Après un réveillon de fin d’année éblouissant, cap au sud, pour trouver un peu de soleil. Nous sommes invités chez des amis. Nous commençons par un Champagne Ayala blanc de blancs bien fluide, facile à boire, un peu dosé mais agréable. Ensuite, c’est un Champagne Monopole Heidsieck premier cru brut. Plus orthodoxe, plus calibré, il est dans la ligne du parti, sans excès d’aucune sorte. Le fils de nos amis veut absolument que nous goûtions un champagne à l’aveugle. J’imagine une merveille et je me fais piéger, car je le vois plus beau qu’il n’est. C’est le champagne bling-bling par excellence, avec un habillage tout en dorures propres à émoustiller les filles lascives qui ondulent dans le sillage des rappeurs californiens. C’est un Champagne Armand de Brignac brut sans année à l’accroche assez séduisante mais au manque de fond évident.
Notre boucher traiteur dont nous apprécions la qualité de ses produits avait un voisin marchand de journaux qui a pris sa retraite. Un caviste l’a remplacé, un passionné de vins. Quand je vais lui dire bonjour, je ressors avec des emplettes. J’ai voulu saluer le traiteur pour échanger nos vœux, mais il n’était pas là. J’ai donc fait un crochet chez le caviste qui m’a conseillé un vin dont je devrais lui donner de mes nouvelles, un Pierres Précieuses, domaine Croix Rousse, vin du pays du Var 100% Carignan 2007. Il ne s’agit pas pour moi d’être snob ou méprisant. Je comprends qu’on puisse recommander ce vin bien fait riche de ses 14° d’alcool. Mais il lui manque cette étincelle qui fait dire qu’il s’agit d’un grand vin. Le message n’est pas passé mais il est certain que les voies que j’explore ne sont pas les siennes, sans que j’y mette un jugement de valeur.
A côté de lui, une Côte Rôtie La Landonne Rostaing 1995a su toucher mon cœur, car c’est un vin qui cause comme dirait Marius dans la trilogie. Sur la cuisine délicate de notre amie, ce fut un régal.
Peu de jours plus tard, alors que ce début janvier dans le sud nous gratifie de températures printanières, nous dînons chez des amis. J’ai apporté les vins. Le Champagne Krug Grande Cuvée qui a déjà près de dix ans de cave est d’un confort inégalable. On se sent bien. Il est poli, aimable et se prête aux caprices de tous les mets qui lui sont associés. Il y a des coquilles Saint-Jacques crues associées à de fines rondelles de radis. Ça croque, et le champagne est bien en phase avec cette entrée. Sur une liche, poisson combatif et rusé, c’est un Champagne Selosse Substance dégorgé en juin 2006. Une merveille. Hélas, la liche est rétive, car nous ne nous sommes pas mis à table au moment où la cuisson était optimale. Tel Vatel, le maître de maison se serait fait hara-kiri pour cette cuisson excessive. Mais le champagne parade, trône, expression absolue d’un champagne viril, roi des Huns, à l’apex de sa gloire. Avec les citrons confits du poisson, c’est un régal. Pour le fromage, j’ai apporté un Chambertin Grand Cru Camus Père & Fils 1989. Il s’est réveillé bien tard aussi la déviation ressentie en le goûtant m’a privé du message qu’il aurait pu nous adresser. J’espérais qu’il brillerait sur les coraux des coquilles juste poêlés, mais il a quelque chose de plat. Qu’importe, il y avait tant à dire sur tant de sujets avec nos amis que la soirée fut réussie.