L’île de Pâques dimanche, 10 janvier 2010

 

Voyage de Silke et François Audouze janvier 2010

 

Ce compte-rendu de voyage a été rédigé pour garder la mémoire des événements qui nous ont marqués. Il n’a normalement pas sa place sur le blog, puisqu’on n’y parlera pas de vin. Il ne sera pas inclus dans les bulletins. Il a été mis dans l’année 2001, pour ne pas dévier du contenu qui est destiné au vin.

 

Il est recommandé de lire dans l’ordre du voyage.

 

L’île de Pâques

 

6 janvier 10

 

L’avion est grand, beaucoup de gens vont vers Tahiti, car notre arrivée n’est qu’une étape pour eux. Le repas est délicieux et le service de la compagnie chilienne est charmant. Qu’allons nous découvrir en mettant les pieds sur cette île magique vers 21 heures ? L’imagination travaille et l’excitation est à son comble.

 

L’aéroport de l’île est exactement comme je les aime : un tracteur agricole tire l’escalier qu’il colle à la porte de l’avion. Nous descendons dans la salle de réception des bagages où de souriantes femmes sont prêtes à accueillir les touristes. Les bagages arrivent, reniflés par des chiens qui contrôlent qu’aucune denrée alimentaire ou plante n’arrive sur l’île. A la sortie un bel îlien au type tahitien appelle Silke par son prénom. Pas de pancarte de reconnaissance, mais une prescience de qui est qui. Samy, le guide, nous passe un collier de jolies fleurs jaunes autour du cou et nous partons à l’hôtel Explora. Il fait nuit maintenant. A l’entrée, la souriante directrice de l’hôtel nous accueille et nous montre notre chambre. Tout ici est dessiné en ronds qui s’entrecroisent. Les matériaux sont le béton brut et le bois clair. Les fondations sont en pierre de lave noire que l’on trouve partout sur l’île. Dans la chambre, une baie vitrée de six fenêtres placées en cercle donne sur la mer. Nous revenons vite, car Samy nous explique les excursions que nous ferons les prochains jours. Le rendez-vous est pris pour le lendemain.

 

Nous prenons un rapide dîner qui sera le troisième repas de notre journée rallongée de deux heures. En sortant pour rejoindre notre chambre, le ciel est illuminé d’étoiles comme on en voit rarement. Cette île est sans pollution et loin de toute source de pollution. C’est comme si le ciel était doté d’un rhéostat poussé à son maximum. C’est absolument spectaculaire.

 

Dès que nous avons éteint les lampes, malgré des fenêtres ouvertes, le noir est total ainsi que le silence. Du fait de l’excitation, j’ai très mal dormi, réveillé très tôt par des coqs qui chantent le lever.

 

7 janvier 10

 

Le petit déjeuner ne se prend pas en chambre. A 9h45, une camionnette Chevrolet conduite par un homme au profil tahitien typique emporte un groupe de six touristes, deux brésiliens, deux suisses et nous. Nune, la jolie guide, nous conduit au premier site de statues. C’est évidemment émouvant, mais l’on est loin de la majesté imposante que l’on imaginait. Une fois cette entrée en matière acceptée, on est pris par l’étrangeté de ces témoignages uniques de l’esprit humain. Les profils des statues n’ont rien de tahitien. De quels hommes s’agit-il ? Les mains sont très longues et très fines. Nune nous explique l’histoire et ses énigmes.

 

Nous nous rendons ensuite le long de la mer pour une longue promenade épuisante mais passionnante. Nous voyons une deuxième plateforme où les statues ont été renversées, certaines ayant le nez tourné vers la terre. Là, nous croisons un individu curieux, un shaman sans doute qui parle des plantes médicinales avec une science rare et qui connaît des secrets qu’il lui est interdit de divulguer. Nous voyons des restes de maisons en formes de bateaux, dont l’usage est uniquement celui du couchage, les autres occupations familiales se faisant sur le seuil. Nous voyons des fours, des enclos à végétation, et nous visitons deux grottes qui ont servi d’habitation, dont une impressionnante où l’on accède en descendant dans un trou étroit au ciel bas, qui a deux ouvertures en milieu de falaise, en aplomb direct de la mer agitée. Une chose est sure, je ne serai jamais spéléologue, car je suis sorti trempé de sueur du stress de ces espaces poignants.

 

Ce qui est assez curieux, c’est que les abris pour les poules semblent aussi sophistiqués que les maisons qui sont comme des igloos plats, mais en pierre.

 

Un autre alignement de statues montre une statue avec le chapeau des rois et des yeux peints qui ne sont pas authentiques. Un débarcadère datant de plus de mille ans est d’une architecture parfaite. La tête de le plus vieille statue date des années 700.

 

Nune nous donne des tranches d’ananas et du jus de fraise. Epuisés mais contents nous allons prendre un déjeuner léger à l’hôtel Explora. Le prochain rendez-vous est à 16h45. Vais-je me baigner dans le froid lagon situé au centre du volcan qui a servi de carrière aux statues Moai ? L’après sieste le dira.

 

L’émotion qui était un peu limitée le matin va faire place à un pur enchantement. Nous partons vers l’est. Des « plateformes » abandonnées montrent les Moai face contre terre, ce qui n’est pas valorisant. Pourquoi laisser tant de témoignages en position négative ? On m’a expliqué plus tard que c’est lié au manque d’argent. Nous partons pour une longue marche vers le volcan qui a servi de carrière à la fabrication des 900 Moai qui ont été recensés. Tout le long du chemin nous voyons des Moai, faces contre terre qui sont les sculptures qui ne sont jamais arrivées à destination, cassées pendant la reptation qui ressemblait à la manœuvre que l’on utilise pour déplacer un meuble ou un réfrigérateur. Le site autour de nous est aride, mais nous traversons une vallée extrêmement riche où les goyaves poussent comme du chiendent. Ce passage a un petit côté Indiana Jones, comme la grotte de ce matin.

 

Tout d’un coup, un paysage de rêve se découvre à nos yeux. Le long des pentes abruptes du volcan, une trentaine de Moai sont plantés de façon anarchique, comme les fléchettes d’un joueur maladroit. Nous nous promenons au milieu de ces sculptures beaucoup plus émouvantes du fait du hasard et en levant les yeux, nous voyons que la falaise quasi verticale a été creusée pour fabriquer les Moai dont le plus long, qui ne sera jamais sorti de sa gangue, fait 21 mètres de long. Et l’on est obligé de s’interroger : comment est-il possible qu’une technique aussi sophistiquée pour creuser la roche, faire glisser les statues sans les casser, ait conduit à des sculptures aussi primitives, puisque le visage est caricatural, les bras à peine dessinés, le tronc informe et les jambes inexistantes ? Cette visite creuse le mystère. Nous revenons sur nos pas pour entrer dans le cratère du volcan où un lac couvre les deux tiers de la surface. Cet étang n’est pas très engageant, mais je m’y baigne. Je suis le seul fou à le faire, mais j’aurai le plaisir de me dire que j’ai nagé dans le lagon du cratère de la carrière des statues de l’île de Pâques. A l’intérieur du cratère la roche a aussi été creusée pour fabrique des statues et une vingtaine de Moai, faces tournées vers le lac, m’ont vu me baigner.

 

Alors que j’étais en train de me changer à l’abri des regards, une horde de chevaux sauvages fonce sur les femmes de notre groupe. Heureusement, une chienne très sale qui nous suivait depuis le début de l’expédition a effrayé les chevaux qui se sont détournés.

 

Les muscles tétanisés par le froid, je marche comme un pingouin pour revenir vers notre voiture.

 

Cette promenade a été merveilleuse.

