Archives de catégorie : dîners ou repas privés

Dîner au restaurant Hélène Darroze at the Connaught samedi, 13 septembre 2014

Après le pantagruélique déjeuner au restaurant Alain Ducasse au Dorchester, une pause était nécessaire. L’avantage d’un hôtel au centre de Mayfair, c’est qu’on se rend à pied dans tous les lieux de vie les plus chics même si les taxis abondent, et feraient pâlir d’envie les touristes parisiens. Se promener dans Mayfair permet de constater à quel point le luxe se trouve à Londres plus qu’à Paris où il se cache.

Nous pénétrons à l’hôtel Connaught où Ferraris, Rolls Royce et autres occupent les abords. Le restaurant Hélène Darroze at the Connaught bénéficie de la même décoration raffinée que l’hôtel, avec des bois lourds et très foncés. La souriante directrice Sandrine est la femme du directeur du Ducasse Dorchester, ce qui permet de supposer que le tamtam a fonctionné depuis les discussions intéressantes que nous avons avec Damien et Vincent.

Le choix du menu est très original. On nous donne un boulier, avec de belles billes blanches sur lesquelles est inscrit un mot clef. On peut choisir 5, 7 ou 9 billes qui vont composer le menu, chaque bille étant expliquée dans un court texte collé sur un support en bois.

Mon choix sera : Caviar / Hake / Cep / Lamb / Fig.

Détaillons : Oscietra Kaviari, cauliflower, cucumber, hazelnut / Hake : Nahikori de Saint-Jean de Luz, coco beans, clams, calamari, salsa verde / Cep de Clermont-Ferrand, walnut, lardo du Colonnatta, frog legs / lamb Axuria Basque country, carrot, tandoori, Greek yoghurt, mint / Violet Fig from Var, Greek yoghurt, Port, sesame.

La carte des vins est de loin la plus riche de ce que j’ai rencontré jusqu’ici à Londres. Pour beaucoup de maisons de champagne il y a cinq ou six millésimes, ce qui est remarquable. Les prix sont aussi londoniens que dans les autres restaurants ce qui fait que le vin rare est sur une autre échelle tarifaire à Londres par rapport à Paris.

J’ai choisi un Champagne Laurent Perrier Grand Siècle, dont Mirko, le sympathique sommelier d’origine italienne, me dit qu’il est d’arrivage récent. Le champagne est servi un peu chaud aussi faut-il le frapper pour qu’il soit agréable à boire. Encore tiède, il est pataud et manque d’expressivité. Frais, il redevient noble, équilibré et de belle complexité.

Le caviar n’est pas très mis en valeur par les saveurs qui l’accompagnent. Il eût probablement fallu ne garder que la délicieuse gelée de concombre. Le merlu est un beau poisson et le plat aux saveurs multiples est très bien intégré. Les raviolis de cèpes et cuisses de grenouilles avec un coulis d’ail forment un plat gourmand et généreux. C’est un plat de plaisir pur. La grouse qu’a prise mon amie est tellement tendre qu’on dirait un pigeon. L’agneau est superbe, goûteux, en deux préparations très tendres.

Mirko me fait goûter à l’aveugle un Mullineux Granite Syrah Swartland Afrique du Sud 2010 dont la syrah est reconnaissable à son évocation de poivron vert. Le final du vin est un peu abrupt.

Curieusement, le champagne même frais ne rafraîchit pas. Il est opulent, tapisse le palais, jouit d’une belle longueur mais ne rafraîchit pas. Le dessert à la figue est très agréable et léger.

Le repas dans ce restaurant d’Hélène Darroze est enthousiasmant.

Nous avons rencontré Mirko le lendemain matin pour parler de dîners de vins anciens. Mirko nous a montré sa belle cave dont il est fier.

En trois jours, grâce à mon amie française londonienne j’ai fait une visite de quatre restaurants de haut niveau et de deux cavistes impressionnants. Dans un monde qui bouge, on peut constater que Londres bouge, Londres vit, épouse son temps, beaucoup plus qu’un Paris frileux, anxieux même s’il a de beaux restes. C’est Londres qui a fait bouger le vin de Bordeaux par ses exigences de qualité il y a quelques siècles. Y faire quelques dîners de vins anciens, comme celui n° 28 que j’ai fait au Gavroche de la famille Roux pourrait être un joli challenge.

