Le lendemain du déjeuner de conscrits d’école, un déjeuner me fait retrouver mes conscrits par l’âge à l’Automobile Club de France. Le site magnifique de ce club sur la place de la Concorde a été rénové avec beaucoup de goût pendant la période de confinement. L’ami qui nous invite fait servir un Champagne Ruinart 2010. Je le trouve très supérieur à l’image que je m’en faisais. Extrêmement consensuel, il représente une belle image de la Champagne.
Je voulais prendre des cèpes dont c’est la saison avec des escargots en persillade, mais le jeune serveur nous dit : en fait ce ne sont pas des cèpes. Ce ne sera pas la seule surprise. Mon choix se portera sur un foie gras poêlé et champignon farci, plat délicieux.
Le Château Montrose Saint-Estèphe 2012 est un enfant doué, mais mon Dieu qu’il est jeune ! Quand je dis que ce vin sera magnifique dans trente ans, un des amis me dit qu’il y a peu de chances que nous puissions le vérifier.
Nous sommes une majorité à avoir choisi le ris de veau croustillant aux blettes. Le Corton Château de Corton Grancey 2012 a le même âge que le bordeaux mais il dégage un charme redoutable qui fait oublier sa jeunesse. Sur le ris de veau cuit très exactement le vin dégage des complexités raffinées. Il est très agréable à boire. Nous continuerons à le boire sur un délicieux brie bien onctueux. Sa subtilité bourguignonne est entraînante.
Pour les desserts, nouvelle surprise. Il n’y a plus le traditionnel chariot de desserts mais une vitrine fixe au loin, qui ne nous donne pas envie de quitter la table pour aller voir. Pour plusieurs desserts, le serveur nous dit qu’il n’en reste plus qu’un ou qu’il n’y en a plus. J’ai pu goûter le seul millefeuille qui restait, nommé feuille à feuille chocolat au poivre Sarawak. Nous avons quand même tous eu des desserts qu’accompagnait un Château Suduiraut Sauternes 1978 absolument éblouissant, solaire, radieux d’une énergie puissante et d’une suavité extrême.
Pour continuer dans l’étonnant, la table avait été retenue par un ami, membre de l’Automobile Club alors que c’est un autre ami qui nous invitait. Vers 15 heures un serveur vient chuchoter à l’oreille du membre du club qu’il serait bon qu’il règle la note, car la caisse va se fermer. Il prévient l’ami invitant qui nous quitte le temps de payer son écot. Dans ce si beau cadre où la cuisine a fait de sensibles progrès, il y a encore des points à améliorer, fort heureusement bénins.
Le Suduiraut 1978 a été l’illumination de ce repas, suivi du Corton Grancey de haute qualité. Les soubresauts parfois délirants de l’activité internationale ne nous ont pas privés de sujets de conversation.