Au bout du fil : « François, j’ai deux cigales ». Ma réponse : « d’accord, ce soir ». Nous arrivons par un soir d’été magnifique chez Yvan Roux. Voici notre table, face à la presqu’île de Giens.
Pas de Pata Negra pour le Laurent Perrier Grand Siècle. Que se passe-t-il ? Nous aurons quelques compensations. Ce sont d’abord trois petits cigalons à la chair intense, qui excitent bien le champagne. Puis une petite friture de poissons délicieux, pour lesquels le champagne est un accompagnement naturel. Ce sont ensuite de belles girelles dont la chair est très neutre, voire un peu fade. Ce sont ensuite des anémones de mer pour lesquelles je cherche encore le vin qui se marierait bien. J’ai peur qu’un Banyuls n’écrase les anémones. Est-ce plutôt un vin rouge charnu ? Il faudra essayer. Les entrées allaient-elles finir ?
Yvan nous fait goûter un essai : des œufs brouillés aux anémones. L’évidence est criante, seul un champagne peut accompagner ce goût subtil, tout en étrangeté.
Pour les cigales au goût très pur, fait d’une mâche intense et d’une fraîcheur presque mentholée, c’est un Bastor-Lamontagne, sauternes 1995 que j’ai apporté. Bu seul, ce sont le caramel et le pain d’épices qui dominent. Avec la cigale, la continuité est assez spectaculaire. Et comme avec l’Yquem d’un essai récent, ce qui frappe, c’est qu’au-delà de la continuité, le sauternes respecte la chair de la cigale qui reste présente en bouche, sans aucune altération. La mise en valeur est concluante.
Une glace vanille avec des copeaux de pain d’épices vient apaiser un festin de haut niveau. Face à une mer calme sillonnée par des hélicoptères en quête d’on ne sait quoi, sous un ciel dégagé qui miroite d’étoiles, il fait bon vivre de produits de la mer judicieusement traités.