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notre table au Helene Darroze at Connaught 001

les billes pour composer son menu et mon choix de cinq billes

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les explications sur un petit chevalet recto-verso

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déjeuner au restaurant Marcus à l’hôtel Berkeley à Londres samedi, 13 septembre 2014

Une fidèle académicienne de l’académie des vins anciens vit à Londres. Elle m’a préparé un périple gastronomique pour que je puisse envisager d’organiser des dîners de wine-dinners à Londres. Le trajet par Eurostar est facile et tranquille. Il présente l’avantage majeur sur l’avion d’arriver au centre de Londres. Un taxi me conduit à mon hôtel, The Chesterfield Mayfair, situé à portée de marche des endroits que je visiterai.

Nous allons déjeuner au restaurant Marcus à l’hôtel Berkeley. Nous y sommes accueillis chaleureusement par une équipe souriante. La carte des vins est abondante mais il y a des prix londoniens, c’est-à-dire stratosphériques. Je repère un chambertin qui fait partie de mes chouchous dont le prix est environ vingt fois le prix que j’ai payé. Il faut donc louvoyer dans la carte pour espérer trouver de bonnes pioches. Le dévolu sera jeté sur un Château de Fonsalette Côtes du Rhône 1996.

Je choisis dans le menu : ris de veau aux amandes et nectarine / grouse avec fenouil, haricots et figues.

Le sommelier Michael est charmant et nous propose de nous offrir quelques vins au verre avant l’arrivée du vin du Rhône. Le premier est un Riesling Langenlois Loiserberg autrichien Kamptal Weszelli 2012. Il a un joli nez, une attaque très jeune, un beau fruit et un final très frais. Sa belle structure est celle d’un vin un peu fumé évoquant la noisette grillée. Le ris de veau de qualité est cuit à la perfection.

Le Helus Belus blanc Roussanne 2012 de Santa Barbara Californie 2012 est plus lourd, plus pataud et a plus d’alcool que le riesling ciselé. Il lui faudrait deux ans de plus.

Le Puligny-Montrachet Premier Cru sous le Puits Domaine Larue 2012 est plus joli que la Roussanne. Il a une belle acidité. Il manque d’ampleur mais est très agréable dans sa fraîcheur. Il est très jeune.

Si l’on pense à un dîner de vins anciens, il faudrait que le ris de veau reste accompagné de sa crème goûteuse mais abandonne les amandes et la nectarine qui détournent du goût principal.

Le chef décide d’ajouter à notre menu un turbot aux escargots, échalotes et gnocchis. Ce plat est délicieux. Michael nous sert un verre de Mioni Frioli Colli Orientali Ribolla Gialla Italie 2011. Le vin du nord de l’Italie est riche et marche divinement bien avec la sauce du gnocchi. Il est simple, direct, plein en bouche, de belle minéralité. Une gentille curiosité.

La grouse est absolument parfaite, beaucoup plus tendre que ce que j’attendais. Le Château de Fonsalette Côtes du Rhône 1996 a un nez superbe, une belle attaque, mais tout-à-coup tout s’arrête. Le vin n’a pas de final, ce qui limite le plaisir. Il évoque l’olive verte avec une légère trace de poussière. On dirait que le vin est « twisté », c’est-à-dire qu’il a perdu de sa cohérence.

J’ai goûté l’agneau qu’avait choisi mon amie, tendre et joliment épicé. Nous avons ensuite discuté avec Alison, la responsable des événements et le sommelier. Une jolie salle pourrait accueillir des dîners de vins anciens. La cuisine est excellente, le service est dynamique et attentionné. Marcus pourrait être un point d’ancrage de beaux dîners.

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Retour à Paris après 3 mois de sud mardi, 9 septembre 2014

Un membre de l’académie des vins anciens m’invite à déjeuner au restaurant Taillevent. La décoration du rez-de-chaussée, et l’agencement général de l’espace ont été revus et cela donne un coup de jeune à cette table institutionnelle. L’équipe est toujours souriante et accueillante. On se sent bien en ce lieu chaleureux.

Le menu du déjeuner est joliment conçu. Nous choisissons des œufs brouillés au homard et une pintade aux petites pommes de terre et giroles, fromage et dessert à la fraise. L’amuse-bouche, croustillant de langoustine, donne le ton. La cuisine est remarquable d’exécution, avec une sérénité qui permet de jouer juste. Pas d’épate, pas d’esbroufe, la cuisine est claire limpide, avec des dosages de grande distinction.

