Dîner, dîner encore chez Laurent, délicieuse gentilhommière aux toiles Belle Epoque du meilleur effet. Tables spacieuses, service attentif, cela appelle évidemment un Meursault Perrières Coche Dury 2000.
La belle définition du Meursault sauvage. C’est Attila chevauchant sur les pentes de notre gosier. Une crème aux oursins très parfumée arrive cependant à dompter le Hun, alors que sur des coquilles Saint-Jacques crues délicatement et naturellement sucrées, le Meursault fait l’étalage de sa perfection. Le nez est brillant, la structure est dense, et on a des myriades de variations sur tous les thèmes d’épices, d’agrumes et de fruits frais. Talent et maîtrise de Coche-Dury. Le pigeon est très académique, ce qui me convient et sa chair savoureuse forme un beau mariage avec le Vosne Romanée Cros Parentoux Henri Jayer 1995. Quand on boit ce vin, on boit la légende, l’histoire d’un vigneron qui aura marqué de son talent la Bourgogne et le Cros Parentoux notamment. Ce qui frappe, c’est qu’on puisse faire vivre dans la même gorgée une grande puissance avec une rare élégance et une finesse délicieuse. Un vin qui démontre que la Bourgogne peut atteindre des subtilités extrêmes.
Comme ce dîner fêtait un événement, Philippe Bourguignon décida d’y ajouter un Gruaud Larose 1921 bu à l’aveugle. Grande homogénéité des votes sur l’année puisqu’il n’y avait pas plus de 60 ans d’écart entre les réponses extrêmes ! Ma réponse fut la plus proche mais je me trompai de décennie, car ce vin gardé dans la même cave depuis des lustres a une jeunesse rare. Belle acidité, signe de longévité. Ce vin, comme une fleur qui éclot, s’est épanoui tout au long de sa dégustation, montrant une rare finesse et un bel accomplissement. Deux vins rouges que tout oppose, la région et l’âge, se sont réunis pour offrir des plaisirs pleins, montrant que le monde du vin est captivant dès que l’on côtoie la perfection du travail bien fait. Les trois vins de ce dîner sont d’une certaine manière la définition du repas idéal.
On retrouvera aussi Philippe Bourguignon dans un prochain numéro où je raconte l’invraisemblable dégustation de vins de légende comme un Montrachet 1864 ou un Meursault 1846. L’émotion d’une vie !