Archives de catégorie : dîners ou repas privés

Déjeuner au restaurant Les Climats mercredi, 5 juin 2013

Le monde des blogs du vin est un microcosme particulier. J’ai voulu rencontrer l’auteur d’un des plus actifs de ces sites sur le vin. C’est sa proposition qui fut prise, le restaurant Les Climats. Après avoir monté quelques marches sur la rue de Lille, on arrive sur une immense salle assez extraordinaire décorée avec un mélange de style qui va du fauve à l’Art Déco avec une générosité spontanéiste. C’est furieusement tendance. En traversant la salle on aperçoit un jardin en contrebas, entouré d’immeubles, planté sur une pelouse synthétique. L’impression est tonique et marrante à la fois. On sent qu’on va aimer.

Carole colin, qui m’accueille, est aussi tonique que la décoration. Elle me fait visiter la cave toute en hauteur et bien agencée. La carte des vins est la belle surprise du lieu. Il n’y a que des bourgognes, mais il y a une grande variété et ce qui se fait de mieux. Pour honorer cette initiative heureuse de mettre en valeur la Bourgogne, je choisis un Chambertin Armand Rousseau 2009.

Curieusement, pour ce temple du vin, la carte des menus n’a pas l’air d’être orientée vers les vins. Aucune entrée ne nous tente aussi le menu sera fait de deux plats : dos de cabillaud cuit vapeur, émulsion de carottes et safran, légumes et olives de Calamata / onglet de bœuf français, jus corsé à l’ail doux, patates douces en deux façons.

Le chambertin est bien jeune aussi arrive-t-il un peu coincé, serré, mais il ne peut s’empêcher de séduire. Lorsqu’il s’ébroue et lorsque la viande l’anime, on retrouve la richesse et la carrure d’un chambertin passionnant, velouté, follement séducteur. On ne peut s’empêcher de penser que c’est un crime, dont j’admets la faute, de ne pas attendre de boire ce vin avec quinze ans de plus.

Le chef Phan Chi Tam cuisine de beaux produits, cabillaud ou onglet avec des cuissons idéales. Mais les à-côtés trop marqués ne sont pas des amis du vin. Carole ayant une attitude très ouverte, nous avons pu parler avec le chef, formé dans de grandes maisons et avec de grands chefs, d’évolution de la cuisine pour aller dans le sens de la prodigieuse carte des vins. Voilà un lieu où je reviendrai avec grand plaisir.

DSC05328

DSC05332 DSC05333 DSC05334

Dîner à quatre mains avec Gilles Goujon de Fontjoncouse et Philippe Mille des Crayères mardi, 4 juin 2013

Les « dîners à Quatre Mains » sont avant tout une aventure humaine et c’est en cela qu’ils prennent une dimension supplémentaire à mes yeux. Voir le bonheur de deux chefs qui créent ensemble et la joie des jeunes commis de la brigade heureux de recevoir un enseignement riche de deux grands chefs, c’est un plaisir qui ne se mesure pas. Il se savoure.

Nous arrivons à l’hôtel les Crayères par un chaud soleil ce qui fait tout drôle après la grisaille qui n’en finissait pas d’obscurcir le ciel de mai. Notre chambre est spacieuse, décorée comme les riches maisons bourgeoises du 19ème siècle. Ce n’est pas désagréable.

Nous prenons l’apéritif face au grand parc et au soleil dont on ne se lasse pas. Le Champagne Taittinger brut sans année se boit avec beaucoup de bonheur, d’autant plus que nous trinquons avec Claire et Pierre-Emmanuel Taittinger. Peut-être dopé par cette présence, le champagne a une profondeur et une vivacité plus grandes que la mémoire que j’en avais. Les deux chefs viennent nous rejoindre et sont d’une décontraction remarquable. On est loin de la tension des pilotes de Formule 1 avant le départ.

Les chefs du jour sont Philippe Mille, le régional de l’étape, MOF (meilleur ouvrier de France) doté de deux étoiles, et Gilles Goujon, MOF lui aussi et doté de trois étoiles à l’Auberge du Vieux Puits à Fontjoncouse. Son épouse est biterroise, ce qui fait que nous sommes pays.

Le menu préparé par les deux chefs est : lobe de foie gras de canard poêlé, tarte sablée « pain d’épices » à la rhubarbe en cage de meringue et gariguettes en réduction balsamique par Gilles Goujon / filet de rouget barbet, pomme bonne bouche fourrée d’une brandade à la cébette en « Bullinada », écume de rouille au safran par Gilles Goujon / aloyau de bœuf de Galice affiné cent jours, fenouil confit à l’eau de tomate, caviar d’aubergine au gingembre, jus de rôti à l’olive noire par Philippe Mille / dacquoise noisette et son praliné crémeux, mousse et dés de cake citron, mikado de meringue zestées par Philippe Mille.

Le Champagne Taittinger Comtes de Champagne rosé 2005 est un agréable champagne qui n’a pas tellement attiré mon attention, tant les discussions à notre table étaient animées. Mais il a favorisé un bel accord.

Il n’en est pas de même du Champagne Taittinger Comtes de Champagne rosé 2002 qui ne peut pas passer inaperçu. De grande personnalité et de grande tension, il occupe la bouche en en prenant possession. Ses évocations de fruits sont roses et le caractère vineux est très équilibré. Très gastronomique il est le chevalier servant idéal d’un plat d’anthologie, la bouillabaisse revisitée par Gilles Goujon.

