141ème dîner de wine-dinners – les vins jeudi, 11 novembre 2010

ajouté : Champagne Laurent Perrier rosé Cuvée Alexandra 1998, en mémoire de Bernard de Nonancourt, récemment décédé

Champagne Charles Heidsieck 1955 (prévu, mais enlevé du fait de défections d’inscrits)

Champagne Krug 1988 (prévu, mais enlevé du fait de défections d’inscrits)

"Y" d’Yquem 1988

Chevalier-Montrachet Antonin Rodet 1987

Château Cheval Blanc 1955

Château Palmer 1959

Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961

La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1982

Château Guiraud Sauternes 1971 (prévu, mais enlevé du fait de défections d’inscrits)

Château Filhot 1935

141ème dîner de wine-dinners – photos jeudi, 11 novembre 2010

Photos de groupe (trois vins ne seront pas inclus dans ce dîner, car nous ne sommes que six au lieu de 10 pour lesquels ce dîner était prévu)

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les bouchons

Emusion d’oursins / un autre amuse-bouche / Crevettes poêlées minute

Moules et girolles de Sologne / Encornets farcis et senteurs de Speck / Foie Gras poêlé

Perdreau rôti en cocotte / Fromages / Clémentines rôties.

141ème dîner de wine-dinners au restaurant de Patrick Pignol mercredi, 10 novembre 2010

Le 141ème dîner de wine-dinners se tient au restaurant de Patrick Pignol. Nicolas, le fidèle sommelier qui a déjà servi le vin de neuf de mes dîners faits en ce lieu, observe une fois de plus cette opération et vient sentir les vins. Les parfums des deux bordeaux rouges sont capiteux et profonds, celui du Palmer 1959 étant plus riche que celui du Cheval Blanc 1955. Le souci vient de La Tâche 1982. Quand j’ai fait les photos des vins en cave, le vin me paraissait clairet. Je me suis demandé s’il y avait un début de dépigmentation mais il n’en était rien. La bouteille me paraissant convenable, elle avait été conservée au sein du groupe de vins. Lorsque je la prends en mains sous la lumière beaucoup plus crue que celle d’une cave, le liquide ressemble plus à un jus de grenadine qu’à un vin. J’ouvre le bouchon, plus fatigué qu’il ne le devrait dans sa partie haute, mais très convenable dans sa partie basse. Le nez du vin n’est pas très expressif mais pas désagréable. Je verse un peu dans un verre et la couleur est manifestement trop claire. Au goût, le vin n’est pas à rejeter, mais il n’exprime rien. Pour moi la cause est entendue, le vin est mort. Le Filhot 1935 a un parfum miraculeux.

La liste des vins a été prévue pour une table de dix personnes, comme à l’accoutumée. La date ayant été mal choisie puis que nous sommes la veille d’un jour férié, nous ne serons que huit. Parmi les inscrits il y a un couple d’amis marocains dont la femme a demandé que mon épouse assiste au dîner pour qu’elles puissent deviser sur des sujets dont le vin n’est pas l’épicentre. Or ma femme ne boit pas. Nous ne serons que sept buveurs. Bernard de Nonancourt étant décédé une semaine avant ce repas, j’avais jugé opportun que nous rendions un hommage à sa mémoire en début de repas, aussi ai-je ajouté un champagne Laurent Perrier au programme. Sept buveurs et onze vins, c’est un peu trop. Je décide donc de ne pas ouvrir le Guiraud 1971. Dix vins pour sept, c’est encore beaucoup. Mais nous avons un jour férié à suivre pour nous reposer.

Toutes les bouteilles sont ouvertes, sauf les champagnes, et c’est alors que je reçois un appel téléphonique. L’amie marocaine est bloquée à l’aéroport car dans la zone internationale elle s’est fait voler son passeport. Par ailleurs son mari qui est à Paris s’est alité car il ne se sent pas bien. Les coups de fil s’échangent, la volonté de venir est là, mais au fil des heures une évidence s’imposera : ils ne viendront pas.

