Un dîner où j’étais invité. Voulant faire plaisir à mes hôtes, j’ai apporté trois vins – ce qui n’était pas prévu – mais qui ont trouvé une place de choix avec une succulente cuisine : un Monbazillac non daté, mais certainement récolté vers 1950 succulent, doré, rond liquide puis s’épanouissant bien en bouche, gras, et avec une profondeur et une persistance très grande. Sur un foie gras aux figues, une merveille de combinaison. Le grand vin, ce fut un Montrachet 1945 de chez Roland Thévenin : couleur or cuivré et ambré, nez très large, des agrumes, des épices, des fruits. Une large palette aromatique en bouche et une longueur inimaginable. Une acidité qui est le signe de la race et de la puissance à long terme, mais qui ne gène en rien la dégustation. Une marque de jeunesse extrême, une absence totale de madérisation; un vrai grand et exceptionnel vin blanc de fraîcheur, charme et jeunesse, qui subjugue par la richesse des arômes complexes. Sur un imposant bar de ligne, le mariage était une évidence : rien ne pouvait s’unir mieux que ce poisson et ce vin sublime. Ensuite, un château Despagne Graves 1962 : une étrangeté absolue. La couleur est dorée comme un vieux Sauternes de cet âge, et en bouche il évoque les premières côtes de Bordeaux, les Langoiran, les très bons Romanée, mais jamais un Graves. Et même pas en tête l’idée que ce pourrait être un vin madérisé. Non, un chatoyant Bordeaux liquoreux léger, avec cette subtilité, cette finesse exceptionnelle de raffinement simple. Sur une fourme, puis sur des entremets caramélisés, l’association était parfaite. Cette bouteille sera sans doute photographiée pour le musée sur le site www.wine-dinners.com du fait de l’étrangeté de son goût exceptionnel.