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dîner chez Yvan Roux avec les trois Côtes Rôties de Guigal samedi, 13 août 2011

Après une bonne sieste et des activités ludiques, nous nous rendons au domicile d’Yvan Roux. Le soleil est rasant et colore de rose Giens, Porquerolles et les marais salants. Quand il se cache derrière un bouquet de pins méditerranéens, il semble l’embraser. Sur la terrasse qui surplombe la mer, le Champagne Salon magnum 1997 met un sourire sur nos lèvres. Ce champagne est romantique, floral, et c’est sans doute l’un des moins vineux et des plus féminins de tous les Salon. Mais surtout il est lisible. Il n’est nul besoin de chercher à comprendre son charme. La seule chose à faire est d’y succomber.

De fines tranches de chorizo fait au Pata Negra apportent un gras qui titille aimablement le beau champagne. Mais l’accord divin se fait sur une crème aux poivrons et piment d’Espelette où l’on trempe des beignets de lotte. La chair de la lotte est un régal.

La lune apparaît, merveilleusement ronde, et teinte d’un argent légèrement blond l’onde calme du début de nuit.

Nous passons à table derrière la piscine qui ne gêne en rien la vue sur la mer. C’est cette piscine où un autrichien fou de vin était tombé par mégarde en voulant aller chercher un de ses vins. Nous le reverrons dans quinze jours.

Sur une friture de petits rougets, nous avons deux vins blancs. Le reste du Condrieu Les Chaillées de l’Enfer Domaine Georges Vernay magnum 2000 et un Meursault Charmes Domaine des Comtes Lafon 2002. Je suis très favorablement surpris par la qualité du Condrieu, qui montre son adaptabilité gastronomique au-delà de toute attente. Je ne me souviens pas avoir bu un Condrieu de ce niveau. Il est charmant, puissant, riche de fruit brun, avec une complexité qui me surprend et une longueur plaisante. C’est un grand vin. Le Meursault Charmes est plus élégant, plus raffiné et subtil, mais je dois dire que ce soir, c’est le rhodanien que je préfère.

Sur un carpaccio d’un poisson dont la chair ressemble à celle d’un thon rose, servi avec des copeaux de pamplemousse, l’accord avec le Condrieu est tout simplement diabolique. Le Condrieu est fait pour le pamplemousse, judicieux pour le carpaccio.

Ayant récemment fait des statistiques sur ce que j’ai bu, j’ai constaté que contre toute attente (enfin la mienne), j’ai bu autant de chacune des trois grandes Côtes Rôties de Guigal, la Landonne, la Mouline et la Turque. Spontanément, j’aurais répondu que la Mouline est de loin la plus bue et la Turque beaucoup moins, mais en fait les trois sont numériquement égales dans mes dégustations. Jamais n’avais-je ouvert les trois ensemble aussi suis-je excité à l’idée de le faire avec des amis qui apprécient le vin.

Dans trois verres devant nous se présentent les trois, pour le millésime 2000. Il faut savoir qu’Yvan Roux a fait son menu sans connaître les vins. A peine sommes-nous servis des vins qu’arrivent des assiettes submergées par des énormes moitiés de langoustes. Nous allons comparer nos trois vins sur des chairs absolument succulentes dans leur pureté.

Le nez de la Côte Rôtie La Turque Guigal 2000 est de loin le plus imposant. Le nez le plus subtil et délicat est celui de la Côte Rôtie La Landonne Guigal 2000. Sur la langouste, ma fille comme moi, nous trouvons que c’est la Landonne qui est la plus pertinente. C’est le vin le plus bourguignon des trois, car il joue plus sur la subtilité que sur la force. C’est d’ailleurs celui qui fait le plus évolué.

La Côte Rôtie La Mouline Guigal 2000 est la plus séduisante des trois, avec un final mentholé de fraîcheur absolument unique. La Turque est la plus puissante, riche, mais plus brutale.