Reprenons donc notre équation : huit personnes dont sept buveurs moins deux, cela fait une table de six dont cinq buveurs. Dix vins pour cinq, cela commence à ressembler à un combat inégal. Un ami français vivant en Australie, fidèle de mes dîners, étant venu me rendre visite au restaurant de Patrick Pignol, je lui demande s’il peut se libérer pour participer au dîner. Il a réservé dans un autre restaurant pour retrouver deux amis. Il semble difficile de modifier son programme.

La variable d’ajustement, ce sont les champagnes qui ne sont pas ouverts. N’ayant aucune envie de supprimer l’hommage que je veux rendre à Bernard de Nonancourt, ce sont les deux autres champagnes qui seront sur la touche. Nous sommes donc dans la formation suivante : cinq buveurs et huit vins. Courage !

Sur les six présents il y a trois nouveaux. Quand j’annonce la très certaine mort de la Tâche 1982, la tristesse se lit sur les visages. Nous sommes prêts à passer à table. Nous prenons l’apéritif sur le Champagne Laurent Perrier rosé Cuvée Alexandra 1998, dont le prénom est celui d’une des filles du regretté président de Laurent Perrier. Le champagne lui-même rend hommage à ce grand personnage du monde du vin, car c’est certainement le meilleur que je n’aie jamais bu de cette cuvée. Bernard aurait été heureux de savoir que nous l’avons adoré, avec sa magnifique couleur d’un rose pur, sa bulle active et élégante et un goût de plus en plus cohérent, riche et profond. Patrick Pignol qui a bu une coupe avec nous décide de nous préparer, après avoir recueilli notre avis, une émulsion d’oursins dans une coquille d’œuf. Le mariage est pertinent et nous ravit.

Patrick Pignol prépare toujours ses menus au dernier moment, en fonction des achats qu’il fait à Rungis, à une heure où tout le monde dort. Voici le menu qu’il a composé : Crevettes poêlées minute / Moules et girolles de Sologne / Encornets farcis et senteurs de Speck / Foie Gras poêlé / Perdreau rôti en cocotte / Fromages / Clémentines rôties.

Le "Y" d’Yquem 1988 a une couleur de belle jeunesse, sans le moindre signe d’un début de brunissement. Le nez est très riche, évoquant les grains de raisin d’Yquem que l’on presse. En bouche le vin est plein, opulent, joyeux, avec une légère sucrosité malgré sa belle rigueur. Son final est très prononcé. Le deuxième amuse-bouche, dans lequel j’ai le souvenir d’une purée de céleri, ne vibre pas avec le vin, alors que l’accord avec les crevettes est saisissant. Ce sera le plus bel accord du repas. Il montre à quel point une cuisine exacte amplifie le message d’un vin. Cet "Y" d’une belle année est porté, par cet accord, à son plus haut niveau.

Le Chevalier-Montrachet Antonin Rodet 1987 a un nez d’une minéralité impressionnante. Il sent la pierre à fusil à cinq pas. Alors que le "Y" avait des rondeurs appétissantes, le Chevalier Montrachet, d’une puissance étonnante pour son année, est d’une rigueur d’ascète. C’est la droiture sans fioritures ! Le plat de moules est délicieux mais le mariage mets et vin ne crée aucune vibration. Les très bons encornets s’accordent mieux au vin, sans toutefois le dérider. Si sa puissance m’a étonné, sa sévérité l’a laissé "droit dans ses bottes", peu accueillant aux plats proposés.

Sur le foie gras poêlé aux haricots blancs, nous allons boire deux icônes du vin bordelais. Les couleurs sont belles, celle du Château Cheval Blanc 1955 étant la plus foncée. Le nez du Château Palmer 1959 est le plus charmeur. En bouche, la séduction du Palmer entraîne l’adhésion des convives, alors que je suis absolument enthousiasmé par la profondeur de trame du Cheval Blanc. Elle est même particulièrement impressionnante. Il est assez probable que ma jubilation à boire le 1955 aura influencé les votes en fin de repas, alors que tout le monde a apprécié le Palmer 1959 pour sa vivacité charmeuse, vin épanoui à la jeunesse folle. J’ai tellement insisté sur la richesse profonde de la trame du Cheval Blanc 1955, vin d’une richesse incroyable devenu intemporel tant il est parfait, que ma préférence est devenue contagieuse. Le foie gras n’ajoute rien à la performance des bordeaux. Les deux vins très différents ont une caractéristique commune, c’est d’avoir atteint un niveau d’équilibre indestructible qui rend impossible de leur donner un âge. Le 1955 confirme son statut au plus haut niveau de la hiérarchie des Saint-Emilion. Le Palmer, par son charme et son élégance, a tout d’un grand margaux, l’un des Palmer les plus réussis.

