Archives de l’auteur : François Audouze

Déjeuner au siège du Yacht Club de France mercredi, 1 mai 2024

Notre groupe de conscrits s’est agrandi d’une unité. Nous avons fermé les yeux sur l’âge de ce jeune conscrit comme nous l’avions déjà fait pour un autre ami. Disons que quand on aime on ne compte pas.

C’est le nouveau presque conscrit qui nous invite pour la première fois au siège du Yacht Club de France. Il a travaillé avec Thierry Le Luc, le directeur de la restauration pour mettre au point le menu et les vins.

Le résultat de leurs travaux est : hors d’œuvre en apéritif avec coquilles Saint-Jacques, ris de veau, charcuteries fines, toasts de foie gras / carpaccio de bar et mangue ivoirienne et croustillant de Saint-Jacques / filet de veau Ségala de l’Aveyron, pommes Président, légumes de saison, sauce poivre / fromages d’Éric Lefebvre MOF / Saint-Honoré revisité, fraises, basilic.

Sur le menu l’étiquette du veau fermier d’Aveyron figure et je ne résiste pas au plaisir de mentionner ce qui est indiqué : né et élevé à la ferme dans de bonnes conditions de confort et de bien-être, allaité par sa mère et nourri de compléments de céréales et de foin de la ferme. L’origine est France Occitanie et l’absence d’OGM ainsi que les indications sont certifiées par un organisme tiers indépendant, dont les coordonnées du service consommateur sont données. Ce texte montre le fossé qui existe entre une alimentation de qualité et ce qu’on appelle la ‘malbouffe’.

Comme toujours, les mets de l’apéritif sont si copieux et si bons que toutes nos résolutions de modération fondent comme un iceberg. Le Champagne Deutz Brut Classic sans année ne m’émeut pas. Est-ce parce que mon palais n’était pas préparé, c’est possible, mais le courant ne passe pas, alors que j’aime les champagnes de cette belle maison.

Le Champagne Laurent-Perrier ‘La Cuvée’ Brut sans année me paraît beaucoup plus adapté et se montre fort agréable.

Avec mes amis, nous avons une différence d’opinion sur le plat de poisson. Ils l’apprécient particulièrement, ce que je peux comprendre. Mais dans ma perspective, tournée vers les vins, la présence de mangues avec du bar en carpaccio et un croustillant de Saint-Jacques, ce n’est pas possible. Comme quoi tous les goûts sont dans la nature.

Je n’ai pas touché aux tranches de mangue, ce qui m’a permis d’apprécier le Puligny Montrachet Le Trézin Domaine Gérard Thomas 2020, jeune bien sûr mais avec un joli gouleyant.

Le veau est remarquable et la carte d’identité de sa provenance correspond à une réalité. Nous avons bu trois bouteilles de vins de Bouchard, deux Gevrey-Chambertin Bouchard Père et Fils 2016 et un Gevrey-Chambertin Bouchard Père et Fils 2013. J’avoue que dans le rythme passionné de nos discussions, je ne peux pas dire lequel ou lesquels j’ai bus mais ces vins sont agréables et francs.

Lorsque j’ai vu l’assiette de dessert se poser devant moi, j’ai été frappé par la beauté de la présentation et lorsque Thierry Le Luc nous a dit que c’est son fils qui a réalisé ce dessert, je lui ai demandé de le féliciter.

Comme toujours ces réunions de conscrits sont de beaux moments d’amitié.

Déjeuner au restaurant Astrance samedi, 27 avril 2024

Le prochain dîner, qui sera le premier de l’année, se tiendra au restaurant Astrance, de Pascal Barbot et Christophe Rohat. J’avais fait plusieurs dîners à l’ancien Astrance et j’ai envie d’en refaire dans le nouvel Astrance. J’ai réservé une table pour qu’après le déjeuner on puisse composer avec le chef le menu du repas.

Ma femme devait m’accompagner mais n’a pas pu aussi, le matin même, je demande à un ami de déjeuner avec moi en lui disant que l’on élaborera le menu du prochain dîner, auquel il participera.

L’idée m’est venue de faire plaisir à mon ami généreux en apportant une bouteille qui servirait aussi à donner au chef un rappel du goût des vins anciens pour qu’il en tienne compte dans ses réflexions.

Quand j’arrive, je suis accueilli avec des sourires aimables. Je n’ai pas apporté mes tirebouchons habituels, aussi j’ouvre la bouteille de Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti 1974 en prenant un soin tout particulier. Le bas du bouchon ne remonte pas avec le haut aussi me faut-il beaucoup d’attention pour qu’il ne tombe pas dans le vin.

