La survie des bas niveaux dimanche, 16 mai 2021

Une discussion avait été lancée sur Instagram sur l’attitude à avoir face à des vins dont les bouteilles ont subi des baisses de niveau. Certains amateurs ont des anxiétés qui me paraissent excessives. J’ai suggéré que l’on ait vis-à-vis de ces vins une attitude positive, sans stress. Plus on aura un accueil ouvert, plus on aura une chance d’aimer le vin et surtout j’ai insisté sur la nécessité d’utiliser la méthode dite d’Audouzer le vin, c’est-à-dire de l’ouvrir quatre à cinq heures à l’avance, pour que toutes les petites imperfections se corrigent grâce à l’oxygénation lente.

Pour vérifier mes dires, j’ai pris en cave deux bouteilles que la quasi-totalité des amateurs jetteraient. L’une est un Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964 qui a perdu environ 75% de son volume et qui a une couleur très foncée. L’autre est un Nahe Winzerstolz Schloss Böckelheimer, Bad Kreuznach Rheinland 1959, dans une bouteille fine et haute au fond plat, qui a perdu environ 80% de son volume.

Inutile de dire que la probabilité de trouver deux vins morts est extrêmement élevée. Le bouchon du champagne est recouvert de saletés noires, dures comme du goudron. Le bouchon est noir, mais le goulot n’est pas sale. L’odeur à l’ouverture à 9h du matin, soit quatre heures avant le déjeuner, est très acceptable, ne révélant aucun défaut majeur.

Le bouchon du riesling allemand tourne en même temps que mon tirebouchon, ce qui rend difficile de l’enfoncer. Je suis obligé d’arrêter cette rotation en plantant une autre mèche dans le liège. Je peux alors enfoncer la mèche principale et je lève entier le bouchon très imbibé. Le goulot est sale et gras, d’une graisse noire, que je nettoie avec mes doigts qui se noircissent. Je sens et, oh surprise, un délicieux parfum de fruits rouges se montre souriant. Je fais sentir à ma femme qui trouve ce parfum superbe.

Au déjeuner j’annonce à ma fille que nous allons faire l’expérience de ces deux vins. La couleur du Champagne Moët & Chandon Brut Impérial 1964 est beaucoup plus claire dans le verre que dans la bouteille. Il y a quelques poussières en suspension qui ne me gênent pas. Le goût est celui d’un champagne ancien plaisant. Ma fille est un peu rebutée par les suspensions, mais je boirai tout le champagne qui n’a aucune lie. Il a accompagné de belle façon une tarte à l’oignon au goût légèrement sucré et nous l’avons trouvé confortable et agréable, doté d’une belle complexité. Je n’aurais pas parié qu’il se comporte aussi bien.

Le Winzerstolz Schloss Böckelheimer, Bad Kreuznach Rheinland 1959 au moment du service offre un nez qui a perdu tout son charme car il sent le bouchon. Il y a une salade de champignons qui va effacer cette trace de bouchon. Le vin met du temps à s’assembler, mais il est d’une belle douceur, et d’une grande cohérence. Il n’a pas de défaut, juste une petite fatigue.

Pour le cas où les vins auraient été défaillants, j’ai ouvert un Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 2004. Le bouchon très serré sort difficilement. Une belle explosion de gaz salue son ouverture. La couleur est très claire. Quel contraste avec les deux autres. Le champagne est agréable et bien construit, mais nous faisons ma fille et moi le même constat : les deux vins anciens sont infiniment plus complexes et donnent beaucoup plus de plaisir que ce jeune champagne.

Le 2004 trouvera un bel accord avec une tarte aux fraises et à la rhubarbe, grâce à son acidité trouvant un miroir dans les fruits. J’ai fait part sur Instagram des résultats de cet essai. Il faut toujours faire confiance au vin et lui donner sa chance, sans le condamner a priori. Nous aurions pu avoir un échec car il y a des vins irrécupérables, mais nous n’en avons pas eu. Et l’âge leur donne des complexités que ne peuvent donner les vins plus jeunes. Ces conclusions n’ont pas valeur de vérité définitive, mais ils encouragent à laisser leur chance aux vins.

Déjeuner préparatoire du 250ème dîner jeudi, 13 mai 2021

Les 100ème et 150ème dîners ont été organisés au château de Saran, demeure de réception du groupe Moët-Hennessy, grâce à l’amitié de, notamment, Jean Berchon et Richard Geoffroy chef de cave de Dom Pérignon. Nous aurions bien continué la série pour le 200ème mais le château a été en rénovation pendant quelques années.

J’étais venu au château en octobre dernier pour mettre sur les rails le 250ème dîner. Nous sortions de confinement, qui allait réapparaître peu après. J’avais eu l’occasion d’étudier la cuisine du chef Marco Fadiga lors du déjeuner avec Vincent Chaperon, le nouveau chef de cave de Dom Pérignon. A cette occasion j’avais apporté trois vins à boire. Nous n’en avions ouvert que deux. Un vin était resté pour la prochaine occasion de rencontrer le chef.