La bonne résolution de ne rien boire est écornée tout d’abord par un verre de Champagne Bollinger 2004 un peu âpre d’attaque mais qui montre qu’il est vineux et complexe. Un champagne qui en impose. La résolution chavire avec un verre de Chante Coucou, Côtes du Marmandais Elian da Ros 2007 fort joyeux, d’un beau fruit joliment ciselé. On pourrait reprocher un manque d’ampleur, mais le vin dans sa logique est une belle surprise de justesse et d’équilibre du fruit.

Reprendre la vie parisienne après les vacances au Taillevent, c’est aller tout de suite au meilleur.

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Dîner dont le thème est « vins de la région » mardi, 2 septembre 2014

Des amis nous invitent à un dîner dont le thème est : « apportez des vins de la région« . Nous sommes dans la région des Côtes de Provence et des Bandol. Le choix d’une bouteille est toujours excitant et j’ai plusieurs raretés qu’il serait intéressant d’essayer. Après avoir longtemps hésité, je jette mon dévolu sur un Rimauresq Côtes de Provence 1983. C’est probablement l’un des plus vieux de ma cave de cette belle région.

Les invités arrivent et nous avons la curiosité de découvrir les nouveaux apports. Nous commençons par boire une cuvée Exception Côtes de Provence 2012 dont la caractéristique principale est de ne pas être exceptionnel. Suivent de jeunes Château Sainte-Marguerite 2012 et 2011 qui sont agréables à boire, sans plus. Le Vin de pays des Alpes Maritimes de l’Abbaye de Lérins 2000 est un vin atypique. J’ai très peu de repères pour de tels vins. Il est original, manque un peu de complexité, mais il me plait par son caractère inhabituel.

Les choses commencent à s’animer avec un Château Pibarnon rouge 2008 tout en finesse et en douceur. Il joue sur la légèreté, même si son alcool n’est pas mince. J’aime son raffinement.

Le Château Jean-Pierre Gaussen Bandol rouge 2001 est un vin magnifique. Il a du fruit, de la structure, de la profondeur. C’est un grand plaisir de le boire et une agréable surprise.

Le Rimauresq Côtes de Provence rouge 1983 est très différent. Il a moins de fruit que le Bandol, il a plus de maturité et une grande complexité. On a le vin de Provence tel qu’on aimerait qu’il évolue, avec une richesse aromatique très sensible. C’est ce vin qui a conquis mes proches voisins de table, car égoïstement, je ne l’ai pas fait circuler autour de la table de dix huit personnes, pour pouvoir profiter de ce vin trentenaire devenu rare à cet âge.

La maîtresse de maison, fine cuisinière qui aime interpréter des recettes complexes, nous a ravis par des plats sophistiqués. Ce dîner aux apports de vins de la région était une belle idée.

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Dîner de fin d’été dans le sud mardi, 2 septembre 2014

Des amis viennent dîner à la maison, dans le sud de la France. Il fait au début septembre un temps tellement beau que l’on pense à un été indien, spécialité automnale, alors que nous sommes toujours en été. Nous tartinons du foie gras sur de croquants gressins et le Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1998 en profite pour prendre de la largeur. Ce champagne est extrêmement rassurant. Il est joyeux, riche, et donne du bonheur. Pas de questions, pas de chichis, on en profite spontanément. C’est un régal.

Une tarte aux oignons posés sur une fine couche de parmesan sur laquelle sont jetées quelques olives noires accueille une Côte Rôtie La Mouline Guigal 1996. Le vin aime le sucré salé de l’oignon. Il est riche, en pleine possession de ses moyens, d’un beau jus gouleyant. Riche, il offre aussi de l’élégance. On est dans l’aristocratie de la Côte Rôtie, avec des longueurs généreuses. J’ai toutefois une préférence pour La Turque 1996 qui m’a apporté plus de vivacité et de vibration.

Les filets de lotte sont accompagnés de tranches de foie gras poêlé et lorsque l’on mange les deux ensemble, la Côte Rôtie brille encore plus. Voilà un accord peu académique mais extrêmement pertinent.

La tarte aux quetsches s’est dégustée à l’eau. C’est très probablement le dernier dîner au vin de vacances qui auront duré plus de trois mois.