Je sens le vin et instantanément je sais qu’il sera grand. Le niveau dans la bouteille est très convenable. La première couleur a quelques nuances terreuses, mais deviendra beaucoup plus rouge par la suite.

Nous bavardons avec Pascal et Christophe pour composer le menu du jour en insistant sur le fait qu’il faudra simplifier les recettes en vue du futur dîner. Je ressens une volonté forte d’aller dans ce sens.

En regardant la carte des vins je vois qu’il existe un Champagne Pierre Péters, Cuvée les Chétillons Blanc de Blancs Œnothèque 2002. C’est un champagne que j’ai adoré dès sa parution. Le prix est un peu lourd, mais j’en ai envie. Je demande au sommelier de me montrer la bouteille pour que l’on voie la date de dégorgement. Aucune indication n’est inscrite sur l’étiquette. Il y a une image à scanner, mais je n’aime pas ce procédé.

On nous sert le Champagne Pierre Péters, Cuvée les Chétillons Blanc de Blancs Œnothèque 2002 et je ressens une amertume qui tue un peu le plaisir. Il n’est pas question de refuser la bouteille mais je suis un peu déçu que ce champagne si vif ait perdu de sa superbe. Il est bon, bien sûr, mais il n’a plus la folle pétulance qu’il avait.

Les plats que nous allons goûter ont des cuissons absolument parfaites. Nous aurons successivement un petit biscuit magique, une brioche gourmande, une langoustine merveilleuse, dont la soupe est un régal, un riz spécial qui convient à un vin rouge et mettra en valeur le prodigieux Romanée Saint-Vivant Marey-Monge Domaine de la Romanée Conti 1974, un turbot d’une cuisson idéale avec les barbes bien grasses qui excitent le vin rouge, un rouget que Pascal préfère de grande taille alors que j’aurais aimé un rouget moins épais. Pascal a expliqué sa préférence et je suis sûr qu’il a raison.

Le pigeon est magistral de tendreté et le toast au foie est exactement ce qu’il faut pour le grand vin de la Romanée Conti. C’est un accord fusionnel. La petite assiette de lentilles est très croquante, mais peut-être pas nécessaire pour le futur plat.

Le dessert éthéré d’une meringue aérienne est parfait, mais ne pourra pas être utilisé pour les vins que nous aurons.

La Romanée Saint-Vivant aura été divine tout au long du repas et appréciée par Pascal et Christophe et bien sûr par mon ami ému de ce cadeau, qui n’a pas reconnu les habituels marqueurs de la Romanée Conti, la rose et le sel. Cela arrive que les vins de la Romanée Conti ne montrent pas ces marqueurs. J’ai aimé sa longueur extrême et la grâce subtile de son message. Il y a à la fois les complexités que donne l’âge mais aussi un joyeux récital de saveurs.

L’ambiance de la création du menu a montré que nous avons les mêmes visions pour espérer réussir le prochain dîner de wine-dinners.

Règles pour la 40ème séance de l’académie des vins anciens du 6 juin 2024 jeudi, 25 avril 2024

Rules in English : https://www.academiedesvinsanciens.org/rules-for-the-40th-session-of-the-academy-of-ancient-wines-on-june-6-2024/

Règles pour la 40ème séance de l’académie des vins anciens du 6 juin 2024

A lire attentivement, même si vous pensez connaître tout par cœur.

Pour participer à une séance il faut suivre le cheminement habituel :

  • Si l’on vient sans bouteille de vin, respecter les dates de paiement.
  • Si l’on veut venir avec un vin, proposer un vin ancien et fournir tous éléments sur le vin, dont le niveau dans la bouteille (chaque photo ne devra pas dépasser 500 Ko et devra être lisible. Elle sera en pièce jointe et non pas dans le corps du texte )
  • Obtenir mon approbation pour la ou les bouteilles proposées
  • Respecter les critères d’âge :
  • Champagnes d’apéritif : pas de règles. Ce seront des cadeaux des académiciens qui veulent en apporter, au-delà de leur apport
  • Champagnes : avant 1997
  • Vins blancs : avant 1991
  • Vins rouges et liquoreux : avant 1972

Dates à respecter

  • Livrer les vins à partir du 10 avril et avant le 17 mai
    selon le processus décrit ici :
  • soit livrer sa bouteille au 10 place des Vosges (sonner et demander au gardien de prendre possession des vins, qu’il gardera pour moi. Son numéro : 06.05.76.24.83)
  • cette possibilité  de Place des Vosges n’est plus valable du fait du départ du gardien.
  • Il est possible de livrer au restaurant Macéo. Voir règles spécifiques ci-dessous en italiques.
  • Le restaurant Macéo accepte de recevoir les vins que vous livrerez au 15 rue des Petits Champs 75001 PARISLes conditions sont les suivantes :

    Bouteilles mises dans une caisse en bois ou en carton.