 

8 janvier 10

 

Après une nuit passée à rechercher une position de repos pour mes jambes que je ne trouve jamais, le soleil très vif dès 7 heures du matin inonde notre chambre. Silke va gérer ses excursions avec un couple de brésiliens. De mon côté, je pars avec Nune et le père d’un suisse de notre groupe de la veille, pour découvrir la plus grande plateforme de quinze Moai. Ces Moai sont très impressionnants. Le site est magique, au plus profond de l’île, sur une baie protégée par le plus vieux volcan de l’île. Le site dessiné de la plateforme fait 200 mètres de long et la plateforme fait 100 mètres. Elle a été restaurée par des japonais qui sont venus avec de grandes grues relever les imposantes statues. Les formes des têtes sont très différentes ainsi que les tailles des statues. Le seul point commun, ce sont les mains aux doigts très longs et très fins qui enserrent leurs ventres. A peu de distance on peut voir des pétroglyphes représentant des tortues, des thons, et des représentations sexuelles car le site dispose d’une sorte de bassine en pierre pour les accouchements. Nous reprenons la voiture et nous nous arrêtons le long de la mer. Nune nous dit que nous sommes partis pour une promenade de neuf kilomètres le long de la mer. Elle montre la colline qui sera la fin de la promenade et je suis prêt à abandonner car mes jambes me font mal. Mais il faut y aller. Nous sommes seuls, et sur les trois heures de la marche nous ne croiserons personne. Nous voyons de nombreuses plateformes dont les Moai ont été renversés. Un petit port de pêche est très succinct. Juste à côté de son embarcadère, nous voyons une pierre ronde mise au milieu d’un cercle de pierres de lave qui est appelée « le nombril du monde ». Cette pierre venue non pas d’ici mais d’îles polynésiennes lointaine doit contenir du fer, car elle affole la boussole, qui selon les positions par rapport à la pierre montre une direction inverse de celle qu’elle devrait montrer, préférant se tourner vers la pierre.

 

La marche est difficile, car le sol est jonché de petites pierres de lave qui menacent les chevilles. La marche épuisante est enfin finie et nous nous rendons en voiture vers une plage de sable fin où poussent de grands cocotiers qui donnent du lieu une image totalement opposée à la sauvagerie authentique de l’île. Il s’agit de cocotiers venus de Polynésie dans les années soixante. Je prends le premier bain de ma vie dans l’océan Pacifique, dans une eau qui n’est pas froide du tout, contrairement aux avertissements de toutes les bonnes âmes locales qui doivent me prendre pour un fada. Auprès de moi des petits poissons nagent, comme dans toutes les mers du monde.

 

Sous les cocotiers l’hôtel Explora a installé une tente et un buffet froid fort sympathique. Pendant cette pause méridienne, j’ai le temps d’aller photographier des Moai qui portent tous des chapeaux de lave rouge. Je soupçonne que certains d’entre eux sont de restauration récente.

 

L’excursion la plus difficile est l’ascension du plus grand cratère de l’île. La promenade longue qui s’y rend dure 3h30 et compte plus de sept kilomètres. La promenade courte fait 1h30. On m’a inscrit sur la courte, compte tenu de mon programme du matin. Mais un jeune couple d’américains « just married » avec qui j’ai sympathisé lors du déjeuner sur la plage fait la marche longue, ainsi que le jeune suisse. Je rejoins donc ce groupe, sentant qu’il s’agit d’une folie, mais qui mérite d’être faite.

 

Le site du volcan est impressionnant. Pendant 90% de la montée, on ne voit derrière soi que l’océan et le reste de l’île et devant nous, il n’y a qu’un horizon étroit, celui de la pente. Après avoir traversé une forêt de cyprès, on arrive sur l’arête du cratère. Un étang d’un cercle presque parfait a un diamètre de 1,6 kilomètre, alors que le diamètre du cratère est du double. Le point de vue est unique. Nous longeons l’arête sur près de la moitié du cercle. Notre camionnette nous attend. J’imagine que tout est fini et je commence à me détendre après cette ascension usante. Mais ce n’est pas fini. Nous nous rendons sur le site qui surplombe l’île de l’homme oiseau. C’est cette île qui était le point d’arrivée de la compétition annuelle qui désignait le chef de l’île sur une période qui va de 1620 à 1860 environ. Il s’agissait pour les athlètes en lice de nager jusqu’à l’île, trouver l’œuf d’un oiseau marin, le montrer le premier au sommet de l’île et de revenir à la nage avec l’œuf noué dans les cheveux, pour que l’on vérifie l’authenticité de l’œuf. Notre guide Javier nous raconte les rites de désignation des chefs et les récompenses des athlètes. Nous continuons de marcher le long du cratère pour trouver des pétroglyphes qui racontent ces hommes oiseaux.

 

Au retour à l’hôtel, plusieurs personnes me félicitent d’avoir enchaîné sur la même journée les deux excursions les plus longues. Mes jambes se tétanisent. Après une douche plus que nécessaire, nous dînons avec le suisse et son père. Nous trouvons des sujets passionnants de discussion qui nous entraînent fort tard.

 

Demain par prudence, il n’y aura aucune excursion.

 

9 janv. 10

 

J’ai passé ma nuit à tourner et retourner dans le lit tant il était impossible de trouver une position qui ne me fasse pas mal aux jambes. Le soleil rasant inonde notre chambre de sa lumière et de sa chaleur. Une journée de repos s’annonce.

 

Lorsque nous avions décidé du voyage avec une société spécialisée, l’hôtel Explora nous avait été présenté comme le plus moderne, le plus luxueux et le plus respectueux de l’environnement. Mais Explora, ce n’est pas que cela. C’est aussi une philosophie qui a la délicatesse de ne pas s’afficher. Sur le papier de bienvenue, il y a marqué « dear explorer ». Nous sommes donc considérés comme des explorateurs. Ce qui explique que chaque excursion a une dimension sportive et d’imprégnation avec l’environnement. Nous aurions pu voir tous ces sites en étant déposés devant chacun d’eux. Nous les avons découverts après ou avant de longues promenades. Nous ne le savions pas, mais c’est une excellente chose.

 

L’aisance avec laquelle se prennent les contacts avec d’autres touristes est aussi exemplaire. Des promesses se sont échangées avec nos compagnons de marche, brésiliens de San Paolo, américains de Washington D.C., suisses de Panama ou de Toscane.

 

Après un petit-déjeuner copieux et agréable, j’ai fait un petit somme de récupération. Après le déjeuner, une sieste réparatrice fut suivie d’un massage tonique d’une chilienne aux mains puissantes. Il est temps de se reposer avant le dîner, car le programme des jours à venir s’annonce particulièrement mouvementé.

 

10 janv. 10

 

Nous dormons mal dans cet hôtel. Est-ce dû au vent, aux activités physiques, je ne sais. Dans la nuit, je vois à l’horizon, au ras de l’eau, un disque de la forme d’un ongle d’un rouge puissant comme celui du soleil au moment où il se couche. Dans mon demi-sommeil, je sens que ce n’est pas l’heure du lever du soleil. De plus, si le soleil se levait, le ciel serait clair et non pas noir. Dix minutes plus tard le disque est devenu blanc-gris. C’est la lune. Jamais de ma vie je n’ai vu une lune qui devient rousse en pleine nuit et qui de plus n’est pas rousse mais d’un rouge sanguin aussi puissant. Ce doit être un Moai qui me fait un clin d’œil. Nune a confirmé le phénomène de la lune rouge.

 

Tout à l’heure, nous allons quitter cette île avec beaucoup d’impressions étranges. L’une d’elles est le caractère primitif de la civilisation des Rapa Nui, les habitants de l’île qui s’appelle aussi Rapa Nui. Comment être enfermé dans un culte des rois et des personnalités locales au point de construire des statues imposantes dont les représentations sont aussi primitives ? Le mythe de l’homme oiseau et la désignation des chefs sont aussi des rites primitifs. On voit aujourd’hui que les habitants sont assez paresseux, car ils laissent à l’abandon des terres très fertiles. Leur raisonnement doit être : pourquoi faire, si l’on n’en a pas besoin.

 

L’autre sentiment très désagréable est le comportement des civilisations occidentales vis-à-vis de cette île. Aucun respect, volonté de domination politique ou spirituelle, utilisation d’êtres humains comme esclaves. Tout cela donne froid dans le dos. Les seuls qui ont eu du respect sont James Cook et La Pérouse. Tous les autres n’ont pratiqué que domination, prise de possession et pillage.

