Dîner à 4 mains au restaurant de David Toutain
Dîner à 4 mains avec un chef japonais
Les vacances arrivent à leur fin, après trois mois de temps irréellement chauds, et de quasi sécheresse. Il va falloir rejoindre la région parisienne où semble-t-il, la chasse aux voitures est organisée. Alors, avant de se replonger dans ce monde stressé, j’ai envie de célébrer les beaux moments vécus ici. Du caviar osciètre prestige de Kaviari sera un bon compagnon d’un Champagne Krug 1982.
J’ai un amour particulier pour les champagnes de 1982 que je trouve romantiques. Ils savent être puissants mais gardent un charme et une délicatesse qui leur apportent la grâce. Cette bouteille me semble un peu moins jeune que celles dont j’ai le souvenir et cela me fait réaliser que ce champagne a quarante ans. Pour moi, un champagne de 1982 est un jeune bambin. Eh bien non, il ne peut plus être considéré comme jeune car il entre dans une zone de maturité. Il est si noble que cette évolution ne me gêne pas. Je trinque par l’esprit à la beauté de la Méditerranée et au bonheur de cet été.
d’abord, petit passage au restaurant l’Aventure
et dernier dîner dans le sud
David Djaoui est un archéologue d’Arles qui a organisé une exposition au Musée d’Histoire de Marseille dont le thème est « On n’a rien inventé » montrant que du temps des romains le niveau de connaissance de l’œnologie et de la gastronomie était extrêmement élevé. Il m’avait contacté et je lui avais prêté six bouteilles anciennes vides qu’il avait lui-même choisies dans ma cave parisienne pour l’exposition de 2019. Le Covid étant passé par là, c’est seulement maintenant que David vient me rapporter les bouteilles dans ma maison du sud.
C’est l’occasion de déjeuner ensemble. L’apéritif sera de Pata Negra, gouda au cumin et mimolette. Le menu simple sera poulet avec un écrasé de pommes de terre à l’huile, camembert Jort et tarte au citron.
Le Champagne Pommery 1989 avait un pschitt significatif lorsque je l’ai ouvert de bon matin. Sa couleur est d’un bel ambre doré. Son parfum est agréable, racé. En bouche c’est un bonheur et David Djaoui prend conscience du monde qui sépare les champagnes anciens des champagnes très / trop jeunes. Quelle douceur, quelle rondeur ! Je suis enthousiaste devant un tel plaisir. Avec le jambon, c’est un régal.
Nous sommes un mardi et le Rimauresq Côtes de Provence 1983 avait été ouvert vendredi dernier. C’est donc avec circonspection que je sers ce qui reste de ce vin. Et je suis surpris de voir qu’il est encore vaillant, joyeux et agréable à boire. Si l’on cherche la petite bête, on sent effectivement une petite amertume dans le finale, mais globalement c’est une heureuse surprise, car le vin élargi a gardé sa typicité.
Le Châteauneuf-du-Pape Domaine Pauljean 1971 a un niveau à 4 centimètres du bouchon ce qui est un très beau niveau. Le nez à l’ouverture était suffisamment prometteur. Le parfum est maintenant parfait. Dès la première gorgée je suis réjoui et je remercie le Rimauresq car il met en valeur le Pauljean. Il y a en effet un fruit puissant dans le Châteauneuf que le Côtes de Provence n’a pas et on se régale de ce fruit entraînant. Un régal. 1971 est une superbe année et ce vin en profite. Quand je pense que ce vin a 51 ans, ça paraît incroyable car il a une vivacité idéale.
Vega Sicilia Unico n’a plus le monopole de l’accord avec un camembert Jort, car l’accord du Jort avec le Pauljean est superbe.
Rien ne pouvait s’associer à la tarte au citron sauf nos discussions passionnantes sur le doute scientifique qui est le comportement indispensable aux chercheurs scientifiques et l’humilité, indispensable aux amateurs de vins.
