Dom Pérignon 1966, une merveille partagée avec émotion mardi, 6 mars 2007

Un lecteur de mon blog m’a écrit pour me proposer des bouteilles à vendre, comme cela arrive souvent. Son ton m’a plu. Je lui achète des bouteilles intéressantes, dont plusieurs Dom Pérignon 1966. Nous bavardons de façon fort aimable et il me dit : « j’aimerais bien que vous parliez de ces vins lorsque vous les boirez. Ça ferait plaisir au grand-père de ma femme de vous lire, car ces vins viennent de sa cave ».

Le lendemain à 14h06, Jean-Philippe Durand, ami cuisinier amateur mais talentueux m’appelle : « je fais un dîner impromptu ce soir chez une amie qui a partagé nos aventures chez Marc Veyrat. Veux-tu venir avec ton épouse ? ». 14h08, j’appelle mon épouse. 14h10, j’annonce que nous venons avec un Dom Pérignon 1966 et sans doute un autre vin. Nous nous retrouvons à sept chez cette amie, avec une majorité de compagnons des expéditions dans les deux sites de Marc Veyrat. Le champagne Brut Jacques Selosse, dégorgé en septembre 2004 est bien sec, tout à mon goût. Sur l’amuse bouche, langoustine juste saisie, mousseline douce amère, Raz el Hanout, il va se comporter de différentes façons. C’est surtout sur la carotte qu’il s’anime, trouvant une belle longueur. Sur la délicieuse langoustine il est poli, aimable, mais la résonance est moins visible. Les divines épices marocaines sont envoûtantes, mais ce qui reste, lorsque le champagne se prolonge en bouche après ces folles bouchées, c’est la trace du sucré de la carotte, véritable faire-valoir du champagne.

Il fallait bien commencer par ce Selosse pour apprécier toute l’immensité du champagne Dom Pérignon 1966. Sa couleur est déjà d’un or foncé, la bulle est active, le nez énigmatique. Le premier contact révèle l’âge. Mais le risotto à la truffe blanche va servir de catapulte et donne au champagne une jeunesse exquise. La personnalité du champagne est immense. Il nous raconte des milliers d’histoires. Il est plus discret sur les noix de St Jacques poêlées qui accompagnent le risotto mais Jean-Philippe a sa botte secrète. En ajoutant un peu de sel de sa composition, le champagne est tout excité. C’est surtout sur la truffe blanche que ce champagne émouvant est magistral. Un très grand champagne.

Je suggère un intermède avant le vin rouge que j’ai apporté. Un Domaine Ollier Taillefer, Castel Fossibus Faugères 2004 est ouvert. Ce vin est nettement meilleur que ce que je pouvais supposer. De bel équilibre, joyeux, juteux, il a su éviter l’excès de bois et se marie bien à un jambon ibérique typé.

Le suprême de pigeon à la goutte de sang, côtes de blette au fumé virtuel, sauce aux foies et baies noires est un des plats que je préfère de Jean-Philippe. On sait à l’avance que l’accord avec la Côte Rôtie La Landonne E. Guigal 1997 sera parfait. Cette Landonne est éblouissante, et l’accord transcendant. J’ai de plus en plus d’amour pour cette année 1997, année de plus faible puissance, car c’est ainsi que l’on découvre le mieux les infinies variations et complexités de ce vin faussement simple. Ce moment est magique. La bouche n’est remplie que de bonheur.

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Le Comté de 36 mois est un gentil clin d’œil de Jean-Philippe, car il sait que je déconseille les très vieux Comtés pour les vins du Jura. Or celui-ci, de Roland Barthélémy, est sage et onctueux. Le Vin Jaune Château d’Arlay 1987 y trouve son compte, vin fort agréable qui n’est pas handicapé par son jeune âge.

Le « Madame Figaro » de Pierre Hermé, dessert talentueux et facile d’accès a tout pour créer une harmonie avec le Vouvray Moelleux "Le Haut Lieu", Domaine Huet, 1997. J’aimerais bien un jour comprendre l’engouement pour ce vin qui fait se pâmer les amateurs de vins, car je ne lui ai trouvé que de gentilles évocations sans grande imagination. Notre hôtesse ayant par mégarde entrouvert une armoire à alcools avec des flacons extravagants, c’est sur des saveurs étrangement exotiques que se conclut un repas charmant, où l’amitié souriante fut l’épice la plus envoûtante de ce festin.