 

Le sentiment qui domine cependant, c’est la satisfaction d’avoir visité un site unique, avec une des formes de civilisation les plus uniques et étranges qui soient. Ici tout le monde sourit. Alors, sourions, fiers d’avoir fait ce beau voyage pour rencontrer les Moai et les Rapa Nui.

 

Nous sommes conduits à l’aéroport où les formalités de contrôle donneraient des cauchemars dans tout autre pays. Très en avance, nous regardons les souvenirs qui sont proposés dans d’approximatives boutiques, d’un art particulièrement primitif.

 

Le vol se passe très vite et le service du personnel de la compagnie chilienne est parfait, la nourriture étant fort bonne. Qualité de service oblige, un guide, Christian, nous accueille à l’aéroport alors que nous n’avons que dix mètres à faire puisque nous couchons à l’Holiday Inn accolé à l’aéroport. Nous récupérons les valises laissées à la consigne et nous prenons notre chambre à l’hôtel. Ici, tout est formaté pour le représentant de commerce en escale. Pas de mini-bar, pas de service en chambre, mais une immense salle informatique où chacun peut brancher son portable. Nous dînons tout en jetant un œil sur un écran de télévision qui diffuse un match de foot en direct. La nourriture est standardisée et acceptable.

Santiago et Valparaiso lundi, 4 janvier 2010

Voyage de Silke et François Audouze janvier 2010

 

Ce compte-rendu de voyage a été rédigé pour garder la mémoire des événements qui nous ont marqués. Il n’a normalement pas sa place sur le blog, puisqu’on n’y parlera pas de vin. Il ne sera pas inclus dans les bulletins. Il a été mis dans l’année 2001, pour ne pas dévier du contenu qui est destiné au vin.

 

Le texte ajoute aux milliers de photos que nous avons prises. Pour celui qui lira ce texte, tout n’a pas autant d’importance que pour nous. Mais c’est la loi du genre, comme pour les photos de vacances, qui font moins exploser de rire ceux qui n’y étaient pas.

 

Il est recommandé de lire dans l’ordre du voyage.

 

Santiago et Valparaiso

 

3 janv.-10

 

Pour aller à l’aéroport, j’ai adopté un principe de précaution d’une magnitude qu’on aimerait trouver chez Eurostar quand il neige. J’imaginais que les retours de vacances de Noël bloqueraient les routes. Tout est fluide. Je pensais que le durcissement des contrôles de sécurité allongerait les files d’attente. C’est l’inverse. C’est donc avec quatre heures d’avance que nous sommes à l’aéroport, toutes formalités accomplies.

 

Après un examen succinct des boutiques de luxe de l’aéroport, que faire ? Nous nous présentons au salon d’Air France prévu pour les voyageurs de première classe. L’agent obséquieux, que l’on verrait volontiers en gants blancs, nous reçoit et examine nos cartes d’embarquement. Sa morgue instantanée démontre que nous ne sommes pas de ces gens-là. Il nous rend nos papiers comme s’ils portaient le virus H1N1. Il est vrai que dans le salon dévolu aux voyageurs en classe affaires, tout fait franchement plus « peuple » que « people ». La différence tient en une seule lettre, un « u » au lieu d’un « o » dans peuple.

 

Air France devrait faire un examen de la valeur diététique de ce qui est proposé aux voyageurs en salle d’attente. Il n’y a que des chips et des petits gâteaux sucrés, dont chaque gramme multiplie les calories par un facteur dix. Autour de nous de jeunes couples ou des collègues de travail tous très jeunes qui voyagent en groupe.

 

Nous embarquons dans le Boeing 777 en partance pour Santiago.

 

Le personnel de cabine est d’une gentillesse et d’une serviabilité qui méritent mention.

 

Quatorze heures de vol, c’est assez long, mais supportable. Au moment où le soleil n’a pas encore pointé son nez mais teinte l’horizon d’un rouge puissant qui lutte avec le bleu foncé du ciel, je peux voir un fleuve qui raie tout l’espace visible en serpentant. Il me paraît si large qu’il doit s’agir de l’Amazone. Cette pensée provoque une émotion évidemment intense. Quand ensuite nous survolons la Cordillère des Andes, aux paysages arides, dont le point culminant, l’Aconcagua, est presque au même niveau que notre avion, l’impression d’être embarqués dans une belle aventure est totale.

 

4 janv. 10

 

Les aéroports américains du nord n’ont pas le privilège des attentes aux contrôles douaniers, et la lenteur à l’obtention des bagages montre qu’il y a une universalité dans cette disgracieuse habitude.

 

J’avais parié un repas avec Silke que deux sur quatre de nos bagages seraient perdus. Ce qui est perdu, c’est mon pari.

 

Nous sommes attendus par Lise-Marie, notre guide, qui se fait appeler Luz et par George le chauffeur. Nous apprendrons plus tard que nous avions un tel retard qu’ils allaient partir, croyant que nous avions raté notre avion. Nous nous rendons à Valparaiso. Luz est bavarde et plutôt que de parler de nature, de géologie ou de botanique, elle se lance dans un plaidoyer appuyé sur les mérites du général Pinochet. Quand on a veillé trente heures, quand le désir d’une douche est assez fort, les mérites politiques de l’ex-président chilien n’entraînent pas la vibration qu’elle eût souhaitée.

 

Lorsque nous traversons une plaine riche en vignes qui ressemblent à celles de la Napa Valley, Luz veut me démontrer que les vins chiliens sont les meilleurs du monde. Je me dis que je n’ai pas fait 12.000 kilomètres pour qu’on me parle de vin. J’essaie de faire dévier la conversation.

 

La ville de Valparaiso a été classée au patrimoine mondial de l’humanité. L’urbanisme est une surprise, car cette ville, rescapée d’un fort tremblement de terre en 1906 a vu pousser les maisons en chaque recoin possible. De nombreuses maisons sont à pic sur d’improbables falaises et s’écrouleront dès que la terre toussera.

 

Comme dans d’autres villes de la planète, quand les maisons n’avaient pas de numéros dans les rues, le repère était la couleur vive du crépi. Cette ville est donc un patchwork de couleurs agrémenté en de nombreux endroits d’une grande vétusté et d’une belle saleté. Mais l’on sent les efforts depuis le classement de l’Unesco, d’autant que le gouvernement a offert la peinture et les peintres pour revitaliser ces quartiers.

 

Notre hôtel est situé en hauteur et l’on y a une belle vue sur le port de marchandises.

 

Nous y arrivons à midi et nous n’avons qu’une envie, plonger sur le lit ou sous la douche. La jeune femme de la réception nous annonce que les chambres ne seront libres qu’à 15 heures.

 

Tout d’un coup, la fatigue tombe sur mes épaules comme une chape de plomb. Il va falloir attendre sur la terrasse qui surplombe le port que la chambre soit enfin libérée.

 

Peu avant l’heure dite nous prenons possession de notre chambre charmante qui possède sa propre terrasse face à la baie de Valparaiso. Après une douche réparatrice, nous partons visiter la ville. Les rues sont en pente forte. Un funiculaire vétuste nous fait peur. Est-ce celui que nous emprunterons demain avec notre guide ?

 

Les immeubles des abords du port sont d’une laideur absolue. Sur la rue la plus passante, de petites échoppes vendent de tout et de rien, nourriture, articles de bureau, téléphones. Il y a des agences de voyage, des banques dans des immeubles cossus qui contrastent avec la grisaille de beaucoup de commerces. Dès qu’on quitte les grands axes, la vieille ville est charmante. Les couleurs des maisons sont belles, avec des harmonies ravissantes. Beaucoup de maisons sont taguées par de vrais artistes aux codes internationaux. De minuscules boutiques vendent des articles de mode, des bijoux ou de l’art qui dénotent un goût certain. Cela m’évoque certains quartiers de San Francisco ou Greenwich Village à New York. La visite est intéressante.