Le Coteaux de Champagne Ambonnay rouge Cuvée des Grands Côtés, Vieilles Vignes Egly-Ouriet 2009 a un parfum incroyable. Je n’arrive pas à y croire. Il est puissant, fait de fruits rouges lourds, velouté comme le parfum du plus généreux des chambertins. Comment est-ce possible ? Je ne veux pas le croire car jamais je n’ai rencontré une telle puissance olfactive en un Coteaux de Champagne. J’ai beau sentir et ressentir, je ne peux pas m’y faire tant il y a du charme et de la puissance dans ce parfum. M’en ouvrant à Francis Egly qui participait au dîner avec son épouse, il explique cette richesse notamment par la faiblesse des rendements. En bouche, le vin est plus conforme à l’image que j’en ai. Le vin est bon, profond, mais il n’a pas la largeur que suggérait son parfum. Le vin est idéal sur la pièce de bœuf généreuse.

Le Champagne Egly-Ouriet Brut Tradition dégorgé en janvier 2013 est un champagne un peu vert à mon goût, mais très prometteur. Francis Egly m’a expliqué qu’il aime les champagnes plus mûrs et qu’il avait fait ce choix à cause de la présence de citron dans le dessert. Il me semble qu’il aurait pu choisir plus mûr, car le citron se sentait à peine.

Gilles Goujon est venu lui-même découper les lobes de foie gras et servir nos assiettes qui embaumaient tant la fraise était présente. Je me suis concentré sur la chair seule du foie gras, qui se mariait idéalement au rosé 2005. Le rouget traité en bouillabaisse est un plat qui donne des frissons dans le dos. Il est parfait et fait comprendre ce que c’est que d’avoir trois étoiles. Le plat est gourmand, et l’on reprend sans cesse le jus délicieux, servi à profusion. La viande mûrie plus de trois mois glisse en bouche comme un bonbon, mais c’est sur le dessert d’un équilibre remarquable que l’on a surtout vu le talent extrême de Philippe Mille.

Le directeur, Hervé Fort, nous entraîne dans le noir dans un coin reculé du petit bois qui jouxte le parc et nous entrons dans une yourte aux bois joliment peints, où nous pouvons continuer à bavarder avec Gilles Goujon, Pierre-Emmanuel Taittinger, Francis Egly et de nombreuses autres personnes en goûtant l’un des cognacs Hine qui nous sont proposés. Je choisis un Cognac Hine 1960 qui a une délicatesse extrême, plus charmant à mon goût qu’un Cognac Hine 1961 plus viril mais moins élégant.

Une fois de plus, les « Quatre Mains », c’est grand et très émouvant.

DSC05266 DSC05269 DSC05270 DSC05272

DSC05292 DSC05293 DSC05294 DSC05295 DSC05296

DSC05275 DSC05280 DSC05279 DSC05281 DSC05282 DSC05283 DSC05285 DSC05286 DSC05289 DSC05290

Margaux 1928, Lafite 1961, La Tâche 1951 et d’autres vins immenses au Garance samedi, 1 juin 2013

La chaîne de télévision LCI m’a demandé de donner mon avis sur la vente aux enchères de vins de la cave de l’Elysée qui doit commencer le soir même. J’ai l’occasion de dire à quel point cette opération n’envoie que des signes négatifs, d’un pays aux abois qui vend des poussières de ses bijoux de famille, mais surtout d’un pays qui ne va pas de l’avant, qui devrait être solidaire avec une des filières les plus porteuses de la balance commerciale du pays, la filière vin et plus précisément la filière des vins de qualité qui sont un emblème de l’image de la France, qui fait tant rêver le monde. Alors que je n’avais pas l’intention d’aller à cette vente, car j’anticipais des prix de feu d’artifice, le journaliste qui m’invitait me dit : « bien sûr vous irez à la vente ! ». Je me suis senti obligé d’y aller.

Sur place, je rencontre diverses personnes que je connais et tout d’un coup, je vois arriver Gérard Besson, le chef chez qui j’ai organisé beaucoup de dîners et de casual Fridays. Nous sommes heureux de nous revoir, pour la première fois depuis qu’il a pris sa retraite. Tous les deux nous voulons nous revoir et je lui dis : « pourquoi pas demain ? Nous faisons l’un des dîners de notre dream team, avec des vins très rares ». Je quitte très vite la vente aux prix fous et j’envoie à Gérard la liste des vins prévus. Le lendemain matin il m’informe qu’il viendra.

Au restaurant Garance, j’ouvre les bouteilles dès 17h30. Le parfum du Lafite 1961 est d’une pureté d’Evangile. Le bouchon de La Tâche 1951 est de très mauvaise qualité et n’a pas été aidé par une cave trop sèche si je me fie à ce qui apparaît sur le bouchon. Le niveau est bas, le bouchon sent très mauvais et lorsqu’on sent le goulot, l’odeur est désagréable. Tomo qui m’a rejoint verse un peu du vin dans un verre et les odeurs désagréables n’étaient attachées qu’au goulot. L’espoir renaît. Le parfum du Margaux 1928 est séducteur, et, lorsque Florent arrive avec son Pontet Canet 1926, c’est un parfum d’une délicatesse rare qui envahit mes narines à l’ouverture.