 

deux ou trois commentaires sur le guide Michelin dimanche, 4 mars 2007

Le guide Michelin a frappé très fort. Il reprend la main. Juger le guide serait faire preuve de tout ce que je reproche aux amateurs de vins qui se sentent investis d’une mission : juger les vins, et de surcroît, juger les juges. Si Robert Parker a osé donner 97 à un vin qui ne le mérite pas, aux yeux de notre amateur qui se croit compétent, si Michel Bettane a osé oublier un vin absolument sublime, ils sont voués aux gémonies.

Je ne tomberai pas dans ce travers, car le guide Michelin est une œuvre humaine. Et je ne peux pas prétendre que mon goût est universel et serait supérieur à celui du guide. Tout au plus puis-je dire que le goût du guide correspond ou ne correspond pas à mon goût dans certains cas.

Je remarque une chose qui mérite l’intérêt. Les restaurants parisiens où se trouvent les trois plus brillants directeurs de salle ont perdu une étoile.

          Jean-Claude Vrinat est « le » directeur de salle (qu’il soit aussi propriétaire ne change rien) exemplaire. D’un accueil distingué, il a l’œil sur tout et fait de sa maison le modèle absolu du service.

          Philippe Bourguignon a un charme inégalable, une intuition parfaite, et considère chaque table comme la table de ses amis. Il donne à la salle une atmosphère unique.

          Eric Beaumard, le plus fantasque des trois, conteur truculent, qui vous raconte un vin à la Frédéric Dard, ensoleille une salle aux ors pesants.

Si l’on se souvient de Claude Terrail, le directeur de salle aussi célèbre dans le monde entier que la Tour Eiffel, on voit que le guide n’aime pas beaucoup les restaurants où le directeur de salle « fait » la personnalité du lieu. Ce n’est certainement pas un hasard.

Est-ce à dire que la cuisine y serait malmenée ? C’est à chacun des clients de ces lieux de se faire son opinion. Je crois en avoir une certaine expérience, mais mon goût est le mien. Une chose est sûre, c’est que la perte de l’étoile n’est pas « que » le fait du chef. La dernière des erreurs serait que la décision du guide divise les équipes. Elle doit au contraire les souder. « On ne change pas les équipes qui perdent » quand ce n’est pas une vraie perte. On réfléchit, et on reprend calmement le sujet.

Il se trouve que j’ai fréquenté récemment des tables comme l’auberge les Morainières à Jongieux, le Bec Fin à Dôle, l’hôtel des Roches à Aiguebelle. Dans chacun de ces lieux, un jeune chef plein de talent mérite une étoile. Il l’a eue, et je l’avais souhaitée dans mes bulletins. Tant mieux.

Mais les retrouver au même niveau que Laurent, non. Ce « non » n’est pas une critique du guide, mais l’impression d’une limite. Il manque une nuance.

Des jeunes qui montent, inventifs, doivent être encouragés. Mais les mettre tout de suite au niveau de Laurent, Patrick Pignol ou Gérard Besson ? Je ne crois pas que cela représente une réalité.

Une autre remarque concerne des chefs dont j’ai souvent dit dans mes propos : « avec tel plat, il vaut trois étoiles ». Je les apprécie, je vante leur talent. Mais que reste-t-il à Yannick Alléno et Frédéric Anton si on leur donne déjà la Grand Croix de la Légion d’Honneur ? Quand, à cet âge, le seul horizon possible n’est que de descendre, puisqu’on est au sommet, quelle frustration après la légitime fierté !

Dernière remarque : c’est la perte d’une étoile qui m’a attaché à Gérard Besson en qui j’ai trouvé un chef amoureux des vins anciens et raffiné. Même chose pour Jacques Le Divellec au cœur gros comme ça. Mon attachement à un restaurant reste fondé sur mon appréciation plus que sur celle d’un guide.

Mais le guide Michelin est une institution irremplaçable, qui a bien fait de créer l’événement par des choix audacieux. Que chacun continue de faire ce qu’il doit.