 

Nous revenons à notre hôtel pour reposer nos pieds mis à mal par ces chemins pentus. Le dîner ne laissera aucune trace dans nos esprits, tant l’envie de compliquer les plats pour faire semblant d’être un grand chef achoppe sur l’exécution.

 

Demain, visite guidée de Valparaiso

 

5 janv. 10

 

La nuit, il faut fermer tous les rideaux et tous les persiennes. Car le port de marchandises fonctionne 24h sur 24 et l’espace est éclairé pour la sécurité au travail.

 

Le matin, un beau soleil éclaire la baie et le port. Le petit déjeuner est sympathique, tout annonce une belle journée.

 

La douche ! Ah, il y aurait un livre à écrire sur les douches d’hôtel. Ici, baignoire et douche ne font qu’une. Une paroi de verre fixe couvre la moitié de la baignoire, ce qui implique quasi automatiquement que l’on va créer une petite inondation si l’on utilise la douche. Il me semble que les designers des douches ne doivent jamais prendre de douche. Ils doivent fonctionner comme ces architectes qui font des maquettes des ensembles qu’ils projettent dont l’objet est de flatter l’ego des signataires du gros chèque plutôt que de donner du confort de vie aux futurs habitants. Car la pomme de douche extra large est fixée à un tuyau fixe et non souple comme l’on faisait jadis. Et bien sûr, quand on veut régler la douche, les gouttes froides nous guettent. Le soi-disant modernisme et le design ont tué le plaisir des douches.

 

A l’heure dite nous retrouvons George et Luz qui est étonnée de voir que nous avons déjà visité tant de sites. Dans la même vieille ville nous continuons à explorer de belles maisons, de beaux tags, et, d’un mirador, terme qui désigne un joli point de vue, nous voyons arriver le « Sea Princess », un gigantesque bateau de croisière qui fait la navette, si l’on peut dire, entre Buenos-Aires et Santiago. Sa manœuvre d’une lenteur majestueuse dans le port est impressionnante.

 

Nous partons visiter le musée de Pablo Neruda, maison qu’il a habitée, située en hauteur, équipée comme un bateau et jouissant d’une vue exceptionnelle. Cette minuscule maison de cinq étages ressemble à un bateau. Là sont rassemblés des milliers d’objets d’art qui ont jalonné la vie de l’écrivain ambassadeur. Dans le salon un oiseau de paradis empaillé déploie ses ailes dans une bulle transparente en plastique. La visite est éclairante sur la personnalité de ce personnage important de l’histoire du Chili, qui a longtemps séjourné en France.

 

Nous nous promenons ensuite dans un ensemble de maisons extrêmement intéressantes pour leurs formes architecturales, leurs couleurs et leurs tags. Les couleurs de cette ville sont d’une rare beauté. Nous prenons un funiculaire dont la cabine semble avoir plus d’un siècle.

 

Les visites qui suivent, faites en voiture ont nettement moins d’intérêt, car il s’agit de points de passage obligés qui ne sont pas marquants. La maison du parlement voulue par Pinochet est un gigantesque immeuble aussi beau qu’un hôpital de province. La place principale avec la statue du héros de la guerre de 1899 ne dégage aucune émotion.

 

Si notre Eiffel savait toutes les charpentes qu’on lui prête, il serait étonné, car le marché couvert aux fruits et légumes a une charpente métallique. De là à l’attribuer à Eiffel, il y a peut-être de l’extrapolation. Luz nous offre des fraises à croquer qu’elle achète à l’un des marchands aux étals éphémères.

 

A la pointe extrême de la ville nous prenons un funiculaire qui mène à un promontoire d’où la vue est saisissante sur la baie et sur le port. Comme au Sacré-Cœur, le lieu appartient aux marchands d’objets attrape touristes. Nous avons déjeuné avec Luz au « Café del Mirador » où la vue est belle et le poisson purée fort comestible pendant qu’un petit guitariste nous chante des œuvres à la gloire de Valparaiso avec un beau filet de voix.

 

Le soleil sournois a peint en rouge crabe le haut de mon crâne. Il me faut vite acheter un bob marqué « Chile » à l’un de ces marchands du temple. Assommé par le soleil, j’écourte la journée guidée.

 

Nous allons voir la mer d’un promontoire devant lequel des pélicans glissent dans les airs, planant sur le fort vent venant du large. C’est en ce lieu à la vue majestueuse qu’un cimetière marin est installé à l’espagnole, avec un alignement horizontal et vertical de cases tombales.

 

Nous passons devant le restaurant où nous irons ce soir, le restaurant « Turri ».

 

Après un peu de repos, nous allons à pied au restaurant Turri. Nous passons devant des galeries d’art qui attirent l’attention de Silke. Le vent étant tombé, nous pouvons dîner sur une terrasse face à la mer. Entre le restaurant situé sur un « mirador » et la mer, tous les immeubles sont laids. Notre guide avait vanté la qualité du restaurant. C’est une honnête cantine sans plus.

 

6 janvier 10

 

Le lendemain matin, après un petit-déjeuner toujours aussi agréable, avec du vrai jus d’orange, nous devons faire nos valises. Il faut scinder nos valises en deux contenus, l’un qui nous accompagnera à l’île de Pâques et l’autre que nous laisserons à l’aéroport en consigne. Il fait une chaleur intense, et les coups de soleil sont très vite brûlants. Une rapide collation à l’hôtel, avec un service toujours aussi approximatif, et nous quittons l’hôtel Casa Higueras. Cet hôtel a très peu de chambres, ce qui devrait signifier un service attentionné. Or en fait tout est marqué par de l’amateurisme. Il faut attendre vingt minutes pour avoir un thé sur la terrasse, le petit déjeuner annoncé dans dix minutes en prend trente, etc. Il est peu probable que nous reviendrons à Valparaiso, car cette visite suffit. Si nous revenons, nous choisirons un autre hôtel.

 

Luz et George sont en avance. Nous envisageons de laisser nos valises à l’Holiday Inn de Santiago où nous coucherons dans quatre jours à notre retour de l’île de Pâques. Les manœuvres que nous faisons subir à nos valises entre l’hôtel qui ne veut pas les prendre, la consigne qui n’est pas à l’étage où nous nous rendons, toutes ces allées et venues produisent en moi un stress difficilement contrôlé. Quand enfin nous avons passé toutes les formalités, il reste du temps pour que je retrouve mon calme avant le départ de l’avion pour l’île de Pâques.

réveillon du 31/12 – les photos vendredi, 1 janvier 2010

Champagne Bollinger Blanc de noirs, Vieilles Vignes Françaises 1998. L’étiquette est très sombre, minimaliste. Il a fallu retoucher la photo pour qu’on puisse lire.

Le bouchon du Champagne Veuve Clicquot brut 1943

On peut lire qu’il est interdit d’exporter ce champagne

Vosne Romanée Roland Thévenin & Fils 1955

Ermitage Cuvée Cathelin Jean-Louis Chave 2000

Château Climens Barsac 1943

Bar cru

caviar et coquille Saint-Jacques crue

foie gras poëlé

la truffe en fines lamelles et pomme de terre

pigeon à la goutte de sang

beau foie gras à pocher

belle harmonie de couleurs entre la mangue aux grains de fruits de la passion et le Barsac

toujours dans la même harmonie, les kumquats sont d’un goût un peu trop fort pour le Climens 1943.

Réveillon du 31 décembre, suite et fin jeudi, 31 décembre 2009

Les enfants arrivent. Mon gendre a apporté du foie gras à poêler et des bulots et du bar en filets qu’il aimerait manger cru. Je m’occupe d’ouvrir les vins. Je ne suis pas hyper convaincu de ce que donneront les deux 1943. Nous verrons. Le Chave est une bombe aromatique, il ira bien pour les pigeons. Le Vosne-Romanée 1955 a une odeur de truffe imprégnante. Ce serait sans doute la bonne pioche pour la truffe. Nous essayons de composer le menu : le Veuve Clicquot 1943 avec le bar cru puis un premier service de foie gras. Où caser le pata negra ? Entre les deux champagnes peut-être. Le Bollinger VVF 1998 avec bulots puis caviar sur coquilles Saint-Jacques crues. Le Vosne-Romanée Roland Thévenin 1955 sur truffe et pomme de terre. L’Ermitage Cuvée Cathelin Chave 2000 avec le pigeon puis avec le foie gras poêlé ou poché, et le Climens 1943 sur les mangues avec des traces de grains de fruits de la passion.