J’arrive au château pour apporter les vins du 250ème dîner une semaine à l’avance, pour qu’ils reposent sur place. Nous avions échangé des mails, le chef et moi et je vais vérifier quelques recettes avant le prochain dîner. En ce milieu de printemps, le jardin du château est une pure merveille.

Je suis accueilli chaleureusement avec une coupe de Champagne Dom Pérignon P2 2002. On me dit que le P2 est dégorgé normalement lorsqu’il a quinze à seize ans. Le bouchon que je vois, très resserré ne me semble pas correspondre à un dégorgement récent. Le champagne est frais, large, souriant. On sent un peu son dosage, et le plaisir est grand.

J’ouvre le Vino Rosato de la coopérative de Berchidda, vin de Sardaigne 1968 qui titre 14° que j’avais apporté il y a quelques mois. Sa couleur rose est très soutenue, le nez est profond et en bouche ce qui est impressionnant c’est la jeunesse de ce vin de 52 ans. Il est équilibré, solide, carré, et nous guetterons ses réactions sur les plats.

L’équipe de restauration du château me propose de goûter un vin qui a été ouvert hier pour un autre événement. C’est un Château Montrose Saint-Estèphe 1999. Le nez est puissant et profond mais en bouche ce vin me paraît imprécis, brouillon, manquant de tranchant. Il sera lui aussi utilisé pour voir ses réactions sur certains plats.

Marco Fadiga se posait la question d’utiliser pour ses sauces un Château Fourcas Hostein Listrac jéroboam 1975 ouvert il y a plusieurs jours. J’ai goûté le vin légèrement éventé mais sans défaut qui pourra effectivement être utilisé dans des sauces.

Nous avons analysé les plats dans un climat de grande compréhension. L’équipe de cuisine écoutait nos commentaires et l’ambiance était agréable. Les recettes me semblent convenir aux vins, ce qui devrait se traduire par un grand 250ème dîner.

la table du futur 250ème dîner

249ème dîner à la Maison Belle Époque samedi, 8 mai 2021

Lors du 247ème repas où nous avions pu goûter six vins du domaine de la Romanée Conti, deux participants qui font partie de la direction du groupe Pernod-Ricard ont lancé l’idée que l’on se retrouve dans la même formation pour un dîner à la Maison Belle Époque de la maison Perrier-Jouët.

J’avais déjà eu l’occasion de faire un dîner dans cette magnifique « maison », c’était le 236ème dîner. Les personnes de la Maison Belle Époque impliquées dans le dîner ont changé. Séverine est chef de cave, la huitième seulement en 210 ans et elle est la première femme à ce poste. C’est elle qui a choisi les champagnes que nous boirons ce soir. À l’accueil Annabelle remplace Thierry le sympathique maître des lieux pendant de longues années. En cuisine, le chef Sébastien Morellon fait suite à Joséphine Jonot.

Les règles sanitaires liées au Covid avaient failli rendre le dîner impossible mais en fin de compte nous serons dans une magnifique salle à manger décorée avec un goût certain, à une table qui respecte les règles de distance.

J’arrive à 16 heures pour ouvrir les vins que j’avais livrés il y a une semaine, ayant profité de la livraison pour tester les recettes élaborées par le chef. Annabelle a redressé hier soir les bouteilles couchées en caisse. Elle est auprès de moi pour les ouvertures. Les trois premiers vins que j’ouvre en cave ont des bouchons qui tournent dans le goulot extrêmement facilement. Cela est sans doute dû à la forte hygrométrie qui règne en cave faisant suinter de l’eau en certaines zones. Les deux vins blancs de 1962 ont de superbes parfums. Le moment fort de la soirée sera de juxtaposer trois Vosne-Romanée Cros Parantoux de trois vignerons différents, aussi mes soins pour ces vins sont tout particuliers. Le Méo-Camuzet a un parfum racé fort élégant, le Henri Jayer est fermé et ne sent rien et l’Emmanuel Rouget est d’une grande discrétion. Tous les bouchons, même quand ils se déchirent du fait des irrégularités du verre à l’intérieur du goulot, viennent sans réelle difficulté.

J’avais un doute sur la couleur de l’Yquem 1939 qui a été rebouché au château en 1989 mais je suis rassuré par son parfum et les fragrances que délivre la Romanée-Conti 1967 m’enthousiasment. C’est un chef-d’œuvre de subtilités.

Je vais saluer le chef Sébastien Morellon en cuisine et je suis heureux de saluer aussi Michel Nave, chef MOF qui est le bras droit de Pierre Gagnaire avec qui nous avions réalisé un dîner sublime dans son restaurant, le 222ème.

Les participants arrivent et se rendent dans leurs chambres puis, quand nous sommes tous prêts, nous avons une forte envie de boire du champagne, ce qui se comprend normalement lorsque l’on est dans une maison de champagne. Mais j’apprends que pour des raisons sanitaires, nous ne boirons pas au bar, distanciation oblige, et l’apéritif se prendra à table.

J’apprends aussi que Séverine préfère dîner dans une pièce voisine, car elle a peur de toute contamination, ce qui se comprend compte-tenu de sa fonction. Un maître de cave sans odorat, c’est impensable. Fort heureusement Séverine viendra nous présenter les champagnes que nous boirons.