De ce repas, c’est le Pommery 1989 qui m’a donné la plus grande émotion.
David Djaoui est passionnant dans un domaine qui fait rêver et je rêve de recommencer une complicité pour une de ses prochaines expositions.
les bouteilles que David Djaoui avait choisies dans ma cave et rendues ce jour :
le lien avec la présentation de l’exposition de 2019 :
Des amis gourmets viennent dîner à la maison du sud. Il y aura deux caviars à comparer sur du pain et du beurre, le caviar Baeri avec des pommes de terre, du cœur de saumon fumé, des fromages et un millefeuille.
Le Champagne Dom Pérignon 1975 avait montré, six heures avant d’être servi, un discret pschitt et des senteurs prometteuses. Il est très ambré et dès la première gorgée, je suis conquis, tétanisé comme si je regardais un cobra. Il y a en bouche une saveur sphérique comme un bonbon de fruits exotiques jaunes. C’est un choc de bonheur. Le champagne est rond, long, charmeur, porteur d’extase. Je n’attendais pas un 1975 à un tel niveau. Il y a dans cette décennie des champagnes merveilleux comme 1973, 1971 et 1978. Ce 1975 joue dans la cour des très grands.
Le champagne est associé à une tarte aux oignons et le côté sucré des oignons crée un accord de continuité enthousiasmant. Il côtoie aussi un gouda aux grains de cumin et l’accord plus provoquant donne au champagne une vivacité nouvelle.
J’avais imaginé que ce Dom Pérignon accompagnerait aussi les caviars, mais comme je sens qu’il va très vite être à marée basse, je cours chercher un Champagne Taittinger Comtes de Champagne 2005 que j’adore car il est d’un confort idéal avec une douceur charmeuse. Il va bien avec le gouda aussi l’idée me vient qu’au moment des fromages, on mange le gouda en buvant l’eau-de-vie de cumin 1943 que m’avait offerte le regretté Jean Hugel.
Nous passons à table et comparons le caviar osciètre prestige et le caviar Baeri sur du pain et du beurre. Le Baeri se montre très au-dessus d’autres dégustations de ce caviar faites à la Manufacture Kaviari. Les deux caviars font jeu égal, avec des personnalités différentes. Le Dom Pérignon cohabite volontiers avec l’osciètre alors que le Comtes de Champagne convient au Baeri.
La pomme de terre au caviar Baeri du fait de sa douceur est mis en valeur par le Dom Pérignon. Pour le cœur de saumon fumé, les accords sont moins évidents. Un vin blanc riche eût été plus approprié.
Pour les fromages, je sers un Rimauresq Côtes de Provence 1983 que j’avais ouvert huit heures auparavant. J’avais trouvé son parfum très discret. Il ne l’est plus. Ce vin est glorieux. Il exsude l’olive noire et la garrigue. Il est généreux, typé, provençal et sa longueur est belle. Ce vin de 39 ans n’a aucun signe d’âge. Au niveau parfait dans le goulot, c’est le gendre idéal. Je conseille toujours aux amateurs qui ont de la place disponible en cave d’acheter des vins du sud, Bandol ou Côtes de Provence et de les laisser dormir au moins vingt ans, car ils expriment alors un charme qui les met au niveau des grands vins du Rhône.
Sur le gouda aux grains de cumin l’eau-de-vie de cumin 1943 se montre idéale, vivante. Comment cet alcool peut-il être aussi limpide que de l’eau de source ? Il est plus délicieux que lorsque j’avais ouvert la bouteille il y a bien longtemps. L’accord avec le gouda est magique.
Les bouteilles se vident à belle allure aussi j’ouvre un Champagne Krug Grande Cuvée sans année, qui n’a pas de numéro d’édition et qui n’a pas de code sur l’étiquette du dos de la bouteille. Il a donc des champagnes qui doivent en moyenne dépasser les vingt ans. Ce champagne a tout d’un édile provincial. Il est distingué, courtois, malicieux et ne manque pas d’esprit. Il n’a rien de révolutionnaire et sait se tenir dans toutes les situations. Il accompagne aimablement un millefeuille à la crème délicieuse.
