L’EDHEC, grande école commerciale de Lille et Nice invite des représentants de grandes entreprises au Press Club de France à Paris. Dans un salon aux lambris dorés, Alexandre de Lur Saluces, ancien élève de cette école, présente les vins de son vignoble : Château de Fargues. Lorsqu’il avait fait une présentation de ses vins à l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm, il m’avait demandé d’être à ses côtés pour parler de vins anciens. Cette soirée s’était bien passée aussi Alexandre m’a gentiment offert de recommencer notre duo.
Le Comte de Lur Saluces donne des indications sur l’histoire, les vignes, le botrytis et nous commençons à goûter les vins dans l’ordre chronologique ce qui n’est pas évident. Le Château de Fargues 2001 a un nez intense. Il évoque avec une évidence criante l’abricot confit et le coing. Il est plein en bouche et son final est assez court. Le sucre est très apparent, ce qui s’estompera avec le temps. Ce vin est riche de promesse et on sent en lui un parfum d’éternité. Mais contrairement au Château d’Yquem 2001 qui est impérial dans sa prime jeunesse, le Fargues devra attendre encore quelques années pour devenir ce qu’il promet.
Le Château de Fargues 1997 affiche d’emblée un accomplissement plus abouti. Il est moins chien fou. Son année est toute en finesse avec moins de fruits confits et plus de fruits blancs. On sent une légère pointe de poivre. Le final est beaucoup plus élégant et persistant que celui non encore formé du 2001.
Le Château de Fargues 1988 a une robe plus foncée. Le nez est un peu plus fermé mais riche. En bouche il est d’une belle ampleur. Il est plus cousin du 2001 que du 1997. Le final est superbe, riche et glorieux. C’est un très beau vin aux fruits très dorés. Son final est magnifique.
Le Château de Fargues 1986 a un nez plus discret. Le vin est plus effacé et plus limité. C’est pour lui difficile de passer après le 1988. Il est bien sûr globalement plaisant et frais, mais moins élégant dans ce registre que le 1997. Mon classement serait : 1988, 1997, 1986, 2001 ce qui ne préjuge en rien du potentiel de ces vins mais de leur prestation de ce soir.
Entre deux commentaires d’Alexandre, je parle de vins anciens et de gastronomie ce qui intéresse manifestement l’auditoire, la vedette restant aux beaux vins de Fargues.
La direction de l’Edhec remercie l’audience qui se sépare et nous invite à un repas en petit comité dans une jolie salle à manger, aux mêmes lambris dorés. Le menu, conçu pour le vin de Fargues et joliment réalisé par la cuisine du Press Club est : marbré de foie gras, compotée de figues au coulis de balsamique / Albarine de volaille, pommes de terre rissolées et champignons, sauce au sauternes / le blanc-manger à la cannelle, poire rôtie.
Sur ce dîner, le Château de Fargues 2000 est assez léger et je lui ai trouvé un cousinage très fort avec Yquem 2002. Le Château de Fargues 1990 est absolument splendide, glorieux, et ce sera pour moi le vin de la soirée. Riche, épanoui, joyeux, il profite d’être présenté au cours d’un repas, ce qui change d’une dégustation avec de petits canapés. Le dessert convole bien avec le Château de Fargues 1986 que nous avions déjà bu dans la grande salle.
Mes avis sur les accords mets et vins ne coïncident pas toujours avec ceux d’Alexandre, ce qui rend nos échanges passionnants. Une très belle soirée en hommage à l’un des plus beaux sauternes, fait par un vigneron de talent qui a apporté beaucoup à Yquem et à Fargues.