Il y aura un seul nouveau à ce dîner, jeune entrepreneur gastronome et amoureux des grands vins.

Le menu mis au point avec le chef Sébastien Morellon et réalisé par lui avec l’aide de Michel Nave, est : sablé parmesan, pomme gaufrette, saumon fumé, gel citron-mélisse / langoustine au court-bouillon, mousseline de persil / sole de petit bateau pochée, farcie d’une duxelles de champignons, fondue de poireau / quasi de veau braisé parfumé de laurier, carottes / filet de bœuf sauce Périgueux, pommes Anna / gratin de macaronis au comté / foie gras poché dans une infusion de légumes / ris de veau croustillant, fondue d’oignons doux / déclinaison de mangue.

Annabelle nous sert le Champagne Perrier Jouët Belle Époque Magnum 1989 lorsque nous sommes assis. Le nez de ce champagne est incroyable tant il est plein, fort, guerrier. C’est un immense champagne de grande largeur. Il combine à la fois l’énergie d’une folle jeunesse avec la sérénité que donne la maturité. Très solaire, c’est un champagne royal. Les petits amuse-bouches le rendent gourmand.

Le Champagne Perrier Jouët Belle Époque Magnum 1988 est résolument différent. Si le premier est masculin, celui-ci est féminin, alors que ce n’est pas la caractéristique de ce millésime. Il est tout en grâce et bien malin celui qui dirait lequel il préfère, tant ils explorent des voies différentes. Ce 1988 trouve son envolée avec la divine langoustine superbe avec sa mousseline de persil.

Pour la sole riche et affirmée et arrondie par les champagnes les deux vins blancs de 1962 se montrent brillants. Le Traminer Trimbach 1962 est d’une palette de goûts inhabituels. J’adore son caractère sauvage et terrien. Son nez très minéral évoque les litchis lui donnant des tons exotiques fluides et charmants.

Le Clos de la Coulée de Serrant Mme A. Joly Savennières 1962 au contraire est glorieux. C’est pour mon goût la plus grande année de la Coulée de Serrant avec le 1967, deux années réussies par Madame Joly. Il est serein, épanoui, calme et tout à son affaire. Mais j’ai tendance à penser que le Traminer est plus en phase avec le plat, porteur d’une grande émotion. J’ai toujours un petit faible pour les fantassins.

La raison principale de l’inscription à ce dîner est la curiosité de mes amis à goûter ensemble trois Cros Parantoux mythiques. Il ne s’agit pas de les juger mais de les juxtaposer. Et j’ai eu l’idée que l’on perçoive leurs comportements sur une viande blanche et sur une viande rouge. Nous commençons donc à les apprécier sur un veau fondant.

Très vite il apparaît que le Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1992 est très largement transcendant par rapport aux deux autres. Ce n’est pas que les deux autres seraient plus petits. C’est que le Henri Jayer dégage une émotion incommensurable. Et il n’y a pas d’auto-persuasion parce que nous aurions envie que le Henri Jayer soit le meilleur. Il l’est.

Le Vosne Romanée Cros Parantoux Méo Camuzet 1991 au nez raffiné est le vin qui s’exprime le mieux avec le veau, alors que le Vosne Romanée Cros Parantoux Emmanuel Rouget 1996 plus affirmé est celui qui fait jeu égal avec la force du filet de bœuf que le chef a fait puissant, comme je le souhaitais.

Chacun des trois Vosne Romanée Cros Parantoux serait la vedette d’un repas s’il était seul, le Rouget dans l’affirmation puissante, le Méo dans un registre plus courtois, et le Jayer dans la transcendance. Ce groupe de trois vins est un moment d’une intensité rare. Alors qu’il s’agit de Premiers Crus et non de Grand Crus, on est au sommet du plaisir bourguignon.

Il m’était apparu opportun qu’un champagne précède la Romanée Conti en faisant une rupture gustative. Le Champagne Perrier Jouët Belle Époque Magnum 1982 est accompagné d’un gratin de macaronis absolument idéal pour gérer ce qui est plus qu’une parenthèse, un grand moment. Car ce 1982 est immense. J’ai de cette année l’image de romantisme. Tout est en grâce dans ce champagne. Sa longueur et sa justesse sont merveilleuses.

J’avais senti à l’ouverture que la Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1967 serait toute en grâce. Le foie gras poché remarquablement exécuté est comme un coussin de velours qui fait admirer la brillance d’un joyau. Car c’est un accord extraordinaire. Le nez est subtil et en bouche toutes les suggestions se dessinent comme en une œuvre d’Albrecht Dürer. Tout y est. Il faut savoir lire ce vin. Je suis aux anges. Et je suis tellement content de trouver une Romanée Conti qui s’exprime naturellement de façon équilibrée et suggestive que je ne boude pas mon plaisir. Elle ne s’affiche pas, n’a rien d’ostentatoire, elle suggère et se livre si on l’écoute. Et l’accord divin la rend encore plus belle.

