Tout le monde de « Rhône Vignobles » est heureux de se retrouver et nous nous rendons au Domaine Leflaive. Nous sommes accueillis par Anne-Claude Leflaive et Eric, le régisseur, va conduire les vignerons dans une visite des vignes et de la cuverie. Je les laisse faire, à la fois pour me reposer et pour écrire le compte-rendu du dîner d’hier au Bristol qui risquerait d’être difficile à faire de tête après deux jours en Bourgogne. Anne-Claude m’a accueilli en disant à quel point elle a été émue par le compte-rendu que j’ai fait du Montrachet domaine Leflaive 1996. Je rejoins le groupe pour la dégustation en cave, commentée par Anne-Claude et le régisseur.
Anne-Claude représente la troisième génération à la tête du domaine qui s’est agrandi. Elle a participé à l’élaboration du vin dès 1990 et a pris la responsabilité seule depuis 1994. Le travail de transformation du vignoble en biodynamie s’est fait sur une période de huit ans, de 1990 à 1998. Le domaine représente 24 hectares dont onze de premier cru et cinq de grands crus, dont le Montrachet représente environ 800 m² et produit de l’ordre de 300 bouteilles par an. A noter que le fût qui va contenir le Montrachet de l’année a une taille qui est déterminée par l’ampleur de la récolte. Chaque millésime a un fût neuf de taille différente.
La dégustation prévue est celle de vins de 2013. Le Bourgogne blanc domaine Leflaive 2013 a un nez discret. Il a un beau fruit et une belle opulence, c’est un très beau vin avec une belle acidité. Dans le final on décèle du lacté. Précis, ce vin charnu évoque les amandes. Il sera mis en bouteilles en mars 2015. C’est un vin riche, qui transcende la notion de bourgogne générique.
Le Puligny-Montrachet Clavoillon 1er Cru Domaine Leflaive 2013 a un nez plus riche. La bouche est plus fluide, rendant le vin très joli et gracieux, de belle minéralité. Il évoque les pâtes de fruits. Il est plus réservé que ce que je connais des vins de Leflaive.
Le Puligny-Montrachet les Pucelles 1er Cru Domaine Leflaive 2013 a un nez plus élégant et discret. Il est très fluide, élégant, tout en finesse. Dans le final on retrouve un peu de caramel comme pour le Clavoillon. Il est plus calcaire, plus complexe. Un des vignerons dit « on mâche de la craie ». Il a une belle acidité.
Le Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 2013 vient d’une parcelle de 2 hectares, l’appellation comptant seulement sept hectares. Tout-à-coup, on change de dimension. Ce vin a une énergie extrême. Il a le gras typique des vins de Leflaive. Il est très fin, élégant. Bien fait, il est tout en finesse. Il est gourmand, citronné, au final immense et à la belle acidité. Nous buvons un très grand vin.
L’atmosphère étant joyeuse, je lance en direction d’Anne Claude qu’à mon avis les Chevalier Montrachet sont incapables de vieillir, ce qui justifie qu’on boive le 2013. L’allusion est directe, la perche est grosse et Anne-Claude joue le jeu de bonne grâce. Nous allons boire des Chevalier Montrachet dont nous allons devoir trouver les années.
Le Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive qui nous est servi a un nez qui pétrole. Il est gras en bouche, caramel, épais, très grand. Il est imposant et je pense qu’il est de la décennie 90 mais en fait c’est un Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 2001. Il a du fumé, de jolis agrumes. C’est un vin qui a bien évolué, déjà très gastronomique.
Deux bouteilles qui vont suivre ont un problème, l’une est bouchonnée mais légèrement et l’autre vin est cuit, il a mal évolué. Le Chevalier Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 1989 qui leur succède est très lacté et l’on sent l’alcool qui ressort. Pour moi ce vin n’est pas parfait et ses évocations de champignons, de brioche et de beurre manquent de précision.
Tout-à-coup Anne-Claude nous annonce qu’elle va nous ouvrir un Montrachet. Lorsqu’un domaine produit 300 bouteilles par an, un tel cadeau est inimaginable. Anne-Claude a la gentillesse de dire que j’ai tellement aimé son 1996 qu’elle est heureuse d’en ouvrir un pour nous
Le Montrachet Grand Cru Domaine Leflaive 1993 s’annonce tout de suite comme un grand vin. Il est salin ce que j’aime beaucoup. Il n’a pas l’énergie du 1996 que j’ai bu récemment, mais il est tout en suggestion. Il a une race extrême et une grande complexité. Il évoque un peu la truffe blanche. Le lait et le caramel, s’ils existent, sont suggérés. C’est un vin très structuré. Nous buvons le troisième millésime de ce vin créé en 1991. Nous sommes tous émus de ce cadeau.
J’ai préféré le Chevalier Montrachet 2001, mais ce 1993 est porteur d’une grande émotion. Mille mercis à Anne-Claude pour une telle générosité.