    Indication précise : « académie du 6 juin » visible sur le paquet, en gros caractères.

    Aucun papier collé sur la bouteille

    Aucune mention écrite sur la bouteille

    Aucun chèque inclus dans le paquet.

    La bouteille étant dans un paquet, il n’y a aucune obligation de dérouler avec excès des rouleaux adhésifs qui rendent difficile la prise en main de la bouteille.

    Les livraisons pourront se faire en dehors des heures de service entre 11h00 et 12h00 ou entre 14h30 et 16h.

    Le directeur Adrian Williamson est prévenu.

    Attention : le restaurant Macéo sera fermé du 27/04 au 13/05. Ne vous trompez pas. Tous les vins doivent avoir été livrés avant le 17 mai.

  • ou livrer ou expédier sa bouteille à l’adresse : François Audouze Société ACIPAR, 44 rue André Sakharov 93140 BONDY.
  • Payer sa participation dans les délais prévus (avant le 22 avril)
  • Chèque à l’ordre de « François Audouze AVA » à adresser à François Audouze société ACIPAR 44 rue Andrei Sakharov 93140 BONDY, qui est de : 180 € si on apporte un vin agréé ou 290 € si on vient sans vin.
  • Ou bien avant le 22 avril pour le paiement à RIB FRANCOIS AUDOUZE AVA : FR7630003030000005024474342 (je préfère largement les virements si faciles aujourd’hui)

– Le lieu de la réunion est : RESTAURANT MACEO 15 r Petits Champs 75001 PARIS

– Heure de la réunion : 6 juin 2024 à 19h et fin impérative 0h00.

Recommandations supplémentaires :

– ne pas mettre de chèque dans le colis qui comporte votre vin. Les chèques doivent être envoyés à part (je préfère les virements).

– ne pas coller quoi que ce soit sur la bouteille. Tout ce qui est collé est difficile à enlever.

  • Le restaurant me demande de limiter à 32 personnes. D’où l’intérêt de s’inscrire vite.

Remarque générale importante :

L’expérience des 39 séances précédentes montre que je suis obligé de gérer beaucoup trop de cas particuliers au dernier moment. On va essayer de ne pas subir les impondérables.

Mettre ma secrétaire en copie de tous vos mails, à winedinners.paris@gmail.com

Nota : les apports bénévoles de fromage et de chocolat sont appréciés. Je préciserai si c’est possible.

Rules for the 40th session of the Academy of Ancient Wines on June 6, 2024 jeudi, 25 avril 2024

Rules for the 40th session of the Academy of Ancient Wines on June 6, 2024

Read carefully, even if you think you know everything by heart.

To participate in a session you must follow the usual procedure:

• If you come without a bottle of wine, respect the payment dates.

• If you want to come with a wine, offer an old wine and provide all information on the wine, including the level in the bottle (each photo must not exceed 500 KB and must be readable. It will be attached and not in the text of the email)

• Obtain my approval for the proposed bottle(s)

• Respect the age criteria:

• Aperitif champagnes: no rules. These will be gifts from academicians who want to bring them, beyond their contribution

• Champagnes: before 1997

• White wines: before 1991

• Red and sweet wines: before 1972

Dates to respect

• Deliver the wines from April 10 and before May 17

according to the process described here:

• either deliver to restaurant Macéo according to new rules :

The Macéo restaurant accepts to receive the wines that you will deliver to 15 rue des Petits Champs 75001 PARIS

The conditions are as follows:

Bottles placed in a wooden or cardboard box.

Precise indication: “Academy of June 6” visible on the package, in large letters.

No paper stuck on the bottle

No mention written on the bottle

No check included in the package.

As the bottle is in a package, there is no obligation to excessively unroll adhesive rolls which make it difficult to hold the bottle.

Deliveries can be made outside of service hours between 11:00 a.m. and 12:00 p.m. or between 2:30 p.m. and 4:00 p.m.

