Le lendemain midi nous déjeunons en amoureux, ma femme et moi au restaurant l’Astrance, pour nous remettre en mémoire le monde culinaire de Pascal Barbot. Les libations de la veille imposent de l’eau, et ce n’est pas plus mal, car cette cuisine subtile serait moins bien perçue avec un vin. La variété des mets imposerait sans doute un champagne, dont la discrétion suivrait le talent du chef sans jamais lui voler la vedette.
Disons-le tout net, je suis très sensible au style de Pascal Barbot. Il y a une recherche de sincérité, de sensibilité dans la mise en œuvre des produits, presque idéalisés dans l’assiette. Le goût de chaque ingrédient est élégant, presque fragile comme une porcelaine rare. Je ne suis pas totalement convaincu que chaque recherche japonisante soit nécessaire, car un produit n’est pas meilleur parce qu’il est japonais, mais on est embarqué avec Pascal comme en un tableau de Watteau.
La crème de potiron ne m’a pas convaincu.
La grosse crevette perdue dans un champ d’herbes folles est une merveille. Le saint-pierre avec des copeaux de châtaignes est particulièrement goûteux, la chair du poisson aspirant avec envie les arômes du marron, l’ormeau sur un navet serait délicieux si une crème japonaise ne venait troubler leur danse, tandis qu’une petite tranche de sardine est succulente comme le péché. Un thon rose presque cru sur des petits haricots exprime tout ce que Pascal sait faire avec grâce. Le veau sur des cèpes est aussi frais que la joue d’une jeune fille qui a couru par un grand froid.
Il y a dans cette cuisine une légèreté voulue, une délicatesse polie et une élégance unique, toute dans la personnalité de ce chef attachant. On aura compris que j’en suis fan.