Jean-Philippe nous fait remarquer que sur le homard, c’est le Meursault Charmes qui est le plus pertinent, et c’est vrai que le meursault crée une vibration beaucoup plus intense que les vins rouges sur le crustacé.

Yvan nous sert ensuite du denti, ce poisson des eaux profondes à la chair très typée, avec des aulx et du pesto, sur une aubergine. Les vins de Guigal s’animent mieux sur le poisson et sur l’ail, et nous sommes bien embarrassés de décider nos préférences entre les trois vins. Ils sont tous les trois attachants, avec des personnalités très différentes. Ma fille continuera de préférer la Landonne, ce que je comprends, mais ce soir, je préférerai la fraîcheur mentholée de la Mouline, avec un fruité rare de fruits noirs.

Je rêvais de faire cette confrontation et je suis heureux de l’avoir faite. Et savoir qu’il n’y a pas de réel gagnant, chaque Côte Rôtie ayant une expression qui se justifie me remplit d’aise.

Le repas s’est terminé sur un fondant au chocolat que j’ai esquivé. Ayant prévu un champagne rosé, je ne l’ai pas ouvert, car la résonance sur le chocolat n’aurait jamais été trouvée.

La nuit illuminée par une lune parfaitement ronde nous donnait envie de jouir de la douceur de la nuit, avec le beau souvenir d’une confrontation réussie des trois belles Côtes Rôties de Guigal, sur la cuisine généreuse et toujours juste d’un Yvan Roux fier que son fils devienne comme lui naguère un rugbyman qui monte.

Chez Yvan Roux, photos samedi, 13 août 2011

le site est toujours aussi spectaculaire

si on regarde bien, la trace de la lune sur la mer est d’un or orangé

les vins de la soirée

Champagne Salon magnum 1997

Les Chaillées de l’Enfer Condrieu domaine Georges Vernay 2000

Meursault Charmes Domaine Comtes Lafon 2002

les trois Côtes Rôties de Guigal en 2000, Mouline Turque et Landonne

Champagne Perrier Jouët rosé 1966

les bouchons des vins

les plats

week-end du 15 août – les préliminaires samedi, 13 août 2011

Le noyau dur de notre Veyrat’s fan club, qui avait fait le voyage au restaurant Noma, se retrouve pour le week-end du 15 août dans le sud. Jean-Philippe est arrivé le vendredi matin et deux d’entre eux arrivent après 22 heures. J’ai envie de les accueillir avec un beau champagne, mais il n’est pas question d’attendre aussi tard sans une petite collation.

Le Champagne Dom Pérignon magnum 1998 est d’une belle fraîcheur, fait de fruits blancs et de fleurs blanches. Sur des tranches de Cecina de Léon et sur une saucisse de Morteau, c’est un régal. Ce champagne est beau, légèrement trop dosé mais très élégant. Lorsque les amis arrivent, il reste suffisamment du magnum pour trinquer, mais bien vite il faut ouvrir autre chose. Comme ma femme a prévu une pissaladière, c’est un vin rouge qui s’imposerait, mais j’ai envie de faire une folie.

J’ouvre un Champagne Dom Pérignon magnum 1988. Cette confrontation m’excite. Hélas, le deuxième magnum provenant d’un autre réfrigérateur est beaucoup trop froid et il faudra bien longtemps avant qu’il ne décide de se civiliser. Son parfum est intense, plus riche que celui du 1998. Il est plus fruité, mais nous n’aurons jamais complètement la volupté que nous attendions. Heureusement, il en restera pour demain.

Le lendemain, c’est branlebas de combat et tout le monde part faire des courses pour les repas à venir. Les approvisionnements sont pléthoriques, surtout de mon côté, mais heureusement ma fille aînée et son compagnon viennent compléter la table du déjeuner.

Le reste du Dom Pérignon 1988 est absolument magnifique. J’adore. Le nez est d’une force extrême, riche et complexe, aux notes légèrement citronnées mais aussi parfumé de fleurs blanches comme le jasmin. En bouche, le côté floral qui est une signature de Dom Pérignon est dominé par un fort fruit jaune d’une belle puissance. Ce champagne à la longueur infinie est ici d’un accomplissement royal. Sur des tranches d’andouille, l’accord se trouve à la perfection, plus que sur des tempuras de fleurs de courgettes.