Nombreux sont ceux qui pensent que les bourgognes n’auront pas la partie belle après ce feu d’artifice de saveurs inégalables. Mais je connais par cœur le Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961 qui n’a jamais failli à sa mission de conquérir les cœurs. Son nez est déjà un brevet de perfection. Son charme est redoutable et la bouche le confirme. C’est un bourgogne serein, équilibré, tranquille, très sûr de son effet. J’adore ce vin. Le perdreau est brutal tant il est faisandé. Il pourrait se concevoir, mais il est trop violent pour ce vin. Un rejet se produit entre le vin et lui. Nicolas nous sert maintenant La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1982. Qui pourrait croire qu’il s’agit du vin que j’ai annoncé mort ? Sa couleur s’est foncée. Son nez a gagné en pureté, même s’il est très discret et en bouche, on retrouve des caractéristiques habituelles des vins de la Romanée Conti, la rose et le sel. Un convive, tellement heureux que le vin ne soit pas ce que j’avais dit, le classera premier de son vote, ce qui est manifestement excessif, mais nous sommes loin du désastre annoncé. Le vin peut se boire mais ne peut pas cacher qu’il n’est pas ce qu’il devrait être. C’est le soldat marathonien épuisé qui peu avant de s’évanouir a la force de réciter des bribes du message pour lequel il avait couru.

Une tomme, un reblochon et un saint-nectaire sont de bons compagnons des dernières gouttes des deux bourgognes.

Le Château Filhot 1935 est d’une couleur particulièrement jeune. Le nez est généreux, puissant, de fruits jaunes plus que d’agrumes. En bouche, c’est la solidité absolue du beau sauternes. Là aussi, voici un vin dont l’accomplissement et l’équilibre signifient qu’il n’a pas d’âge, devenu intemporel comme les beaux vins qui l’ont précédé. L’accord se trouve plus sur le soufflé que sur la clémentine un peu sucrée.

Il est temps de passer aux votes et nous ne sommes que cinq à voter. Deux vins figurent dans les votes de tous les votants, le Cheval Blanc 1955 et le Chambertin 1961. Trois ont eu des votes de premier, les deux qui viennent d’être cités et La Tâche 1982 (eh oui !). Tous les vins et le champagne figurent dans au moins un vote, sauf le Chevalier Montrachet 1987.

Le vote du consensus est : 1 – Château Cheval Blanc 1955, 2 – Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961, 3 – "Y" d’Yquem 1988, 4 – La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1982, presque à égalité avec Château Filhot 1935.

Mon vote est : 1 – Château Cheval Blanc 1955, 2 – Chambertin Clos de Bèze Pierre Damoy 1961, 3 – Château Filhot 1935, 4 – "Y" d’Yquem 1988.

L’un des participants venant de Marseille a rencontré sur place un ami qu’il n’avait pas vu depuis dix ans. Il s’est déplacé en fin de repas à sa table où l’on m’a fait boire un vin blanc jeune à la simplicité déroutante après ces grands vins.

J’ai préféré la première partie du repas à la seconde qui a apporté peu de vibrations aux vins. Dans une ambiance familiale toujours aussi chaleureuse et attentionnée, malgré les changements de casting, nous avons passé une excellente soirée marquée par quelques vins quasi "éternels".

casual Friday – photos samedi, 6 novembre 2010

Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1995

Champagne Alfred Gratien 1964

Château Carbonnieux blanc 1937

Pavillon blanc de Château Margaux 1929

Montrachet Diard et Girard 1949

Château Gruaud-Larose 1926

Château Haut Brion 1926

(le nom d’André Gibert est peu souvent cité. C’est étonnant que l’on parle d’une mise en bouteille "intégrale" au chateau)

Les couleurs des deux 1926 sont résolument différentes (Haut-Brion à droite) :

Corton Grancey Louis Latour 1959

Chateauneuf-du-Pape La Bernardine Chapoutier 1945

Marestel Robson-Missol 1934

Champagne Moët et Chandon Rosé 1975

Champagne Dom Ruinart 1996

Les plats

Cette signature raffinée sur les plats de service, j’espère que nous pourrons continuer de la voir, en souvenir d’un chef, Gérard Besson, meilleur ouvrier de France, de grand talent.