Je descends au rez-de-chaussée pour mettre au point avec Guillaume Iskandar le menu et choisir avec lui quelques orientations. Le menu, dont je reconstitue les intitulés, est ainsi organisé : la traditionnelle brioche de bienvenue / homard bleu, traces de crème à l’orange / Lieu, roquette et petits oignons / ris de veau / épaule d’agneau, asperge et oignons / financier en gâteau fumé.

Notre groupe se compose de Tomo, Lionel, Florent, Jean-Philippe, Gérard Besson et moi. L’un d’entre nous étant en retard, Guillaume Muller nous propose au verre le Champagne Langlet Brut Grand Cru. Le champagne ne m’inspire pas et j’ai un commentaire bien méchant : « voilà un champagne qui nous fait aimer le cidre ». C’est bien méchant. Le Champagne Louis Roederer 1964 de Florent a encore du pétillant et une jolie couleur ambrée. En bouche c’est du plaisir pur, avec de jolis fruits oranges et une originale évocation de marc. Ce champagne est excitant de curiosité et s’annonce comme un grand compagnon de gastronomie.

Le Champagne Mumm Cuvée René Lalou 1979 de Jean-Philippe, que j’ai bu maintes fois, à la bouteille si belle, est une grosse déception. Car il a vieilli trop vite et a perdu de sa vivacité. Il n’est pas mauvais mais il n’est pas ce que nous attendons.

Le Château Rayas blanc 1996 de Lionel met un sourire à mes lèvres : c’est « love at first sight », le coup de foudre pour un vin généreux, facile, dandy sacrément convaincant. Avec le homard un peu chiche pour nos appétits, il est parfait.

Le Château Haut-Brion blanc 1964 de Lionel n’a pas assez de panache pour retenir notre attention. Je ne saurais pas dire de quoi il souffre mais il n’est pas là, même si le homard l’aide un peu.

Le Bienvenues Bâtard-Montrachet Domaine Leflaive 1995 de Gérard attaque très fort. Ce vin puissant d’un équilibre rare occupe le palais et l’envahit de ses arômes complexes. Ce qui me fascine, c’est le plaisir qu’il donne, profond et pénétrant. C’est l’attaque qui pose le jeu.

Servi en même temps, le Chevalier Montrachet Domaine Leflaive 1989 offre des saveurs plus fluettes. On imagine que le combat est joué au profit du Bienvenues, mais pas du tout. Le Chevalier s’assemble, déroule sa matière riche et prend progressivement le dessus. Les deux vins sont parfaits et très différents. J’aime le premier pour son attaque généreuse. J’aime le second pour sa matière opulente et sa noblesse. J’aime les deux car ils sont l’expression de la grandeur des blancs de Bourgogne. Le lieu superbement cuit convient aux deux vins, probablement plus au Chevalier.

Le Château Margaux 1/2 bouteille 1928 que j’ai apporté est tétanisant de perfection. Au moins dix fois Gérard dira qu’il n’en revient pas qu’une demi-bouteille de plus de 80 ans puisse avoir une telle jeunesse. Il regardera à deux fois le bouchon pour vérifier qu’il s’agit bien d’un bouchage d’origine. Séduisant, féminin, velouté, ce vin est d’un charme à pleurer. Il a une profondeur et une densité qui sont remarquables et un final grandiose.

A côté de lui, le Château Pontet-Canet 1926 de Florent, au niveau presque dans le goulot, au parfum charmant, se caractérise par son velouté délicat. S’il n’était à côté du Margaux, il aurait la vedette parce qu’il profite à fond d’une grande année : 1926. Mais le Margaux est trop brillant.

Pour être sûr d’avoir une bonne demi-bouteille de Margaux, j’en avais apporté trois. Dix fois au moins mes amis ont tenté de faire pression pour que j’ouvre les deux autres. Mais j’ai résisté, surtout pour rester sur la bonne impression d’une bouteille parfaite. Le ris de veau est de très grande qualité et tout au long du repas, Gérard Besson n’arrêtera pas de faire des compliments sur la cuisine de Guillaume Iskandar. Venant de la part d’un MOF, meilleur ouvrier de France, cela compte.

Je ne peux évidemment avoir aucune objectivité pour le vin que j’ai apporté, Château Lafite-Rothschild 1961. Son parfum est d’une profondeur exceptionnelle avec des évocations de graphite et de truffe. En bouche ce vin est dense, lourd, profond, mais aussi complexe et raffiné. C’est un très grand vin au final inextinguible.

A côté de lui, La Tâche Domaine de la Romanée Conti 1951 de Tomo, qui avait un bas niveau, exhale un parfum d’une rare persuasion. Si l’on voulait savoir ce qui fait la caractéristique d’un vin du domaine, ce serait ça. Je m’amuse car lors d’une dégustation d’une vingtaine de vins de la Romanée Conti, un participant voulait que j’enlève La Tâche 1942 dont il contestait l’étiquette, sans le nom des propriétaires et sans l’indication des volumes produits. C’est ce vin contesté qui avait été le plus brillant de la réunion. Cette Tâche 1951 a strictement la même étiquette et se présente avec l’ADN du domaine sans l’ombre du plus minuscule doute. Je dirais même qu’il est presque un peu exacerbé et excessif dans le caractère salin. Le charme du parfum du vin est extrême. Là où nous allons différer avec mes amis qui plébiscitent ce vin, c’est que je trouve qu’il n’est pas parfait. Il a souffert, comme le montre son bouchon dégradé, et ses caractéristiques se sont empâtées. Elles sont là, mais manquent un peu de finesse. Cette réserve est à la marge, car le vin est convaincant, dominant et plein de charme.

