Archives de catégorie : dîners ou repas privés

week-end de folie, épilogue mardi, 16 août 2011

Le lendemain de ce féerique repas, Jean-Philippe nous quitte. Il reste de quoi faire de multiples repas. Ayant consommé huit petits homards, il reste seize pinces, décortiquées par l’un des amis. C’est sur le reste du champagne Salon 1988 que nous les dégustons. Une nuit a permis au Salon 1988 de prendre une ampleur spectaculaire. C’est comme cela que j’aime ce 1988. Il est joyeux, ample, avec un fruit ensoleillé. Quel grand champagne. Je m’en veux, car je me dis chaque fois que les Salon devraient être ouverts la veille. Est-ce que j’y penserai la prochaine fois ?

En tout cas c’est un champagne magnifique et joyeux qui clôture en fanfare notre week-end fou, pour la catégorie champagne. Ma femme cuit des filets de bar qui sont d’une chair d’une percutante saveur. Sur ce beau poisson et sur des restes froids du quasi de veau, le Pommard Epenots domaine Parent 1969 montre, lui aussi, que la nuit lui a fait du bien. Il a gagné en ampleur et reste précis. C’est vraiment un grand vin que nous avons adoré jusqu’à la dernière goutte. Sur des abricots ou sur des miettes de la tarte aux mirabelles, on peut encore goûter le Gilette 1953 qui lui, contrairement aux autres, a souffert de l’aération de la nuit.

Lorsque nous raccompagnons les derniers amis à l’aéroport, nous savons que nous venons de vivre un week-end intense. Les rendez-vous sont pris pour recommencer.

Le travail de bénédictin de notre ami qui en pince pour le homard.

le dîner de Jean-Philippe, point culminant de notre été lundi, 15 août 2011

Le point culminant gastronomique de nos vacances, c’est le dîner cuisiné chez nous par Jean-Philippe. Dès son arrivée nous avions défini les vins du dîner. L’air de rien, malgré les occupations sportives ou ludiques, Jean-Philippe tournait et retournait dans sa tête, à notre insu, les plats qu’il allait créer. A partir de 16 heures dans la cuisine occupée par Jean-Philippe aidé de deux amis, l’espace bourdonne, les produits virevoltent, les couteaux découpent, les mixers vrombissent et les sauces s’organisent. Puis, comme si de rien n’était, à 18 heures, Jean-Philippe joue une partie de tennis, décontracté comme jamais.

Le Champagne Salon magnum 1988 est très différent du 1997 que nous avons bu hier. Le caractère vineux est nettement plus intense. Le vin est solide, carré, d’une insolente jeunesse, avec de beaux fruits jaunes. Il est plus fruité que floral. Avec de fines tranches de Cecina de Léon, moins fumé que le précédent mais plus tendre, le champagne est impérial. Nous l’aimons beaucoup, mais, même si tout au long de la soirée, sa matière vineuse s’est épanouie révélant une structure remarquable, nous n’avons pas eu la plénitude que peut atteindre Salon 1988. Il est grand, mais pas au sommet que j’ai déjà rencontré.

La deuxième partie du champagne se prend à table avec un carpaccio de sébaste au pamplemousse. Dès ce premier plat, nous savons que Jean-Philippe va frapper très fort, car la justesse du plat est extrême, mais surtout le carpaccio donne une tension sensible au champagne.

Le Clos Joliette Jurançon sec 1974 se présente avec une couleur extrêmement foncée. Son nez évoque un liquoreux ou un Tokay. On pourrait s’attendre à un vin doux, mais la bouche est effectivement celle d’un vin sec. Légèrement oxydé, ce vin est pour moi extrêmement difficile à saisir, car on cherche en vain quelle direction il a voulu prendre. Veut-il aller vers les vins du Jura, vers les Château Grillet, vers certains fumés du Rhône, on ne sait pas bien. Mais la belle acidité de son abricot est remarquablement mise en valeur par le plat : filet de bar à l’unilatérale, avocat poêlé, jus d’abricot aux herbes diverses de la Provence. Il convient de remarquer que pour chaque plat, Jean-Philippe goûte le vin avant pour ajuster la force de ses sauces et la pesanteur de chaque épice. Et, chose incroyable, à chaque plat, nous avons l’impression que rien n’est prêt pour le suivant, alors qu’avec ses deux compères, il va exécuter les dressages et les sauces comme par magie. Le jus d’abricot a permis de donner au Clos Joliette un charme auquel je n’adhérais pas sans cela.