A table, nous mangeons des gambas à la plancha, puis des demi-homards au jus de verveine et citron. Le Condrieu Les Chaillées de l’Enfer Domaine Georges Vernay magnum 2000 que j’avais trouvé assez simple en le goûtant à l’ouverture crée une association diabolique avec le jus de verveine et citron, et se trouve propulsé à des hauteurs extrêmes. Il est transporté à des sommets grâce à cette combinaison. Il combine fluidité, acidité parfaite, richesse en bouche et une suffisante complexité. Un vrai régal.

Le Brie de Meaux à parfaite maturation et une salade de pêche viennent conclure un repas fort agréable mais qui me fait peur. Car ce soir, nous allons dîner chez Yvan Roux. Et ce sera du sérieux.

dîner d’été – photos vendredi, 12 août 2011

Champagne Henriot 1996 magnum

Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 (à côté de la boisson des tout petits)

Champagne Bollinger Grande Année 1990

Chateau Laville Haut-Brion 1982 avec la mention « crème de tête »

Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986

Chateau de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 2001

Domaine de Mont-Redon CdP 1978

Champagne Dom Ruinart rosé 1988

Champagne Perrier Jouët rosé 1969

un beau dîner d’été vendredi, 12 août 2011

Dîner chez ma fille dans leur maison louée à portée de fusil de la notre. Le Champagne Henriot magnum 1996 confirme une fois de plus qu’il est « la » définition du champagne classique, tel qu’on l’attend et tel qu’on l’aime. Il est sans histoire, dans la ligne de ce que l’on aime. Son caractère rassurant me plait énormément.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 est résolument différent. Il est plus fruité, tout en étant aérien, plus complexe. C’est un régal fruité. Mais il ne fait pas ombrage au Henriot à la solide charpente. Alors que le Henriot cohabitait bien avec de la boutargue, il eût fallu du foie gras pour le Pol Roger, pour que la douceur du gras mette en valeur la complexité aérienne de l’élégant champagne.

Nous passons à table et c’est mon gendre qui a réalisé le menu : émulsion de céleri et bouillon de céleri / grenadin de veau à basse température au céleri / selle d’agneau aux petits pois en crème et en grain / butternut en dés au coulis de figues et de pêches.

Le Champagne Bollinger Grande Année 1990 est idéal pour le céleri. C’est un beau champagne puissant, équilibré et structuré. Il est solide, mais porte moins d’émotion que le Pol Roger. C’est au demeurant un beau 1990.

Le Château Laville Haut-Brion 1982 est d’un jaune d’une belle jeunesse, entre or et citron. Son parfum est d’une complexité extrême. En bouche, quel plaisir. C’est un vin riche, structuré, puissant, plein. Il est aimablement citronné et sa complexité en fait un vin passionnant. J’aime énormément ce vin qui résonne remarquablement avec le grenadin de veau rose à souhait. En faisant le lendemain les photos des vins, j’ai constaté que l’étiquette porte la mention « crème de tête », mention qui a déjà été utilisée pour des millésimes comme 1945, mais dont je ne connais pas la signification, car elle est généralement réservée aux liquoreux.

Mon gendre avait prévu un Chateauneuf-du-Pape Domaine de Mont-Redon 1978 mais il nous annonce que le vin ne lui plait pas, aussi a-t-il ouvert un Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 2001. C’est un beau vin, riche mais un peu strict. Il est fruité et puissant, mais un peu doctrinal. A côté de lui, la Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986 est beaucoup plus ronde, joyeuse, chaleureuse, au fruit encore plus marqué. Et nous allons différer, car mon gendre préfère le Beaucastel alors que je préfère le Guigal, même si, comme mon gendre, je trouve qu’il y a de meilleures Mouline.