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Dîner dans le sud mercredi, 27 août 2014

Des amis viennent dîner dans notre maison du sud. Le Champagne Dom Pérignon 1998 est une heureuse retrouvaille. D’emblée, il met à l’aise. Il est large, fleuri, avec aussi quelques accents confiturés. J’aime qu’il virevolte et nous offre de multiples facettes. Il n’a pas la pénétration de champagnes plus typés, mais il est confortable. Avec des tranches fumées de viande des alpages, avec un saucisson viril ou avec un foie gras à prendre sur des gressins, il s’adapte à chaque fois avec bonheur.

A table, nous avons des langoustines juste poêlées, cuites à la seconde près pour avoir un moelleux incommensurable puis deux loups de ligne goûteux. Le Meursault Clos de la Barre Domaine des Comtes Lafon 2000 est quasiment insaisissable. Il va dans quatre directions : le minéral, pierre à fusil, le citronné, avec une jolie acidité maîtrisée, les agrumes confits et les impressions lactées ou de noisette. Et ce qui est curieux, c’est qu’à chaque gorgée, la pondération de ces quatre pistes change. Il est assez facile d’être désarçonné par ces changements de facettes. Je suis plus à l’aise que d’autres, mais je n’ai pas trouvé la plénitude sereine que ce vin peut avoir, avec une longueur moins présente que d’habitude.

Au dessert, plus question de boire du vin car nous goûtons les délicieuses glaces de madame Ré, qui a quitté Hyères pour la Moutonne et qui fait des glaces qui boxent dans la catégories du regretté Berthillon. C’est bientôt la fin août. Nous avons profité d’une bien belle soirée.

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Le riz à l’encre de seiche accompagnait le loup non photographié

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Beau dîner dans le sud avec des vins originaux samedi, 23 août 2014

Gerhard est un compositeur et chef d’orchestre grand amateur de vins. Son épouse concertiste et ses deux fils partagent la même passion, enrichie par de nombreuses visites qu’ils font ensemble chez des vignerons devenus au fil du temps leurs amis. C’est ainsi, entre autres, que Gerhard a pu organiser chez lui en Autriche une verticale de la Romanée Liger Belair de 41 millésimes. Leurs périples changent chaque année mais une halte est presque toujours prévue dans ma maison du sud. C’est l’occasion d’un dîner de vins.

J’ai invité d’autres personnes pour former une table sympathique et pouvoir partager de nombreux vins. Les journées étant plus courtes, j’ai demandé que les convives arrivent à 19h30 pour profiter d’un apéritif face à la mer.

Gerhard arrive à 17 heures avec ses vins et j’ouvre les vins du dîner, les siens et les miens, car nous serons les deux seuls apporteurs de vins pour le dîner. Mes vins seront marqués d’une « * ». L’ami Cédric, traiteur, arrive à 18h15 pour préparer avec son collaborateur Denis l’apéritif et le dîner. Cédric sera à table à nos côtés.

A 19h30 nous attendons un vigneron et un couple de vignerons. A 20h personne. La pluie menace et le jour tombe. Nous devions commencer par un champagne ancien, mais tout le monde a soif. Pour tromper notre attente, j’ouvre un champagne non prévu, un *Champagne Delamotte 2004. Il accompagne des petites sardines délicieuses. Le Delamotte est toujours aussi précis, rassurant blanc de blancs qui fait un sans faute, très fluide et de belle soif. A 20h15, je commence à être agacé et je sers le *Champagne Salon magnum 1997. Il sera rejoint par de fines tranches de Cecina de Leon, de Pata Negra découpé devant nous et de poutargue. Dès la première gorgée on ressent le saut qualitatif que représente Salon. Il est plus vineux, plus complexe, de très grande longueur et l’effet magnum joue à plein pour lui, donnant plus d’ampleur et de coffre à son message. A 20h30 le vigneron arrive. Ma fille qui devait ne participer qu’à l’apéritif fera-t-elle venir ses amis pour remplacer le couple de vignerons absents ? Le nombre de places à table oscille entre 10, originellement prévu, 11, si ma fille vient avec ses deux amis qui remplaceraient le couple qui entretemps m’avait envoyé un message expliquant leur absence, puis 9 quand j’apprends que les amis de ma fille avaient déjà dîné. Rester zen.