Director Adrian Williamson has been notified.

Please note: the Macéo restaurant will be closed from 04/27 to 05/13. Do not be mistaken. All wines must be delivered before May 17.

• either send your bottle to the address: François Audouze Société ACIPAR, 44 rue André Sakharov 93140 BONDY.

• Pay your participation on time (before April 22)

• Check payable to « François Audouze AVA » to be sent to François Audouze company ACIPAR 44 rue Andrei Sakharov 93140 BONDY, which is: €180 if you bring an approved wine or €290 if you come without wine.

• Or before April 22 for payment to RIB FRANCOIS AUDOUZE AVA: FR7630003030000005024474342 (I much prefer the transfers which are so easy today)

– The location of the meeting is: RESTAURANT MACEO 15 rue des Petits Champs 75001 PARIS

– Time of the meeting: June 6, 2024 at 7 p.m. and mandatory end at 12:00 a.m.

Additional recommendations:

– do not put a check in the package containing your wine. Checks must be sent separately (I prefer wire transfers).

– do not stick anything on the bottle. Anything stuck on is difficult to remove.

• The restaurant asks me to limit it to 32 people. Hence the interest in registering quickly.

Important general note:

The experience of the 39 previous sessions shows that I am forced to manage far too many special cases at the last moment. We will try not to suffer the imponderables.

Copy all your emails to my secretary at winedinners.paris@gmail.com

Note: voluntary contributions of cheese and chocolate are appreciated. I will clarify if this is possible.

Revue de la société Amorim – don des bouchons mardi, 23 avril 2024

Revue de la société Amorim – don des bouchons

La société Amorim a accueilli ma collection de bouchons dans une grande salle qui sert de musée du bouchon. Ils sont heureux d’avoir reçu ce témoignage de bouchons de tous les âges. Ils en parlent dans leur revue.

cliquer sur ce lien :

AMORIM – Article Guardian of Memories

Déjeuner d’anniversaire dimanche, 21 avril 2024

Le lendemain matin il faut préparer le déjeuner dont l’intention est de fêter mon anniversaire. Mes trois enfants seront présents, ce qui est une chance appréciable, et deux de nos six petits-enfants seront avec nous. L’idée me vient de choisir des vins des années de mes trois enfants. Je descends dans la cave de la maison et je prends un Château Ausone 1967, un Cheval Blanc 1969 et un Pétrus 1974. Ce qui est intéressant, c’est que les trois vins ont un niveau de bas de goulot, ce qui est parfait et les étiquettes sont impeccables. C’est une bonne nouvelle sur la qualité de la cave de la maison.

Comme j’ai déjà ouvert il y a trois jours un vin de 1969 de l’année de mon fils, et comme trois vins rouges seraient de trop j’ouvre seulement le 1967 et le 1974 aux beaux bouchons et aux parfums prometteurs.

Lorsque c’est fait nous partons avec mon fils faire une promenade dans une magnifique forêt de 280 hectares, ouverte au public, et dont une porte est à moins de cinq cent mètres de chez nous. Quelle chance d’être si près de cette magnifique forêt conservée dans son état le plus naturel.

Au retour, j’ouvre un Champagne Heidsieck & Cie Monopole Cuvée Diamant Bleu 1979. La bouteille est très belle avec un verre biseauté façon diamant mais élégamment suggéré. Le bouchon s’est brisé non pas comme souvent en laissant en place la lunule du bas, mais juste sous la partie externe du bouchon ce qui est rare. Le nez promet.

Les enfants et petits-enfants arrivent et nous avons sur table un programme gargantuesque : deux fromages de tête, des tranches de jambon Pata Negra, des amandes salées, des têtes de moines, du gouda au Pesto comme celui que nous aimons dans le sud, un saucisson viril et j’oublie sans doute d’autres gourmandises.

Nous commençons par le Champagne Abel Lepitre 1959 pour que mes filles profitent de ce superbe et généreux champagne. L’effet du temps passé depuis l’ouverture est faible. Mes filles peuvent donc profiter de ce beau et riche champagne.

Le Champagne Heidsieck & Cie Monopole Cuvée Diamant Bleu 1979 a une belle bulle encore active. C’est un champagne racé d’une belle année qui m’évoque le Mumm Cuvée René Lalou 1979 qui a la même vivacité et la même finesse. Ce champagne s’adapte à tous les mets et montre sa belle subtilité racée. Un champagne long et raffiné.

