Archives de catégorie : dîners ou repas privés

dîner avec des vins énigmatiques chez un ami – les photos mercredi, 16 décembre 2009

les vins que j’ai apportés : Ausone 1900, deux 1/2 Haut-Brion 1992, un Tokaji Aszu probable avant 1910, un probable Madère d’avant 1850 et le reste d’un Bourbon ex cave du duc de Windsor

le Tokaji

l’Ausone 1900 (ou supposé tel, avant qu’on ne ne boive)

photos des plats

le champagne Dom Pérignon 1978 à la belle couleur dorée

la suite des plats (voir intitulés dans le compte-rendu)

la couleur de l’Ausone 1900

le Stilton est déjà à moitié dévoré !

L’ensemble des vins dans l’ordre de service

merci à Jean-Philippe Durand pour sa merveilleuse cuisine.

vins inconnus sur la cuisine de Jean-Philippe Durand mercredi, 16 décembre 2009

Nous nous sommes connus aux restaurants de Marc Veyrat. Nous sommes huit et cela fait bien longtemps que les amis de Marc Veyrat ne s’étaient pas réunis au complet. Il y a longtemps aussi que Jean-Philippe Durand, notre cornac et cuisinier de rêve n’avait pas fait la cuisine pour nous. C’est ce soir chez lui. C’est une occasion superbe de mettre le talent de notre ami en face de saveurs vineuses inconnues. J’ai donc choisi dans ma cave un voyage dans l’inhabituel et l’énigmatique. Pour permettre à Jean-Philippe d’adapter ses préparations aux vins, mon épouse et moi sommes arrivés une heure avant les autres amis, pour que j’ouvre à temps des flacons originaux.

Les amis arrivent et nous commençons par un velouté de potiron à la noix de coco et au gingembre pour préparer nos palais. Les noix de St Jacques juste saisies et ananas aux épices douces voisinent avec deux demi-bouteilles de Château Haut-Brion blanc 1992 provenant de la cave de la Tour d’Argent dont je voulais tester le goût puisque j’en ai acheté beaucoup. Le nez du vin est superbe, la bouche est très Haut-Brion, sans l’opulence des grandes années, mais suffisamment de puissance pour que le plaisir soit grand. Le final très citronné est d’une grande fraîcheur. L’ananas est d’une belle originalité mais je trouve que le vin est surtout mis en valeur par l’onctueuse coquille. Mon achat est une bonne pioche.

Le foie gras poêlé, caramel acide à l’orange amère est une merveille de texture et crée un accord invraisemblablement joli avec le Tokaji Aszu, vers 1910 qui est le seul Tokaji que j’ai acquis d’une cave belge entièrement constituée avant 1930. J’ai indiqué « vers 1910 », mais à la réflexion, compte tenu de la lie, nous pourrions bien être au 19ème siècle. C’est une amie qui a expliqué les irisations extrêmes du verre de la bouteille : elle a été enterrée pendant de longues années pour atteindre cette érosion colorée du verre. Le nez du vin est envoûtant et pur. En bouche, il n’y a rien de plus séduisant, doucereux, riche et extraordinairement frais. Quel Tokaji ! Le temps d’un siècle a construit patiemment cet équilibre spectaculaire.

Jean-Philippe l’a travaillé cet accord ente l’escalope de ris de veau, sauce au café, risotto au génépi et ce vin totalement inconnu que nous avons appelé finalement : Brown Madera,1828. La bouteille est à coup sûr du 18ème siècle puisque j’en ai une quasiment semblable de 1780. Quant au contenu, que dire ? Le nez est sublime, lui aussi très pur, plus rêche que le Tokaji qui explose de douceur. L’attaque en bouche me fait penser la forme ronde de la bouche du poisson-chat. C’est une attaque frontale très large. On est dans des saveurs de douceurs jaunes. Puis très vite l’alcool s’affirme et le final est allongé comme la queue de ce même poisson, et évoque la sécheresse des Xérès. Il y a des notes de café, d’épices, qui permettent à l’un de nos amis qui fut professeur d’œnologie d’affirmer qu’il s’agit de madère. Mes références aux vins de Chypre de 1845 me permettent de dire que ce vin est d’avant cette date. Et comme j’ai bu plusieurs vins de 1828, nous concluons de façon péremptoire qu’il s’agit d’un Madère 1828. Mais une chose est sûre, c’est qu’aucun d’entre nous n’a rencontré un goût aussi étrange, exotique, aussi profondément parfait, dans un style opposé à celui du Tokaji qui joue sur sa douceur et non sur son alcool, alors que celui-ci joue sur l’alcool et un style très sec. Je suis personnellement « pris aux tripes » en découvrant une saveur que je n’ai jamais connue.