Cédric nous sert des tranches de truffes d’été posées sur des morceaux de pain blanc recouverts de gouttes d’huile d’olive et d’une pincée de gros sel. L’effet avec le Salon 1997 est miraculeux, car le champagne est enhardi par le caractère terrien de la truffe. Un accord de rêve. Salon a une complexité dynamique que j’apprécie.

Nous passons à table. Les camerones, immenses crevettes juste poêlées sont associées à deux vins. Le Riesling Weingut Brundlmayer Vieilles Vignes Autriche 1997 est d’un joli jaune citronné. Le vin est clair, précis, net comme les rieslings savent le faire. Il est très agréable, un peu perlant et manque un peu de longueur. Mais nous constaterons que dans le verre il restera tout au long de ce repas d’une solidité à toute épreuve. A côté de lui le *Chateauneuf-du-Pape Château La Nerthe Clos de Beauvenir blanc 1999 a une couleur déjà très ambrée. S’il est oxydé, il est quand même agréable à boire avec de petites notes fumées. Le Riesling est le plus pertinent sur les camerones et le Châteauneuf est divin avec la poêlée de cèpes qui suit. Cédric n’a sélectionné que des cèpes de petite taille et le plat est intensément goûteux. Et le blanc du Rhône est magiquement ragaillardi. Original et hors norme, il est très accompli sur les cèpes.

Lorsque j’avais ouvert la Côte Rôtie Côte Blonde A. Dervieux-Thaize 1979 j’avais constaté que la moitié supérieure du bouchon était complètement noire. Une étiquette indiquant que la bouteille a été importée par un marchand de vins de San Francisco et achetée par Gerhard en Allemagne, on peut supposer que des différences de températures dans les divers transports a créé la torréfaction que montre ce vin. On devine ce qu’il aurait pu être mais il est trop « cuit » pour être plaisant. Il met sans le vouloir encore plus en valeur le *Chateauneuf-du-Pape rouge Jean et Jean-Paul Versino 1989 qui est une merveille de fluidité et de précision. Ce vin est enthousiasmant tant il glisse bien en bouche, équilibré, généreux et gracieux. C’est un achat de hasard et je ne m’attendais pas à trouver le vin à ce niveau. Le ris de veau juste poêlé se comporte bien avec les deux vins, donnant un coup de main à la Côte Rôtie pour la rendre plus sociable. La selle d’agneau avec un pressé de pommes de terre est brillante, fondante, et avantage encore plus les deux vins.

N’ayant peur de rien, j’avais programmé une deuxième viande pour les deux « costauds » qui arrivent. Nous étions déjà rassasiés mais le cœur de romsteak est tellement fondant que l’on ne peut résister. L’aubergine confite est, elle aussi, fondante à souhait. Le Chateauneuf-du-Pape rouge Domaine du Vieux Télégraphe 1971 est un seigneur. Il a la sérénité d’un millésime réussi. C’est un bonheur de boire un tel vin. A côté de lui, le *Château Rayas Chateauneuf-du-Pape 2005 est un trésor de complexité envoûtante. Au premier contact, je ressens une trace saline qui est celle des vins du domaine de la Romanée Conti. Mais peu de temps après, c’est une impression sucrée et de douceur qu’offre ce vin. Enfin, viril, puissant, il laisse une trace en bouche de chaude complexité.

Les deux vins cohabitent très bien. On serait bien en peine de désigner un vainqueur, tant ils sont différents. Le 1971 est plus dans la logique de l’appellation, le 2005 est plus énigmatique, mais les deux sont au sommet de leur art, même si le 2005 va s’accomplir encore et encore.

A la surprise de mes convives, le Rayas a bien voulu se prêter à l’exercice de la cohabitation avec un camembert Jort. Il l’a réussi.

Cédric est le prince du moelleux au chocolat. Face à ce moelleux divin et satanique de séduction, deux vins dissemblables. Le *Maury Mas Amiel 15 ans d’âge mis en bouteille en 1998 après 14 ans de fût et une première année en bonbonne de verre est un bonbon tant il est doux et sensuel. C’est lui qui crée le plus bel accord avec le chocolat. Le Pedro Ximenez 1927 Alvear est trop lourd de sucre. Il a des intonations de noix, de café, de caramel et écrase le dessert de sa lourdeur. Il mériterait un dessert comme une tarte aux pommes acides ou une glace au café.