Le nez du Château Laville Haut-Brion 1980 est tellement fou de jeunesse que l’on sent le soufre des vins jeunes et on le ressent même en bouche. Si nous n’étions déjà des adorateurs de Laville, celui-ci nous convaincrait définitivement, car sa richesse dans les acidités est spectaculaire. C’est le prototype du vin sec parfait. Personne ne pourrait situer son millésime avant 2000 si on le goûtait à l’aveugle, tant sa vivacité est grande. Il se marie à des encornets, concombre à la verveine citronnée et purée de courgette et basilic. Avec chacune des trois composantes du plat l’accord est éblouissant, et comme dans les feux d’artifice on fait des oh et des ah lorsque l’on passe d’un accord à un autre. Ma préférence va à l’association créée par la purée de courgette et basilic, même si la tendreté de l’encornet et la précision de la verveine citronnée sont aussi de grands multiplicateurs du vin. C’est je crois l’accord suscité par ce plat que j’ai préféré.

Le Kistler Durell Vineyard Sonoma Coast 2008 a été vanté par Jean-Philippe car, si j’ai bien compris, son vinificateur a travaillé au domaine Ramonet, l’un des plus prestigieux pour les blancs de Bourgogne. Malgré cette carte de visite, je n’adhère pas du tout. Le vin est bon, c’est un chardonnay bien structuré, mais il n’y a pas d’émotion. Son nez est américain, et sa bouche l’est aussi. Il est accompagné par un plat magistral, un homard à la plancha, coulis de poivron jaune, sauce corail. Le plat est prodigieux, et aurait probablement mérité le Laville, avec quelques accommodements dans les pondérations.

François Parent, vigneron qui fait de beaux pommards, était venu nous rendre visite il y a deux ans à la même date, jour pour jour. Il nous avait offert un Pommard Epenots domaine Parent magnum 1969. J’attendais d’avoir des connaisseurs pour ouvrir ce vin. C’est fait ce soir. Le vin nous subjugue tous. La couleur est d’un rose foncé soutenu, sans trace d’âge. Le nez est prodigieux de finesse, avec des pétales de rose. Et en bouche, l’impression est saisissante. C’est un bourgogne d’une sensibilité exceptionnelle, très au dessus de ce que j’attendais. Nous faisons tous de larges sourires, car nous tenons devant nous un vin exceptionnel de subtilité, de grâce, de plaisir. Comment Jean-Philippe a-t-il pu créer un plat d’une telle justesse : quasi de veau basse température, endive confite aux pétales de rose, sauce au genièvre et à la rose. Le plat et le vin nous entraînent au septième ciel, le vin me ravissant par sa délicatesse.

Je voulais que nous restions sur la Bourgogne avec le Chambertin Clos de Bèze domaine Armand Rousseau 2002. Le vin est presque noir si on le compare au pommard. Son nez est puissant, très beau. En bouche, c’est un seigneur. C’est la plénitude absolue du vin de Bourgogne jeune. Il a tout pour lui, la sérénité, l’équilibre, un fruité joyeux, et une opulence rassurante. Il est majestueux. La tentation bien sûr, c’est de voir si le pommard bu après le chambertin reste aussi brillant. Et à ma grande joie, c’est le cas. Car ce qu’il n’a pas en force de structure est compensé par sa subtilité gracieuse.

Lorsque j’étais chez mon boucher traiteur, j’avais repéré un filet de bœuf qui me paraissait dans un état parfait. Et Jean-Philippe a réalisé un filet de bœuf aux épices douces Tepanyaki, courgettes au Raz el hanout cuit divinement. L’accord avec le Clos de Bèze est d’une évidence confondante, comme chacun des accords de ce dîner. Nous avons continué longtemps à siroter les deux bourgognes enthousiasmants.

Le Château Gilette Crème de Tête 1953 est d’un or ambré absolument magnifique. Le nez est une bombe d’abricot et en bouche, le confort d’un sauternes à parfaite maturité est exemplaire. Le vin est doucereux et procure un plaisir rare. Ma femme a réalisé une tarte aux mirabelles qui va comme un gant au liquoreux. Elle est tellement bonne qu’elle est vite absorbée aussi aimerions-nous un autre dessert. Le sauternes respire tellement l’abricot que nous supplions notre chef de réaliser quelque chose avec des abricots. Comme l’artiste qui fait durer le doute sur sa volonté de bisser son spectacle, Jean-Philippe se fait prier, estime que sa prestation est terminée. Mais en fait il réfléchit à ce qu’il a envie de faire. Il poêle des demi-abricots sur la plancha et concocte une caresse de gingembre, qui vont propulser le Gilette à des hauteurs insoupçonnées tant il prend une tension extrême. Il devient magique.