Le plat suivant s’appelle Souvenir de Toscane : lardo di Colonnata, gnocchi al parmigiano, crema di funghi porcini. C’est le plat le plus abouti de la cuisine de Jean-Philippe où tout est subtil dans les dosages. Luc a apporté un Champagne Dom Pérignon 1978 dont il est fier, car il chérit cette année oubliée des amateurs. Alors il nous en parle comme de ces livres interdits qui se passent sous le manteau. Le champagne doré est à l’opposé du 1975 Œnothèque que je viens de boire récemment. Le 1975 était fluide, délicat, très Dom Pérignon. Celui-ci est atypique, puissant, conquérant, et séduisant par sa vinosité virile. Il faut bien ce champagne pour changer son palais après le madère. Mais le plat accueille si bien le madère qu’il faut reprendre du champagne pour étalonner à nouveau nos capacités gustatives.

Le pigeon à la goutte de sang, sauce mûre-framboise, marrons glacés au sang est une merveille de subtilité traitée en douceur. Et c’est le bon choix pour le Château Latour 1975 qui est un Latour aux folles promesses. Comment peut-on parler d’un vin de 34 ans en disant : « il est encore jeune, il faut le laisser vieillir » ? Car c’est la jeunesse de ce vin révélée et exacerbée par la frémissante sauce au sang qui emporte notre adhésion.

Des dés de ris de veau à la truffe noire de Richerenches accompagnent un autre vin de la cave murée acquise il y a un an. Rien n’est lisible sur la bouteille et le bouchon ne m’en dira pas plus tant il est noir tout du long. C’est par un indice de nombre de bouteilles identiques que je suis convaincu qu’il s’agit d’un Château Ausone 1900. A l’ouverture le nez était poussiéreux, mais l’espoir existait. Tout au long de la soirée nous avons senti le vin s’éclore. Avec les amis, mais surtout Luc, nous dégustons le vin en cherchant s’il est cohérent qu’il soit de 1900 et s’il est logique qu’il s’agisse d’Ausone. C’est amusant de croiser ainsi les souvenirs, mais aussi d’exclure petit à petit des hypothèses autres. Tout en réfléchissant, nous jouissons du vin qui m’a profondément ému. Alors que j’aurais il y a dix minutes annoncé que le madère serait mon favori, ce vin, Ausone, puisque c’est Ausone, me transporte de joie, car je retrouve sans aucun doute la perfection que m’a donnée le millésime 1900, le plus grand sans doute de tous, comme je l’avais écrit dans mon livre. Je retrouve une richesse, un aplomb, une assise, un équilibre, une maturité qui ne peuvent exister que dans les années de première catégorie. Alors, comme nous avions déjà un peu bu, j’ai eu ma minute d’émotion, en pensant que je venais de faire ressusciter sur une cuisine de rêve trois vins aux saveurs aujourd’hui inconnues : un Tokaji que l’âge magnifie, un madère extra-terrestre et un Ausone 1900 au sommet de perfection que le vin rouge peut atteindre. Cela m’a donné le tournis.

Le Stilton (Nicole Barthélémy) est le plus beau Stilton du monde. Hélas, trois fois hélas, la magnifique bouteille de Château Climens 1924 est frappée d’un petit goût de bouchon. Alors, même si le vin est bon, car il combine de discrets agrumes et un charmant caramel, on ne voit que le bouchon comme l’on ne voit que la feuille de salade collée aux dents, même sur le plus beau des sourires. Yann était triste car à l’ouverture son vin avait un merveilleux nez d’agrumes. Que s’est-il passé ? Je comprends sa tristesse car Climens est l’un des plus sublimes sauternes. Les deux tartes de Philippe Conticini, la tarte Tatin et la tarte douce à l’orange sont d’une magnifique délicatesse qui comme deux infirmières nursent le Climens.

Ma femme a réalisé à la dernière minute des petites madeleines façon Astrance (euh, mieux qu’Astrance) juste sorties du four pour accompagner un chocolat noir à la vanille de Tahiti et une ganache noire aux épices douces (Jacques Génin) qui doivent donner un écho au très vieux Bourbon vers 1900 que j’avais ouvert à Clos de Tart il y a un mois et dont il me restait presque la moitié. Curieusement cet alcool est devenu trouble, sans doute du fait des transports, et il a perdu une bonne partie de son éclat que j’avais alors trouvé miraculeux. Malgré ces blessures récentes, l’évocation de Bourbon me remplit d’aise. Cet alcool qui provient de la cave parisienne du Duc de Windsor, mais maintenant de la mienne, m’évoque toutes les splendeurs du passé, que l’on idéalise forcément.