Cédric a appliqué à la lettre la recommandation que je lui avais faite : « le produit, le produit, le produit, sans fioriture ». Ce fut un succès d’autant plus grand que ses fournitures sont de première qualité. Le plat le plus saisissant est la poêlée de cèpes, la sensation la plus forte est la truffe d’été avec le Salon 1997. Les viandes étaient fondantes. La plus belle surprise parmi les vins est le Chateauneuf-du-Pape rouge Jean et Jean-Paul Versino 1989. Les plus grands vins sont Rayas 2005, le Vieux Télégraphe 1971 et le Salon 1997 en magnum.

C’est fort tard que nous avons salué nos convives, heureux d’avoir partagé un grand moment de plats superbes et de grands vins.

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Un bel Henriot lundi, 18 août 2014

Apéritif grignotage chez ma fille. Elle ouvre un Champagne Henriot magnum 1996. Ce vin a de la grâce. Il est élégant, raffiné, expressif. Une petite merveille. Je me demande ce que donnerait la confrontation avec la Cuvée des Enchanteleurs de la même année. Je ne suis pas sûr que l’Enchanteleurs gagnerait, tant ce champagne Henriot me semble dans une forme éblouissante.

Déjeuner au Castellet lundi, 18 août 2014

Le lendemain du dîner de vins du 15 août, nous allons avec nos amis au restaurant San Felice de l’hôtel du Castellet. L’endroit est toujours aussi beau, incitant au calme et à la sérénité. L’apéritif se prend avec un Champagne Henriot Cuvée des Enchanteleurs 1988. Le vin est aussi ambré que le Mumm René Lalou 1979 et le Substance de Selosse de la veille. Serions-nous abonnés à cette jolie couleur dorée ? Le vin a un parfum intense. La bulle est active et ce qui frappe, c’est la personnalité affirmée du champagne.

Chacun choisit ses plats. Mon menu comprend de délicieuses grosses crevettes puis une araignée de porc avec du chorizo et des blettes. La cuisine est bien exécutée. Le Corton Bonneau du Martray rouge 1996 est d’une grande subtilité. C’est un vin qui caresse le palais, avec une petite acidité qui émoustille. J’ai toujours eu un penchant pour ce vin affable, courtois et raffiné. La pêche Melba est un péché, je le confesse, mais que c’est bon.

Le lendemain au déjeuner, nous avons confronté les fins de bouteilles du Corton Bonneau du Martray 1996 qui a juste 24 heures après l’ouverture, avec La Turque 2000 qui a été ouverte il y a trente-six heures, comme le Vega Sicilia Unico 2000. Le Corton a perdu de la fraîcheur, prenant une acidité qui dévie le goût. La Turque est encore meilleure que ce que nous avions bu et le Vega Sicilia Unico s’il est encore très bon, montre un peu les effets des 36 heures. C’est donc La Turque qui a les plus belles aptitudes à résister au temps. Bravo pour ce vin racé et solide.

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Dîner du 15 août samedi, 16 août 2014

Le dîner du 15 août, c’est une institution, occasion d’ouvrir de belles bouteilles entre amis. Nous serons six, dont cinq buveurs. J’ouvre tous les vins vers 17 heures, sauf les deux 2000 rouges dont je souhaite une ouverture de dernière minute pour bénéficier de l’éclosion du fruit de ces deux champions.

Le premier acte de l’apéritif met en présence des petites sardines avec le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979. La bouteille est toujours aussi belle, avec ses rondeurs biseautées et le vin est d’un or glorieux. Le nez est très expressif. Le vin est grand, opulent, majestueux, avec de jolis fruits jaunes. Le champagne est confortable avec une acidité citronnée très légère. Alors que le champagne Henriot avait eu du mal avec les petites sardines, l’accord se trouve avec ce vin de presque 35 ans. Sa maturité s’accompagne d’une jeunesse exaltante. On dirait que ce champagne est au sommet de sa forme.