La cohabitation des deux vins est possible. Le Lafite, c’est la perfection, la pureté la droiture. La Tâche, c’est le charme, la séduction et la complexité. L’agneau vote pour Lafite.

Le Château Rabaud-Promis 1937 de Jean-Philippe se présente dans une bouteille assez sale, ce qui ne préjuge de rien et le liquide que l’on devine est d’un marron très foncé. Le nez est très sauternes mais manque un peu d’ampleur. En bouche c’est un sauternes généreux aux fruits bruns, un peu poussiéreux, qui aurait créé un accord superbe avec le financier si celui-ci avait été moins fumé.

Nous sommes tous impressionnés par la qualité générale des vins que nous avons bus. Il y a parmi eux des vins de première grandeur. Gérard n’en revient toujours pas qu’une demi-bouteille de 1928 ait cette vivacité. Jean-Philippe met le Margaux 1928 en premier. Pratiquement tout le monde met Lafite et La Tâche juste après, soit ex-æquo, soit La Tâche en tête. Mon classement diffère sur La Tâche. J’ai noté : 1 – Château Margaux 1/2 bouteille 1928, 2 – Château Lafite-Rothschild 1961, 3 – Chevalier Montrachet Domaine Leflaive 1989, 4 – Bienvenues Bâtard-Montrachet Domaine Leflaive 1995. Il y aurait ensuite les belles performances de La Tâche 1951, du Rayas blanc 1996 et du Pontet-Canet 1926.

En des moments comme celui-là, nous ne voulons pas nous quitter, aussi avons-nous rêvé de nos futures agapes autour d’un Chartreuse faite à Tarragone très récente, beaucoup trop jeune pour avoir la complexité que l’on attend de cette liqueur emblématique. La date est prise pour un futur dîner. Ces repas amicaux dont de véritables bonheurs.

DSC05254

DSC05248 DSC05245

DSC05219 DSC05218

DSC05217 DSC05216

DSC05220

DSC05259 DSC05258

DSC05222 DSC05221

DSC05214 DSC05253 DSC05250

le défaut du verre de la bouteille de Lafite 1961 est assez spectaculaire

DSC05238 DSC05235 DSC05234

DSC05224 DSC05223

DSC05243 DSC05230 DSC05229

DSC05240 DSC05241 DSC05242

DSC05255 DSC05256 DSC05257 DSC05260 DSC05261 DSC05262 DSC05263

Déjeuner au restaurant Les 110 de Taillevent samedi, 1 juin 2013

Au dîner à quatre mains aux Crayères, Laurent Gardinier propriétaire des lieux avait lancé à notre table une invitation à se retrouver au restaurant Les 110 de Taillevent. Le jour dit, ma femme, Jean Miot et moi sommes aux côtés de Thierry et Laurent Gardinier. Le lieu est décoré dans des tons d’ocre et de terre, créant une atmosphère intimiste et décontractée. Un comptoir « à la Robuchon » fait face à l’impressionnant alignement de 110 verseurs de vins au verre. On reconnait quelques icônes qui sont des tentations auxquelles on a envie de succomber.

La carte est extrêmement astucieuse puisque les vins sont classés par tranches de prix et sont positionnés dans la même zone de lecture que les plats qu’ils pourraient accompagner. Les choix sont intelligemment facilités. Mes plats seront : le risotto printanier, asperges et morilles / le cabillaud « au naturel », jus de cresson, poireaux au cumin et tartare d’algues.

Mon premier vin est un Pinot Gris Clos Windsbuhl domaine Zind-Humbrecht 2007 dont je prends un verre de 7 cl, puisque l’on a le choix entre 7 cl, 14 cl et bouteille. Le vin est précis, original, mais il manque un peu d’ampleur. Il est très adapté à l’excellent risotto. Si la formule du choix au verre est très intéressante, puisque l’on peut avoir accès à des vins dont le budget serait élevé pour 75 cl, cela fait tout drôle d’être seul à boire un vin, que l’on ne peut pas commenter avec ses convives si leurs choix sont différents. L’avantage, c’est que dans un restaurant tourné vers le vin, on peut parler d’autres choses que de vin, ce que nous avons fait. Ce n’est pas désagréable. C’est un paradoxe amusant de cette formule.

Le Bâtard Montrachet Domaine Leflaive 2007 est dans le haut de gamme de l’offre du 110. Il a la noblesse des vins de ce prestigieux domaine, mais il n’a pas l’ampleur habituelle d’un Bâtard du domaine, sans doute du fait du millésime. Il cohabite bien avec le cabillaud à la chair comme je l’adore, marqué d’une verdure vraiment verte. J’aurais volontiers apprécié une petite coupelle de purée de pomme de terre pour que le jaune clair contrebalance le vert intense. Ce qui n’enlève rien à la qualité de ce plat.