Je vais ouvrir le Climens et le Bollinger. J’avais peur pour le Climens 1943 au beau niveau, mais à la couleur de thé ou de cuivre un peu gris. Or en fait, le nez est tonitruant d’agrumes. Ça promet ! Le Veuve Clicquot 1943 a un beau bouchon bien droit, lisse. Sa senteur doit se normaliser, mais il me paraît prometteur. Ayant fini les ouvertures qui ont été progressives, je remonte de la cave et ça sent bon en cuisine.

Le dîner peut démarrer.

Le bar cru est très ferme, fortement goûteux, avec des accents de noix et un léger sucré. C’est ce qui avait poussé mon gendre à suggérer de le manger avec le Champagne Veuve Clicquot 1943. La première gorgée est un peu amère, car c’est le liquide qui était au contact du bouchon. Vite resservi, je constate que le vin est chaleureux, avec des notes de fruits jaunes comme la pêche ou la mirabelle. On note aussi des évocations de vin jaune, ce qui paraît cohérent avec le goût de noix du bar. Mais en fait, je pense que le bar irait beaucoup mieux avec le Champagne Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1998. Ce champagne est un vrai bonheur. Ciselé, précis, tendu, il est dans la ligne de ce que doit être un grand champagne bien sec. Je suis étonné de lui trouver tant de fruits blancs, ce qui fait que ce champagne élégant, lord anglais, sait aussi parler le langage du cœur. Et captant la face iodée et marine du bar, il crée un accord beaucoup plus convaincant.

Le caviar osciètre d’élevage d’Iran posé sur des tranches de coquilles Saint-Jacques crues est l’un des plus beaux caviars que nous ayons mangés. La combinaison du salé et du sucré de la coquille, avec la profondeur insistante du goût du caviar créent un accord avec le champagne qui tient du sublime. Cet accord on ne peut plus simple dans sa définition est un accord vibrant, exceptionnel, frôlant l’extase. Nous sommes comme assommés par l’immensité de cet accord qui rehausse le caviar d’un charme inoubliable.

Le Pata Negra ne vibre pas franchement avec les champagnes. Nous laissons de côté les bulots et nous revenons maintenant au Veuve Clicquot dont le doucereux et la complexité se conçoivent très bien après le Bollinger. Mon gendre poêle des tranches de foie gras et l’accord se trouve dans la délicatesse.

La truffe sur pomme de terre accueille le Vosne-Romanée Roland Thévenin 1955 qui a un nez de truffe et une belle évocation de truffe. Ce vin est quand même très limité car il a souffert d’avoir perdu trop de volume. Il avait le droit de venir à notre table. Nous l’avons écouté mais il n’a pas brillé même si ses variations bourguignonnes avaient un soupçon d’émotion.

Le pigeon rosé à souhait, à la cuisson parfaite, fourré au foie gras sans que le foie ne se sente dans le goût du pigeon est d’une tendreté absolue et d’une personnalité forte. L’Ermitage Cuvée Cathelin Jean-Louis Chave 2000 me fait vaciller. Jamais je n’aurais imaginé que ce vin puisse être aussi exceptionnel. Je suis saisi. Il est à la fois puissant et d’une délicatesse invraisemblable. Tout en douceur, velouté, charmant, ce vin est un amour. C’est un courtisan galant qui fait des madrigaux. Jamais je ne dirais que ce vin est rhodanien alors qu’évidemment cela ne fait aucun doute. Ce vin pourrait faire partie des vins parfaits qui sont toute ma recherche. Avec le pigeon, c’est un bonheur absolu. Je demande à mon gendre de pocher le foie gras et le résultat avec le Chave est convaincant car la qualité du foie est exceptionnelle.

Le Château Climens Barsac 1943 a une couleur de cuivre gris. Le nez est en opposition à la couleur, car l’agrume est tonitruant. En bouche le vin a beaucoup plus d’ardeur que ce que la couleur suggère, et je ressens la richesse gustative et le coffre puissant d’un grand Climens, qui combine les agrumes, la mangue et un soupçon de thé. Les fines tranches de mangue léchées de grains de fruit de la passion forment un accord dont la simplicité n’a d’égale que la pertinence.

Dans ce dîner, rien n’a été cuisiné, et tout a été minimaliste, simplifié à l’extrême : le bar cru n’était accompagné de rien, le caviar et la coquille Saint-Jacques étaient dans leur totale nudité, la truffe et la pomme de terre n’acceptaient aucune fioriture. Pas le moindre légume pour le pigeon juste fourré de foie gras, lequel poêlé ou poché était aussi dans le plus simple état de présentation. Mangue et fruit de la passion sans un gramme d’ersatz. Cette recherche de pureté est voulue pour que rien ne détourne de la captation du message de grands vins. L’accord le plus sublime fut celui du caviar à la Saint-Jacques avec le Bollinger, chef-d’œuvre de précision du champagne d’exception. Le plus grand vin fut de très loin l’Ermitage de Chave, véritable consécration d’un domaine au sommet de la renommée de l’Hermitage. Ainsi, deux parcelles infinitésimales, toutes deux inférieures à l’hectare, nous ont donné deux vins très jeunes au sommet de leur art. Quoi de mieux pour terminer une année et en commencer une autre ?

réveillon, phase 1 jeudi, 31 décembre 2009

Ma femme et moi partons faire un grand voyage sur la plus grande partie de janvier. Le départ est dimanche, aussi n’avons-nous rien prévu pour le 31.

Nous serons deux, aussi ma femme a-t-elle acheté des pigeons que j’adore, j’ai acheté du caviar et deux belles truffes.

Je me rends en cave pour choisir des vins pour ce réveillon où je serai seul à boire. Que choisir quand on boit seul ? Le vin, c’est le partage, mais je n’ai quand même pas fait vœu d’abstinence.

La promenade dans ma cave est un moment d’excitation, car dès que je vois une bouteille, j’ai envie de la boire. Mon œil tombe sur Veuve Clicquot 1943. Tiens, voilà une bouteille qui se justifie, puisque c’est mon année de naissance. Si je suis seul, « j’ai le droit » d’ouvrir une bouteille de mon année.

Voilà un thème possible. Mes yeux tombent sur Climens 1943. Je tiens une logique. Il se trouve que les vins de 1943 sont plutôt chez moi que dans ma cave, or j’ai envie de faire mon choix maintenant. J’ai envie d’une Cuvée Cathelin de Chave. Je prélève une Cuvée Cathelin 2000. En faisant cela, mon œil croise une Mouline 1990, vin que je considère comme le plaisir absolu. Je suis donc à quatre bouteilles, or mon petit sac de transport a six places. Quoi ajouter de plus ? Je mets « pour le cas où » un Bollinger Vieilles Vignes Françaises 1998. Et, pour rester fidèle à ma vision des choses, j’ajoute une bouteille basse, que j’ouvrirai de toute façon : un Vosne-Romanée Roland Thévenin 1955.

Je rentre à la maison et j’échange des mails avec mon gendre sur d’autres sujets. Puis je lui écris : ce 31, je vais choisir entre ces six bouteilles, car nous ne sommes que deux.

Réponse de mon gendre : nous aussi nous ne sommes que deux, pourquoi ne pas faire un travail d’équipe.

C’est comme la cavalerie américaine qui arrive au bon moment : je vais pouvoir éviter de boire seul. J’ai bien fait d’avoir confiance dans la justice de mon pays !

Bulletins 2009 – De 301 à 355 jeudi, 31 décembre 2009

(bulletin WD N° 355 091230)

Le bulletin 355 raconte : un dîner au Castel de Très Girard à Morey-Saint-Denis, un déjeuner de famille au restaurant Taillevent, un déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol, un déjeuner au restaurant du Yacht Club de France et l’ouverture des vins du 126ème dîner de wine-dinners au restaurant Guy Savoy.

