Nous accueillons depuis quinze jours quatre puis trois de nos petits enfants dans le sud. Le week-end du 14 juillet, fille et gendre viennent retrouver leur couvée. C’est un court passage de leur part, mais il faut fêter cela. A déjeuner, un Champagne Dom Pérignon 1998 est ouvert. Immédiatement nous sentons que le gamin souvent bu l’an dernier à notre table estivale a pris du poil au menton. La couleur s’est à peine dorée. C’est en bouche que l’évolution est sensible. Le champagne a perdu ses fleurs blanches pour devenir plus vineux, et cela lui va bien. Alors que je le trouvais depuis quelques mois dans une phase de renfermement, il est sorti de sa retraite et ne procure que du plaisir. Bravo.
C’est un Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 qui lance le dîner. La race, la grandeur, la complexité, tout est là. C’est un champagne carré, assis, notable. Notre fournisseur de poutargue a changé, et sa poutargue n’est pas aussi typée qu’avant. Le champagne n’y trouve pas son compte, se sentant rétréci, alors qu’avec du lomo, saucisson de Pata Negra, le Pol Roger prend un véritable coup de fouet. Sur un Pata Negra de quatre ans de séchage, le petit goût de noix et le gras propulsent le Winston Churchill à des sommets merveilleux. Le champagne est très long, complexe, de grand raffinement. Rectitude et plénitude sont ses deux qualités. On a donc deux oppositions de style avec le Dom Pérignon, le 1998 étant plus vineux et très élégant, alors que le 1996 est plus complexe et plus noble.
Sur un loup juste saisi à la plancha, c’est un Château de la Gardine Chateauneuf-du-Pape 1989 qui est ouvert. Instantanément, c’est une bouffée végétale du sud qui nous envahit. Je reconnais le fenouil, le romarin et un poivre bien assorti. Ce vin est joyeux et fait crisser les cigales dans nos cœurs. Il est velours, on se sent bien. Il n’est pas tonitruant, mais un vin de grand plaisir, une belle surprise. Il montre à quel point il fait savoir attendre ces vins chauds, car il n’a plus la moindre aspérité, il est doux, plaisant, convivial. C’est exactement ce qu’il faut pour un loup à la chair si précise. Ce dîner est un coup d’envoi des futures vacances de nos enfants.