Tomo ayant offert il y a près de deux mois un Single Cask Malt Whisky Karuizawa 1967 titrant 58,4°, c’est sur ce merveilleux whisky sentant le cuir et extrêmement chaleureux malgré son degré d’alcool que nous avons fini ce repas qui est le point culminant de notre été. Tous les plats ont été d’une justesse exceptionnelle par rapport aux vins. Ce fut grand.

Mon classement des vins est : 1 – Chambertin Clos de Bèze domaine Armand Rousseau 2002, 2 – Pommard Epenots domaine Parent magnum 1969, 3 – Château Gilette Crème de Tête 1953, 4 – Champagne Salon magnum 1988, 5 – Château Laville Haut-Brion 1980.

Jean-Philippe ayant pris goût à cet exercice reviendra dans quinze jours cuisiner pour l’ami autrichien amateur de vins, car Yvan Roux ne sera pas disponible à la date prévue. Fera-t-on mieux la prochaine fois ? A suivre.

dîner de Jean Philippe – les vins dimanche, 14 août 2011

Champagne Salon magnum 1988

Clos Joliette 1974

Chateau Laville Haut-Brion 1980

Kistler 2008 Durell Vineyard Sonoma Coast

Pommard Epenots domaine Parent magnum 1969

Chambertin Clos de Bèze Domaine Armand Rousseau 2002

Chateau Gilette crème de tête 1953

whisky Karuizawa Single Cask Malt 1967

dîner de Jean Philippe – les plats et la dream team dimanche, 14 août 2011

Les plats préparés par Jean Philippe et ses assistants :

Mon gendre pose une question à Jean Philippe de dos

Apparemment, mon gendre a du mal à y croire !

pendant une pause, le chef travaille toujours !

on refait le match entre Jean-Philippe, mon épouse et ma fille

la salle à manger d’été, vue de l’autre côté de la piscine

déjeuner au bord de la mer avec Vega Sicilia Unico 1965 dimanche, 14 août 2011

Le lendemain matin, même cérémonial des courses. Ce soir, c’est Jean-Philippe qui fera la cuisine, aussi avons-nous prévu de grands vins. Le midi devrait être calme, mais les chipolatas que j’ai achetées imposent d’ouvrir un grand vin apporté par l’un des amis.

En guise de démarrage du déjeuner, j’ai attribué par un tirage au sort les restes des vins de la veille. J’ai un peu forcé le sort pour avoir le fond du Champagne Salon magnum 1997 qui a pris un peu de coffre et de vineux pendant la nuit en perdant de sa bulle. Il est aussi délicieux ainsi.

Nous goûtons d’abord une petite coupelle avec des endives, de la poire et un jus au roquefort. C’est une composition délicieuse de Jean-Philippe, comme s’il faisait ses gammes. Ensuite, ce sont quatre chipolatas, une au pesto, une d’agneau à la menthe, une de canard et enfin une saucisse « à l’ancienne ». C’est cette dernière qui sera jugée la meilleure et créera la meilleure vibration avec le vin.

Le Vega Sicilia Unico 1965 est d’une couleur déjà tuilée. Son nez est élégant et discret. C’est en bouche que le miracle se produit, car il est tout simplement parfait. C’est une main de fer dans un gant de velours, car sa puissance s’accompagne de beaucoup de douceur. Légèrement fumé, à peine torréfié, il ne montre aucun signe d’âge que la couleur tuilée eût laissé supposer. Sur l’instant, je me dis que je préfère ce vin aux trois d’hier. Mais faisons comme avec les trois Côtes Rôties hier, ne désignons aucun gagnant.

La chaleur communicative des banquets aidant, nous avons mangé plus qu’il ne faudrait, car ce soir, c’est festival avec Jean Philippe au fourneau.

dîner chez Yvan Roux avec les trois Côtes Rôties de Guigal samedi, 13 août 2011

Après une bonne sieste et des activités ludiques, nous nous rendons au domicile d’Yvan Roux. Le soleil est rasant et colore de rose Giens, Porquerolles et les marais salants. Quand il se cache derrière un bouquet de pins méditerranéens, il semble l’embraser. Sur la terrasse qui surplombe la mer, le Champagne Salon magnum 1997 met un sourire sur nos lèvres. Ce champagne est romantique, floral, et c’est sans doute l’un des moins vineux et des plus féminins de tous les Salon. Mais surtout il est lisible. Il n’est nul besoin de chercher à comprendre son charme. La seule chose à faire est d’y succomber.