Bistrot du sommelier vendredi, 2 mars 2007

Avec deux amis, nous allons dîner au Bistrot du Sommelier qu’anime l’excellent Philippe Faure-Brac avec une belle sérénité. Sa carte des vins est intelligente, ce qui ne surprendra personne. Si nous n’avons pas eu de vins dans un état irréprochable, ce n’est qu’un manque de chance, car je ne peux que me féliciter de ce que j’ai bu jusqu’alors chez Philippe. Le champagne Charles Heidsieck brut blanc des millénaires 1995 doucereux, dosé, manque un peu de souffle. Le Château Laville Haut-Brion 1983 dont j’attendais beaucoup porte plus que son âge, avec un fumé prononcé. L’Hermitage Chave rouge 1998 aurait dû trompeter de joie mais il était en RTT, le Volnay Les Caillerets La Pousse d’Or 1969 offert par Philippe ne manquait pas de charme mais souffrait un peu. Et mon Coteaux du Layon Les Aunis de Chaume R. Dubreil 1947 au niveau très bas et à la couleur fatiguée faisait presque meilleure figure dès qu’il s’est ouvert par son élégance évocatrice. Tout ça n’est pas très grave, mais j’attendais plus du Laville et du Chave. La cuisine simple et directe est fort agréable. Il faudra que je revienne prendre une belle pépite choisie par ce meilleur sommelier du monde et écrivain du vin et de la gastronomie.

I bought some old Chave vendredi, 2 mars 2007

I had bought some wines with the help of an expert, Pétrus 1975, a Port 1887, a Haut-Brion white 1980 and some other stuff, and to give me the bottles against one bank check, he invited me for a lunch.

We began with a Peyre Rose, Clos Syrah Leone 1998, a Coteaux du Languedoc, and I must say that I appreciated it. The smell is pure, genuine, and in mouth, what is comfortable is that there is no wood. Very agreeable, of course alcoholic with 14.5°, I liked it despite a certain lack of imagination. Well made, but not inspired. This is not the wines that I chase, but why not.

Things changed with a Chateau Ausone 1952. Opened much too late, and shaken by the walk of my friend when coming to the restaurant, this wine would have disturbed many palates. But after some sips, what a delight ! I ate the sediment with a lubricious pleasure.

This wine has all the characteristics of Ausone, and it is velvety, cosy, even if weak when compared with greater vintages. But who cares as we had a true emotional Ausone.

This invitation should normally have an object, and I heard it clearly.

He told me that he has visited a cellar of a man living in the centre of France, who has a big collection of Chave and La Chapelle.

He said : I have never seen bottles which such magnificent levels.

Stupidly I said : could I have a look? I was hooked.

I went to his place where he had put his buy and I bought 10 Chave Hermitage 1962, 3 Chave Hermitage 1964, 5 La Chapelle Hermitage 1962, and he offered me an exciting Hermitage white 1961 and a completely unknown wine. All levels are in the middle of the neck or up neck.

As I have no idea on such wines, only experience will tell !

Jeroboam Mouton Rothschild 1945 : $310,000 jeudi, 1 mars 2007

Philippine de Rothschild has organised with Sotheby’s a public sale of many wines coming from the cellar of the castle.

Which are the reason for such a sale ? Probably to make people talk about Mouton, and reinforce the prices for future years.

A Jeroboam (4.5 litres, or 6 bottles) of Mouton 1945 was sold for $310,000. Taking in accounts the extras, it values a single bottle for approximately $60,000. Of course, there is a premium for the extraordinary size of the bottle, surely authentic as it comes from the castle. This justifies this extraordinary value.

As I intend to open Chateau Mouton-Rothschild 1945 in April 2007, every drop will be appreciated as a diamond !

Guy Savoy éblouissant mercredi, 28 février 2007

Il y avait bien longtemps que je n’étais pas allé au restaurant Guy Savoy. Quelle erreur. Y aller le jour de la parution du guide qui fait la piste aux étoiles, cela ne manque pas de sel, car je me souviens de la liesse chez Guy le jour de la troisième. Constater que le restaurant Laurent et celui de Patrick Pignol perdent une étoile me fait mal. Car un ami, écrivain du vin, est venu avec le guide qui ne paraîtra que demain et nous informe de ce que nous ne savions déjà. Et nous constatons les joies et les peines que le soubresaut du Michelin va créer. C’est le prix à payer pour que cette institution, toujours critiquée, mais toujours écoutée, prouve qu’elle est vivante.