Par curiosité, je goûte un peu du Mont-Redon et même s’il n’est pas parfait, je le trouve buvable et méritant pour le moins l’essai d’un demi-verre.

Le dessert a été conçu pour le Champagne Dom Ruinart rosé 1988. La robe est belle ainsi que le flacon. Le nez est expressif et intense, la bulle est fine et active. Dès que l’on boit ce champagne, le mot qui s’impose, c’est : »respect ». Car c’est un rosé glorieux, au firmament de la qualité des champagnes rosés. Il a tout pour lui, dont une aptitude gastronomique surdéveloppée. Il aurait été parfait sur le grenadin de veau, par un accord couleur sur couleur. Ce champagne glorieux donne du plaisir à boire tant il est riche, au message extrêmement lisible, message de bonheur.

En plus du Pol Roger, j’avais apporté un Champagne Perrier-Jouët rosé 1969 dont j’espérais autant que le sublime 1966 bu récemment au même endroit. Hélas, ce champagne ne me plait pas, car il manque de souffle et de vivacité. Mon gendre l’a aimé, car il adore les vieux champagnes, mais je ne l’ai pas aimé, vexé qu’il ne soit que l’ombre du 1966 éblouissant.

Le vote que j’ai annoncé ne diffère de celui de mon gendre que par l’interversion des deux vins rouges. Il est : 1 : Champagne Dom Ruinart rosé 1988, 2 – Château Laville Haut-Brion 1982, 3 – Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996, 4 – Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986.

Par une des plus belles journées de cet été, nous avons goûté quelques vins passionnants.

déjeuner – photos dimanche, 7 août 2011

Gevrey Chambertin Clos Saint-Jacques Domaine Armand Rousseau 2001

Domaine de Terrebrune Bandol 1987

la couleur de la cuisson basse température

Grosse surprise quand j’ai découvert que le Salon 1983 sans étiquette était en fait un 1982, l’un des plus grands qui soient.

Deux hasards en cave ajoutent du piment dimanche, 7 août 2011

Deux hasards en cave ajoutent du piment. Nous devons recevoir des amis, et je sais qu’il s’agit d’amateurs de vins, surtout des grands classiques traditionnels, mais qui aiment aussi se faire surprendre. Ma cave dans le sud, comme à Paris, n’est pas à mon domicile. Elle est dans un hangar où j’espère que nul malfrat n’ira supposer qu’il y a du vin. Alors que ma cave du sud est microscopique par rapport à celle de Paris, je ne sais pas mieux ce que j’ai. Je remarque une caisse carton de champagne Salon noire, sale, avachie comme un béret, avec des noirceurs de moisissure. Dedans, une bouteille a encore son enveloppe de papier blanc intacte, et quand je l’ouvre pour repérer le millésime, je constate que sous l’emballage intact, l’étiquette de la bouteille a disparu, évaporée en poussière. Rien n’est plus lisible, aussi est-ce vers le carton que je cherche une information. L’étiquette du carton a perdu toute trace d’écriture, mais je vois « 83 » écrit distinctement. L’idée d’ouvrir un Salon 1983 me paraît excitante, car cette année jugée plutôt faible m’a souvent donné de belles surprises. Je poursuis mes recherches et je vois un Montrose 1978 qui me semble convenir au plat prévu par ma femme et un vin d’Armand Rousseau me fait de l’œil. Ma pioche est faite.

Le jour venu, je veux ouvrir les rouges quelques heures avant le déjeuner, avec l’angoisse qu’un temps orageux ne donne des vins lourds à boire. Avant d’ouvrir, je prends des photos. Dans le viseur de mon appareil, le 1978 du Montrose, lorsque je le rends plus lisible, me semble 1918. Il me paraît impossible que ce soit le cas. Je prends la bouteille en main et il apparaît sans doute possible que c’est un 1918. Par cette chaleur, je n’aimerais pas ouvrir un 1918, aussi mon choix se reporte sur un Terrebrune Bandol 1987 que j’ai à domicile. J’ouvre les deux bouteilles et le Terrebrune exhale un parfum exceptionnel alors que le Clos Saint-Jacques a encore le pied sur le frein aromatique.