Entraîné par mes amis, j’ai pris un verre de « Cuvée Laurène » vin de l’Orégon domaine Drouhin USA 2008. C’est vraiment une bonne idée car ce vin est joyeux, riant, subtil, équilibré dans toutes ses composantes. C’est un régal de boire ce vin bien dessiné aux subtilités « à la française ».

Le petit financier qui accompagne le café est un régal, après un détour gourmand par un nougat glacé. Le lieu est ouvert sept jours sur sept midi et soir, ce qui est un atout. Cette formule de type bar à vin qui joue sur une offre de vins haut de gamme et une cuisine qui est une vraie cuisine est extrêmement judicieuse.

DSC05208 DSC05210 DSC05211

DSC05209 DSC05212

1928 MARGAUX, 1961 LAFITE, 1951 LA TACHE AND OTHER OUTSTANDING WINES AT RESTAURANT GARANCE samedi, 1 juin 2013

The French TV channel LCI has asked me to comment the auction of wines from the cellar of the Élysée Palace (the official residence of the President of the French Republic), which is scheduled to begin that evening. It gives me the opportunity to explain that this operation only sends negative vibes: it is yet another sign of a country in dire straits, selling off bits and pieces of its family jewels, but also of a country that is not going forward, which should rather work hand in hand with one of the most promising sectors in its trade balance—the wine industry and more specifically the fine wine sector, a true French emblem, something the rest of the world dreams about. While I originally do not intend to go to the auction, as I anticipate a fantastic fireworks display of prices, the reporter who invited me tells me: « Naturally, you will go to that auction! » I therefore feel obliged to go.

There, I meet several acquaintances and all of a sudden, here comes Gérard Besson, the restaurant chef with whom I have organised many of my dinners and my Casual Fridays. We are happy to see each other again, for the first time since he retired. We both want to see more of each other and I suggest: « Why not tomorrow? We are organising one of our dream team dinners, with very rare wines. » I quickly leave the auction and its insane prices, and send Gerard the wine list scheduled for the dinner. The following morning, he confirms that he will join us.

At the restaurant Garance, I open the bottles at 5:30pm. The scent of the 1961 Lafite is of angelic purity. The cork of the 1951 La Tâche is of very poor quality and, looking at it closely, it has apparently not been helped by a stay in an over-dry cellar. The level is low, the cork smells really bad and when you smell the neck, there is an unpleasant whiff. Tomo joins me and pours a little bit of the wine into a glass and it seems that the unpleasant smell only came from the neck itself. We can still hope. The aromas of the 1928 Margaux are seductive, and when Florent arrives with his 1926 Pontet Canet, I open it and a scent of a rare delicacy invades my nostrils.

I go to the ground floor to develop the menu with William Iskandar and together we determine some guidelines. Here is the organisation of the dishes on the menu, which I recreate from memory: traditional welcoming brioche / blue lobster, traces of orange cream / pollack, arugula and small onions / sweetbreads / shoulder of lamb, asparagus and onions / smoked almond sponge cake.

Our group consists of Tomo, Lionel, Florent, Jean-Philippe, Gérard Besson and myself. One of us being late, Guillaume Muller suggests we have a glass of Champagne Langlet Brut Grand Cru. The champagne does not inspire me and I can’t help myself and criticize the wine— »this champagne would make you fall in love with cider! » That is really spiteful. The 1964 Champagne Louis Roederer brought by Florent is still sparkling and of a nice amber colour. In the mouth it is pure fun, evoking beautiful orange fruits and also marc alcohol, strangely enough. This champagne is curious and exciting and promises to be a great companion to food.

Several times I have had the 1979 Champagne Mumm Cuvée René Lalou brought by Jean-Philippe: the bottle is splendid, but the champagne is a big disappointment, because it has aged too quickly and lost part of its liveliness. It is not bad but it is not what we were expecting.

The 1996 Château Rayas Blanc brought by Lionel makes me smile: it is love at first sight for this generous, easy-going wine, a really convincing dandy of a wine. With the lobster—whose portion size falls rather short of filling our appetiteit is perfect.

The 1964 Château Haut-Brion Blanc also brought by Lionel does not have enough panache to catch our attention. I cannot really say what its problem is, but it is not really focused, even though the lobster helps it a little.

The 1995 Bienvenues Bâtard-Montrachet Domaine Leflaive that Gérard brought with him starts really strong. This powerful wine, of a rare balance, fills up your mouth and invades it with complex flavours. What fascinates me is the deep and penetrating pleasure it creates. This is the attack of the wine that sets the stage.

The 1989 Chevalier Montrachet Domaine Leflaive is served at the same time and offers lighter flavours. One could imagine that this is a losing battle for the Chevalier, but not at all. It picks itself up, unfolds it rich body and gradually takes over. Both wines are perfect and very different. I like the first one for its generous attack. I like the second for its opulent body and its nobility. I like both because they both showcase the greatness of white Burgundy wines. The perfectly cooked pollack pairs beautifully with both, probably slightly better with the Chevalier.

The 1928 half-bottle of Château Margaux which I brought is of petrifying perfection. Gérard ends up repeating at least a dozen times that he cannot believe that a half-bottle which is over 80 years old can remain so young. He even takes a closer look at the cork to make sure it is indeed original. Seductive, feminine, velvety—this wine has enough charm to make you cry. It has remarkable depth and density, and a grand finish.