Casual Friday chez Gérard Besson vendredi, 5 novembre 2010

Il y avait longtemps que nous n’avions pas fait de Casual Friday, moment fou où entre amis, offre du vin qui veut. Comme au poker, il y a toujours un joueur qui mise fort, décourageant la contradiction. Ce coup-ci, c’est Florent qui a asphyxié la concurrence. Il arrive de Lyon de bon matin au restaurant Gérard Besson, et, par un réflexe d’amitié, je viens le rejoindre pour qu’il ne se sente pas seul. Nous savons que Lionel, professionnel des arrivées tardives, sera en retard comme d’habitude. Aussi, nous bavardons de choses et d’autres, et à midi, il fait soif. Nous choisissons un Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1995. Ce champagne est d’une tension assez extrême. Lorsqu’il s’oxygène, il se domestique, et nous jouissons d’un champagne goûteux. Notre petit groupe se constitue. J’ai oublié mon portable, ce qui me paralyse, aussi est-ce bien tard que je rappelle à l’ordre Cédric qui pensait qu’un Casual Friday était un dîner. Il nous a rejoints rapidement.

Le Champagne Alfred Gratien 1964 est une pure merveille. Il a une couleur abricot, un pétillant actif et son goût est extrême. Je vois des fruits jaunes, des fruits confits, du citron vert et de l’écorce d’agrume. Sur les amuse-bouche, brioche de homard, gougère et tête de veau, c’est cette dernière qui fait vibrer le champagne grâce à son poivre bien dosé. On se sent "confortable" en buvant un champagne "plein", joyeux, riche comme des rêves de mille et une nuits.

Le Château Carbonnieux blanc 1937 est d’un bel ambre et son nez est superbe. Il y a de la poire, du coing, et une élégance rare. Ce vin est dans une forme parfaite. Florent l’avait acheté sur la foi de mes commentaires. Tout se confirme. Denis est un bizut de notre groupe, dont le "passeport" est un Pavillon blanc de Château Margaux 1929. Il est des tickets d’entrée de moindre prestige. Hélas, le "ticket" a un nez un peu incertain. La bouche est un peu déviée, délavée, tendance serpillière. Par comparaison, le Carbonnieux brille d’autant plus. Le 1929 est buvable et Denis le défend, ce qui est légitime. Mais c’est une version faible de ce vin. Le pâté de turbot est un plat de la cuisine de nos enfances, perpétuation des recettes d’antan. Et c’est un vrai bonheur. Le Carbonnieux est magique sur ce plat.

Le Montrachet Diard et Girard 1949 a une sale couleur grise. Il sent le gibier, et n’est pas engageant. Je n’insiste pas même si je sens que quelques heures de plus pourraient réveiller ce moribond. Pour l’instant il est mort. C’est dommage pour le bar qui est superbe.

Pour accompagner la grouse fort typée, le Château Gruaud-Larose 1926 à la couleur d’un rouge de belle jeunesse est idéal. Ce qui me frappe dans ce vin, c’est qu’il est impossible de lui trouver le moindre défaut. Il est parfait, dans une forme absolument accomplie d’un vin intemporel. En bouche, c’est un plaisir parfait. A côté de lui, le Château Haut Brion 1926 qui est ma contribution est d’une couleur noire, indiquant une densité extrême. Quand le Gruaud Larose joue sur le charme, le Haut-Brion joue sur la profondeur. J’ai toujours considéré que 1926 est la plus grande année de Haut-Brion. Celui-ci nous entraîne dans l’extrême. Il n’est pas facile à comprendre pour beaucoup de mes amis, mais je le trouve absolument grand, dans une forme d’une intensité rare. Evidemment mes amis se moquent de moi car je succombe à la densité de ce vin et j’en vante les qualités.