(bulletin WD N° 354 091229)

Le bulletin 354 raconte : une dégustation verticale exceptionnelle de 56 millésimes de Clos de Tart de 2005 à 1887, au domaine.

(bulletin WD N° 353 091223)

Le bulletin 353 raconte un déjeuner aux caves Legrand, la remise du prix Edmond de Rothschild, un repas de famille à mon domicile et la 77ème édition de la Paulée de Meursault au château de Meursault.

(bulletin WD N° 352 091222)

Le bulletin 352 raconte un dîner au restaurant Chinois on Main à Los Angeles et un déjeuner au restaurant Spago Beverly Hills.

(bulletin WD N° 351 091216)    (bulletin WD N° 350 091215)

Les bulletins 350 et 351 racontent : départ à Los Angeles, livraison de mes vins et dîner de vins extraordinaires au restaurant Spago Beverly Hills. Le lendemain, déjeuner au restaurant « CUT » de l’hôtel Wilshire Beverly Hills.

(bulletin WD N° 349 091208)

Le bulletin 349 raconte la 11ème séance de l’académie des vins anciens qui s’est tenue au restaurant Macéo et les préparatifs du 126ème dîner de wine-dinners lors d’un déjeuner au restaurant Guy Savoy.

(bulletin WD N° 348 091201)

Le bulletin 348 raconte un dîner au restaurant de l’hôtel Casadelmar à Porto-Vecchio avec des vins corses, un déjeuner de presse au restaurant Pierre pour le champagne de Venoge, un cocktail au Ritz pour la sortie d’un livre sur la gastronomie, une vente aux enchères, un impromptu au Crillon et les vins de la 11ème séance de l’académie des vins anciens.

(bulletin WD N° 347 091124)

Le bulletin 347 raconte le 125ème dîner de wine-dinners au restaurant Patrick Pignol et un premier dîner de grands vins à l’hôtel Casadelmar de Porto-Vecchio.

(bulletin WD N° 346 091117)

Le bulletin 346 raconte un dîner à l’Orangerie du Château de Beaune et un déjeuner au restaurant Taillevent.

(bulletin WD N° 345 091110)

Le bulletin 345 raconte un brunch dans la suite orientale de l’hôtel Mandarin Oriental de San Francisco, un dîner au restaurant Acquerello, un déjeuner au Cercle Interallié et le début d’un dîner de folie à l’Orangerie du château de Beaune.

(bulletin WD N° 344 091103)

Le bulletin 344 raconte des petits détails de la vie d’hôtel (je force volontiers le trait), un dîner au restaurant Aqua de San Francisco et undîner de grands vins au restaurant La Toque à Napa.

(bulletin WD N° 343 091027)

Le bulletin 343 raconte un déjeuner à la table de Joël Robuchon, le 124ème dîner de wine-dinners au restaurant Gérard Besson et le départ à San Francisco.

(bulletin WD N° 342 091020)

Le bulletin n° 342 raconte : le 123ème dîner de wine-dinners au restaurant de l’hôtel Bristol et la manifestation « Livres en Vigne » avec des repas au château de Beaune, au château de Clos-Vougeot et chez Guy à Gevrey-Chambertin.

(bulletin WD N° 341 091013)

Le bulletin n° 341 raconte : le 122ème dîner de wine-dinners au restaurant Laurent et un dîner d’amis au restaurant de Gérard Besson.

(bulletin WD N° 340 091006)

Le bulletin n° 340 raconte : encore un dernier repas dans le sud, une dégustation verticale de 23 vins du Domaine de Chevalier au restaurant Taillevent, un déjeuner au restaurant Astrance en l’honneur de Clos de Tart.

(bulletin WD N° 339 090929)

Le bulletin 339 raconte un passage chez Yvan Roux, un dîner d’amis, une surprise de taille au bout du filet le 121ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent avec un vin de 1791.

(bulletin WD N° 338 090922)

Le bulletin 338 raconte des repas de famille ou d’amis pendant le séjour d’été, une escapade chez Yvan Roux et un dîner au restaurant de Mathias Dandine à l’hôtel des Roches.

(bulletin WD N° 337 090915)

Le bulletin 337 raconte une succession de repas d’été où les vins sont à la fête.

(bulletin WD N° 336 090908)

Le bulletin 336 a encore une atmosphère de vacances. Il raconte un dîner chez des amis, un dîner à la table d’hôtes d’Yvan Roux et de multiples dîners dans la maison du sud.

(bulletin WD N° 335 090901)

Le bulletin 335 raconte un dîner à mon domicile parisien, un déjeuner et un dîner chez Yvan Roux, et plusieurs repas de famille dans le sud.

(bulletin WD N° 334 090824)

Le bulletin 334 raconte, à l’occasion de Vinexpo, un dîner au Château Haut-Bailly et la Fête de la Fleur au Château d’Issan.

(bulletin WD N° 333 090721)

Le bulletin 333 raconte un dîner à la table d’hôtes d’Yvan Roux et deux dîners pendant le grand salon du vin, Vinexpo : une fête au Château Palmer et un dîner au Domaine de Chevalier.

(bulletin WD N° 332 090715)

Le bulletin 332 raconte un séjour chez des amis, un dîner au restaurant Saint-Vincent à Oisly,un déjeuner au restaurant les Ambassadeurs de l’hôtel de Crillon et le 120ème dîner de wine-dinners au restaurant de la Grande Cascade.

(bulletin WD N° 331 090707)

Le bulletin 331 raconte Roland-Garros avec Moët & Chandon et la 10ème séance de l’académie des vins anciens

(bulletin WD N° 330 090630)

Le bulletin 330 raconte le 119ème dîner de wine-dinners au restaurant Ledoyen et un dîner à la table d’hôtes d’Yvan Roux.

(bulletin WD N° 329 090623)

Le bulletin 329 raconte de nombreux petits ou grands événements où le vin est un acteur de talent : un nouveau dîner chez Yvan Roux, un repas de famille, les 25 ans du Bistrot du Sommelier, une présentation de vins de « Domaines Maisons et Châteaux », un dîner d’anniversaire chez mon fils, un déjeuner au restaurant Laurent, des parties de belote au champagne, un dîner de promotion et un dîner d’amis. Cette succession de sujets donne une tonalité différente au bulletin.

(bulletin WD N° 328 090616)

le bulletin 328 raconte un déjeuner chez Yvan Roux, un dîner au restaurant de Matthias Dandine à Aiguebelle (hôtel des Roches) et le 118ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent

(bulletin WD N° 327 090609)

Le bulletin 327 raconte : un déjeuner au restaurant Ledoyen et le 117ème dîner de wine-dinners au restaurant Guy Savoy

(bulletin WD N° 326 090602)

Le bulletin 326 raconte : dégustation de trente millésimes du Château Le Bon Pasteur suivie d’un déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol

(bulletin WD N° 325 090526)

Le bulletin 325 raconte un dîner familial au restaurant Astrance et un déjeuner au restaurant de la Grande Cascade

(bulletin WD N° 324 090519)

Le bulletin 324 raconte le 116ème dîner de wine-dinners au restaurant Laurent, avec des apports de vins de plusieurs participants, conduisant à partager six vins du 19ème siècle, dont trois grands bordeaux de 1900

(bulletin WD N° 323 090512)

Le bulletin 323 raconte : un dîner de vins anciens et jeunes au Château Canon La Gaffelière avec mon ami collectionneur américain, une dégustation de vins de 2008 au Domaine de Chevalier, un dîner à l’Hostellerie de Plaisance à Saint-Emilion et la visite de la fabuleuse cave de Michel Chasseuil.

(bulletin WD N° 322 090505)

Le bulletin 322 raconte :Paulée et dîner de Gala de l’Académie du Vin de France, déjeuner au restaurant Laurent avec deux vins de la Romanée Conti, conférence et dégustation à l’Institut Supérieur de Marketing du Goût.

