J’arrive à 13h30 au château de Saran à Chouilly pour ouvrir les vins du dîner. Si je suis en avance, c’est parce qu’à 16 heures, nous aurons une dégustation de Dom Pérignon à Hautvillers. Je commence les ouvertures. Beaucoup de bouchons vont se sectionner, sans que des miettes ne tombent dans le liquide. Le parfum du Y d’Yquem 1985 et beaucoup plus intense que celui du Montrachet Domaine de la Romanée Conti 2001 ce qui est inattendu.
L’objet de tous mes soins est le Château Haut-Bailly 1900. La bouteille vient de la cave de la maison Nicolas, qui a mis une étiquette spéciale pour une vente caritative organisée pour le sauvetage de Venise en 1972. Il est donc probable qu’elle ait été reconditionnée pour cette vente. Le niveau est beau et le parfum est superbe.
Le plus beau parfum est celui du Château Guiraud 1893, au bouchon d’origine, au niveau parfait et à la couleur rose orangée plutôt claire pour ce millésime, ce qui n’a pas atténué la puissance des fragrances infinies.
Marco Fadiga le chef du château m’a préparé un petit casse-croûte. Tout me semblant en ordre, je me dirige vers Hautvillers où nous serons reçus par Marie-Philomène qui nous fera visiter l’église d’Hautvillers, où reposent Dom Pérignon et Dom Ruinart et nous racontera des anecdotes de la vie du moine visionnaire, Dom Pérignon.
Daniel Carvajal Pérez est un jeune colombien qui travaille avec Vincent Chaperon, le chef de caves de Dom Pérignon. Il est responsable du patrimoine œnologique. Il va mener notre dégustation avec beaucoup de talent et d’empathie.
Le Champagne Dom Pérignon 2010 a un nez superbe et une bulle fine. Le nez est racé, salin, avec un peu de floral. Il se caractérise par sa grâce, sa finesse et sa générosité. Son finale est frais comme un bonbon anglais.
Nous avons côte à côte le Champagne Dom Pérignon 2002 d’origine et le Champagne Dom Pérignon P2 2002, dégorgé il y a environ cinq ans (P2 voulant dire deuxième plénitude, dégorgé généralement une quinzaine d’années après la version d’origine). Le 2002 d’origine, appelons-le P1 est fabuleux, plus que le P2. Le P1 est glorieux et le P2 est très élégant. Daniel estime que le P2 vieillira mieux ce qui donne lieu à des discussions passionnantes et souriantes, parce que je ne suis pas de son avis.
Ensuite le Champagne Dom Pérignon P1 2000 est associé au Champagne Dom Pérignon P2 2000. Celui d’origine évoque le miel et il est plus difficile à comprendre, alors que le P2 est plus frais, plus agréable. Daniel nous dit que 2000 est un millésime Janus, qui a deux visages et je préfère le P2 au P1, contrairement au millésime 2002. Le 2000 P1 est moins cohérent et le P2 gagne par sa fraîcheur.
Le Champagne Dom Pérignon P2 1996 est très frais, floral, fait de fleurs blanches et de citron. En bouche des fruits exotiques apparaissent. C’est un vin fin et précis. C’est un très bon champagne.
Nous avons ensemble le Champagne Dom Pérignon rosé 2006 et le Champagne Dom Pérignon rosé 2005, les deux étant de dégorgement d’origine. Le 2006 est peut-être un peu fort pour un rosé. Le 2005 est plus salin plus timide et plus frais mais il manque un peu d’affirmation.
Le Champagne Dom Pérignon rosé P2 1996 a un nez très beau et un bel équilibre. C’est un vin élégant.
Nous goûtons maintenant à l’aveugle un champagne de belle bulle, ancien, ce doit être un P3. Il a du charme, des fleurs séchées et des agrumes frais. C’est un Champagne Dom Pérignon P3 1970 à la complexité parfaite.
Mon classement est : 1 – 1970 P3, 2 – 2002 P1, 3 – 1996 P2, 4 – 1996 rosé P2. Le plaisir a été grand et amplifié par la qualité des commentaires de Daniel, qui a une belle vision de ce grand champagne.
Il est temps de repartir au château de Saran pour le 250ème diner.
L’église d’Hautvillers :
la tombe de Dom Pierre Pérignon