Le lendemain c’est Olivier Bernard et sa ravissante épouse qui accueillent au Domaine de Chevalier. L’ambiance est radicalement différente car les vignerons de cette soirée sont regroupés en « le Xème tour de France des appellations », groupe qui s’est réuni pour la première fois en 1985 et fête aujourd’hui son 21ème anniversaire. On quitte la sphère bordelaise pour visiter sur la pelouse toutes les régions françaises, avec ce qui se fait de mieux dans chaque appellation, où seules des maisons familiales sont représentées. Il doit y avoir un ange qui veille sur les soirées vineuses, car hier et aujourd’hui le ciel est clément. Une ondée passagère rafraîchira la dernière partie du dîner mais sans rien perturber, l’apéritif se tenant sous un soleil rasant, perçant les arbres du petit bois que l’on arpente pour discuter avec une assemblée au moins aussi cosmopolite que la veille. Je serai à une table où l’on vient de Las Vegas, de Djakarta et de Shanghai. Mon voisin de Shanghai distribue des vins français mais aussi les fromages de Bernard Antony, le célèbre fromager.
(on lit : 300 cl)
Pendant l’apéritif sous les bois, on peut déguster des vins de tous ces producteurs et je suis très sensible au vin blanc Esprit de Chevalier 1992 servi en double magnum, vin doré dont la maturité est reposante. Pressentant que l’offre de vins à boire serait redoutable, c’est surtout le champagne Pol Roger qui m’accompagne en ce début de soirée, mais quand on voit sur table un Sassicaïa 1996, il est assez difficile de résister. De délicieuses victuailles réparties en stands sont offertes, dont un Jabugo de compétition.
(le souriant Alphonse Mellot était présent)
Le dîner assis n’est pas placé aussi je suis le sillage de Gil et Christine, amis de Las Vegas, pour me retrouver à cette table agréablement exotique où mes voisins sont tous maîtres d’une commanderie de Bordeaux quand je suis simple soldat. Les vins pour cinq cents personnes sont accessibles à un immense stand où s’organise une joyeuse cohue car dans ces cas-là, ce sont évidemment les vins les meilleurs qui s’arrachent les premiers. Je profiterai donc du Sassicaïa 1996 au charme puissant, lourd mais très équilibré, surpassé ce soir pour beaucoup de mes voisins par le Guidalberto 2004 qui est une bombe de cassis. Il est évident que ce vin est grand mais très éloigné de mes penchants. J’ai en revanche une émotion plus grande avec l’Hermitage La Chapelle Jaboulet 1983, joliment subtil et suggestif qui se marie à merveille à une goûteuse poularde. Le Pouilly- Fuissé Château de Fuissé vieilles vignes 1999 en jéroboam est très adapté à la profusion de fromages de Bernard Antony découpés dans les chais. Le Pinot Gris Windsbuhl vendange tardive Zind-Humbrecht 1994 est toujours aussi précis.
Comment finir un tel festin mieux qu’avec un champagne Pol Roger cuvée Winston Churchill 1996 ? Ce champagne racé, bien défini, est grand. Un petit orchestre a accompagné l’apéritif et le dîner, devenant plus présent quand il s’est agi de danser. Olivier Bernard et son épouse, d’une bonne humeur communicative, ont fait de cette soirée un moment chaleureux amical où les échanges avec des professionnels de tous les pays se sont faits avec le sourire. L’efficacité bordelaise sans doute.