(Bulletin WD N° 321 090428)

Le bulletin 321 raconte : la présentation des vins de 2006 des « Domaines Familiaux de Tradition », le 115ème dîner de wine-dinners au restaurant de l’hôtel Bristol et un traditionnel déjeuner à la table d’hôtes d’Yvan Roux.

(Bulletin WD N° 320 090421)

Le bulletin 320 aborde : un déjeuner familial, un dîner au restaurant Laurent, un déjeuner au Yacht Club de France, la présentation annuelle des vins du groupe Henriot, un déjeuner à la Tour d’Argent, un casual Friday en terre inconnue et un dîner chez des amis.

(Bulletin WD N° 319 090414)

Le bulletin 319 raconte la suite et la fin de mes aventures chinoises : le 114ème dîner de wine-dinners au restaurant Maison Boulud à Pékin et un déjeuner au restaurant Dessirier.

(Bulletin WD N° 318 090414)

Le bulletin318 raconte la suite de mes aventures chinoises : un dîner au restaurant italo-chinois du Raffles de Pékin, un dîner au restaurant français Jaan du Raffles, un déjeuner au « Da Dong Roast Duck » de Pékin, une soirée à l’Opéra de Pékin, la visite d’un musée de l’histoire du commerce en Chine et enfin l’ouverture des vins du 114ème dîner de wine-dinners.

(Bulletin WD N° 317 090409)

Le bulletin 317 raconte le 113ème dîner de wine-dinners avec des vins exceptionnels, fait au restaurant Maison Boulud à Pékin en Chine avec mes vins.

(Bulletin WD N° 316 090407)

Les sujets du bulletin 316 sont : péripéties domestiques dans mon hôtel de Pékin, déjeuner au restaurant Maison Boulud, dîner au même restaurant, journée de tourisme.

(Bulletin WD N° 315 090402)

Le bulletin 315 raconte :Un déjeuner à la table d’hôtes d’Yvan Roux, un dîner au restaurant de Matthias Dandine à Aiguebelle (hôtel des Roches) et le 118ème dîner de wine-dinners au restaurant Taillevent.

(Bulletin WD N° 314 090331)

Le bulletin314 raconte un déjeuner pantagruélique au restaurant l’Ami Jean, un déjeuner au restaurant du Fouquet’s, un dîner au restaurant de Patrick Pignol, une dégustation de vins d’Alsace, une dégustation de vins de Graves et un déjeuner au restaurant Dessirier.

(Bulletin WD N° 313 090324)

Le bulletin 313 raconte : le 112ème dîner de wine-dinners au restaurant Astrance, un déjeuner au Yacht Club de France

(Bulletin WD N° 312 090324)

Le bulletin 312 raconte : un déjeuner au restaurant Laurent , le dîner de la Saint-Valentin au restaurant de l’hôtel Bristol, un dîner d’amis à la maison.

(Bulletin WD N° 311 090317)

Le bulletin 311 raconte : dîner au restaurant Villaret avec François Simon , dégustation de vins italiens au restaurant italien « Samesa », « musique-et-vin » dans un loft privé, déjeuner au restaurant Laurent .

(Bulletin WD N° 310 090310)

Les sujets du bulletin 310 : La neuvième séance de l’académie des vins anciens au restaurant Macéo et un déjeuner au restaurant Le Coq de la Maison Blanche.

(Bulletin WD N° 309 090303)

Le bulletin 309 raconte : déjeuner au restaurant « les Vieux Murs » à Antibes, déjeuner au restaurant de Matthias Dandine à l’hôtel des Roches à Aiguebelle, dégustation de Dom Pérignon à Hautvillers, déjeuner au restaurant « Les Grains d’argent » à Dizy.

(Bulletin WD N° 308 090224)

Les sujets du bulletin 308 :Le 111ème dîner de wine-dinners au restaurant Ledoyen avec de belles surprises, un dîner « Les Mots et les Vins » au George V avec Erik Orsenna et Château Margaux et un déjeuner de conscrits au Yacht Club de France

(Bulletin WD N° 307 090217)

Les sujets du bulletin 307 :110ème dîner de wine-dinners au restaurant Le Carré des Feuillants, déjeuner de famille, déjeuner au restaurant Le Bon Bec, déjeuner au restaurant Le Cinq du George V.

(Bulletin WD N° 306 090210)

Les sujets du bulletin 306 :Deuxième dîner de Noël, réveillon de la Saint Sylvestre dans la maison du sud, dîner d’amis, déjeuner au restaurant d’Yvan Roux, déjeuner d’amis et visite de ma cave.

(Bulletin WD N° 305 090203)

Les sujets du bulletin 305 :déjeuner au restaurant de Patrick Pignol, déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol, dîner de veille de Noël et dîner de Noël en famille.

(Bulletin WD N° 304 090127)

Les sujets du bulletin 304 :Dîner au restaurant « Les Ambassadeurs » de l’hôtel de Crillon. Dégustation des sept vins de 2005 du Domaine de la Romanée Conti. Dîner au restaurant de Patrick Pignol.

(Bulletin WD N° 303 090120)

Les sujets racontés dans le bulletin 303 sont : un cocktail à l’occasion de soldes.
Un exceptionnel dîner de vignerons au restaurant Laurent.
Dégustation en cave des restes des mêmes vins, peu de temps après.

(Bulletin WD N° 302 090113)

Les sujets du bulletin 302 :108ème dîner de wine-dinners au restaurant La Grande Cascade
Cocktail à l’occasion de soldes. Dîner de vignerons (dîner des amis de Bipin Desai) au restaurant Laurent.Dégustation en cave des restes des mêmes vins, peu de temps après.

(Bulletin WD N° 301 090106)

Les sujets du bulletin 301 :Dîner chez des amis. 107ème dîner de wine-dinners au restaurant Le Divellec. Deux champagnes pour une pause « high-tech ».

les vieux champagnes ne sont pas toujours parfaits mercredi, 30 décembre 2009

Le 30 décembre, surprise quand je rentre à la maison : ma femme a ouvert des huîtres et préparé des filets de turbot. La raison pousserait à l’abstinence une veille de réveillon.

J’ouvre une demi-bouteille du Champagne Léon Camuset sans année. Ce champagne familial de Vertus doit être dans ma cave depuis une bonne vingtaine d’année. Le bouchon chevillé glisse facilement. Le vin est ambré, la bulle est faible.

Hélas comme cela arrive souvent, les vieux bouchons laissent passer un peu de liquide qui touche la cape en étain et le goût est dévié. Comme ce défaut n’est pas très marqué, je continue de boire, mais la mémoire me restituera ce désagréable défaut pendant de longues heures.

les vins le lendemain samedi, 26 décembre 2009

L’assassin devrait toujours revenir sur le lieu de ses crimes, car c’est particulièrement instructif. Comme il reste du vin dans des bouteilles la tentation est grande de revisiter leur goût. Ma femme réchauffe du canard au miel qui s’est adouci et devient encore plus agréable, et le Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999 trouve son expression la plus divine et la plus aboutie. Il a gagné en rondeur, en assise, et c’est richement qu’il conquiert le palais. Quel grand vin ! Il faudra se souvenir que ce vin mérite d’être ouvert un jour plus tôt. A l’inverse, la Côte-Rôtie La Turque Guigal 1995 s’est simplifiée, est devenue plus rugueuse, plus schématique, et la brutalité de sa jeunesse s’expose, alors que le vin est grand. Aussi, dès la première gorgée du Vega Sicilia Unico Reserva Especial, on voit l’éclatante différence en faveur de l’espagnol. Il y a du fruit rouge dans la signature, de l’anis étoilé et de la fraîcheur mentholée dans le parcours en bouche. Le final interminable est extraordinairement élégant. Quel grand vin dans lequel on retrouve tout puisqu’à un moment le café, signature du Vega Sicilia Unico, montre son nez.