A part l’étonnante eau-de-vie de cumin, deux vins sont d’un niveau exceptionnel, le Dom Pérignon 1975 et le Rimauresq 1983. Ce fut un beau dîner d’amitié.
Nous serons huit au dîner du 15 août dont les six du dîner du 14 août et deux amis. J’ai ouvert les vins de 15 heures à 16 heures et comme hier les bouchons gémissent ou crissent, semblant souffrir de mes tractions. Tous les bouchons viennent entiers et ont des parfums rassurants. Les plus belles senteurs viennent de l’Yquem et du Penfolds et les plus subtiles sont ceux de La Turque.
Il restait du Champagne Pierre Péters Cuvée les Chétillons Blanc de Blancs 2009 que j’ai servi en priorité à nos amis non présents hier. Le champagne a gagné en largeur et se montre beaucoup plus plaisant.
Le Champagne Salon magnum 1997 est un de mes chouchous parce qu’il y a une histoire qui m’attache à lui. Lorsque Didier Depond, président des champagnes Salon et Delamotte a organisé le premier cocktail pour la commercialisation du 1997, je lui ai dit que je ne le sentais pas au niveau d’autres années. Il m’a répondu : « tu verras ». Et j’ai vu qu’il avait raison. Je suis content d’avoir eu tort et j’adore ce millésime. Dès la première gorgée, on sent que le champagne est grand, noble, large et impérial. Il est complexe et frais, avec une longueur extrême, mais je dois dire que j’en attendais plus car je le mets très haut dans mon Panthéon mémoriel.
L’apéritif consiste comme hier en olives de Kalamata, anchoïade, poutargue, foie gras, gouda au Pesto, jambon ibérique, chips à la truffe et autres. Le plus bel accord si naturel est une nouvelle fois avec l’anchoïade.
Le menu du 15 août est : comparaison de deux caviars, l’osciètre prestige de Kaviari et le Baeri de la même maison, avec pain et beurre / pomme de terre avec de caviar Baeri / coquilles Saint-Jacques avec du lomo ciselé / morilles de l’Oregon / filets de pigeon / fromages, de chèvre, saint-nectaire, camembert Jort / stilton / escalopes de mangue crue.
Le Corton Charlemagne Bouchard Père & Fils 2008 avait à l’ouverture un parfum prometteur. Il a maintenant un parfum d’une force infinie. C’est comme une explosion de senteurs. Ce vin est un guerrier généreux. Il a un fruit fort, convainquant. Il est solaire. C’est un grand vin poussant à l’optimisme. Il est parfait avec les coquilles Saint-Jacques.
La Coulée de Serrant Madame Joly 1988 a une énergie et une puissance que je n’attendais pas à ce niveau. Il est puissant mais charmant. Il est subtil et se marie idéalement avec les imposantes morilles.
Le Château Pape Clément 1982 m’était apparu un peu incertain à l’ouverture. Il a du mal à s’assembler mais le pigeon lui permet de briller. Il a la persuasion d’un grand vin. On devine ses complexités qui ne s’expriment pas totalement.
Le Clos des Fées Hervé Bizeul Côtes de Roussillon Villages 2001 annonce 15° et l’on voit bien que c’est une bombe. Mais une bombe civilisée car il sait être aimable et subtil. J’aime ce vin pour sa franchise.
Le Grange des Pères Vin de Pays de l’Hérault 2004 a été bu au dîner de la veille et il en reste presque une moitié que nous goûtons en même temps que la Côte Rôtie La Turque Guigal 1992. Il ne me faut pas beaucoup de temps pour voir l’immense écart entre le vin de l’Hérault et La Turque si extraordinaire. Le 2004 est plaisant et bien construit, mais le 1992 est sur une autre planète. Généreux, puissant et d’extrême élégance. Il sait être velours, délivrant ses complexités subtilement avec un charme infini. Plusieurs de mes amis le classeront premier.