Nous passons à table. Ma femme a préparé une épaule d’agneau de sept heures, marinée avec un peu de bière blonde et des légumes comme la carotte.

Le Château Ausone 1967 a un nez élégant. Le vin lui-même est élégant et noble. Il est très long, dynamique. C’est un grand Saint-Emilion exprimant le meilleur de ce que ce millésime peut donner.

Le Pétrus 1974 avait un parfum plus discret à l’ouverture. Ce vin joue avec mon palais. Il dit : essayez de trouver qui je suis. J’ai commencé à préférer l’Ausone mais au bout d’un certain temps, la complexité de ce Petrus m’a fait l’aimer un peu plus. Mon fils l’avait préféré dès le début. Il m’a fallu plus de temps.

Pour le dessert, ma femme a préparé un gâteau reine de Saba. J’ai ouvert un Maury la Coume du Roy Agnès de Volontat-Bachelet 1948. Je connaissais la mère d’Agnès et je connaissais leur collection de vieux tonneaux. La mise en bouteille de 50 cl a été faite récemment à partir de fûts bien conservés.

Ce Maury de 17° d’alcool est tellement charmant. C’est un plaisir à boire, simple et souriant. Parfait pour le chocolat car il est léger et ne s’impose pas. La reine de Saba de la forme d’un tore est pratique pour planter des bougies que j’ai soufflées. Il y en avait largement moins que mon âge. Ce repas avec mes enfants et petits-enfants fut un grand moment de bonheur.

Dîner du samedi avec mon fils samedi, 20 avril 2024

Nous allons fêter mon anniversaire avec deux jours d’avance, un dimanche, pour que nous ayons avec nous nos trois enfants et deux des petits-enfants. Mon fils dit qu’il sera le samedi soir avec nous. Il va falloir que je prépare ce dîner du samedi.

Nous commencerons par le Champagne Abel Lepitre 1959 dont il reste presque la moitié et j’ajouterai un Champagne Dom Pérignon 2002 que je n’ai pas bu depuis longtemps.

Ma femme ayant prévu des linguines avec des dés de saumon, il faut un blanc. Je vais dans la cave de la maison que j’utilise très peu car souvent je prépare les vins dans la cave principale. Je vois dans une case deux bouteilles qui ont la même étiquette avec un seul mot : Graves. C’est sans doute une étiquette « passe-partout » que l’on donne à des marchands de vins qui ont acheté un petit fût de vin. Du fait de la présentation de l’étiquette, ce peut être des années 40 ou 50. Les niveaux dans les deux bouteilles sont très bas, la perte étant forte. Comme il y a un risque certain, je choisis aussi un Chevalier-Montrachet Domaine du château de Beaune demi-bouteille 1960.

J’essaie d’ouvrir la première bouteille de Graves, celle qui a le plus bas niveau et la couleur la plus foncée et malgré mes efforts je ne peux éviter que le bouchon tombe dans le vin, avec beaucoup de petits déchets de liège. Je prends une carafe, un entonnoir et un tamis pour recueillir les petites particules. Le vin en carafe n’a pas un mauvais parfum, mais de peu d’émotion.

Le bouchon de la deuxième bouteille de Graves vient sans trop de problème. Les senteurs sont assez agréables, sans défaut.

J’ouvre maintenant la demi-bouteille de Chevalier-Montrachet 1960. Le bouchon impeccable sort entier et sans problème et le magistral parfum est encore plus agréable quand il suit les parfums faibles des deux Graves.

Le temps de l’apéritif est proche aussi j’ouvre le Dom Pérignon 2002. Le pschitt est très fort, poussant ma main en faisant un joli bruit. Le parfum est magique, conquérant.

J’ai acheté deux cochonnailles, un pâté de tête et une rillette de porc, mais le boucher a ajouté une rillette de volaille en me disant : je la préfère à celle de porc, essayez-la.

Le Champagne Dom Pérignon 2002 est versé dans nos verres. Sa couleur est très pâle, comme celle d’un 2013, montrant une belle jeunesse. En bouche ce champagne est d’une vivacité extrême. C’est un jeune fou, ravi de s’ébrouer. Il est exactement comme le 2002 que j’ai pu boire il y a plus de quinze ans. Il est brillantissime, et à le boire, je ne comprends pas comment on a créé un 2002 P2 de deuxième plénitude quand ce 2002 a encore une jeunesse si brillante. Quel grand champagne.