Nous sommes quatre, cet ami écrivain, le cuisinier fétiche de dîners privés et de plus ami, et un correspondant de forum qui devient réel, de chair et d’os. Le champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1989 a été ouvert à notre arrivée. J’implore quelque chose à manger, car la première gorgée, sur la bouche du matin, paraît pâle. Le délicieux foie gras qu’un jeune garçon étage sur une pique fait vivre le champagne. Le 1988 bu récemment est plus monumental. Le 1989 est plus subtil et romantique. C’est un grand champagne.

Nous prenons le menu prestige dont voici l’intitulé : mini millefeuille d’hiver / Coquilles Saint-jacques « crues-cuites », pommes de terre et poireaux / saumon à la vapeur, jus « anis-réglisse », brochette de légumes en côtes / veau cuit lentement en bouillon, chou farci, quelques racines en compote / soupe d’artichaut à la truffe noire, brioche feuilletée aux champignons et truffes / pigeon « poché-grillé »,  salsifis et saveurs d’agrumes / fromages affinés / exotique / fondant chocolat au pralin feuilleté et crème chicorée.

 Je préfère annoncer la couleur, je persiste et signe, Guy Savoy est le chef avec lequel je suis en totale harmonie. Cela ne veut pas dire amour aveugle, car le veau, dont il nous avait annoncé l’originalité avant qu’il ne soit servi, ne m’a pas convaincu. Mais il y a des plats d’une telle grandeur, d’une telle sensibilité, que je suis anesthésié de bonheur. Le millefeuille d’hiver où des chips de betterave s’entrelacent de truffes est d’un équilibre absolu. C’est aussi parfait qu’un vin extraordinaire dont on vante la sérénité. La soupe d’artichaut est aussi un plat d’un équilibre parfait. Dans ces deux plats, pas une virgule ne pourrait être changée. Et puis il y a l’homme. Aucun chef ne dégage une telle empathie. J’ai fait vœu, en écrivant mes aventures de ne jamais être objectif et de ne suivre que mes sentiments. Ce chef est mon préféré. Je n’en ferai jamais mystère.

Le Corton Charlemagne Bonneau du Martray 1997, au moment où il se présente, est un vin intellectuel. Il faut en effet faire appel à des codes pour entrer dans sa logique. Et les coquilles Saint-jacques s’empressent de me le faire aimer. C’est assez extraordinaire comme sur la coquille crue ce Corton est sucré, et comme sur la coquille cuite il devient profond, long, sec et précieux. L’adaptabilité de ce vin remarquable est un immense plaisir. Je dois avoir un sixième sens, car c’est d’instinct que j’ai commandé Château Rayas Châteauneuf-du-Pape blanc 2001. Ce vin « est » réglisse. Vous avez sans doute déjà éprouvé l’usage du verbe être : Marion Cotillard « est » Edith Piaf, ou Sandrine Bonnaire « est » Jeanne d’Arc. Là, le Rayas « est » réglisse, ce qui crée un accord phénoménal avec le saumon qui ne vit que pour s’accoupler avec cette saveur. Ce qui est particulièrement étonnant, c’est que le Rayas restera réglisse même après le plat, sur le veau au bouillon rural et agreste.

Le vin qui suit est une suggestion d’Eric Mancio : Nuits-Saint-Georges Clos des Forêts Saint Georges Domaine de l’Arlot 1989. Il apparaît sur la fameuse soupe, mais reste sur son strapontin. Ce vin est une belle définition du Nuits-Saint-Georges, mais il n’est que cela. Trop scolaire, trop bon élève, il joue son rôle, mais ne m’entraîne pas, comme il devrait, dans une farandole. Sur le pigeon subtil, il n’est que le gardien de square.

Le Jurançon Clos Uroulat Charles Hours 1996 est une fantaisie de mes deux jeunes amis. C’est une gymnopédie destinée à délier le palais. On a de tout, du litchi, du kiwi, de la mangue, et des agrumes à profusion. C’est évidemment plaisant mais c’est une récréation. Cela excite les papilles pour les faire chanter. Et c’est bien agréable. Mais j’attendrais à ce moment du pastel plus que du flamboyant. La profusion des desserts crée une confusion mentale dont on ne se remet pas.

Guy Savoy est venu bavarder à notre table, car je prépare un dîner redoutable dont il sera le dompteur. Ce fut l’occasion de parler des plats car il est à l’écoute de tout. Grand moment de partage de sensations.