Alors, on veut revenir sur La Turque, pour voir. Et la comparaison dans ce sens là est à l’avantage du rhodanien. Il se restructure, reprend ses marques, et retrouve son élégance. Le Vega Sicilia est quand même ce soir nettement supérieur, mais La Turque est loin de faire de la figuration. L’ordre dans lequel les vins se sont améliorés le lendemain est : Montrachet, Vega Sicilia, La Turque étant la seule à ne pas avoir profité d’un repos dans une atmosphère à 14°. Il reste encore des vins à finir. Ils auront un jour de plus. Nous verrons.

déjeuner du 25 décembre – les photos vendredi, 25 décembre 2009

Le Dom Pérignon 1962 a retrouvé une belle couleur et il devient absolument charmant après 16 heures d’oxygène

Champagne Krug Collection 1982 (le sapin et le feu de cheminée forment avec le Krug un décor évocateur de Noël)

Les deux demi-bouteilles de Château Haut-Brion blanc 1992. A noter « absolument », le cachet de la cave de la Tour d’argent !

Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 1999. On note sur la capsule deux points, l’un sous le « de » et l’autre sous le « co » de Conti. Pourquoi ? On constate, une fois la capsule enlevée, qu’un de ces points est le départ d’un possible pourrissement du bouchon, très net sur la photo de droite.

Autre énigme : que veulent dire ce « V » et ce « S » ?

Le beau bouchon. On voit sur la droite qu’il a un renflement au niveau du nom « Romanée Conti » puis un creux.

Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti 1974. On voit que le bouchon mentionne « Marey-Monge ». Le bouchon est très beau. Sur la capsule, il n’y a pas les deux petits points de la capsule du Montrachet.

Hermitage Chave 1988

Vega Sicilia Unico Reserva Especial qui a donné lieu à 5.500 bouteilles.

le verre est gravé

Domaine de la Forêt Haut-Preignac 1920. C’est très curieux que la capsule ne comporte que le mot « Preignac », alors que bouchon indique bien « Forêt », avec le nom du propriétaire.

Quelle belle bouteille :

le filet de boeuf en croûte avec sa purée

la mangue avec ses grains de fruits de la passion (j’ai déjà mangé un peu avant de prendre la photo)

la merveilleuse couleur du Madère situé vers 1828

Bons vins, bonne chère, feu de cheminée. Même les plus braves succombent!

déjeuner de Noël en famille vendredi, 25 décembre 2009

La famille est au complet pour le déjeuner du 25 décembre. Le Champagne Dom Pérignon 1962 est resté toute la nuit dehors. Une petite amertume subsiste encore, mais le champagne a vraiment reconquis son statut. C’est un grand champagne, qui évoque le zeste de citron, riche d’une belle complexité aux saveurs oranges, devenu plus doux. Les petits toasts de foie gras sont du velours pour mettre en valeur sa délicatesse.

Le Champagne Krug Collection 1982 est un monument. Tout en lui est d’une délicatesse et d’une noblesse de fond. Rien n’est excessif et tout est parfait. Nous avons en bouche la définition du champagne parfait sans le moindre excès, où l’équilibre le plus pur est recherché. Alors, bien sûr, selon ses goûts, on penche vers l’un ou vers l’autre. Mon fils préfère le Dom Pérignon. Ayant encore le souvenir des blessures de la veille, mon cœur penche vers le Krug Collection 1982.

A table, nous commençons par des coquilles Saint-Jacques juste poêlées. Le Château Haut-Brion blanc en ½ 1992 de la Tour d’Argent (d’un achat récent) est absolument exceptionnel, avec des évocations citronnées d’une rare élégance. A côté de lui, un symbole de l’excellence du vignoble français. Quand on veut offrir aux siens un Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999, ce n’est pas par hasard. Bien évidemment, on s’attend à ce que le Montrachet domine le Graves. L’opulence en bouche et le final inextinguible et puissant indiquent que le combat sera sans égal. Or lorsque j’observe mes deux verres, celui qui se vide le plus vite est celui du Haut-Brion. Et je repense à la critique assassine qu’avait faite Aubert de Villaine lorsqu’il avait bu Haut-Brion blanc 1966 qu’il avait éreinté. Ici, celui qui me plaît le plus, c’est le Haut-Brion, même si le Montrachet est immense. Le montrachet, c’est la puissance, l’explosion gustative et le final en trompette. Le Haut-Brion, c’est l’acidité ciselée et une finesse de trame hors du commun. Voir que le vin le moins célèbre, qui plus est d’une année sans panache, se pousse du col au dessus de l’icône, cela me fait plaisir.

Pour la pièce de bœuf en croûte, fourrée au foie gras, nous avons cinq vins. Les trois ouverts la veille et les deux que j’ai ouverts ce matin. Pour respecter l’ordre des puissances, nous allons goûter une première série de trois vins. La Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti 1974 est l’expression pure et simple du génie bourguignon, et, plus précisément, du génie de la Romanée Conti. Ce vin aux accents salins, de coquille d’huître, est une pure merveille. A se damner.

A côté, l’Hermitage Rochefine Jaboulet Vercherre 1967 a fait beaucoup de progrès par rapport à la veille. Il s’est épanoui, élargi, et mon gendre constate comme je l’avais fait hier, l’étonnant aspect bourguignon de ce délicieux Hermitage. En troisième, l’Hermitage Chave rouge 1988 joue comme hier le rôle de l’étalon, qui montre la pureté que peut atteindre l’Hermitage, sans toutefois enflammer les foules. On revient, on revient sans cesse vers la Romanée Saint-Vivant, diablesse tentatrice au goût inénarrable.

La deuxième série des vins rouges sur le plat met en confrontation la Côte-Rôtie La Turque Guigal 1995 qui a bien profité de sa nuit d’oxygénation et le Vega Sicilia Unico Reserva Especial très vieux. Je serais bien incapable de dater le Vega Sicilia, mais sa couleur très pâle, très café clair, indique qu’il doit être vraiment très vieux. Disons dans les années cinquante. Il est fort en alcool, alors que l’étiquette n’indique modestement que 13,8°, et s’amuse à jouer les portos qui flirteraient avec du café. Ce vin est déroutant, atypique, hors norme, mais sacrément intéressant. La Côte Rôtie, élargie par sa nuit blanche, est devenue parfaite, exacte définition de ce qu’une Turque doit être. Mais, qu’on le veuille ou non, on revient au Marey-Monge, petite pépite de la Romanée Conti.

Les rouges s’amusent avec les deux camemberts de la veille, sans qu’aucune répulsion ne se manifeste.

Ma femme a prévu des mangues en tranches avec quelques grains de fruits de la passion. C’est idéal pour le Domaine de la Forêt Haut-Preignac 1920, sauternes à la couleur merveilleuse, dont le bouchon indiquait bien l’origine ainsi que le nom du propriétaire, un monsieur Mathieu. Le vin est remarquable. On pourrait lui appliquer les slogans publicitaires : « il a tout d’un grand », voire : « pas assez cher, mon fils », car ce sauternes dont je n’ai aucune idée de l’origine dans ma cave joue en première division. Les notes d’agrumes sont parfaites, l’équilibre général est étonnant tant il joue haut. C’est un grand vin.

Pour finir, j’ai servi le Brown Madeira 1828 dont il restait une bonne part après le dîner chez Jean-Philippe Durand. Il est certain que ce vin sublime est tellement hors norme qu’il éclabousse tous les autres. On est au niveau de la perfection la plus absolue.

Alors s’il faut voter, ce sera : 1 – Brown Madeira 1828, 2 – Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti 1974, 3 – Château Haut-Brion blanc en ½ 1992, 4 – Montrachet Domaine de la Romanée Conti 1999, 5 – Krug Collection 1982. Sans que je cherche d’une quelconque façon à déboulonner les icônes, car je n’y vois aucune gratification, je ne suis pas mécontent que des vins inattendus prennent les premières places. Car sur le papier, c’est le Montrachet et le Krug qui seraient les leaders. Ils furent grands. Mais de belles surprises ont ravi nos âmes.

Dans une atmosphère de joie familiale, des vins se sont montrés immenses. C’est un cadeau de Noël de plus.