Next to it, the 1926 Château Pontet-Canet brought by Florent, whose level is upper-shoulder, has charming aromas and a delicate velvety texture. Were it not served along with the Margaux, it would be the star of the show, being boosted by the great 1926 vintage. But the Margaux is just too damn brilliant.

To make sure that I would produce a good half-bottle of Margaux, I had brought three. Again and again my friends try to pressure me to open the other two. But I resist, especially because I want to remember the positive note of a perfect bottle. The sweetbreads are of great quality and throughout the meal, Gérard Besson keeps complimenting William Iskandar’s cooking. Coming from a MOF, Meilleur Ouvrier de France (Best National Craftsman in His Category), it says something.

I can obviously show no objectivity towards the wine I brought, a 1961 Château Lafite-Rothschild. Its fragrance is exceptionally deep with hints of graphite and truffle. In the mouth, the wine is dense, heavy, deep, but also complex and refined. This is a great wine with a never-ending finish.

Tomo’s 1951 La Tâche Domaine de la Romanée Conti is served alongside the previous wine. It has a low level but gives off a scent of rare persuasion. If one wanted to know what identifies a wine from the domaine, it would be exactly that. It makes me laugh because during a recent tasting of twenty wines from the Domaine de la Romanée Conti, one participant wanted me to exclude a 1942 La Tâche because its label did not include the names of the owners nor any indication of the number of bottles produced. This disputed bottle turned out to be the most brilliant of the tasting. This 1951 La Tâche has exactly the same label and sports the DNA of the domain without the tiniest shadow of a doubt. I would even say that it is almost a little exaggerated and excessive in its saltiness. The charm of this wine’s aromas is extreme. But, contrary to my friends who praise this wine, I find that it is not perfect. It has been through hard times, as its decayed cork can testify, and it has become slightly pasty. All its traditional characteristics are there, but lacking a little in finesse. This is almost insignificant, for the wine is convincing, dominant and full of charm.

The coexistence of both wines is possible. The Lafite is perfect, pure, and straight. The La Tâche is charming, seductive and complex. The lamb votes in favour of the Lafite.

The 1937 Château Rabaud-Promis brought by Jean-Philippe comes in a rather dirty bottle—which is actually irrelevant—and inside it, one can make out a very dark brown liquid. The nose is very Sauternes but slightly lacks in volume. In the mouth, it is a generous Sauternes with brown fruit, a little dusty, which would have created a superb pairing with the almond sponge cake had it been less smoked.

We are all impressed by the overall quality of tonight’s wines. Among them are some first-class bottles. Gérard still cannot believe that a half-bottle of 1928 can have such liveliness. Jean-Philippe gives first place to the 1928 Margaux. Almost everyone ranks the Lafite and the La Tâche immediately behind, either tied or with the La Tâche ahead.

My ranking is different because of the position of the La Tâche: I place 1 – 1928 Château Margaux half bottle; 2 – 1961 Château Lafite-Rothschild; 3 – 1989 Chevalier Montrachet Domaine Leflaive; 4 – 1995 Bienvenues Bâtard-Montrachet Domaine Leflaive. Then would come the commendable performances of the 1951 La Tâche, of the 1996 Rayas Blanc and of the 1926 Pontet-Canet.

In times like these, we do not want to part ways, so we decide to dream of our future banquets and share a Chartreuse bottled very recently in Tarragone—far too young a bottle to have the complexity that is expected from this emblematic spirit. The date is set for a future dinner. These meals among friends are blessed moments.

Les miracles, ce n’est pas tous les jours jeudi, 30 mai 2013

Mon fils vient dîner à la maison et nous sommes seuls à grignoter cochonnailles et fromages. Je descends en cave et je prends en main un Ausone 1943. Enfer et damnation, le niveau est largement sous l’épaule. Si c’est comme cela, autant essayer de voir ce que donneront des bouteilles dont le ticket n’est apparemment plus valable. J’en avais repéré quelques unes, sans avoir le moindre espoir de bonnes surprises. Bien sûr, j’ajoute une bouteille saine, pour que la punition ne soit pas trop grande. Alors, allons-y pour le bal des éclopés.

Le Champagne Mumm Cordon rouge 1937 a un niveau baissé de moitié. Le bouchon tout recroquevillé est tout noir. Le parfum qui sort de la bouteille n’est pas désagréable, mais n’est pas précis. La couleur est trop grise. Du fait de l’odeur qui n’est pas détestable, nous attendons une bonne heure avant de le boire, mais le vin est trop déplaisant pour que nous insistions. Le score est : mort 1 – vie 0.

Le Meursault-Charmes Thomas Bassot 1950 a un niveau bas, mais pas extrêmement bas. C’est la couleur foncée qui n’est pas engageante. Le nez est poussiéreux. Le verdict est sans appel : mort sans possibilité de résurrection. Le score est : mort 2 – vie 0.

Le Château Gruaud-Larose Faure-Bethmann 1928 a un niveau nettement sous la moitié. Il n’y a rien à attendre. Et contre toute attente, le parfum du vin est doux et fruité. Le vin n’a aucune tension, mais il est buvable et ne pourrait tirer de grimace à personne. Mais de là à l’aimer, le pas ne sera pas franchi. Le score est : mort 2,5 – vie 0,5.

Le Château Ausone 1943 a un bouchon d’une qualité effrayante et sent horriblement. Le vin a une odeur qui n’est pas marquée comme celle du bouchon, mais il n’est pas brillant. Tout indique que le plaisir n’apparaîtra pas. Le score est : mort 3,5 – vie 0,5.