Nous passons maintenant au lièvre à la royale qui est magnifiquement réalisé, tout en finesse, ce qui ne caractérise normalement pas un tel plat. C’est ce qu’il faut pour le Corton Grancey Louis Latour 1959 au nez d’une sensualité bourguignonne. Le vin est "frais", magique, délicat. Il a toute la richesse de la Bourgogne. Des amis pensent que le Corton Grancey est un peu faible à côté du lièvre, et c’est ce que je croyais "sur le papier". Mais en fait l’accord se fait. C’est le Haut-brion 1926 qui crée le plus bel accord avec le lièvre.

Le Chateauneuf-du-Pape La Bernardine Chapoutier 1945 me frappe par sa jeunesse. Je lui trouve des aspects mentholés. Il a de la fraîcheur et un léger manque d’homogénéité. Gérard Besson a ajouté à son menu une assiette de champignons et des pains grillés aux abats qui s’accordent très bien au vin du Rhône.

J’ai choisi, parmi les apports prestigieux proposés, que nous goûtions un Marestel Robson-Missol 1934 proposé par la seule femme de notre déjeuner. L’étiquette indique "Marétel". Le vin à la couleur claire a un goût très pur. Je l’avais aimé à l’ouverture et il va bien sur une tomme de Marie Quatrehomme. Mais il ne peut pas cacher certaines limites de goût, car il est plutôt monolithique et simplifié. Mais je suis ravi de cet essai.

Sur le dessert, chocolat-framboise, le Champagne Moët et Chandon Rosé 1975 à la vilaine couleur est mort, définitivement mort. Aussi l’un d’entre nous commande-t-il un Champagne Dom Ruinart 1996 qui signe un brutal retour sur terre. Nous étions dans un monde de saveurs équilibrées, intégrées et délicates. Ce champagne qui serait bon dans un autre contexte marque un retour brutal au monde des vins d’aujourd’hui.

Gérard Besson va quitter son restaurant fin décembre. Il nous a offert un déjeuner d’une très grande qualité. Nous avons donc pris date pour un nouveau repas, d’adieu cette fois, où l’oreiller de la Belle Aurore, plat emblématique du chef, sera au rendez-vous.

Le vote du consensus de notre groupe de huit est : 1 – Château Gruaud-Larose 1926, 2 – Corton Grancey Latour 1959, 3 – Château Haut Brion 1926, 4 – Champagne Alfred Gratien 1964.

Mon vote est : 1 – Château Gruaud-Larose 1926, 2 – Château Carbonnieux blanc 1937, 3 – Château Haut Brion 1926, 4 – Corton Grancey Latour 1959.

Ce fut un Casual Friday de grande qualité.

Sup de Goût mercredi, 3 novembre 2010

L’Ecole Supérieure du Marketing du Goût remet les diplômes de fin d’étude à des élèves dont les mémoires sur des projets ambitieux ont retenu l’attention de la direction.

Dans ce foisonnement inventif, on note l’intérêt pour le "snacking", pour le bio et pour la Chine.

Ce sont des professionnels de la restauration, du vin ou de la communication qui remettent les diplômes. J’ai l’honneur de remettre un diplôme à un jeune ambitieux qui veut participer à diffuser la connaissance du vin.

La réunion se passe dans l’un des salons prestigieux du Cercle Interallié, suivi d’un buffet qui permet de discuter avec les élèves et avec de grands professionnels qui apportent leur soutien à cette école.

Je retrouve des élèves passionnés que j’avais initiés aux vins anciens lors d’une conférence et ensuite à l’académie des vins anciens.

Il est rafraîchissant de voir des jeunes qui prennent bien en main leur avenir.

repas gastronomique chez des amis du sud lundi, 1 novembre 2010

Des amis de notre villégiature du sud nous invitent à dîner. L’apéritif se grignote sur un Champagne Bollinger 2000 qui est très agréable. Il n’est pas aussi typé que les champagnes de la veille, mais il tient très agréablement son rang de champagne. Il y a un fruité et un fumé qui sont délicatement dosés.