Le Gewurztraminer Vendanges Tardives Hugel 1976 est d’une année que Jean Hugel considérait comme la plus réussie de celles qu’il avait dirigées. Le vin combine force et subtilité, d’un équilibre rare. Je me demandais si faire suivre un foie gras poché par un ris de veau était possible. L’accord s’est montré superbe.

Le Château d’Yquem 1939 est d’un ambre assez discret et je me suis rendu compte que le léger doute que j’avais sur sa couleur n’était dû qu’à une chose : la bouteille est d’un verre bleuté comme ce fut le cas pendant la guerre. Dans le verre la couleur du vin retrouve un or magnifique. Son nez est puissant. En bouche il combine élégamment le côté gras du botrytis avec une tendance sèche des sauternes ayant mangé leur sucre et cette combinaison le rend élégant. La mangue se montre le compagnon idéal de ce grand vin.

D’habitude, lorsque l’on vote dans mes dîners, même si mon vote diffère du vote du consensus, cela ne m’émeut pas. Mais dans ce cas, j’ai eu un temps de réaction qui n’est pas un refus, mais presque. J’étais tellement heureux de trouver une Romanée Conti qui soit dans l’expression la plus fine et subtile de la Romanée Conti que je l’ai mise première de mon vote. Or le gagnant, de loin, est le Cros Parantoux d’Henri Jayer qui a obtenu six votes de premier. Pourquoi ai-je été interrogatif, alors que le Henri Jayer a été sublime, je ne le sais pas aujourd’hui en rédigeant ce compte-rendu. C’est peut-être dû au fait que les marqueurs habituels de la Romanée Conti, la rose et le sel étaient moins marqués que d’habitude pour ce 1967. J’aurais aimé que mes amis aient mon enthousiasme mais je suis heureux qu’ils aient couronné le vin d’Henri Jayer. La Romanée Conti a eu trois votes de premier.

Le classement du consensus est : 1 – Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1992, 2 – Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1967, 3 – Magnum Champagne Perrier Jouët Belle Époque 1982, 4 – Vosne Romanée Cros Parantoux Emmanuel Rouget 1996, 5 – Gewurztraminer Vendanges Tardives Hugel 1976, 6 – Château d’Yquem 1939.

Mon classement est : 1 – Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1967, 2 – Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1992, 3 – Château d’Yquem 1939, 4 – Magnum Champagne Perrier Jouët Belle Époque 1982, 5 – Gewurztraminer Vendanges Tardives Hugel 1976.

Une mention particulière devrait être faite sur les accords mets et vins que j’ai suggérés ou bâtis avec le chef et qui ont été magnifiés par le talent du chef. L’accord le plus beau est celui du foie gras poché avec la Romanée Conti. Ensuite ce serait la sole et sa duxelles avec le Traminer, le ris de veau avec le Gewurztraminer, le bœuf avec le Vosne-Romanée d’Emmanuel Rouget et les macaronis avec le Perrier-Jouët 1982. Mais la langoustine avec le 1988 pourrait concourir aussi, car tout fut divinement bon.

L’ambiance très amicale, le service attentif et la cuisine d’un niveau exceptionnel ont fait de ce 249ème dîner un des plus mémorables qui soient.

La maison Belle Epoque et ma chambre. Une table vivante

mon lit et la vue de ma chambre

la table du repas

mes outils d’ouverture

Magnum Champagne Perrier Jouët Belle Epoque 1989

Magnum Champagne Perrier Jouët Belle Epoque 1988

Traminer Trimbach 1962

Clos de la Coulée de Serrant Mme A. Joly Savennières 1962

Vosne Romanée Cros Parantoux Emmanuel Rouget 1996

Vosne Romanée Cros Parantoux Henri Jayer 1992

Vosne Romanée Cros Parantoux Méo Camuzet 1991

Magnum Champagne Perrier Jouët Belle Epoque 1982

Romanée Conti Domaine de la Romanée Conti 1967

Gewurztraminer Vendanges Tardives Hugel 1976

Château d’Yquem 1939

Les repas de conscrits reprennent vendredi, 7 mai 2021

Depuis le confinement, il n’y a eu aucune possibilité pour faire nos déjeuners de conscrits. L’occasion s’est présentée de faire un de ces déjeuners dans ma cave. Nous serons cinq au lieu de huit, les autres amis n’ayant pas la possibilité de venir. De bon matin j’ai ouvert les bouteilles pour qu’elles aient l’aération nécessaire. Aucun incident ne se produit. Le sauternes Domaine de la Forêt a une étiquette très peu lisible mais j’avais noté sur mes fiches son année, 1920. Illisible sur l’étiquette elle apparaît sur le bouchon. C’est bien un 1920, à la hauteur dans le goulot montrant qu’il n’y a pas eu l’ombre d’une évaporation et le parfum à l’ouverture est divin.

Les amis arrivent à des horaires décalés et nous commençons par la rituelle visite de cave. L’un des amis est un fan du champagne Delamotte aussi le premier vin que nous buvons pour l’apéritif est un Champagne Delamotte Blanc de Blancs 2007. Il a le charme des blancs de blancs de Mesnil-sur-Oger. J’ai voulu l’associer avec le Champagne Salon 2007 nous pas pour faire une confrontation mais plutôt pour faire une association. Je préfère qu’il en soit ainsi. Si l’on constate que le Salon est plus noble et plus précis, ce n’est pas pour déprécier le Delamotte que je considère aussi comme un grand champagne.