Les cochonnailles sont idéales. Si la rillette de volaille est plus raffinée, je préfère le gras de la rillette de porc, qui met en valeur le champagne.

Nous passons à table. Nous convenons que le Graves mis en carafe ne sera pas bu et nous essayons le Graves blanc années 40 ou 50 resté en bouteille, avec les linguines et dés de saumon. Le plat met en valeur le vin de Graves qui nous donne quelques belles sensations, mais l’envie est trop grande de passer au Chevalier-Montrachet Domaine du château de Beaune demi-bouteille 1960. Quel grand vin ! Le parfum est grand et joyeux et en bouche, c’est un vin solide comme le château de Beaune. Carré, puissant, riche, il a tout pour plaire. Il n’y a aucun effet lié au petit volume d’une demi-bouteille et son âge de 64 ans ne se ressent absolument pas. Une réussite absolue.

Il reste un fond de bouteille du Château Margaux 1916 qui n’a pas souffert d’avoir été ouvert il y a trois jours. Avec un saint-nectaire nous en profitons.

Dîner avec mon fils et des vins centenaires jeudi, 18 avril 2024

Mon arrêt de repas et de toute forme d’alcool a duré deux mois du fait d’une hospitalisation avec des montagnes de médicaments faisant de mon estomac une usine chimique. C’est la première fois que je vais partager des vins avec mon fils aussi ai-je envie de frapper très fort. Pour les rouges, je choisis un Château Margaux 1916 à la très jolie bouteille soufflée et au niveau mi- épaule. Cette bouteille m’inspire. Je prends ensuite une demi-bouteille de Château Haut-Brion 1919 d’une grande beauté, au niveau parfait. L’idée d’ouvrir deux vins de plus de cent ans me chatouille aimablement.

Pour le champagne, je choisis d’abord une demi-bouteille de Pol Roger 1969, elle aussi très belle et une bouteille qui m’est inconnue, un champagne Abel Lepitre 1959.

J’ouvre d’abord le Château Margaux 1916. Le verre du goulot n’a pas d’aspérité et pas de surépaisseur. Sous la capsule il y a de la poussière. Le bouchon vient bien et de belle qualité. Le parfum est prometteur. Il n’y a aucun défaut apparent.

Le bouchon du Haut-Brion 1919 est collé au goulot. Je ne peux pas le soulever car seules des déchirures se font. Je suis obligé d’utiliser le tirebouchon Durand pour sortir le bouchon. Le parfum a l’ouverture est encore plus engageant que celui du Margaux.

Vient le tour de la demi-bouteille de Pol Roger 1969. Le bouchon est tellement collé au verre que je n’arrive pas à le soulever. J’utilise un tirebouchon pour champagnes dont le manche est prolongé d’une sorte de fourche que j’essaie de pousser sous le bord du bouchon. Après un gros effort je soulève le beau bouchon sur lequel on voit clairement 1969, mais la lunule du bas est restée dans le goulot. Je la lève facilement.

Le parfum du champagne est enthousiasmant. Aucun pschitt n’est apparu.

Le Champagne Abel Lepitre 1959 a une jolie bouteille. Le bouchon – enfin un – vient facilement. Le bouchon est court et beau. Le parfum très différent est lui aussi très engageant.

A l’heure de l’apéritif nous commençons par le Champagne Pol Roger 1969. La couleur est dorée et magnifique. Le parfum est riche et puissant. En bouche, quel bonheur ! J’avais bu hier au Guy Savoy un champagne de 2018. C’est le jour et la nuit. Le Pol Roger est sur l’Olympe quand le 2018 était sur le plancher des vaches. Ce champagne est adorable, riche, large solaire, conquérant. Sur un fromage de tête, il est impérial.

Le Champagne Abel Lepitre 1959 a encore un peu de bulles et une couleur dorée à peine plus claire que celle du Pol Roger. Les deux champagnes sont opposés quand le Pol Roger est guerrier, le 1969 raconte des madrigaux délicieux. Il est tout en subtilité. Les deux champagnes sont parfaits, chacun en son genre. J’aurais tendance à dire que le Pol Roger est le plus noble, le plus complet, mais l’Abel Lepitre montre un étalage de subtilités qui le mettent à un très haut niveau.

Avec mon fils nous sommes ravis, car ces deux champagnes sont porteurs de grands plaisirs.

A table nous avons des pommes de terre à la crème et à la truffe, une truffe assez blanche, plus stricte qu’une melanosporum.