Le Penfolds Grange Australie 1997 est stratosphérique et là, j’assume mon manque d’objectivité. Ce vin, c’est un voyage dans l’infini. Il est large, kaléidoscopique, changeant sans cesse. Un amour de vin. Les fromages, dont le Jort, lui conviennent parfaitement.
Le Château d’Yquem 1989 est plus fort et plus sucré que le 1990 bu hier. Il a le charme d’Yquem mais un peu exacerbé. Beaucoup de mes amis préfèrent ce 1989 mais ma femme, qui ne boit pas, sauf Yquem, annonce qu’elle préfère le 1990 plus fluide et plus romantique. Je suis de son avis.
L’Yquem accompagne bien le stilton et l’accord avec la mangue est saisissant. Il est fusionnel. On ne sait pas si l’on est en train de « boire » la mangue ou de « manger » l’Yquem. Cet accord émeut tout le monde. Il faut dire que la maturité des mangues est exceptionnelle de douceur et de générosité.
Les vins au niveau le plus élevé sont : 1 – Penfolds Grange 1997, 2 – La Turque 1992, 3 – Yquem 1989, 4 – Corton Charlemagne 2008. Viennent ensuite le Salon 2007 que j’attendais mieux classé, le très joli Clos des Fées et la charmante Coulée de Serrant.
———————————————————————————————————-
Il y a un ‘mais’ à ce compte-rendu car nous avons bu les vins qui restaient au déjeuner du 16 août.
Le magnum de Salon 1997 que j’ai trouvé moins grand que le magnum de Salon 2007 montre maintenant un 1997 tel que je l’aime, porteur d’une émotion extrême. Il est parfait. Faut-il donc que j’ouvre les magnums la veille, puisque les Chétillons 2009 ont eu le même comportement ?
Le Clos des Fées 2010 est très nettement supérieur lui aussi, devenant particulièrement grand.
Le Pape Clément 1982 n’a pas changé et on voit ses imperfections plus qu’hier.
Le Penfolds 1997 continue d’être mon préféré, aux goûts exotiques indéfinissables.
Les deux plus belles embellies concernent le Salon 1997 et le Clos des Fées 2010
Nous avons vécu un 15 août réussi, avec de grands vins et une cuisine d’une particulière justesse de mon épouse.
La vie est belle.
Avec des amis fidèles des festivités du 15 août, il y aura deux dîners en notre maison du sud, les 14 et 15 août. La mise au point des dîners s’est faite avec ma femme qui a réalisé une cuisine la plus simple possible, fondée sur des produits de grande qualité.
Le menu du 14 août sera : eau de tomate / cœur de saumon fumé / anguille fumée au lait fumé / tarte à la tomate / dos de cabillaud cuit à l’ail / fromage de chèvre et saint-nectaire / stilton / tarte à la mirabelle.
L’ouverture des vins commença à 15 heures pour se terminer un peu après 16 heures. Du fait d’une forte chaleur très humide les bouchons ont dû gonfler car ils ont tous été difficiles à retirer, le tirebouchon faisant gémir les bouchons comme s’ils souffraient mille morts. Ils sont tous venus entiers et le seul vin qui me pose question est le Château Caillou Pomerol 1953 qui semble particulièrement fatigué. J’ouvrirai un autre vin si nécessaire. Le parfum du Mouton 2001 est une pure merveille, d’une classe extrême.
Nous sommes six, les mêmes qui étaient au restaurant d’Alexandre Mazzia hier.
Pour les deux amis qui n’étaient pas là le 12 août, je sers le reste du Champagne Salon 2007 qui est toujours aussi plaisant, vif, et vivant qui a juste une longueur à peine plus faible. Un grand plaisir.