Nous avons de petits fours salés et nous continuons avec des sushis et des sashimis de saumon et de thon. Je sers alors le Chablis Premier Cru Fourchaume A. Regnard & Fils 1959. Mes amis sont émerveillés par la jeunesse et la richesse de ce grand chablis qui trouve avec le thon un accord magnifique. Quel grand chablis dont le finale riche de fruits est éblouissant.

Ma femme a préparé pour notre déjeuner un foie gras dont elle a le secret. Il est associé au Champagne Dom Pérignon 1973. Là aussi mes amis, peu habitués aux vins anciens, sont subjugués par l’énergie et la largeur aromatique de cet éblouissant champagne. Il est plus guerrier et conquérant que ce que j’attendais. Il est fruité, doté de belles bulles picotant agréablement le palais. L’accord est idéal.

Le Château Canon La Gaffelière Saint-Emilion 1959 est le seul vin rouge du repas, ce qui n’est pas habituel dans les déjeuners de conscrits. Il est absolument splendide, charbonneux, truffé, à la longueur extrême. Il faut dire que 1959 est une année qui en ce moment est au firmament. Il est intéressant de constater que le saint-émilion s’associe nettement mieux avec un fromage de chèvre qu’avec le saint-nectaire qui dans les livres lui conviendrait mieux.

Pour le Shropshire et le stilton, je sers maintenant le Domaine de la Forêt Sauternes Preignac 1920. Sa couleur est d’un or d’un acajou sombre. Son parfum envahit la pièce. Son goût luxuriant et charmeur est un bonheur absolu. Il est un peu sec, mais à peine, et conserve un fruit percutant. Il est parfait sur les fromages et brille aussi sur une tarte à la mirabelle.

Mes amis sont aux anges. Nous allons voter. Le Dom Pérignon a trois votes de premier et le sauternes en a deux. Le vote du consensus est : 1 – Champagne Dom Pérignon 1973, 2 – Domaine de la Forêt Sauternes Preignac 1920, 3 – Château Canon La Gaffelière 1959, 4 – Chablis Fourchaume A. Regnard & Fils 1959.

Mon vote est : 1 – Domaine de la Forêt Sauternes Preignac 1920, 2 – Champagne Dom Pérignon 1973, 3 – Chablis Fourchaume A. Regnard & Fils 1959, 4 – Château Canon La Gaffelière 1959.

Sur un menu extrêmement simple puisque je n’ai en ce local qu’un embryon de cuisine, on se rend compte que lorsque les vins sont de haut niveau, et ils le furent tous, on peut faire un repas de haute gastronomie. Le plaisir de revoir mes amis est doublé du plaisir de leur offrir une expérience gastronomique mémorable. Vive la vie qui revit.

un Dom Pérignon revenant d’Italie

le 1920 est très lisible sur le bouchon

Déjeuner aux accords audacieux sur le thème des sauternes samedi, 1 mai 2021

(les préparatifs de ce déjeuner sont racontés dans l’article qui est juste en dessous de celui-ci, à lire d’abord)

De très bon matin je vais acheter le pain pour le déjeuner et des fruits de la passion et des grenadelles. J’ouvre ensuite les vins du déjeuner. Le Château d’Yquem 1989 a un bouchon tellement comprimé dans le goulot que mon tirebouchon limonadier, malgré la possibilité de faire levier, n’arrive pas à remonter le bouchon. J’utilise alors le Durand, un tirebouchon qui combine un bilame et une mèche, ce qui permet de tirer facilement le bouchon.

Je vivrai un moment difficile avec le bouchon du Champagne Laurent-Perrier Grand Siècle sans année des années 60 et 70. Il est impossible de le faire tourner à la main aussi j’essaie avec un casse-noix. Le casse-noix ne peut pas faire tourner le bouchon tant le bas du bouchon semble collé au goulot. Avec un couteau mis entre le haut du goulot et la partie renflée du bouchon j’essaie de lever le bouchon, mais il réagit comme un caoutchouc, c’est-à-dire qu’il se lève puis se contracte. Ce manège dure une bonne dizaine de minutes et à un moment, tournant un peu plus fort que d’habitude, je vois que le bouchon se déchire en haut du goulot. Je sors le reste en usant d’un tirebouchon. Un début de pschitt apparaît et une légère brume de bulles émane de la bouteille. Ce fut périlleux.

Les amis et ma fille cadette arrivent et pour l’apéritif, nous buvons le Champagne Salon 2007 que j’avais ouvert hier. Il s’est merveilleusement élargi et montre une noblesse rare. Ce qui a des chances de devenir un rite à la saison des fraises, c’est de commencer l’apéritif par un accord fraises et champagne. Ma fille m’avait regardé avec des yeux incrédules, mais cet accord est divin.