Je sers le Château Margaux 1916 et immédiatement nous sommes émus car ce vin est transcendantal. Il a une forme de perfection absolue. Il est tout de grâce. L’année 1916 est oubliée des radars des plus grands amateurs, car 1914, 1915, 1918 et 1919 sont très au-dessus de ce millésime. Mais je me souviens d’avoir été subjugué par un Malartic-Lagravière 1916. J’avais été tellement dithyrambique que le château avait mis mon commentaire affiché dans la salle de réception des visiteurs du château. J’avais été surpris de le lire lors d’une visite au château.

Le Margaux 1916 c’est cela, un sentiment de perfection intemporelle car l’ayant servi à mon fils à l’aveugle il avait un demi-siècle d’erreur, ce qui est tout à fait normal.

Ma femme a préparé des tranches de Wagyu dont nous aurons trois services, de quoi profiter des vins. Le Château Haut-Brion 1919 a un parfum riche extraordinaire et nous avons une fois de plus l’impression d’être en face de la perfection absolue. J’espérais beaucoup de ces deux vins centenaires, mais à ce point, jamais. Le Haut-Brion est plus dense, plus construit, plus solide. Et on peut dire que le Margaux est très féminin et le Haut-Brion très masculin et chacun dans un style qui n’est pas exagéré.

Nous nous regardons avec mon fils, émerveillés de cette expérience unique. Le wagyu convient aux deux mais naturellement plus au vin le plus masculin.

Un Epoisses ne convient qu’au 1919.

Quatre vins, quatre réussites. Voilà un beau repas qui marquera nos mémoires.

Dîner au restaurant Guy Savoy mercredi, 17 avril 2024

Avec ma femme, nous allons célébrer nos cinquante-huit ans de mariage au restaurant Guy Savoy dans le magnifique immeuble du musée de la Monnaie. Il y a plusieurs années que nous n’étions pas venus en ce lieu à la décoration très moderne. Nous sommes reconnus et nous reconnaissons de nombreux membres du personnel. Il y a un côté intimiste dans les salles de ce restaurant.

Guy Savoy vient nous saluer. Il est toujours aussi charmant et dynamique. Nous commanderons à la carte. L’entrée sera commune : suprême de volaille, foie gras et artichaut, vinaigrette à la truffe.

Nos plats divergeront, ma femme prenant le ris de veau « moelleux-croustillant », les morilles étuvées, pointes et feuilles vertes, tandis que je prendrai les beaux morceaux de l’agneau en verdure printanière car j’ai vu ce plat en photo sur Instagram.

Sylvain, le très compétent sommelier que je connais depuis longtemps me suggère, comme champagne au verre, un Champagne J.M. Sélèque Partition 2018 en sept parcelles, dégorgé en octobre 2023. Ce champagne jeune est intéressant parce qu’il a une belle structure et une certaine amplitude. Mais bien évidemment, il n’a pas l’ampleur d’un champagne plus âgé. Je le boirai avec plaisir.

L’amuse-bouche est à base d’ortie, pour montrer un attachement à la nature, mais j’avoue ne pas avoir été séduit car l’ortie a une forte amertume. Il y a ensuite une crème au caviar.

Devant une carte des vins typique des grands restaurants, on reste parfois songeur. Un champagne que j’adore, âgé d’un quart de siècle seulement, est proposé à 33 fois mon prix d’achat, je l’ai vérifié. Mais évidemment le prestige de ce champagne a explosé comme une fusée. Mais il y a aussi des vins très accessibles. J’ai jeté mon dévolu sur un vin du Rhône de 2012. Sylvain me dit que ce vin est encore trop fermé et me suggère une Côte-Rôtie Michel et Stéphane Ogier 2006. C’est d’autant plus aimable que sa proposition est moins chère que mon choix.

Lorsque je sens le vin, le parfum me semble extrêmement puissant. En bouche j’ai la même impression au point que ce vin me paraît fortifié. Sylvain me dit qu’il connaît ce vin depuis son origine et qu’il l’a suivi depuis sa création. Je lui fais goûter un verre et il maintient son jugement. Je suis peut-être trop influencé par les Côtes Rôties de Guigal qui ont d’autres expressions.

Entre les deux plats nous avons eu la légendaire soupe d’artichaut à la truffe noire. Les plats eux-mêmes sont très accomplis.

Nous avons décidé de ne pas prendre de dessert, mais toute l’équipe nous a submergés de gentillesse et de petites portions absolument délicieuses.