Jean-Philippe a confirmé une fois de plus son immense talent, sa préscience des accords, son raffinement d’exécution. Les amis ont apporté des vins de bonheur et j’ai pu leur faire découvrir des saveurs totalement inconnues, fruits de mes achats tous azimuts, car il y a dans ces vins obscurs ou inconnus une richesse – fort heureusement pour moi – totalement insoupçonnée. Nous avons voté de façon peu formelle et nous étions tous d’accord pour placer en un l’Ausone 1900, en deux le madère 1828 (mais je n’exclue pas qu’il soit plus vieux encore), en trois le Tokaji vers 1910 que l’on verrait bien ex-æquo avec le Dom Pérignon 1978, suivis du Latour 1975. Ce fort moment d’amitié et de partage de merveilles sur une cuisine d’un art consommé, c’est le plus beau prélude aux fastes de Noël.

déjeuner au Carré des Feuillants – les photos mercredi, 16 décembre 2009

La demoiselle des toilettes ne perd pas une occasion de m’observer !

Quel regard !

Le joli petit salon du restaurant

Les verres. Nous avons fait changer cette flûte pour boire notre champagne

Les plats du repas

la perle de mangoustan qui est à droite sur le photo ci-dessus est en fait le fruit d’une nèfle dont le cul du fruit est incroyablement sculpté

champagne Pol Roger Cuvée Sir Winston Churchill 1986 (la cave de Michel Bettane, dans des Crayères, est très humide)

Nuits-Saint-Georges blanc « Clos de l’Arlot » 2002

Château Lafite-Rothschild 1997

Château Mouton-Rothschild 1997

Maury Domaines et Terroirs du Sud 1959

déjeuner d’amitié avec deux beaux Rothschild (Lafite et Mouton) mardi, 15 décembre 2009

Nicolas de Rabaudy invite des amis en fin d’année. Nous nous retrouvons au Carré des Feuillants. Autour de Nicolas, un banquier, un vigneron, Michel Bettane et moi. Le champagne Pol Roger Cuvée Sir Winston Churchill 1986 apporté par Michel me fait un plaisir immense. Car je retrouve avec ce 1986 toute la splendeur que je n’arrivais pas à trouver avec le 1990. Ici, ce 1986 est parfait. Il a la puissance d’une bulle intacte pour ses 23 ans, un fruité agréable et un léger beurré, et son final est brillant.

Le menu d’Alain Dutournier est un roman : huître de Marennes, caviar d’Aquitaine et algues marines, spéciale « Gillardeau en gelée d’eau de mer, tartare d’algues et écume crémeuse / noix de Saint-Jacques snackées, compotée de potimarron, bouillon d’herbes parfumées / les deux envies de lièvre, quelques gourmandises de braconnier, râble simplement servi en médiéval « Saupiquet », en prestigieuse « Royale » avec truffe et foie gras / Fougeru briard travaillé à la truffe / perles de Mangoustan, marrons glacés, parfait vanillé, gelée de rhum, chocolat croustillant.

Le Nuits-Saint-Georges blanc « Clos de l’Arlot » 2002 est une curiosité apportée par Michel, car ce vin contrairement aux blancs de Bourgogne, n’est pas à 100% chardonnay, mais contient aussi du pinot blanc, à part quasi égale. Ce blanc est très sympathique et donnerait volontiers des idées de Condrieu. Le vin est juteux, mais son final est court. Il est plus que plaisant sur les huîtres.

Michel n’aime pas les coquilles Saint-Jacques et quand il n’aime pas, ça se sait. Il est vrai que l’excès de safran, de coriandre et autres épices orientales fait perdre le goût de la coquille.

L’objet de ce déjeuner, au-delà de l’amitié, c’était de comparer deux vins apportés par Nicolas, le Château Lafite-Rothschild 1997 et le Château Mouton-Rothschild 1997. Même si ces vins n’ont pas la puissance suffisante pour dominer le transcendant « lièvre à l’impériale », pardon, lièvre à la royale, que j’ai anobli tant il est bon, nous avons tout loisir pour bien déguster ces deux vins et les comparer.

Le nez du Lafite est absolument exceptionnel. En bouche, il est l’exacte définition d’un grand Lafite. Et ce qui est plaisant, c’est qu’une petite année montre de façon beaucoup plus évidente la pureté du terroir. Très tramé, d’une grande finesse, au final très frais ce vin est un grand vin. Si l’on doit parler de toucher de bouche, ce Lafite a une pesanteur exceptionnelle. A côté le Mouton me donne l’impression d’un Noureev qui marche avec des bottes en caoutchouc. Son parfum est plus imprécis et velouté. En bouche, c’est évidemment un vin très agréable, mais moins bien composé. Il va très bien avec le fougeru, car la truffe l’excite bien.