L’accord suivant est celui du Salon avec un délicieux camembert. Et c’est aussi pertinent.

Je sers maintenant le Champagne Laurent-Perrier Grand Siècle sans année des années 60 et 70. Sa couleur est belle, légèrement ambrée. Les bulles sont visibles. Passant après le Salon, c’est une explosion de bonheur, de bouquets de fleurs et de paniers de fruits. Quelle richesse ! Ce champagne va accompagner des petits fours salés, une rillette, un jambon Pata Negra de bien belle façon.

Nous passons à table. Le premier plat est un poulet cuit au four à basse température. Le Château d’Yquem 1989 crée un accord absolument parfait. La continuité des goûts est idéale. L’Yquem combine une belle jeunesse et une grande maturité. Il apporte la fraîcheur mais aussi un équilibre de belles saveurs. Il n’est pas pesant mais convainquant.

Alexandre de Lur Saluces m’avait souvent dit d’associer Yquem et asperges et j’avais pu en vérifier la pertinence au château de Ferrières, propriété de l’Université de Paris, lors d’un colloque sur les accords mets et vins. L’asperge verte s’accommode de l’Yquem. Pour certains autour de la table, c’est avec la tête verte de l’asperge, plus douce, que l’accord se trouve alors que je préfère la queue blanche plus amère pour converser avec le sauternes. C’est une expérience qu’il fallait faire.

Pour le wagyu passé au four à basse température pendant quelques minutes pour chauffer le cœur, puis cuit comme un steak, j’ai choisi un Savennières Roche aux Moines Moelleux récolte du château de Chamboureau Cuvée Chevalier Buhard Pierre et Yves Soulez Viticulteurs 1989. Son nez est discret. Il m’évoque des coquilles d’huîtres et quelques vins de glace. Il hésite entre le moelleux et le sec et en bouche son attaque est fortement salée. Et c’est exactement ce qu’il faut pour accompagner la délicieuse et opulente viande bien grasse mais légère. L’accord est magnifique. Je suis tellement content d’en avoir eu l’intuition.

Les fromages sont un gouda de très longue maturation, un stilton et un Shropshire qui est comme un stilton mais à la couleur orangée. Nous pouvons essayer ces fromages soit avec l’Yquem soit avec le Château Suduiraut 1959 d’une puissance invraisemblable et d’une palette aromatique infinie. Le gouda est trop fort à mon goût et les deux autres fromages sont superbes pour le Suduiraut qui a la force pour les affronter.

Sur les grenadelles, l’accord le plus pertinent me semble être avec l’Yquem 1989, car le Suduiraut est très puissant. L’accord se trouve aussi avec le Savennières. Pour les fruits de la passion, c’est le Suduiraut qui est le plus adapté.

La tarte Tatin est si gourmande que les deux sauternes font jeu égal.

Je vais chercher une bouteille déjà ouverte depuis quelques mois d’un Madère qui est probablement d’une année autour de 1740, année estimée par la forme de la bouteille qui a été utilisée dans la première moitié du 18ème siècle. Nous en buvons chacun une goutte. Ce liquoreux offre des complexités transcendantales, tant les saveurs sont infinies et éternelles. Autant les sauternes furent brillants, autant ce vin est sur une autre planète.

Nous avons voté pour les vins du repas, le madère étant hors classement. Le consensus est : 1 – Suduiraut 1959, 2 – Yquem 1989, 3 – Savennières 1989, 4 – Grand Siècle, 5 – Salon 2007.

Mon classement est 1 – Suduiraut 1959, 2 – Yquem 1989, 3 – Grand Siècle, 4 – Savennières 1989, 5 – Salon 2007.

Ce repas sur un thème inhabituel fut une vraie réussite car tous les accords ont été pertinents et les vins se sont montrés superbes. Les accords les plus originaux sont la fraise et le Salon, le Savennières et le wagyu et l’Yquem avec les grenadelles. Il faut prendre des risques pour avoir des plaisirs nouveaux.

Symphony in blue

difficulté avec le bouchon, retiré avec le Durand

la couleur du Madère !!!

Préparatifs d’un déjeuner de sauternes vendredi, 30 avril 2021

Pour le déjeuner de mon anniversaire, des amis avaient apporté un Yquem 1989 qui n’a pas été bu, du fait de la profusion de vins. Il paraissait assez naturel que nous nous retrouvions une semaine plus tard, une nouvelle fois chez nous, pour goûter ce vin. Ma fille cadette se joindra à nous.

L’idée m’est venue que ce déjeuner soit un repas de liquoreux. On commencerait par des champagnes et ensuite, la voie serait libre pour les liquoreux. Nous avons discuté avec ma femme de ce que pourrait être le menu et j’ai cherché en cave de quoi composer un repas cohérent.