Le Champagne Pierre Péters Cuvée les Chétillons Blanc de Blancs 2009 est un vin très agréable, beau témoignage de la Côte des Blancs. Il est subtil et authentique mais je dois dire qu’il est assez loin de la perfection du Chétillons 2002 qui est un pur miracle.
L’apéritif consiste en olives de Kalamata, anchoïade, poutargue, foie gras, gouda au Pesto, jambon ibérique, chips à la truffe et autres. Le plus bel accord si naturel est avec l’anchoïade.
Nous passons à table et un petit verre nous attend d’eau de tomate. C’est très original et goûteux.
Le Châteauneuf du Pape Domaine de La Solitude blanc 1993 a une puissance que jamais personne n’attendrait d’un 1993. Il est brillant, profond et s’accorde bien au cœur de saumon et à l’anguille fumée.
Le Château Mouton-Rothschild 2001 a un parfum à se damner. Ce vin est absolument parfait, intense avec des suggestions de truffe et de charbon. L’accord avec le cabillaud à l’ail est un accord idéal.
Le Château Caillou Pomerol 1953 m’avait fait peur à l’ouverture et son apparition me fait infiniment plaisir car il démontre la pertinence de la méthode d’ouverture fondée sur l’oxygénation lente. Il est délicat, élégant et plaisant, d’un raffinement discret. Sa transformation est spectaculaire.
Le Grange des Pères Vin de Pays de l’Hérault 2004 est un vin qui a toutes les qualités d’un grand vin, puissance réelle, largeur, profondeur, mais je dois dire que je n’ai jamais vraiment mordu à ce vin, quel qu’en soit le millésime. Il manque d’émotion pour mon palais. Aussi, pour que je ne sois pas taxé de parti pris, j’ai choisi de garder la moitié de la bouteille pour la confronter demain avec une Turque de Guigal. Ce vin a tellement d’a priori positifs que je ne voudrais pas qu’on pense que j’ai des idées figées sur ce vin, qui se comporte très bien avec les fromages.
Le Château d’Yquem 1990 appartient au trio célèbre des Yquem 88, 89 et 90. Il est déjà bien ambré sans l’être trop. Le botrytis est présent sans excès. Le stilton de belle maturation est idéal avec l’Yquem mais l’accord le plus gourmand est avec la tarte à la mirabelle sur une purée d’amandes crues.
La pureté des plats a permis des accords superbes. Nous avons classé : 1 – Mouton 2001, 2 – Yquem 1990, 3 – Châteauneuf-du-Pape 1993, qui sont les trois champions de ce repas. Le Mouton est hors norme et le Châteauneuf la plus belle surprise.
Vers deux heures du matin il était temps d’aller dormir car pour demain, le programme est extrêmement chargé !
Nous nous étions régalés avec des amis il y a une quinzaine de jours au restaurant A M d’Alexandre Mazzia, le tout nouveau trois étoiles de Marseille. Nous avions alors réservé une table pour le 13 août pour que nos « amis du 15 août » puissent découvrir ce restaurant.