De fines tranches de chorizo fait au Pata Negra apportent un gras qui titille aimablement le beau champagne. Mais l’accord divin se fait sur une crème aux poivrons et piment d’Espelette où l’on trempe des beignets de lotte. La chair de la lotte est un régal.

La lune apparaît, merveilleusement ronde, et teinte d’un argent légèrement blond l’onde calme du début de nuit.

Nous passons à table derrière la piscine qui ne gêne en rien la vue sur la mer. C’est cette piscine où un autrichien fou de vin était tombé par mégarde en voulant aller chercher un de ses vins. Nous le reverrons dans quinze jours.

Sur une friture de petits rougets, nous avons deux vins blancs. Le reste du Condrieu Les Chaillées de l’Enfer Domaine Georges Vernay magnum 2000 et un Meursault Charmes Domaine des Comtes Lafon 2002. Je suis très favorablement surpris par la qualité du Condrieu, qui montre son adaptabilité gastronomique au-delà de toute attente. Je ne me souviens pas avoir bu un Condrieu de ce niveau. Il est charmant, puissant, riche de fruit brun, avec une complexité qui me surprend et une longueur plaisante. C’est un grand vin. Le Meursault Charmes est plus élégant, plus raffiné et subtil, mais je dois dire que ce soir, c’est le rhodanien que je préfère.

Sur un carpaccio d’un poisson dont la chair ressemble à celle d’un thon rose, servi avec des copeaux de pamplemousse, l’accord avec le Condrieu est tout simplement diabolique. Le Condrieu est fait pour le pamplemousse, judicieux pour le carpaccio.

Ayant récemment fait des statistiques sur ce que j’ai bu, j’ai constaté que contre toute attente (enfin la mienne), j’ai bu autant de chacune des trois grandes Côtes Rôties de Guigal, la Landonne, la Mouline et la Turque. Spontanément, j’aurais répondu que la Mouline est de loin la plus bue et la Turque beaucoup moins, mais en fait les trois sont numériquement égales dans mes dégustations. Jamais n’avais-je ouvert les trois ensemble aussi suis-je excité à l’idée de le faire avec des amis qui apprécient le vin.

Dans trois verres devant nous se présentent les trois, pour le millésime 2000. Il faut savoir qu’Yvan Roux a fait son menu sans connaître les vins. A peine sommes-nous servis des vins qu’arrivent des assiettes submergées par des énormes moitiés de langoustes. Nous allons comparer nos trois vins sur des chairs absolument succulentes dans leur pureté.

Le nez de la Côte Rôtie La Turque Guigal 2000 est de loin le plus imposant. Le nez le plus subtil et délicat est celui de la Côte Rôtie La Landonne Guigal 2000. Sur la langouste, ma fille comme moi, nous trouvons que c’est la Landonne qui est la plus pertinente. C’est le vin le plus bourguignon des trois, car il joue plus sur la subtilité que sur la force. C’est d’ailleurs celui qui fait le plus évolué.

La Côte Rôtie La Mouline Guigal 2000 est la plus séduisante des trois, avec un final mentholé de fraîcheur absolument unique. La Turque est la plus puissante, riche, mais plus brutale.

Jean-Philippe nous fait remarquer que sur le homard, c’est le Meursault Charmes qui est le plus pertinent, et c’est vrai que le meursault crée une vibration beaucoup plus intense que les vins rouges sur le crustacé.

Yvan nous sert ensuite du denti, ce poisson des eaux profondes à la chair très typée, avec des aulx et du pesto, sur une aubergine. Les vins de Guigal s’animent mieux sur le poisson et sur l’ail, et nous sommes bien embarrassés de décider nos préférences entre les trois vins. Ils sont tous les trois attachants, avec des personnalités très différentes. Ma fille continuera de préférer la Landonne, ce que je comprends, mais ce soir, je préférerai la fraîcheur mentholée de la Mouline, avec un fruité rare de fruits noirs.