Le Champagne Substance Jacques Selosse dégorgé en 2006 lance le deuxième acte de l’apéritif avec du jambon Pata Negra. Le jambon est assez sec, a relativement peu de gras et n’a pas cette sensation de noisette. Mais il va bien avec le champagne qui présente un saut gustatif par rapport au précédent qui est considérable. J’ai toujours peur avec les dégorgements très anciens de Substance, mais là, force est de constater que celui-ci est exemplaire. Sa couleur est aussi foncée que celle du Mumm, son parfum est intense, et en bouche, il a une longueur infinie par rapport à celle du Mumm. Le vin est puissant, solide sur ses bases, et emporte le palais dans une danse de plaisir. C’est un très grand champagne terriblement vineux.

Nous passons à table et le vin blanc va accompagner une friture de petits rougets relativement peu convaincante, car la panure est trop présente, et des grosses crevettes d’un goût exquis, jointes à d’originales lamelles de courgettes. Le Vina Tondonia Gran Reserva Lopez de Heredia Rioja blanc 1991 est une découverte. Je n’ai aucun repère. Si le vin boude la friture, il s’approprie les crevettes pour offrir une palette aromatique étendue. Ce vin de soleil, chaud et généreux est confortable, mais il n’offre pas énormément de complexité. Il est très correct, évoque quelques chardonnays américains. Il est probable qu’on l’oubliera dans peu de temps.

Le Château Latour 1974 est d’une bouteille rhabillée au château en 2003, ce qui veut dire qu’elle a toujours son bouchon d’origine. Le nez à l’ouverture montrait une grande délicatesse. Maintenant, je ressens un peu de poussière qui n’est pas loin d’évoquer un goût de bouchon mais cette impression fugace ne durera pas. Ce vin est de belle race et il est apprécié de mes amis, mais je suis gêné par le côté poussiéreux qui vient masquer le potentiel du vin. De petite année, il a la discrétion polie. Le voile qui le masque m’enlève le plaisir.

L’agneau cuit à basse température est fondant. Le pressé de pommes de terre est enthousiasmant. Il faut bien cela pour deux seigneurs. La Côte Rôtie La Turque Guigal 2000 est toute en fruit. Elle est généreuse, mais elle offre une belle subtilité gracieuse. Ce n’est pas un vin qui passe en force. Malgré ses muscles saillants, elle fait gant de velours.

A côté, Vega-Sicilia Unico 2000 se distingue par cette caractéristique qui me comble d’aise : la fraîcheur est mentholée avec de petites traces de fenouil.

Les deux rouges sont magnifiques et fondamentalement différents. Les départager serait difficile. Je dirais qu’en début de dégustation, c’est la fraîcheur mentholée de l’espagnol qui le met en tête. Et en fin de soirée, c’est la grâce subtile de La Turque qui lui donne la palme.

Bien évidemment les trois rouges ont accompagné un camembert Jort dont nous sommes friands, et fort agréablement le Latour a, pour un instant, oublié son voile de poussière. Il est devenu charmant et distingué.

Des tranches de mangue légèrement caramélisées ont fait tourne et retourne sur la plancha. C’est un Château d’Yquem 1990 qui va en profiter. Ce qui est fascinant avec Yquem c’est que la question de sa qualité ne se pose pas, il est parfait. Pourquoi le comparer avec d’autres millésimes dont on a la mémoire, quand on profite d’un tel moment de luxure pure. Ce 1990 est très équilibré, très jeune encore comme en atteste la couleur. Il est tout simplement une « sex bomb » de sauternes.

Les discussions animées nous ont portés jusqu’à deux heures du matin. Nous nous sommes endormis heureux d’avoir vécu un moment d’amitié ponctué de bonne chère et de grands vins. Yquem sera toujours Yquem, les deux 2000 sont fascinants et le Substance est un champagne incontournable. Quel bonheur !

2014-08-15 20.01.01 2014-08-15 19.58.41 2014-08-15 19.58.24 2014-08-15 19.58.18

2014-08-15 19.43.30 2014-08-15 19.43.58

2014-08-15 17.24.56 2014-08-15 17.18.55

2014-08-15 17.36.08 2014-08-15 17.36.38 2014-08-15 17.31.39

2014-08-15 19.42.14 2014-08-15 19.42.08 2014-08-17 13.12.08

2014-08-17 13.11.42 2014-08-15 19.40.11

2014-08-15 17.38.57 2014-08-15 17.46.02 2014-08-15 17.47.09

2014-08-15 20.09.05 2014-08-15 20.09.09 2014-08-15 21.22.29 2014-08-15 21.43.02 2014-08-16 00.00.10