Le repas est un festival de saveurs et le menu est aussi long qu’un discours de Fidel Castro. Qu’on en juge : Œufs de truites et saumon sauvage marinés au saké et lait fumé / Biscotte végétale, pommade herbacée, parfum iodé / Anguille fumée et chocolat Pain viennois fumé au charbon, beurre demi sel au combava / Chair d’araignée au jus animal, pelamide mariné saké-betterave et garum d’huîtres / Semoule aux agrumes et fleur d’oranger, raifort et jus de carapaces / Moules, maquereau, hareng, noix de coco, condiment mojito estragon et jus vert / Focaccia au beurre noisette, piment d’Espelette-réglisse, beurre Nigelle et épices / Gamberoni, plancton, gel piment doux, beurre safran café, feuille de câprier Huître pochée, chou-fleur fumé, sarrasin torréfié, gel pimenté, voile marinière, poutargue / Caviar, langoustine, épinard- gingembre, brocolis, amandes, jus de queue de bœuf, beurre blanc café / Consommé de volaille infusé aux coquilles d’huîtres, dulce et écorces d’agrumes brûlées / Chénopode en tempura-vodka, œuf de brochet fumé, piment, poussière de carapace / Haricots verts à la flamme, pancetta de Bigorre, sucs d’oignons, cerise pimenté, jus de canard / Oignons, girolles, mortadelle au jus de queue de bœuf, chapelure à l’eau gazeuse et estragon / Fleur de courgette, pommade épices et noix de cajou, fruit de la passion / Epinard, vermicelles au curry, jus vert saté, jus de betterave Glace wasabi-raifort et diplotaxie / Framboise-Harissa Texture cannelée, tomatillo, tamarin hibiscus / Patate douce, mangue, dattes, eau de verveine / Banane fermentée, riz soufflé, cacahuète sucrée, kumquat / Sorbet ananas-safran, gel pimenté / Maïs givré, balsamique 25 ans, meringue maïs fumé grillé / Texture sablé-cigarette, pommade de patate douce aux épices, framboise, citron basilic / Avocat, perle de gingembre, fenouil, graines de moutarde / Mangue, goyave, poussière d’agrumes, patate douce et gingembre cristallisé / Palet glacé melon, eau de melon au curry vert, spray de gin d’agrumes.
Toutes les saveurs sont pertinentes et la composition d’un plat est comme la composition d’un tableau par Michel-Ange, où chaque détail a son importance, cohérent avec l’ensemble.
J’ai regardé la carte des vins et nous avions eu tant de plaisir avec le Châteauneuf-du-Pape blanc et avec le Selosse que je les ai commandés à nouveau.
Le Champagne l’Âme de la Terre Françoise Bedel 2006 avec 90% pinot meunier a été dégorgé en 2017. Il est resté sur lies 10 ans. Il est élégant, flexible, agréable à boire et gastronomique, très adapté à la cuisine d’Alexandre Mazzia.
Les Safres Châteauneuf-du-Pape blanc Le Clos du Caillou 2013 est un vin d’une puissance extrême, porteur de soleil. On le sent joyeux, épicé, prêt à affronter les plats délicieux. C’était une surprise lorsque nous l’avons bu il y a quinze jours. La surprise est toujours vivace et l’adaptabilité de ce vin est remarquable.
Le Champagne Jacques Selosse Millésime 2008 dégorgé en janvier 2020 est d’une grande noblesse. Il est très droit, équilibré, intense, mais aussi accessible. Avec le divin plat au caviar et avec la langoustine il s’est montré idéal. C’est un très grand champagne.
Le Champagne Jouvence Françoise Bedel 2012 avec 95% de pinot meunier a été dégorgé en 2020. Il est resté sur lies 6 ans. Je lui trouve plus d’énergie que n’en a le 2006. C’est un très beau champagne d’une belle énergie.
Mon classement des vins serait : 1 – Le Clos du Caillou 2013, 2 – Selosse 2008, 3 – Bedel 2012, 4 Bedel 2006, mais les deux premiers sont de niveaux très proches et pourraient être classés ex-aequo.
Revenir dans un grand restaurant peut parfois apporter une certaine déception comme j’ai pu le vivre avec Noma et avec le restaurant de Mauro Colagreco, le Mirazur. Au contraire, au restaurant A M, l’émerveillement est toujours de même amplitude. Ce restaurant est très impressionnant. La langoustine au caviar est un plat exceptionnel.
Le 15 août est marqué par une tradition, celle d’un grand repas gastronomique. Mais les jours qui précèdent sont l’objet d’agapes avec des amis fidèles.