Je rêvais de faire cette confrontation et je suis heureux de l’avoir faite. Et savoir qu’il n’y a pas de réel gagnant, chaque Côte Rôtie ayant une expression qui se justifie me remplit d’aise.

Le repas s’est terminé sur un fondant au chocolat que j’ai esquivé. Ayant prévu un champagne rosé, je ne l’ai pas ouvert, car la résonance sur le chocolat n’aurait jamais été trouvée.

La nuit illuminée par une lune parfaitement ronde nous donnait envie de jouir de la douceur de la nuit, avec le beau souvenir d’une confrontation réussie des trois belles Côtes Rôties de Guigal, sur la cuisine généreuse et toujours juste d’un Yvan Roux fier que son fils devienne comme lui naguère un rugbyman qui monte.

Chez Yvan Roux, photos samedi, 13 août 2011

le site est toujours aussi spectaculaire

si on regarde bien, la trace de la lune sur la mer est d’un or orangé

les vins de la soirée

Champagne Salon magnum 1997

Les Chaillées de l’Enfer Condrieu domaine Georges Vernay 2000

Meursault Charmes Domaine Comtes Lafon 2002

les trois Côtes Rôties de Guigal en 2000, Mouline Turque et Landonne

Champagne Perrier Jouët rosé 1966

les bouchons des vins

les plats

week-end du 15 août – les préliminaires samedi, 13 août 2011

Le noyau dur de notre Veyrat’s fan club, qui avait fait le voyage au restaurant Noma, se retrouve pour le week-end du 15 août dans le sud. Jean-Philippe est arrivé le vendredi matin et deux d’entre eux arrivent après 22 heures. J’ai envie de les accueillir avec un beau champagne, mais il n’est pas question d’attendre aussi tard sans une petite collation.

Le Champagne Dom Pérignon magnum 1998 est d’une belle fraîcheur, fait de fruits blancs et de fleurs blanches. Sur des tranches de Cecina de Léon et sur une saucisse de Morteau, c’est un régal. Ce champagne est beau, légèrement trop dosé mais très élégant. Lorsque les amis arrivent, il reste suffisamment du magnum pour trinquer, mais bien vite il faut ouvrir autre chose. Comme ma femme a prévu une pissaladière, c’est un vin rouge qui s’imposerait, mais j’ai envie de faire une folie.

J’ouvre un Champagne Dom Pérignon magnum 1988. Cette confrontation m’excite. Hélas, le deuxième magnum provenant d’un autre réfrigérateur est beaucoup trop froid et il faudra bien longtemps avant qu’il ne décide de se civiliser. Son parfum est intense, plus riche que celui du 1998. Il est plus fruité, mais nous n’aurons jamais complètement la volupté que nous attendions. Heureusement, il en restera pour demain.

Le lendemain, c’est branlebas de combat et tout le monde part faire des courses pour les repas à venir. Les approvisionnements sont pléthoriques, surtout de mon côté, mais heureusement ma fille aînée et son compagnon viennent compléter la table du déjeuner.

Le reste du Dom Pérignon 1988 est absolument magnifique. J’adore. Le nez est d’une force extrême, riche et complexe, aux notes légèrement citronnées mais aussi parfumé de fleurs blanches comme le jasmin. En bouche, le côté floral qui est une signature de Dom Pérignon est dominé par un fort fruit jaune d’une belle puissance. Ce champagne à la longueur infinie est ici d’un accomplissement royal. Sur des tranches d’andouille, l’accord se trouve à la perfection, plus que sur des tempuras de fleurs de courgettes.

A table, nous mangeons des gambas à la plancha, puis des demi-homards au jus de verveine et citron. Le Condrieu Les Chaillées de l’Enfer Domaine Georges Vernay magnum 2000 que j’avais trouvé assez simple en le goûtant à l’ouverture crée une association diabolique avec le jus de verveine et citron, et se trouve propulsé à des hauteurs extrêmes. Il est transporté à des sommets grâce à cette combinaison. Il combine fluidité, acidité parfaite, richesse en bouche et une suffisante complexité. Un vrai régal.