Les amis arrivent, et le bouchon du Champagne Salon 1983 résiste de façon imprévue. Impossible de l’ouvrir. Nous essayons en usant de toutes nos forces, sans succès. Avec un ouvre-boite nous cisaillons le bouchon et avec mon tirebouchon, je lève le reste du bouchon avec une extrême difficulté. Le pschitt est faible mais la bulle est intense. La couleur du champagne est d’un or de blé d’été. Le nez de ce champagne est extraordinaire, et je suis heureux que ce champagne soit au dessus du souvenir que j’ai des 1983. C’est une bonne pioche, profitons-en. En bouche, ce champagne est magique. C’est la perfection du chardonnay, c’est d’une puissance à se damner, avec une rémanence en bouche inégalable. Nous l’essayons sur du Cicena de Léon, du Pata Negra, de la poutargue et des tempuras de fleurs de courgette, et à chaque fois il est parfait.

Nous passons à table et ma femme a prévu un grenadin de veau à basse température d’une tendreté érotique. Avec le reste du Salon 1983, c’est à se damner. Je sers d’abord le Gevrey-Chambertin Clos Saint-Jacques Domaine Armand Rousseau 2001 et ce qui est absolument subjuguant, c’est la précision et la cohérence de ce vin. On imagine que le travail sur les grains de raisin a été redoutable, car ce jus est d’une pureté infinie. Tout dans ce vin est cohérent et on n’imagine pas bourgogne plus séducteur et serein que celui-ci. Velouté, cohérent, structuré, délicieusement fruité, il a tout pour lui. A côté le Terrebrune Bandol 1987 est l’exacte définition des vins du sud, avec un parfum de garrigue, d’olive noire et de romarin. C’est lui qui s’associe le mieux avec la tapenade que ma femme a léchée d’un peu de réglisse. Mais évidemment, la race, la précision sont du côté du bourguignon.

Un repas sans camembert Jort, ça n’existe pas et les deux rouges chacun dans son registre, captent des saveurs singulières de cette pâte divine.

Nous nous rendons chez ma fille à quelques hectomètres de chez nous pour goûter la tarte aux mirabelles que mon gendre va accompagner d’un Champagne Henriot magnum 1996. Ce champagne absolument plaisant montre à quel point il y a un abîme entre un bon champagne et le Salon que nous avons bu.

De retour chez nous, nous rangeons les plats et les verres restés en place et ma femme me dit ; « n’oublie pas le bouchon du champagne ». Je le prends en main pour une éventuelle photographie, et je regarde. Wow ! C’est 1982 qui est inscrit sur le bouchon et je réalise que le « 83 » que j’avais lu, c’est – je le suppose – le département de livraison.

Tout devient plus clair. Nous avons bu un des Salon que je préfère, le plus romantique de tous, le Champagne Salon 1982, le plus mythique pour moi avec 1966, au dessus du légendaire 1959. Tout redevient cohérent. Nous avons bu l’un des plus grands Salon qui soit. Tant mieux ! Et savoir que j’ai dans ma cave du sud un Montrose 1918, tout est bien qui finit bien.

de plusieurs vins, c’est le plus inattendu qui remporte la palme mercredi, 3 août 2011

Le dîner se tient chez ma fille, qui loue une somptueuse maison au bord de l’eau à une portée de fusil de notre maison. Après une esquisse de partie de pétanque, le Champagne Laurent Perrier Grand Siècle vers 1970 (fait de 1969, 1970, 1973) est subjuguant. C’est un champagne ancien au parfum redoutable, qui emmène dans des directions inconnues. Le mot « indéfinissable » lui convient parfaitement.