Lorsqu’ils arrivent trois jours avant le 15 août l’usage veut que j’ouvre un magnum de Salon. Le Champagne Salon magnum 2007 est définitivement un grand Salon. Il est élégant comme Audrey Hepburn et pianote des complexités comme les Gymnopédies d’Erik Satie. Il est gastronomique et très convaincant.
Des années comme 1988 ou 2008 ont beaucoup plus de puissance, mais le charme de ce 2007 est extrême. Ouvert quatre heures avant le repas, il a gagné en largeur. C’est un bonheur.
L’américain ami de mon petit-fils est un passionné de la mer. Il voulait absolument attraper des poissons et a réussi. Il prépare les filets des poissons avec une dextérité exemplaire et nous mangeons ces poissons cuits à la perfection, c’est-à-dire à peine.
La Côte Rôtie La Landonne Guigal 1980 avait un niveau à deux millimètres sous le bouchon ce qui est exceptionnel, mais fréquent pour les Côtes Rôties de Guigal. A l’ouverture cinq heures avant, le parfum de garrigue et de menthe était une immersion dans la nature sauvage de sa région. En bouche, c’est un grand plaisir car ce vin n’a pas le moindre signe d’âge. Le vin a acquis une élégante maturité. L’accord avec les poissons cuits avec de l’ail est absolument parfait. Il a un beau finale. Ce vin franc et direct est une réussite à 42 ans.
Deux beaux vins pour commencer les festivités du 15 août, trois jours avant.
poissons pêchés par l’ami américain de mon petit-fils.
De ci de là, au gré des envies, des bouteilles s’ouvrent. Quand on veut rester sage, j’ouvre une demi-bouteille de Champagne Krug Grande Cuvée non millésimé. Il est jeune et très vif, agréable et de belle longueur. Bien évidemment, il faut ouvrir une deuxième demi-bouteille, car la première avait un goût de trop peu.
Je ne bois pas fréquemment des champagnes du millésime 2005, mais j’ai une tendresse particulière pour le Champagne Comtes de Champagne Taittinger 2005. Il est si plaisant, si facile à vivre qu’il représente une vraie joie de vivre. Il a des intonations de miel et se montre de pur plaisir.
Un jeune américain ami de mon petit fils a fait cadeau d’un Champagne Nicolas Feuillatte 2016 que nous goûtons ensemble. Ce champagne de Chouilly, plus simple que les champagnes que nous buvons couramment, se montre suffisamment agréable pour qu’on le boive joyeusement.
ici une ancienne bouteille de Krug Grande Cuvée des années 90 très agréable.
Nous nous rendons avec des amis au restaurant AM (Alexandre Mazzia) qui a obtenu en ce début d’année une troisième étoile. Nous connaissions déjà ce beau restaurant marseillais. Le choix est possible entre des menus à deux plats, quatre plats ou cinq plats. Nous choisissons celui à quatre plats dont nous n’aurons le contenu qu’en partant, dont voici la rédaction (prenez votre souffle) : poisson de nos côtes, levure de bière torréfiée / chou cristallisé safran, poutargue de caviar, condiment gingembre / langoustine, bouillon de légumes racine et sumac / courgette aigre-doux, feuille d’amidon, pommade courgette / algue, pommade de patate douce, réglisse, poutargue / crousti-galanga bœuf en juxtaposition de cuisson, Campari / parmesan, pistache, grenade et Aloe vera / crevette grise, katsuobushi de têtes, huile de piment vert / œufs de truite et saumon sauvage marinés au saké, lait fumé / biscotte végétale, pommade herbacée-iodée, fleur de l’instant / anguille fumée au chocolat / pain viennois fumé au charbon, beurre demi-sel au Combawa / chair d’araignée au jus animal, rascasse marinée saké-betterave et garum / semoule aux agrumes et fleur d’oranger, raifort et jus de carapaces / moules, maquereau, hareng, noix de coco, condiment mojito estragon et jus vert / Focaccia au beurre noisette, piment d’Espelette réglisse, beurre Nigelle et épices / langoustine, algue vernie, cordifole, beurre blanc plancton, jus dragon, vierge marine, poutargue / langoustine avec les doigts popcorn d’algues, sésame à la bonite, condiment citron géranium / consommé de volaille infusé aux coquilles d’huîtres, dulce et écorces d’agrumes brûlées / Chénopode en tempura-vodka, œuf de brochet fumé, piment, poussière de carapace / haricots verts, cerise pimentée, suc d’oignons / fleur de courgette, noix de cajou, épices, fruit de la passion / épinard, vermicelles au curry, jus vert salé, jus de betterave / glace wasabi-raifort et diplotaxis / glace confiture de lait et thé vert matcha / texture pudding au jus de viande, tamarin hibiscus, abricot / banane fermentée, riz soufflé, cacahuète sucrée, kumquat / maïs givré, balsamique 25 ans, meringue maïs fumé grillé / avocat, perle de gingembre, fenouil, graines de moutarde / palet glacé pomme verte, eau de pomme verte au curry vert, spray de gin / texture sablé-cigarette, pommade de patate douce aux épices, framboise, citron basilic.
