Casse-croûte au caviarvendredi, 16 janvier 2015

Dans un couple marié de longue date, il y a des réflexes, des connivences ou des hasards qui surgissent. Nos enfants nous avaient offert des boîtes de caviar. En me levant, je me disais que ce serait bien que ce soir nous les goûtions. Rentrant du bureau où je me rends chaque jour alors que je suis retraité, je vois que deux boîtes de caviar m’attendent pour le dîner. Comme dirait Desproges, « étonnant, non ? ». Il y a une baguette de notre boulanger local qui fait les plus belles que je connaisse, une motte de beurre Bordier puisque c’est le Louboutin du beurre, et les deux caviars. A ma gauche c’est un caviar d’Aquitaine de la maison Prunier. A ma droite, un Osciètre uruguayen. J’ouvre, avec les souffrances d’un accouchement tant le bouchon est collé à son verre, un Champagne Salon 1996. Le champagne est grand, connu, je l’ai mille fois visité, mais je dois dire que s’il est au sommet de sa forme, il m’a manqué la petite étincelle qui fait que je m’extasie. Or il n’a rien à se reprocher, car il est grand. Les deux caviars sont très différents. L’Aquitaine est plus confortable, rassurant, avec des petites notes de noisette. L’uruguayen est plus iodé, de plus grande longueur. L’Aquitaine est plus ample en bouche et l’uruguayen plus vif. Bien malin qui désignerait le meilleur, car ils sont complémentaires et l’on passe de l’un à l’autre avec bonheur. Le Salon joue son rôle, tient sa place, mais trop poliment pour moi. Est-ce lui, est-ce moi, on ne le saura pas. Sur un chèvre coulant de bonheur, il arrive à s’exciter, me donnant un sourire de satisfaction. Ce fut un joli casse-croûte.

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