Dans le Sud, face à la mer, nous jouons aux cartes avec des amis. Quand le contrat est gagné, c’est l’équivalent d’une médaille olympique. Si le tandem dont je suis perd, c’est comme si la misère du monde s’abattait sur mes épaules. Il faut étancher ces émotions par un champagne Salon 1988 qui est absolument impressionnant. Ce champagne a tout pour lui. Dense, long, fruité, confituré, il laisse une trace de pur plaisir. A dîner, Château Figeac 1988 donne une impression nettement supérieure à ce que j’attendais. Il a une structure qui rappelle les plus grands vins. S’épanouissant avec bonheur dans le verre, il a constitué une très heureuse surprise. C’est son élégance sereine qui marque.
J’attendais à l’inverse beaucoup plus de la Côte Rôtie cuvée prestige Léonce Amouroux 1989. Ce vin titre 12,5° ce qui est plutôt léger aujourd’hui, et l’on retrouve avec plaisir les expressions rurales et authentiques du terroir rhodanien. Mais le souvenir du Figeac empêche que l’on s’extasie. Beau vin simple et naturel, desservi par le casting dont j’assume l’erreur. La partie reprend avec intensité après la tarte Tatin. Il eût fallu la Marseillaise pour ponctuer le génie absolu de la belote de notre équipe. Puisque, comme on l’aura compris, j’étais dans l’équipe qui gagne.
Le lendemain, la revanche s’impose. Huîtres et champagne Laurent Perrier Cuvée Grand Siècle forment un mariage princier. Le caviar Sévruga se dévore au-delà de la satiété avec le champagne Salon 1995 qui lui va bien, car le sel du caviar supporte mieux un Salon jeune. Un château Mouton-Rothschild 1988 n’était pas franchement nécessaire, mais il était ouvert. C’est un Mouton relativement simplifié mais généreux en bouche et bien rassurant. La parfaite égalité des scores imposera une belle lorsque je reviendrai. Qu’il est dur d’être dans le Sud !