A chaque nouveau millésime prêt à être commercialisé, Didier Depond, président des champagnes Salon et Delamotte invite quelques amis à Mesnil-sur-Oger pour découvrir le nouvel enfant. Aujourd’hui nous sommes une dizaine à nous retrouver pour célébrer le Champagne Salon 1999 qui est seulement le 37ème millésime du siècle, car la stratégie de Salon a été de ne millésimer que les grands millésimes, et c’est le dernier du 20ème siècle, puisqu’il n’y aura pas de Salon 2000. Dans la magnifique et moderne salle de dégustation, nous trinquons sur le Champagne Delamotte sans année, fait avec des vins de 2005 des trois communes Mesnil-sur-Oger, Cramant et Avize. Ce champagne est très agréable et je fais rire le sous-préfet invité en disant que c’est un champagne de soif. Car ce champagne se boit avec un grand plaisir et une grande facilité. Je le trouve très pur.
Nous passons à table et sur le menu il y a ce titre : "entre privilégiés" sous un dessin très "années vingt". Et cette réunion très informelle rassemble des amis de Didier de tous horizons ayant un point commun, l’amour du vin et l’amitié avec Didier Depond.
Le Champagne Delamotte 2002 est un agréable champagne qui joue dans la cour des grands, mais qui ne représente pas un saut gustatif majeur par rapport un non millésimé dont j’avais apprécié la personnalité. Celui-ci est très bon, et satisferait plus d’un amateur. Il accompagne un marbré de canard et foie gras aux fruits secs, puis un risotto virtuel de homard et Saint-Jacques au citron vert. Nous goûtons ce champagne sur trois verres différents qui montrent l’effet évident de la forme sur l’intensité gustative. Un verre à vin assez banal freine le champagne. Certains préféreront le verre à vin assez haut et resserré sur ses bords, alors que je préfère le verre tulipe. Mais pour le 1999, le verre à vin sera de loin celui qui rend le champagne le plus expressif.
Si l’emphase n’accueille pas le 2002 autant qu’il le mériterait, il faut dire que nous attendons avec impatience le Champagne Salon 1999. Une chose est à noter : quand un millésime n’est pas encore à son avantage, Didier fait un petit couplet destiné à l’expliquer. Aujourd’hui, l’absence de commentaire d’introduction est le signe qu’il s’agit d’un grand. Ce qui frappe, c’est l’équilibre de ce champagne. Il est assis, solide, bien planté sur ses jambes. Il est fruité, il a des accents de pâtisserie, et n’a pratiquement aucun aspect citronné.
Sur la poularde de Bresse aux morilles l’accord est spectaculairement bon. J’en suis tout retourné. Didier nous dit que ce 1999 lui évoque le 1982 que je trouve pourtant plus romantique. Il m’évoque plutôt le 1988. Mais Didier a sans doute raison.
Nous continuons sur la viande avec un Corton Grand Cru Clos des Cortons Faiveley Domaine Faiveley 2007 au nez incroyablement puissant et séducteur. Le vin a une couleur à la fois claire et grise, et en bouche il est remarquablement bon. Mais il ne trouve sa place ni avec la poularde ni avec le vieux comté. Il se boit avec plaisir et pour lui-même.
Pour la tarte tiède aux pamplemousses, Didier a prévu un vin surprise sans étiquette qui se boit en magnum. Il s’agit d’un Salon, cela ne pose pas trop de problème, et je n’ai pas le souvenir d’avoir bu cette année encore inconnue. Le suspense ne dure pas longtemps et j’ai bu ce millésime il y a moins d’un an. Il s’agit du Champagne Salon 1971. La couleur commence à s’ambrer un peu, la bulle est d’une force impressionnante et le goût est extrêmement envahissant. C’est un champagne de quarante ans qui n’en paraît même pas vingt. Il est particulièrement bon. Il a des notes d’agrumes, de fumé, et sa longueur est extrême. Un très grand champagne.
Nous sommes fiers d’avoir porté le 1999 sur les fonts baptismaux et heureux d’avoir bu un 1971 d’un accomplissement qui justifie la légende Salon.