Tout est sur les rails et la veille du déjeuner, lorsque je rentre à la maison, je vois que ma femme a acheté un magnifique et imposant pavé de wagyu, parce que son boucher a eu l’occasion de s’en procurer. Ça change beaucoup de choses aussi décidons-nous de goûter ce soir le wagyu sur lequel j’essaierai un liquoreux. J’ouvre un Château Suduiraut 1959 à la couleur très foncée et au niveau parfait. Le vin embaume la pièce. Ma femme a préparé aussi des petites pommes de terre poêlées en fins disques. L’accord sauternes et pommes de terre est parfait. En revanche, même si la cohabitation entre la viande et le vin est possible, grâce au gras délicieux du wagyu, le sauternes est beaucoup trop fort et écrase la viande. Si l’on veut associer la viande avec un liquoreux, il faudra qu’il soit plus léger. J’en ai prévu un au programme.

A titre de vérification, j’ouvre le Champagne Salon 2007 normalement prévu pour l’apéritif demain. Le wagyu accepte le champagne mais il n’y aucune valeur ajoutée à leur conjonction.

Ma femme a acheté chez son marchand de fruits des fruits de la passion et des grenadelles qui ont la même forme que les fruits de la passion, à la peau lisse et jaune. Le fruit de la passion a une forte acidité que n’a pas la grenadelle plus douce. L’essai du Suduiraut avec le fruit de la passion est constructif, mais l’acidité est forte. L’accord avec la grenadelle est beaucoup plus séduisant car il se trouve en douceur. J’irai donc demain de bon matin acheter des grenadelles chez le marchand.

Ce repas et ces essais nous permettent de bâtir le programme du déjeuner de demain. Nous aurons, j’espère, de belles surprises.

Visite à la Maison Belle Epoque de Perrier-Jouët jeudi, 29 avril 2021

La semaine prochaine, le 249ème dîner se tiendra à la Maison Belle Epoque de Perrier-Jouët à Epernay où j’ai déjà eu la chance d’organiser le 236ème dîner. Ma visite de ce jour a deux objectifs : livrer les vins qui seront ouverts la semaine prochaine et mettre au point le menu avec le chef Sébastien Morellon.

Nous en avons déjà parlé au téléphone et Sébastien, qui a travaillé dans de grandes maisons et notamment avec Pierre Gagnaire, a préparé quelques plats dont je vais apprécier la pertinence avec les vins.

Avant de déjeuner avec Alexander, le responsable des opérations de prestige de son groupe, nous prenons, dans le bar joliment décoré, une (ou deux) coupes du Champagne Perrier-Jouët Belle Epoque 2013. Son attaque est extrêmement virile et puissante. Il devient beaucoup plus civil lorsque l’on croque de petites bouchées au parmesan. Il est encore trop jeune, mais promet de devenir un champagne expressif.

Nous déjeunons dans la cuisine pour pouvoir partager nos commentaires à tout moment avec le chef. Les langoustines sont superbes. La sole fourrée est d’une force extrême, comme je le souhaitais. Un des champagnes en intermezzo sera accompagné d’une galette de macaronis percutante. Le foie gras poché est remarquablement exécuté. Le ris de veau est gourmand.

Le repas a été accompagné aussi d’un Champagne Perrier-Jouët rosé 2013 dont le rose est particulièrement pâle. Sa jeunesse empêche de le trouver gourmand mais je pense qu’il le deviendra.

Dans une atmosphère extrêmement positive nous avons conçu un repas qui, je l’espère, mettra les vins en valeur. Sébastien m’a annoncé la venue « en renfort » d’un des chefs MOF qui seconde Pierre Gagnaire pour réaliser le repas. Quelle belle idée.

j’adore l’annotation d’Yvette Guilbert sur un tableau d’elle fait par Toulouse-Lautrec : « Petit monstre !! Mais vous avez fait une horreur !!  »

Une journée de vins variés passionnants dimanche, 25 avril 2021

Le déjeuner du lendemain d’anniversaire est celui où vont s’ouvrir des vins que j’ai choisis lors d’une promenade en cave. Dans une case j’ai vu deux vins de Bourgogne de la maison Poulet négociant à Beaune depuis de 18ème siècle. Je les prends. Continuant mon vagabondage je vois un champagne Hubert Paulet. La sonorité du couple ‘Paulet Poulet’ m’amuse. Voilà les trois vins qui feront l’ossature du repas.

Pour les bourgognes anciens j’ai demandé à ma femme un gigot d’agneau. De bon matin je m’apprête à ouvrir les vins et je vois que ma femme a acheté de magnifiques fraises. J’ai envie qu’elles servent de début d’apéritif et il vaudrait mieux un champagne jeune. Il y en a un au frais.

Les bouchons des deux bourgognes viennent sans problème même s’ils se déchirent. Les parfums sont particulièrement engageants. J’ouvre ensuite le Champagne Hubert Paulet 1947 dont le haut du goulot est sale. Le bouchon se cisaille et je suis obligé de tirer le bas du bouchon avec un tirebouchon. Le parfum fait un peu vieux mais plaisant. Il y a même un embryon de pschitt.

Au moment de l’apéritif que nous prenons dans le jardin, du fait d’un soleil quasi estival, j’ouvre le Champagne Veuve Clicquot La Grande Dame 2004 à la belle couleur de jeunesse. Avec les fraises que l’on découpe en morceaux pour les marier au champagne, l’accord est entraînant. Un ami me demande d’où m’est venue cette idée. J’avais noté que fraise et champagne cohabitent dans la fraîcheur et l’idée de commencer ainsi un repas me plait.