Sa bulle est insistante, et le fruit confit est sa caractéristique dominante. Sur des toasts variés à l’infini, il délivre des saveurs plus complexes les unes que les autres. Personnellement, face à un tel champagne, je n’ai qu’un mot : « respect », car je suis incapable de le cerner, et j’essaie simplement de capter une partie de ses complexités.Une amie de ma fille ayant exprimé récemment son scepticisme à l’égard de Dom Pérignon, j’ai décidé de frapper fort, en apportant un Champagne Dom Pérignon magnum 1990. Et le champagne est confronté à un grenadin de veau cuit à basse température avec une crème de champignons et des champignons. Ce champagne, dans ce format, c’est une rareté. Et nous goûtons un champagne parfait. Nous commençons à nous extasier et je suis le premier – parce que je peux me le permettre puisque c’est mon vin – à dire que derrière la perfection, il y a un certain manque de génie. Car ce champagne est trop « premier de la classe ». On aimerait qu’il s’encanaille et il reste « question de cours ». Il est objectivement grand, et comme la soirée s’est attardée dans la nuit, j’ai pu mesurer dans mon verre à quel point le vin est d’une pureté inégalable. Le vin est objectivement magistral, mais sans folie.

Le Château Trotanoy 2001 a un nez d’une rare noblesse. En bouche, c’est son velouté et sa trame précise qui nous ravissent. Sur la pièce de bœuf divine, le vin est superbe, mais quand arrive la Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986, le match n’existe pas. La Mouline de 25 ans est trop parfaite pour qu’une comparaison puisse se faire. Ce vin est la sérénité absolue. Ce n’est pas la plus grande des Mouline, mais ce soir, c’est un régal.

Sur une salade de pêches blanches, j’ai apporté une petite merveille, un Champagne Perrier Jouêt rosé 1966. La couleur est d’une rare profondeur. Le nez est intense, envoûtant de fruits. Et en bouche, dès la première gorgée, c’est un voyage vers l’infini. Tout le monde tombe sous le charme de cet immense champagne, aux complexités folles, faites de fruits blancs comme la pêche, mais de tellement d’autres choses qu’on reste bouche bée.

Nous nous amusons à voter, et mon vote est partagé par beaucoup de convives. Il est : 1 – Champagne Perrier Jouêt rosé 1966, 2 – Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986, 3 – Champagne Laurent Perrier Grand Siècle vers 1970, 4 – Champagne Dom Pérignon magnum 1990, 5 – Château Trotanoy 2001.

Le plus bel accord de ce dîner, c’est le grenadin de veau et son coulis de champignon avec le Dom Pérignon. La bonne nouvelle, c’est de voir des champagnes anciens aussi bien placés. Mais j’attendais beaucoup mieux de mon arme secrète, le Dom Pérignon 1990 en magnum. Ce fut une grande soirée, et une leçon d’humilité, car comprendre les vins anciens aux saveurs si changeantes n’est pas chose aisée.

apéritif un soir d’été samedi, 30 juillet 2011

Apéritif impromptu par une jolie soirée d’été. Un Champagne Henriot magnum1996 sert d’introduction. Classique, bien dessiné, il est l’archétype du champagne de plaisir. Nous tranchons des lamelles de poutargue, de fines tranches de Jabugo viennent exciter nos papilles et un camembert Jort vient ajouter sa touche de doux-amer. Je donne ensuite le choix entre un magnum de Dom Pérignon 1998 et un magnum de Salon 1997 et l’unanimité se fait sur le Salon, alors que mon humeur eût porté vers le Dom Pérignon.

Le nez du Champagne Salon magnum 1997 est une pure merveille. Il est vineux et évoque de grands bourgognes, tant le Chardonnay imprime sa marque. En bouche, c’est peut-être un des plus grands 1997 que j’aie bu. Il combine la délicatesse florale avec un caractère vineux qui s’affirme de jour en jour. Compagnon de gastronomie, il s’adapte quasiment à tout et lorsque l’on sert un gigot d’agneau de plus de onze heures, l’accord est saisissant de pertinence. Ce Salon est taillé pour les repas aux viandes expressives. Ce champagne me plait de plus en plus.