembre 2014

Mon fils va repartir aux Etats Unis demain matin. Sa mère a prévu un rôti de veau Orloff. Je n’ai pas eu le temps de préparer un vin aussi faut-il un vin qui est bon dès l’ouverture. Je choisis une Côte Rôtie La Turque Guigal 1996. Ce vin est d’une franchise, d’une simplicité naturelle, dans la joie et la plénitude du fruit. Il est généreux et on peut dire : « ça c’est du vin ». C’est un régal. Et même si ce n’est pas le vin idéal pour le veau, on s’en moque, car le vin a de la joie à revendre. C’est ce qu’il fallait pour donner à mon fils l’envie de revenir vite en France.

2014-09-22 20.33.30 2014-09-22 20.33.24

Déjeuner au restaurant Prunier vendredi, 26 septembre 2014

Déjeuner au restaurant Prunier de l’avenue Victor Hugo à Paris. Le cadre est classé, avec une personnalité attachante. Les huîtres Gillardeau n°5 sont extrêmement typées et intenses. La résolution de ne pas boire de vin au déjeuner tombe à l’eau, si l’on peut dire, et je commande un Champagne Bollinger Grande Année 2002. C’est un champagne magnifique, gourmand, facile à lire, qui vibre avec les huîtres. Il a une grande longueur qui donne une trace très forte. Le hareng est très viril, au goût marqué, très pertinent. Le cabillaud cuit à la vapeur avec un pressé de pommes de terre est agréable mais n’intéresse plus tellement le champagne solide. Déjeuner au restaurant Prunier est une bonne idée, à renouveler.

2014-09-22 13.45.27 2014-09-22 13.45.36

charme désuet des assiettes

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Déjeuner au restaurant Itinéraires vendredi, 26 septembre 2014

Déjeuner de famille organisé par ma sœur au restaurant Itinéraires. Nous prenons le menu dégustation du chef Sylvain Sendra avec une jolie composition sur l’huître et des légumes verts, un œuf mollet, un beau rouget, une viande rosée et lardée sur des variations de carottes, un intelligent plateau de fromages et une ganache au chocolat. La cuisine est délicate, raffinée, intelligemment exécutée. C’est un peu agaçant quand on vous énonce les fournisseurs de carottes, de courgettes, d’œuf et de toutes choses, mais c’est très tendance et ça démontre la recherche des meilleurs produits.

Le Champagne André Beaufort à Ambonnay 2005 me rebute un peu au premier contact car il manque un peu de rythme, mais il se transforme complètement sur la nourriture, devenant très accueillant et agréable à boire.

Le Crozes Hermitage Cap Nord Laurent Combier 2011 est tout en fruit, en cassis poivré, étonnamment juteux et souriant. « On en a plein la bouche de cette corbeille de fruits noirs ». Il est généreux et franc et je l’aime beaucoup dans cette spontanéité du fruit.

Le restaurant Itinéraires, que je ne connaissais pas, mérite l’intérêt.

2014-09-23 12.38.52 2014-09-23 12.37.38

2014-09-23 12.50.18 2014-09-23 13.23.45

2014-09-23 12.53.45 2014-09-23 13.06.14 2014-09-23 13.27.36 2014-09-23 13.47.23 2014-09-23 14.16.06 2014-09-23 14.43.34