La conclusion à ce stade est claire : à un certain niveau de dégradation, le miracle n’existe pas, tout du moins aujourd’hui. Mais il fallait essayer.

Le Chateauneuf-du-Pape Ch. Bader-Mimeur 1961 au niveau parfait a un nez très expressif avec des intonations bourguignonnes. En bouche, le vin est puissant, fait apparaître son alcool et a des évocations de bois flotté, presque de thé en superposition à une force vineuse certaine. Il allie force et charme. Il est la récompense de notre approche précédente. Ce vin épanoui, plein et profond séduit par sa maturité.

Nous avions l’envie de comparer la Bénédictine de mon anniversaire avec une Tarragone des années 20 ouverte depuis longtemps. Hélas, en levant le bouchon je me rends compte que la bouteille est vide. Mais le parfum est tout aussi vivace que si la bouteille était pleine. Et la cause est entendue au nez, faute de pouvoir boire : le parfum de la Tarragone est dix fois plus racé et complexe que celui de la Bénédictine. Ce qui n’enlève rien à la séduction sucrée et florale de la Bénédictine.

Mon fils est la personne la plus propice à ces expériences de « spirites » qui tentent de ressusciter les morts. Ce soir, ça n’a pas marché. Mais ça ne nous empêchera pas de recommencer, car l’expérience nous a déjà démontré qu’il faut croire aux miracles, puisqu’il y en a.

Et fort heureusement, les bouteilles à bas niveau sont plus que minoritaires dans la cave.

DSC05196 DSC05195

DSC05185 DSC05184

DSC05186

DSC05189 DSC05187

DSC05183 DSC05182

DSC05192 DSC05194

Déjeuner au restaurant Kei dimanche, 26 mai 2013

Déjeuner au restaurant Kei où un jeune chef japonais a repris les locaux de la rue du Coq Héron où Gérard Besson offrait une cuisine traditionnelle de grande qualité. Le virage est à 180°. Car Kei (prononcez quai) réalise une cuisine de haute qualité où l’esthétique des plats est très japonisante et où tout est complexité et subtilité. Le menu n’est pas communiqué aussi n’ai-je pas noté ce qui est proposé. Il y a eu dix services avant les mignardises. Cette cuisine est d’une grande délicatesse, mais lors d’un déjeuner de travail, on n’a pas l’attention suffisante pour essayer de percer tous les secrets de la créativité du chef. L’exécution des plats est de haut niveau. C’est incontestablement une grande table de Paris. Le Champagne Substance de Selosse dégorgé en octobre 2011 est de forte personnalité, typé, profond, de grande rémanence en bouche. C’est le compagnon idéal d’une cuisine de ce niveau de sophistication.

Il faut de l’attention pour profiter comme il convient du talent de ce grand chef.

DSC05162 DSC05163

DSC05161 DSC05167 DSC05168 DSC05170 DSC05171 DSC05172 DSC05173 DSC05174 DSC05175 DSC05176 DSC05177 DSC05178 DSC05179 DSC05180

Avec mon fils, je bois des pépites découvertes dans les recoins de ma cave samedi, 25 mai 2013

Depuis deux ans, j’ai décidé de déménager ma cave et de profiter du transfert pour en faire un inventaire exhaustif et raisonné. Cela fait dix ans que mes vins se sont installés dans la cave actuelle, maintes fois filmée ou photographiée par divers médias. Il y règne une atmosphère pleine d’émotion et de vie.

En dix ans, j’ai suivi mon instinct pour prélever des bouteilles à boire, mais comme tout être humain, j’ai mes chemins privilégiés et des coins entiers ont échappé à ma vigilance. Si le hasard a ses charmes, le temps qui passe impose de mettre un peu de raison dans mes prélèvements. Il y a des milliers de vins qui supplient qu’on les boive vite, et je ne les écoute pas tous. J’attends de ce transfert un peu plus de cohérence. C’est ainsi que j’ai découvert un Dom Pérignon 1929, vin rarissime que je ne pensais pas avoir. Il était plus que temps de le boire. Il a été partagé avec Richard Geoffroy, l’homme qui fait Dom Pérignon, au début de cette année.

En emballant les vins, je me demande comment j’ai pu les acheter. Quelle raison m’a poussé à acquérir des vins qui aujourd’hui me sont inconnus ? Mais j’ai la chance aussi de faire de belles découvertes.

Pour chaque bouteille, je décris le niveau, j’indique si la couleur est un signe de danger et j’évalue le risque que l’on prendra en la buvant. Comme pour les diamantaires, l’expérience m’a permis d’en apprécier l’orient avec une probabilité suffisante de ne pas me tromper.

Mon fils revient en France. Je vais piocher dans un stock de vieux bourgognes que je sais indestructibles, comme ce fut le cas pour les Nuits Cailles Morin 1915 qui ne m’ont jamais trahis, ou les Echézeaux 1947 de Joseph Drouhin. Je prélève deux bouteilles illisibles, sans étiquette et sans indication d’année. Les niveaux sont superbes et la couleur très caractéristique des capsules m’indique que les vins doivent être des années entre 1945 et 1955. Il s’agit plus que sûrement de grandes années – je me souviens un peu de mes achats – c’est-à-dire 1945, 1947, 1949, 1953 ou 1955 puisque les vins de cette époque sont très verlainiens :  » De la musique avant toute chose, Et pour cela préfère l’Impair ».