Quel bonheur d’avoir retrouvé ce grand restaurant et son équipe si chaleureuse.

déjeuner au restaurant Le Sergent Recruteur vendredi, 12 avril 2024

Un ami dont la vie a de multiples facettes a en tête un possible dîner chez un restaurateur qui a eu pendant quelques années le titre de meilleur restaurant du Monde par l’un des médias les plus sérieux qui attribuent ce type de prix. Je l’invite à déjeuner au restaurant Le Sergent Recruteur où officie Alain Pégouret qui a fait pour moi tant de dîners au restaurant Laurent.

J’arrive à 11 heures pour ouvrir la bouteille que j’ai apportée, après un périple en voiture invraisemblablement long, car la Mairie de Paris veut dégoûter tous les banlieusards de venir à Paris. J’ai choisi un Château Gruaud-Larose-Sarget 1934. C’est en 1867 que Gruaud-Larose s’est séparé en deux Gruaud-Larose distincts, le Sarget et le Bethmann devenu Faure-Bethmann, deux propriétés distinctes qui se sont réunies grâce à Cordier en 1934, négociant qui venait de les racheter. 1934 sera le dernier millésime où l’on a distingué les deux propriétés. Nous boirons donc le dernier Sarget.

L’étiquette est belle, le haut de la capsule est doré est de grande beauté. Le niveau est entre haute épaule et mi- épaule, ce qui est acceptable pour un vin de 90 ans. Le bouchon vient en mille morceaux du fait d’un pincement du goulot qui l’empêche de monter sans se déchirer.

Le nez est prometteur et Aurélien le sympathique et compétent sommelier pense de même. Je demande à Aurélien un champagne pour le repas. Aurélien a une très grande connaissance des champagnes de vignerons qui travaillent à la pureté et l’authenticité des vins. Je goûte un champagne qui est toujours millésimé, d’un millésime très récent, et c’est un peu dur pour moi de goûter ce champagne si jeune et sans aucune concession. Aurélien me verse ensuite un champagne fait selon la forme d’une solera commencée en 1990. Il y a beaucoup plus de matière et de consistance. Ce sera le champagne du début de repas.

Ayant du temps devant moi, je vois en cuisine de beaux petits poulets qui me tentent et une préparation de lotte. Ça pourrait faire mon repas.

Mon ami arrive et nous commençons par la traditionnelle et incontournable rillette de maquereau moutardée, qui met en valeur le champagne que je n’ai pas eu le réflexe de photographier et me reste donc inconnu.

Mon menu sera lotte contisée à l’anguille fumée, cuite au beurre d’amande, une ‘rôtie’, tatin de choux et pomme granny, sauce verjutée / volaille de Luteau rôtie à l’ail noir sous la peau, celtuces et bimis, fleurette d’herbes fortes et thé matcha. Mon ami prendra un menu très différent mais nos plats s’accorderont avec le vin qui apparaît maintenant.

Quand je verse le Château Gruaud-Larose-Sarget 1934 je suis étonné de voir le vin aussi clairet. Je constate que les parois de la bouteille sont noires. Le vin a collé au verre et ce que je verse est un peu dépigmenté. Le parfum du vin m’évoque un fût en cave dont on a soulevé la bonde. Quand on sent le vin à l’intérieur du fût, on a cette odeur. Aurélien à qui je sers un peu de vin a strictement la même sensation.

En bouche, ce qui m’étonne c’est que le fruit qui s’expose est puissant. Qu’un vin de 90 ans ait un tel fruit est étonnant. Mais le vin n’a pas de puissance. Il est clairet avec une acidité délicate. Beaucoup d’amateurs seraient rebutés par le manque de consistance, mais j’aime ce vin tel qu’il est là, atypique combinant un beau fruit et une délicate acidité. J’ai connu des Gruaud-Larose beaucoup plus généreux, mais ce vin se boit bien et nous finirons la bouteille.

Le bas de la bouteille donne un vin beaucoup plus foncé, plus riche et de plus forte personnalité. Il se trouve que j’ai bu 153 vins de 1934. Je situerais le vin que nous buvons dans le troisième tiers qualitatif, mais j’ai aimé ce vin comme il s’est présenté, étonné par son aussi beau fruit.

Les deux plats ont eu des cuissons idéales. Alain Pégouret est heureux dans son restaurant, Aurélien est un sommelier pertinent et chaleureux. Nous avons avec mon ami exploré des idées à mettre en œuvre. Ce fut un beau déjeuner.