La troisième Master Class à laquelle j’assiste est le point culminant de cette manifestation, qui s’intitule "le Génie du Vin". Comme pour la précédente Master Class, un tel événement ne serait pas possible sans l’amitié qui lie les vignerons présents avec Michel Bettane et Thierry Desseauve.
Le Champagne Krug Clos du Mesnil 2000 est d’un jaune d’or déjà joli. Le nez est discret. L’attaque est très belle. La bulle est active mais sans agressivité. Le charme est extrême et l’élégance est rare. C’est le meilleur des Clos du Mesnil 2000 que j’ai bus. Il y a des fruits jaunes et du lacté, le tout étant en nuances.
Le Chevalier-Montrachet Bouchard Père & Fils 1998 est présenté par Christophe Bouchard. Le nez est très puissant et on note encore un peu de soufre. L’attaque est très généreuse. Le vin est très noble, avec du poivre, du tabac et du citron confit. Le vin est opulent, avec une belle tension et une belle acidité. Il est extrêmement plaisant, gourmand grâce à son équilibre. Michel Bettane insiste sur la réussite de ce vin dans un millésime difficile pour les blancs. La race et la subtilité de ce vin me plaisent.
Le Beaune 1er cru Clos des Fèves Chanson Père & Fils 2009 est présenté par Jean Pierre Confuron qui indique que son domaine appartient à Bollinger depuis 1999. Le nom "Fèves" veut dire "hêtres". Le vin est d’un joli rouge clair. Le nez est de feuille de cassis, assez rêche, sans aucune opulence. La bouche est un peu sévère, puritaine, mais intéressante. Le vin est rêche, asséchant mais j’aime son authenticité car il ne cherche pas à séduire. Le vin recherche l’élégance, la retenue. Il sera très brillant dans vingt ans. La vinification en grappes entières explique le goût râpeux et promet un vin de longue garde. C’est un vin très bien fait, élégant, net et pur que l’on boira avec bonheur dans vingt ans.
Le Château Palmer 1989 est présenté par Thomas Duroux. Il a un nez à se damner, d’une race extrême et d’une grande force de conviction. La bouche est moins opulente que le nez. Le final est un peu court. Je suis un peu étonné qu’il ne soit pas plus tonitruant, car c’est une grande réussite de Palmer. Thomas Duroux dit qu’il estime que 1989 aura plus d’avenir que 1990. Thierry Desseauve parle de suavité et de toucher de bouche. Il se pourrait que j’aie eu une bouteille plus fermée que d’autres.
La Côte Rôtie La Turque Guigal 2005 est présentée par Marcel Guigal. Il nous dit que lorsque l’on plante des piquets en terre et qu’on attache une planche transversale, on parle d’une turque. Il pense que ce pourrait être l’explication que personne ne connait vraiment. Je croyais qu’il s’agissait de la forme de l’ombre que crée le soleil sur la parcelle, celle d’un croissant qui avait suscité ce nom. Le nez du vin est d’une richesse folle, de cassis et de poivre. L’attaque est très belle, et la finale est gourmande. Il y a beaucoup de tannins. Il y a une belle richesse joyeuse et une fraîcheur mentholée. Son élégance est extrême.
Le Château de Pibarnon Bandol 1998 nous est servi en mathusalem. Les participants fort nombreux ont tous la même bouteille à boire. Eric de Saint-Victor présente ce vin au nez très discret mais chaleureux, de grande douceur. Le vin a une attaque très ensoleillée et son final est beau. Le vin tannique est généreux et de belle matière. Il est élégant et un peu râpeux. C’est un vin très agréable. Michel Bettane parle de la noblesse du mourvèdre. C’est un très beau vin de gastronomie, de belle richesse en bouche qui va bien vieillir.
Le Vega Sicilia Unico 1994 est présenté par Javier Ausas en la présence de Pablo Alvarez qui comprend assez mal le français. Sa présence est une grande preuve d’amitié pour les animateurs du Grand Tasting. Le vin a un très joli nez et une attaque noble de grand vin. Pour une fois, je préfère le Guigal, car le Vega est vineux. Le Guigal est dans le fruit et le Vega est plus dans le bois, ce qui est plutôt inhabituel. Michel Bettane me dira plus tard qu’il a eu une bouteille meilleure que la mienne, d’après mes descriptions. Le Vega est plus pénétrant que la Turque, mais je préfère celle-ci.
Le Vouvray Clos Naudin 1989 est présenté par Philippe Foreau, le magicien du vouvray. Le nez est d’une grande pureté, avec de la mangue confite, du coing, de l’orange et du zeste d’orange. La couleur est magnifiquement dorée. Ce vin profond, lourd, pénétrant est du pur plaisir. Philippe Foreau parle de silex, de truffe, de coing et de noyau de datte. C’est surtout la fraîcheur du final qui est confondante. L’acidité donne de l’énergie au vin très gastronomique.
Cette présentation de vins immenses est certainement un des plus grands moments de toutes les manifestations publiques sur le vin.