La seule indication précise, si l’on peut dire, c’est qu’ils proviennent de la cave du restaurant La Bourgogne, puisque c’est expressément gravé sur le haut de la capsule de chacune.

Mon fils visite la nouvelle cave qui a beaucoup progressé depuis sa dernière visite et nous rentrons ensemble pour dîner. J’ouvre au dernier moment les bouteilles. C’est bien dommage car les vins vont évoluer et s’améliorer de façon saisissante tout au long du repas.

Ma femme a prévu une terrine de foie gras et un agneau de lait fondant. Le premier Vin de Bourgogne inconnu vers 1950 a un nez délicat et racé. Sa couleur est d’un beau rouge vif. En bouche, ce vin est d’un velouté envoûtant. Il est tout en douceur, mais il a une longueur en bouche qui lui donne de la profondeur. Il est extrêmement féminin et ce vin m’évoque un chambertin.

Le deuxième Vin de Bourgogne inconnu vers 1950 est un Clos de la Roche inconnu vers 1950 puisqu’on arrive à déchiffrer plusieurs lettres de l’étiquette. Et le blason pourrait être celui d’un vin du domaine Armand Rousseau. Le vin est ouvert assez longtemps après le premier qui s’est déjà largement épanoui. Le nez m’indique un vin plus riche et plus profond que le premier, mais la dégustation n’est pas encore à son avantage, car il est rugueux, brut de forge, sans concession.

Plus le temps va passer et plus le Clos de la Roche va surpasser le « peut-être » chambertin. Le premier est langoureux, romantique, d’une séduction folle. Le second est guerrier, matamore, avec, pour mon goût des accents d’Echézeaux alors qu’il est Clos de la Roche. Il devient brillant, grand, profond, d’une trame d’une noblesse rare.

Ces deux vins sont des cartes gagnantes. Je sais en les ouvrant qu’ils seront au sommet. Furieusement bourguignons, ils ont offert la rose fanée pour le premier et le salin pour le second.

Je propose à mon fils de finir sur une bouteille à risque. Lors d’une récente journée harassante de rangement, j’ai trouvé une bouteille de Champagne Comtes de Champagne Taittinger 1961 qui a perdu la moitié de son volume. Fatigué, je décide qu’elle fera mon ordinaire du dîner que je prendrai seul puisque mon épouse est dans le sud. Je cherche à l’ouvrir mais à la torsion, le bas du bouchon se casse et reste collé à l’intérieur du goulot. Cordonnier est très mal chaussé, car je n’ai aucun tirebouchon à la maison. Qui le croirait ? Mes ustensiles sont dans l’une des caves. Je décide de laisser la bouteille dans le réfrigérateur.

Hélas, la bouteille couchée a perdu son bouchon qui s’est rétréci par le froid, et maintenant c’est seulement un tiers qui reste. Finissons-le avec mon fils. La robe est d’un rose pâle un peu grisé. Le nez est d’une rare pureté. Aucun défaut n’est apparent. La bulle a évidemment disparu et en bouche la surprise est grande. Car il n’y a aucun défaut ou peut-être un seul, c’est que ce que nous buvons n’a plus grand-chose à voir avec le destin initial de ce Comtes de Champagne. Le champagne évoque les fruits rouges et roses, les bonbons désaltérants et ces bonbons qui pétillent en bouche. C’est très agréable, mais en version « hors piste ». Paix à l’âme de ce vin que j’aurais aimé boire avant qu’il ne dévie.

Des bourgognes de ce calibre, indestructibles et percutants, il m’en reste beaucoup. Voilà de quoi alimenter l’académie des vins anciens avec des pépites qu’il faut boire, car elles ne gagneront rien à ce que l’on attende de les consommer.

DSC05111 DSC05112 DSC05113 DSC05123 DSC05124 DSC05120 DSC05122

DSC05115 DSC05116 DSC05118

DSC05119

Dîner au restaurant Le Chiberta vendredi, 24 mai 2013

Lors de la visite au champagne Louis Roederer, le directeur du restaurant Le Chiberta nous a donné envie d’aller dîner chez lui. L’accueil est sympathique, les plats sont d’une belle exactitude. Le chef fait une cuisine plaisante et rassurante. C’est une halte solide de l’écurie de Guy Savoy.

La Côte Rôtie La Turque Guigal 2004 est aussi rassurante que la cuisine du lieu. Coquilles Saint-Jacques aux asperges, turbot, pièce de bœuf Rossini : de quoi passer une belle soirée.

DSC05102 DSC05101

DSC05095 DSC05096 DSC05097 DSC05098 DSC05099 DSC05100

Déjeuner de travail au restaurant Alain Senderens vendredi, 24 mai 2013

Déjeuner de travail au restaurant Alain Senderens. Les après-midis seront studieux, aussi sommes-nous sérieux.

Le repas est sans vin.

Je prends les asperges vertes du Vaucluse avec une émulsion froide aux truffes noires et un turbot rôti, artichaut poivrade et olives Taffiasche.

La cuisine est d’une exécution remarquable. Les produits sont de toute première qualité. Le service est attentionné.

C’est une belle table de Paris.

DSC05107 DSC05108