De bon matin je pars au restaurant Il Vino
d’Enrico Bernardo, l’entreprenant meilleur sommelier du monde, où se déroule une présentation des vins du château Pontet-Canet. C’est Enrico lui-même qui sert les verres de chaque millésime et Alfred Tesseron, le propriétaire de ce Pauillac nous suggère de commencer par le plus vieux, pour voir l’évolution du travail fait au château.
Le Château Pontet-Canet 2001
a un nez très joli de fruits rouges et noirs. La bouche est assez neutre. C’est un vin bien construit, droit, mesuré, mais sans grande folie.
Le Château Pontet-Canet 2007
a un nez un peu plus profond et moins fruité. Il a plus de fluidité, il est assez agréable. Sa matière n’est pas abondante. C’est un joli vin dont j’aime le final.
Le Château Pontet-Canet 2010
a un nez subtil et raffiné. Il a plus de matière et se montre plus boisé. Il perd un peu du caractère que j’ai en mémoire de Pontet-Canet car il devient un peu plus conventionnel. Le final est plus rêche et boisé.
Le Château Pontet-Canet 2011
a un nez un peu plus fermé mais on sent toute sa subtilité. Il a une très jolie attaque avec beaucoup de charme. C’est un vin très agréable et parfaitement équilibré. Le final est un peu rêche ce qui est lié à sa jeunesse. Je pressens que ce sera un grand vin.
Le Château Pontet-Canet 2012
a un nez très clair mais peu typé. Son parfum évoque le velours. Il y a une fluidité de l’attaque qui ressemble à celle du 2007. En bouche il y a une petite âpreté. Le final est agréable. C’est un joli vin qui manque un peu de corps et de matière. Je l’aime assez.
Il se trouve que j’étais l’un des premiers à déguster des vins qui venaient juste d’être ouverts. Aussi en y revenant, l’écart de sensation est très fort, car les vins se sont réchauffés et aérés. Et chose curieuse, je vois apparaître chez tous ces vins des évocations de café.
Le 2001 gagne en fluidité et se montre nettement plus généreux, mais c’était mon premier vin du matin, avec un palais non encore aiguisé. Le 2007 montre maintenant un joli fruit et se montre chaleureux. Le 2011 devient nettement plus large. Et le 2012, plus large aussi est plus doux avec un joli poivre.
Comme le deuxième tour est nettement plus favorable, je n’aurais qu’une envie, c’est de goûter ces vins à table, car ils se révéleraient sans doute encore plus opulents. Lors de cette dégustation je n’ai pas eu l’émotion que pourrait procurer un très grand vin. Les vins sont bien faits mais il n’y a pas cette étincelle qui caractérise un très grand vin. La raison en est peut-être que la Côte Rôtie La Turque d’hier est encore fortement présente dans ma mémoire.
Alfred Tesseron nous a raconté l’implication de son père et lui-même dans l’évolution de ce vin et le rôle important de Jean-Michel Comme, l’homme qui fait le vin et a initié depuis 2004 la transition vers la biodynamie. Un travail important a été fait dans la vigne et dans les processus. On sent une volonté de faire bien. Cela se ressent dans la précision des vins que j’ai bus dont j’ai préféré 2007 et 2011 qui révèlent plus que d’autres les qualités de ce beau Pauillac. Connaissant quelques ancêtres de Pontet-Canet dont un grand 1870 je peux sans risque prédire un beau futur à ce Pauillac subtil.