Le service est toujours précis, parfois amusant car il y a aussi de l’humour dans cette brigade. Les propos d’Hubert se dégustent comme des bonbons tant son accent est charmant, avec le même décalage désuet que la présentation du homard chez Jacques Le Divellec. Et moi, bon public, je marche. Le nouvel ami dira qu’en ce déjeuner il a connu plus d’accords merveilleux qu’en des dizaines d’autres. Des repas comme celui-ci sont des moments précieux de la vie.

 

Le mini millefeuille d’hiver est éblouissant. Regardez à gauche du saumon ces trois petites traces. C’est une poudre à base de réglisse qui donne au Rayas une puissance émotionnelle extrême.

Mouton 2001 ????? mardi, 27 février 2007

De retour à Paris, je vais chez Jacques Le Divellec le lendemain de la parution du bulletin 216. C’est un peu comme le joueur de foot qui vient de marquer un but : je peux courir dans la salle de restaurant en ouvrant les bras, la tête cachée par mon maillot, je peux me dépoitrailler en hurlant de façon hystérique, car je suis dans mon camp. Sur une brouillade d’oursins fort goûteuse, le Champagne Bollinger Grande Année 1997 est agréable. Encore très vert, il expose sa race avec élégance. Le numéro du homard à l’américaine est gentiment désuet. L’argumentaire, mille fois rôdé, est charmant dans son exposé décalé. J’adore ce retour aux valeurs qui datent au moins d’un demi-siècle. Et l’on peut se le permettre, car la sauce est redoutablement bonne, juste dosée mais pénétrante. Olivier m’a trahi, car lui posant la question de Mouton 2001, il acquiesça. Or Château Mouton-Rothschild 2001, c’est un vin que je n’aime pas. Il m’est plus facile de le dire car je suis amoureux de Mouton, qui peut être grandiose dans des années de rêve. Mais franchement, ce 2001 est raté. Il n’est que bois. Il ne raconte rien. Quel dommage que la belle étiquette couvre un vin qui ne donnera rien de bien. A oublier bien vite tant il existe de grands Mouton.

Il fait beau dans le Sud samedi, 24 février 2007

Les hirondelles volètent au mois de février dans le Sud de la France. Les pulls s’enlèvent. Il fait fort beau. C’est l’occasion d’aller déjeuner à la table d’hôte d’Yvan Roux. Un champagne Laurent-Perrier cuvée Grand Siècle est fort gouleyant sur des tranches de pata negra. Des montagnes d’oursins pêchés de la veille sont confrontés à un Vin Jaune Victor Richard 1990. Il faut prendre une infime gorgée de ce vin au lourd parfum pour ne pas écraser l’oursin. Le plus subjuguant, c’est que malgré la présence extrême de ce vin profond de 13°, la dégustation des langues d’oursin n’est pas altérée. C’est le goût pur qui est mis en valeur par ce vin typé qui ne dévie pas le palais. Je sens que la brouillade d’oursins appelle un rouge, ce qui, convenons-en, est assez peu orthodoxe. Et le Château Lynch-Bages 1978, qui a entamé sa période de maturité avant l’heure, a l’intelligence de s’effacer pour respecter le fumet intense et délicat à la fois. Les beignets d’anémones de mer repoussent le rouge de leur acidité finale en bouche et c’est le champagne qui leur convient. Nous revenons au rouge pour des fritures de crevettes, petites seiches et petits crabes que l’on croque. Les cigalons, préparés dans leur plus grande pureté, sont d’un goût passionnant où apparaissent les noisettes et le pain d’épices. Avec eux, le vin jaune chante à tue-tête. Un risotto à l’encre de seiche et jus de cigalons permet de finir joyeusement le Lynch Bages 1978, vin de grand confort, expressif même s’il s’est assagi. Sur un sofa profond mis au soleil d’une journée annonciatrice du printemps, les yeux clos, il m’apparaît que la vie est belle.

 

Le Devoir, journal canadien, parle de mes dîners et mes vins vendredi, 23 février 2007

Un article de Jean Aubry dans le devoir, gazette canadienne de langue française :

article

j’aime beaucoup le "l’homme, un chouïa compulsif". Interviewé quand j’ouvre les bouteilles d’un dîner, je n’ai pas la décontraction que j’aurais, confortablement assis dans un fauteuil.

Mais l’article est très flatteur.