Le Brie de Meaux à parfaite maturation et une salade de pêche viennent conclure un repas fort agréable mais qui me fait peur. Car ce soir, nous allons dîner chez Yvan Roux. Et ce sera du sérieux.

dîner d’été – photos vendredi, 12 août 2011

Champagne Henriot 1996 magnum

Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 (à côté de la boisson des tout petits)

Champagne Bollinger Grande Année 1990

Chateau Laville Haut-Brion 1982 avec la mention « crème de tête »

Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986

Chateau de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 2001

Domaine de Mont-Redon CdP 1978

Champagne Dom Ruinart rosé 1988

Champagne Perrier Jouët rosé 1969

un beau dîner d’été vendredi, 12 août 2011

Dîner chez ma fille dans leur maison louée à portée de fusil de la notre. Le Champagne Henriot magnum 1996 confirme une fois de plus qu’il est « la » définition du champagne classique, tel qu’on l’attend et tel qu’on l’aime. Il est sans histoire, dans la ligne de ce que l’on aime. Son caractère rassurant me plait énormément.

Le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996 est résolument différent. Il est plus fruité, tout en étant aérien, plus complexe. C’est un régal fruité. Mais il ne fait pas ombrage au Henriot à la solide charpente. Alors que le Henriot cohabitait bien avec de la boutargue, il eût fallu du foie gras pour le Pol Roger, pour que la douceur du gras mette en valeur la complexité aérienne de l’élégant champagne.

Nous passons à table et c’est mon gendre qui a réalisé le menu : émulsion de céleri et bouillon de céleri / grenadin de veau à basse température au céleri / selle d’agneau aux petits pois en crème et en grain / butternut en dés au coulis de figues et de pêches.

Le Champagne Bollinger Grande Année 1990 est idéal pour le céleri. C’est un beau champagne puissant, équilibré et structuré. Il est solide, mais porte moins d’émotion que le Pol Roger. C’est au demeurant un beau 1990.

Le Château Laville Haut-Brion 1982 est d’un jaune d’une belle jeunesse, entre or et citron. Son parfum est d’une complexité extrême. En bouche, quel plaisir. C’est un vin riche, structuré, puissant, plein. Il est aimablement citronné et sa complexité en fait un vin passionnant. J’aime énormément ce vin qui résonne remarquablement avec le grenadin de veau rose à souhait. En faisant le lendemain les photos des vins, j’ai constaté que l’étiquette porte la mention « crème de tête », mention qui a déjà été utilisée pour des millésimes comme 1945, mais dont je ne connais pas la signification, car elle est généralement réservée aux liquoreux.

Mon gendre avait prévu un Chateauneuf-du-Pape Domaine de Mont-Redon 1978 mais il nous annonce que le vin ne lui plait pas, aussi a-t-il ouvert un Chateauneuf-du-Pape Château de Beaucastel Hommage à Jacques Perrin 2001. C’est un beau vin, riche mais un peu strict. Il est fruité et puissant, mais un peu doctrinal. A côté de lui, la Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986 est beaucoup plus ronde, joyeuse, chaleureuse, au fruit encore plus marqué. Et nous allons différer, car mon gendre préfère le Beaucastel alors que je préfère le Guigal, même si, comme mon gendre, je trouve qu’il y a de meilleures Mouline.

Par curiosité, je goûte un peu du Mont-Redon et même s’il n’est pas parfait, je le trouve buvable et méritant pour le moins l’essai d’un demi-verre.

Le dessert a été conçu pour le Champagne Dom Ruinart rosé 1988. La robe est belle ainsi que le flacon. Le nez est expressif et intense, la bulle est fine et active. Dès que l’on boit ce champagne, le mot qui s’impose, c’est : »respect ». Car c’est un rosé glorieux, au firmament de la qualité des champagnes rosés. Il a tout pour lui, dont une aptitude gastronomique surdéveloppée. Il aurait été parfait sur le grenadin de veau, par un accord couleur sur couleur. Ce champagne glorieux donne du plaisir à boire tant il est riche, au message extrêmement lisible, message de bonheur.

En plus du Pol Roger, j’avais apporté un Champagne Perrier-Jouët rosé 1969 dont j’espérais autant que le sublime 1966 bu récemment au même endroit. Hélas, ce champagne ne me plait pas, car il manque de souffle et de vivacité. Mon gendre l’a aimé, car il adore les vieux champagnes, mais je ne l’ai pas aimé, vexé qu’il ne soit que l’ombre du 1966 éblouissant.

Le vote que j’ai annoncé ne diffère de celui de mon gendre que par l’interversion des deux vins rouges. Il est : 1 : Champagne Dom Ruinart rosé 1988, 2 – Château Laville Haut-Brion 1982, 3 – Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill 1996, 4 – Côte Rôtie La Mouline Guigal 1986.

Par une des plus belles journées de cet été, nous avons goûté quelques vins passionnants.