Notre hôtesse a réalisé des recettes complexes puisées dans la mouvance bio, et nous sommes admiratifs de sa dextérité. Un rouleau de poivron rouge bio au potimarron, chèvre frais et aneth, tuiles aux graines de lin, gomasio et paillettes d’algues, crème de spiruline au sésame colle avec une adéquation saisissante au Château de la Nerthe Chateauneuf-du-Pape blanc 2008 qui épouse le poivron miraculeusement. Le vin est profond tout en n’en faisant pas trop, et l’accord est élégant. Je n m’attendais pas à un équilibre aussi délicat de la part de ce jeune Châteauneuf. Voilà un vin blanc de grande tenue.

J’ai apporté deux vins sans connaître le menu. Le plat suivant est une papillote translucide de saumon fondant, girolles, confit d’oignons au miel et vin rouge. Le vin est un Château Canon Saint-Emilion 1971 dont le niveau était dans le goulot. La couleur est belle, intense, d’un rouge joliment noir. Le nez est incisif, et ce qui me marquera tout au long du voyage de ce vin, c’est la profondeur de la trame de ce vin riche. On pense aux tapis les plus nobles dont le nombre de points est quasi infini. On a cette impression avec ce saint-émilion profond aux tannins présents. L’accord avec le saumon se trouve mieux qu’avec les girolles trop imprégnés du jus fort. Ce Château Canon est une petite merveille.

Le plateau de fromage avec un Saint-Félicien bio, avec un époisses et un Livarot n’est peut-être pas le partenaire idéal pour le Gevrey-Chambertin Clos Saint-Jacques Armand Rousseau 2001, mais tout le monde est prêt à se conformer à ce casting. Car le vin de Rousseau est un plaisir majeur, au fruit rose et rouge, à la mâche délicate, et au parcours en bouche charmant. C’est un vin que l’on déguste, essayant de lire tous les sourires qu’il nous propose comme le fait un jeune enfant. Ce vin bien fait, riche, plein et équilibré joue sur un registre de distinction calme. J’adore cette expression tranquille assumée.

Nous finissons sur une crème brûlée recouverte d’une fine couche de chocolat qui réclame de l’eau pour en suivre les subtilités.

Nous avons refait le monde, car la période s’y prête, en ponctuant ce beau repas d’une cuisinière qui a réussi à jouer la complexité avec succès, par des vins de grands niveaux.

Vive le sud !

champagne, suite dans le sud samedi, 30 octobre 2010

Le lendemain, le ciel est à la pluie. Le temps fraîchit, et vers 19 heures, au bord de la mer, le marin a soif.

J’ouvre un Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1999. C’est la première fois que la vibration de ce champagne m’atteint avec cette intensité. Ce champagne est foncièrement dense. Je le considérais comme un champagne intellectuel et voici qu’il est capable d’émotion. Il prend des intensités de fleurs et fruits roses et blancs, sur une profondeur rare. C’est un vrai plaisir.

Il paraît alors intéressant de voir ce que donne le Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en 2007. Et la complémentarité est évidente. Le champagne de Selosse est plus typé, plus fumé, plus concentré sur des fruits bruns. Mais la densité aromatique est de la même lignée. Voilà deux champagnes qui se caractérisent par leurs densités, et se différencient par des couleurs blanches pour le Bollinger, et brunes pour le Selosse.

Deux grands champagnes assurément, aux longueurs infinies.

retrouvailles du sud ! vendredi, 29 octobre 2010

Nous descendons dans le sud après toutes ces grèves et nous y trouvons ma fille et mon gendre qui nous ont précédés.

Après un alibi sportif sonne l’heure de l’apéritif, car il nous faut reconstruire le monde, dont nous avons les clefs de son renouveau.

Pour philosopher, rien de tel qu’un magnum de Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1995.

Un long filet de chorizo va accompagner le champagne qui est le George Clooney du champagne : c’est le gendre idéal. Le champagne est serein, goûteux, avec une petite trace d’un dosage fumé, et il enchante l’âme, avec un goût de revenez-y insistant. Voilà un bien beau champagne, dans une acception rassurante.

La magie du sud, c’est bien sûr la mer, dont les couleurs s’adaptent aux saisons, mais c’est aussi ces champagnes scouts, "toujours prêts" à nous ravir.