Le soixantième anniversaire du domaine Méo-Camuzet et le trentième anniversaire de la présence de Jean-Nicolas Méo à la tête du domaine se fêtent au château du Clos de Vougeot. Jean-Nicolas a tenu à ce qu’à côté de la célébration de ces deux anniversaires on se tourne aussi vers l’avenir. Parmi tous les jeunes qui ont participé aux vendanges au domaine, certains sont devenus vignerons et dans une grande salle du château une cinquantaine de ces ex-stagiaires présentent leurs vins. J’ai pu goûter de jolis vins de Nouvelle-Zélande, d’Australie, de Saint-Chinian, des Hautes-Alpes et de bien d’autres régions. C’est sympathique de commencer la soirée par cette dégustation.
Parallèlement, le domaine a créé un prix de la jeune création artistique qui couronne des étudiants de l’école nationale supérieure d’art de Dijon pour des réalisations artistiques de leurs visions du patrimoine immatériel de la Bourgogne et de la permanence du terroir. On pouvait donc tout en passant de stand en stand de vin contempler de belles œuvres. Au cours du dîner un prix sera remis de la jeune création artistique 2019 à une artiste qui a créé sept tableaux vidéos réalisés avec l’équipe de Méo Camuzet, visibles dans l’une des salles du château.
Le dîner se tient dans le grand cellier cistercien du château de Clos Vougeot. Il y a dans l’assistance qui remplit la salle, la famille Méo, tout le personnel du domaine, des importateurs de tous les pays, la presse, des clients et des amis. On peut imaginer qu’il y a plus ou moins trois cents personnes. Les chants folkloriques et les bans bourguignons vont égayer la soirée, qui sera entrecoupée de quelques discours, souvent émouvants ou joyeux, de Jean-Nicolas Méo et parfois de ses trois fils.
Le menu du dîner très traditionnel est : le pressé de joue de bœuf à la royale / les œufs en meurette bourguignonne / le carré de veau fermier à la cazette du Morvan / les bons fromages de Bourgogne et de Franche-Comté frais et affinés / le macaron pistache et fraise, crème glacée au lait / les petits fours.
Le premier vin sur la joue de bœuf est le Pinot Noir
Domaine Nicolas-Jay Willamette Valley Oregon 2015. J’ai d’abord cru qu’il s’agissait du vin d’un des stagiaires puisque la dégustation était cosmopolite mais en fait c’est un vin résultant de l’installation de Jean-Nicolas et de Méo-Camuzet en Oregon. J’avoue que je me sens perdu devant ce vin pour lequel je n’ai aucun repère. Il est neutre, peu complexe et sans aspérité. Je suis incapable de le définir. Jean-Nicolas nous dit qu’il est en train d’apprendre ce domaine.
Le Nuits Saint-Georges Aux Boudots Domaine Méo-Camuzet 2005 marque un saut qualitatif certain. Il a de la présence, il est riche et équilibré et même si l’œuf en meurette n’est pas le meilleur des compagnons, il montre une très belle longueur. Il est gourmand et de belle vibration.
Le Clos de Vougeot Domaine Méo-Camuzet 1993 a eu des fortunes diverses aux différentes tables, certaines bouteilles étant incertaines, dont une à ma table. Fort heureusement mon verre est parfait. Il se trouve que le vin de Méo-Camuzet qui m’a le premier enthousiasmé, première rencontre avec ce domaine, est le Clos de Vougeot 1991. D’une année qui n’était pas au firmament, ce vin m’avait conquis. Je retrouve un peu ce sentiment avec ce 1993 dont on voit bien qu’il n’a pas une grande puissance, mais compense par sa noblesse.
Le Vosne-Romanée Aux Brûlées Domaine Méo-Camuzet magnum 1996 marque un nouveau palier dans le registre des sensations, alors que c’est un Premier Cru qui succède à un Grand Cru. Servi à température idéale, ce vin est d’une fraîcheur exceptionnelle. Et cette fraîcheur ne quitte jamais mon palais. Le vin est fluide et délicieux. C’est un vrai bonheur, un vin ciselé.
Dans notre programme le vin suivant est intitulé : « Climat surprise servi en Mathusalem ». L’étiquette manuscrite de ce grand flacon indique : Echézeaux 1976 mis en mathusalem pour Mme Jean Méo par Henri Jayer Viticulteur à Vosne-Romanée. Quel cadeau que font Jean et Nicole Méo, les parents de Jean-Nicolas, car une telle bouteille est un trésor de mémoire de la vinification de ce grand personnage qu’est Henri Jayer. Pour le nombre de convives les portions sont petites mais on peut s’imprégner du vin qui est éblouissant. Il faut longtemps humer ce parfum complexe d’un vin marqué par l’âge avec des notes de vieux bois. La complexité se retrouve en bouche et pousse au recueillement. Infiniment divers avec des évocations de vieux bois marin, il est d’une persuasion incroyable, long et d’une persistance aromatique infinie. Ses amertumes sont divinement équilibrées. On se recueille devant ce vin et son parfum restera présent dans le verre vide pendant longtemps. C’est un instant de bonheur magique, sublimé par la générosité de nos hôtes. Il faut du temps pour s’en remettre.
Les fromages permettent de revenir aux vins précédents, toujours aussi bons. Le dessert arrive et je vois que l’on sert le café alors qu’il était prévu que l’on boive le Champagne Bérêche et Fils Brut Réserve. L’absence de coordination du service des mets et des vins est étonnante de la part des équipes connues pour leur efficacité. Le champagne bu longtemps après que l’on a fini le dessert perd un peu de sa justification.
Un marchand de vins lyonnais truculent Georges dos Santos m’a fait goûter à sa table un Porto Gonzales & Byass 1810 délicieux et suave et un Porto Niepoort Vintage 2017 succulent et riche, promis au plus bel avenir dont Georges est amoureux.
La soirée a été marquée par une atmosphère très familiale et humaine. Jean-Nicolas a fait participer ses trois fils aux présentations et nous a fait connaître tous les membres qui travaillent au domaine en donnant de chacun un portrait flatteur. Au milieu des chants entraînants et des bans bourguignons, nous avons pu nous imprégner de cette belle histoire humaine. Merci au domaine Méo-Camuzet et merci de cet incroyable cadeau d’un vin d’Henri Jayer d’une émotion extrême.
atmosphère de gaieté
et le sublime mathusalem
et les vins de mon ami Georges dos Santos