Je sers maintenant le Champagne Hubert Paulet 1947 vigneron à Rilly. La couleur est beaucoup plus claire que ce que j’attendais, la bulle est belle. On sent que le champagne a un peu vieilli, mais il offre une personnalité et des complexités qui le rendent passionnant, beaucoup plus porteur d’émotion que le jeune Veuve Clicquot, encore puceau. Sur une tarte à l’oignon dont l’oignon a gardé de la sucrosité, l’accord avec le Paulet est superbe. Il en est de même avec une belle rillette et du fromage de tête.

Nous passons à table et le champagne de 1947 continue son parcours gagnant avec un délicieux foie gras préparé par ma femme.

Le Pommard Maison Poulet Père & Fils 1959 a une couleur très jeune et un nez expressif et délicat. En bouche il est raffiné, alors qu’il ne s’agit que d’un pommard générique. J’avais relu mes notes des Poulet que j’avais déjà bus. J’avais été souvent heureusement surpris. C’est encore le cas aujourd’hui.

Le Beaune-Teurons Premier Cru Sieurs Germain Poulet Père & Fils 1964 est très différent du 1959. Son parfum est plus viril et sa bouche puissante est plus noble que celle du pommard. Le premier est plutôt féminin, comme peuvent l’être les pommards, et le Beaune est plus masculin et c’est lui qui emporte nos faveurs car il est particulièrement brillant.

Ces deux vins jouent dans la cour des grands, le 1964 étant d’une qualité très élevée et d’une finesse remarquable, tant sur l’agneau que sur la purée de pomme de terre et céleri, délicat accompagnateur des vins.

J’avais envie d’ouvrir une bouteille rare de ma cave et je vais l’ouvrir maintenant, au moment du dessert. C’est un Rhum de Cayenne 1867. La bouteille a perdu beaucoup de son volume. Le bouchon a dû être recouvert d’une fine cire, quasiment disparue. Au lieu de pointer un tirebouchon dans le liège je coupe au couteau la partie de bouchon qui dépasse du goulot. Le bouchon qui reste glisse dans le goulot. J’essaie délicatement de piquer ce bout de bouchon, qui glisse et finit pas tomber dans le liquide. Je carafe pour récupérer le bouchon et remettre l’alcool dans son flacon d’origine.

Le parfum de ce rhum est d’une puissance incroyable. On sent le fût et l’alcool. Le liquide est clair. En bouche le premier contact montre que le rhum est un peu éventé, mais rapidement sa richesse apparaît. Il est beaucoup plus sec qu’un rhum habituel, mais il a une énorme personnalité. Quelle présence. Son bouchon embaume à des mètres et des mètres.

Ma femme avait prévu un gâteau au chocolat moelleux. L’accord se trouve facilement du fait du caractère très sec de l’alcool. Boire un alcool de cet âge aussi vivant et profond est un régal.

On se repose l’après-midi, car les agapes recommencent ce soir. En milieu d’après-midi j’ouvre un Château Léoville-Poyferré 1959 au niveau de très haute épaule. Son bouchon vient facilement et le parfum assez discret montre la belle densité de ce vin.

L’apéritif se fera avec un Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en mai 2017, au moment où nous élisions un nouveau Président de la République. Le pschitt est sensible, la couleur est claire et dès la première gorgée, on sent que ça ne va pas, le champagne est acide et trop court. C’est étonnant car jamais ce grand champagne n’est apparu sous un tel jour. Qu’est-il arrivé, nous ne saurons pas.

A table nous goûtons un paleron aux carottes fondant et gourmand. C’est le pommard 1959 qui accompagne le mieux ce plat, mieux que le Beaune-Teurons 1964. Le Château Léoville-Poyferré 1959 a du mal à exister à côté des deux bourgognes, plus flexibles pour accompagner le plat. C’est sur un fromage Selles-sur-Cher que le Saint-Julien va donner toute l’étendue de ses qualités. Il est riche, large et précis, intense avec des notes de mine de crayon. Il fallait vraiment en profiter lorsqu’il est servi seul.

La tarte à la poire, joyeuse et gourmande devait donner la réplique à un Yquem 1989. D’un commun accord nous avons décidé de ne pas l’ouvrir, car nous avions déjà, fort amplement, obéi aux ordres de Bacchus.

En cette journée, la plus belle du printemps jusqu’à présent, nous avons célébré l’amitié avec des vins d’un grand éclectisme.

J’ai eu l’occasion le lendemain de goûter le Château Léoville-Poyferré 1959. Une éclatante transformation l’a rendu d’une richesse exaltante.

les fraises sont délicieuses avec le Veuve Clicquot

Champagne d’anniversaire vendredi, 23 avril 2021

Pour mon anniversaire j’ouvre un Champagne Dom Pérignon 1983. De jolie couleur, avec un pétillant marqué, ce champagne n’est que du bonheur, ample, joyeux et racé. Un fromage de tête crée un accord parfait et une petite soupe à la fraise l’accueille gentiment.