Le texte paraît interminable, mais le repas est aérien, et une suite d’émerveillements. Je crois n’avoir jamais mangé une cuisine d’une telle inventivité. Le mot qui résume le mieux ce repas est « émerveillement ».
La liste des vins est fondée sur des vins nature et des vignerons champenois de maisons familiales. Il y a des vins très abordables et des vins très connus à des prix dissuasifs. Le cas le plus extrême est celui du champagne Salon 1997, proposé à un prix qui doit être environ quinze fois plus élevé que le prix que j’avais payé lors de sa commercialisation. Nous devons donc aller dans une zone de prix qui laissera au restaurant moins de marge que s’il avait prévu moins de marge en pourcentage sur des vins plus recherchés. Mais nous ferons plus tard une entorse à ce raisonnement.
Le Champagne André Heucq Hommage Parcellaire 2014 est de 100% de pinot meunier ce qui m’a poussé à le commander, car je n’en bois pas fréquemment. Il a été dégorgé en octobre 2019. Il est énergique, intense et subtil et convient parfaitement à la cuisine subtile du chef. Il est vraiment gastronomique et j’apprécie ses belles complexités. Un champagne à recommander pour une gastronomie complexe.
Le Châteauneuf-du-Pape Les Safres Le Clos du Caillou blanc 2013 titre 15°. Il est d’une puissance rare, très épicé, trouvant un écho avec la cuisine du chef. Il est confondant de perfection dynamique. Je l’adore pour sa richesse ensoleillée.
Après ces deux vins il fallait bien se laisser aller à commander un vin de légende. Dès la première gorgée du Champagne Jacques Selosse Millésime 2008 dégorgé en janvier 2020, on sait que l’on est sur un Olympe de grâce, de complexité et de grandeur. Ce vin, comme les dieux, a tout pour devenir éternel. Etrange, virevoltant, capricieux, il cherche à nous décontenancer par ses saveurs, mais nous les prenons telles qu’elles sont.
Si ce champagne est une merveille, je considère, comme mes amis, que le plus impressionnant est le Châteauneuf, glorieux, royal, d’une largeur rarement atteinte par d’autres vins.
Petit détail qui compte : à aucun moment aucun serveur n’a balbutié ou hésité pour présenter la composition si complexe des plats. C’est à signaler.
La cuisine d’Alexandre Mazzia est exceptionnelle. Les complexités sont infinies, les associations sont osées mais pertinentes, et le tout est d’une cohérence absolue. Tout est subtil, suggéré, délicat. Nous allions de petit nuage en petit nuage. Le service du vin mériterait d’être plus présent mais les compétences du directeur et du sommelier ne sont pas en cause.
Tout a été subjuguant. C’est un des plus grands repas de nos vies.