Des amis sont de passage à Paris. Nous les voyons fréquemment dans le sud et ils nous invitent à dîner au restaurant l’Oiseau Blanc de l’hôtel Peninsula, car ils ont envie de goûter le lièvre à la royale du chef David Bizet qui fut nommé champion du monde du lièvre à la royale il y a peu d’années. Leur voyage à Paris est lié à l’anniversaire de Valérie, qui se souhaitera dans plusieurs grands restaurants parisiens. Je m’enquiers discrètement de sa date de naissance.
Par ailleurs j’appelle Florent Martin, sommelier du restaurant, qui a été nommé meilleur sommelier français 2020 et que j’avais rencontré lors d’une visite dans le territoire de l’appellation Jasnières. Il m’invite à apporter du vin si je le désire.
L’idée me vient de choisir des vins qui conviendraient au lièvre à la royale dans des directions si possibles extrêmes. L’idée me plait et je cherche des vins du millésime de Valérie. J’apporterai un Vega Sicilia Unico vin solide qui créera un accord naturel, un Château d’Arlay Côtes du Jura qui peut provoquer le lièvre et enfin un Château de Cérons, vin doux des Premières Côtes de Bordeaux qui peut apporter des douceurs à un accord hors des sentiers battus.
Notre table au restaurant est dans un bel espace où nous avons une vue magnifique sur la Tour Eiffel dont les lumières scintillantes créent de beaux effets sur les nuages gris d’une soirée pluvieuse.
Pour l’apéritif, Valérie choisit un champagne de Selosse Elle demande Version Originale et Florent Martin revient de la cave et nous annonce qu’il n’a pas ce champagne mais qu’il a un Substance, non présent sur la carte, ce qui nous comble d’aise. Sur les délicieux petits amuse-bouches nous allons juxtaposer le Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en octobre 2020 et le Château d’Arlay Côtes du Jura 1973.
Le champagne est extrêmement vif et très sauvage comme tous les champagnes de cette grande maison. Le vin du Jura a une couleur plus ambrée que celle du champagne elle-même ambrée. Il est d’une rare puissance et d’une richesse aromatique remarquable. Je n’aurais jamais imaginé que le vin d’Arlay se montrerait plus brillant que ce champagne mythique. Tant mieux pour le Jura, car on se régale avec ce vin très long. Une palourde et un kouglof sont magnifiquement goûteux.
Nous consultons les menus et la carte. Les plats que j’ai choisis sont : tagliatelle de butternut, vieille mimolette, truffe blanche d’Alba, cappuccino fromentin / lièvre à la royale, tartare de champignon, râble rôti, diable, sénateur Couteaux/ fromages / chocolat Criollo, écume de bois de hêtre, condiment fumé, ganache chocolat.
Le plat de tagliatelle est délicieux, mais le butternut efface un peu la truffe blanche. J’aurais aimé que dans un coin de l’assiette il y ait un petit morceau de truffe pour pouvoir en croquer un peu, même s’il ne faut pas rêver tant ce champignon est hors de prix. Le vin du Jura est parfait sur ce plat.
Le lièvre à la royale a une présentation d’une rare beauté. Nous aurons les trois vins que j’ai prévus. Dès la première bouchée, je sais que je suis au sommet de l’Olympe. Ce lièvre puissant est remarquable. J’ai fait ouvrir au dernier moment le Vega Sicilia Unico 1973, oubliant que ce vin n’est plus jeune. Cela n’a pas affecté son goût superbe. Ce vin est d’un charme absolu avec une fraîcheur rare. C’est un vin que j’adore, d’une maturité idéale. Il est puissant mais tout velours. Il n’y a pas de meilleur accompagnant du lièvre.
Nous avons trois assiettes, l’une du lièvre avec sa lourde sauce au sang, la deuxième de morceaux de lièvre traités comme un gibier et la troisième d’une purée. Le vin espagnol convient parfaitement au lièvre à la royale, le vin du Jura s’associe très bien au lièvre traité en gibier et le Cérons Château de Cérons 1973 est idéal pour accompagner la purée. Passer d’un vin à l’autre en passant d’une assiette à l’autre magnifie notre plaisir. Le Cérons est assez puissant mais moins qu’un sauternes ce qui permet de passer d’un vin à l’autre. Franc, doux, typé, il a une belle personnalité. J’adore ce liquoreux expressif.
Les trois vins et le champagne trouvent des occasions d’accords avec les fromages. Nous avons hésité longtemps entre le dessert au chocolat et le dessert à la vanille. J’ai choisi celui au chocolat qui permet de trouver des accords que la vanille ne pourrait pas susciter.
La cuisine de David Bizet est d’une grande précision de saveurs comme on le remarque avec l’élégance des amuse-bouches, grands indicateurs du talent d’un chef. Le service de table et le service du vin ont été d’une grande efficacité. Cette table a tous les atouts pour connaître un grand succès.
mes trois vins dans la cave