Pour le dessert, remarquablement exécuté, même si l’usage du rhum porte à la controverse, le Maury Domaines et Terroirs du Sud 1959 est une douceur sensuelle. Il y a du pruneau, bien sûr, mais ce qui frappe, c’est la fraîcheur mentholée du vin, et le final interminable et léger.

Pour s’amuser, j’ai fait voter notre petit groupe de cinq, et le Lafite a recueilli quatre places de premier, la cinquième allant au Pol Roger. Le vigneron et Michel ont le même classement qui se trouve être celui du consensus : 1 – Lafite, 2 – Pol Roger, 3 – Maury, 4 – Arlot, 5 – Mouton.

Mon vote intervertit deux vins : 1 – Lafite, 2 – Pol Roger, 3 – Arlot, 4 – Maury, 5 – Mouton.

Le Lafite 1997 s’est montré sous un jour d’une rare perfection, avec une précision et une finesse remarquables. Le Pol Roger m’a enchanté. La cuisine d’Alain Dutournier qui présente les plats en trois parties est d’un art accompli. Son lièvre avec une partie douce et une partie brutalement sauvage est de toute première grandeur. Ce fut un beau repas amical.

les restes de vins du dîner de vigneron sur la cuisine de mon gendre samedi, 12 décembre 2009

Il y avait tant de vins pour le dîner de vignerons au restaurant Laurent que j’avais réservé au même endroit une table pour le lendemain, pour « finir les restes ». Peu de mes enfants étant disponibles et ma dernière fille allaitant encore, il fut décidé que le dîner « du lendemain » se ferait chez elle. Philippe Bourguignon m’avait prévenu que les vignerons ont une solide descente, mais je croyais bien pouvoir profiter encore des trésors de ce magnifique dîner. Daniel, le sommelier, a rangé les bouteilles très soigneusement.

Il ne reste en fait que des fonds de magnums, toutes les bouteilles, partagées en treize buveurs, étant vides. Mon gendre aime cuisiner et s’est préoccupé de trouver de beaux produits. Il s’est lié d’amitié avec le légumier qui livre les plus grands restaurants de la capitale. En croquant les champignons de Paris, on a en bouche le goût de ceux de l’Astrance, si délicieux. Et si l’on tartine un peu de foie gras sur les champignons, on se trouve en rêve à l’Astrance. Nous croquons ces champignons sur le Champagne Pol Roger Cuvée Winston Churchill en magnum 1990 qui a gardé beaucoup de fraîcheur, a perdu sa bulle du fait des transports et se révèle toujours aussi agréable. Mais l’absence de complexité et de folie apparaît un peu plus.

Lorsque nous passons au Champagne Salon en magnum 1985, le champagne n’a pas perdu une once de sa vigueur et de son expressivité. Il est assez extraordinaire. Et je l’adore encore plus. Avec champignon et foie gras, mais aussi avec des bulots cuits à la perfection, le champagne se régale.

Le Champagne Krug Collection en magnum 1976 est lui aussi encore plus brillant que la veille, car la bulle s’étant sensiblement atténuée, le caractère vineux du champagne est plus resplendissant. Ayant la chance de goûter ces deux champagnes l’un après l’autre alors qu’ils étaient séparés hier, je constate la sérénité du Krug et sa solidité à côté de la fougue du Salon. Mon cœur penche aujourd’hui pour le Krug.

Après ces fonds de bouteilles il reste encore une petite soif qu’un Champagne Krug 1996 va étancher. Ce champagne est à un des multiples sommets qu’il connaîtra dans sa vie. D’une précision de structure extrême, riche, ce champagne est d’un plaisir total.

Mon gendre ayant trouvé un poissonnier de compétition, les petites langoustines sont de vraies merveilles. Pures, quasiment non assaisonnées, elles font vibrer le divin Corton Charlemagne Bonneau du Martray en magnum 1982 qui développe une complexité sur fond de légèreté qui est admirable. Les coquilles Saint-Jacques juste poêlées sont délicieuses, mais le Corton-Charlemagne est plus vibrant sur la douceur des langoustines.

(à peine ai-je eu le temps de prendre mon appareil, une coquille s’était déjà envolée !)

Le poissonnier a préparé des filets de rougets sans aucune arête. Il fallait un pomerol. Guillaume ouvre un Château Gazin 1979 qui est fortement bouchonné, aussi est-ce un Château Trotanoy 1999 qui accompagne le poisson. L’accord est divin. Le pomerol a une belle astringence combinée, oh paradoxe, à un velouté rare, qui met en valeur le rouget qui lui rend la pareille.

(merveilleuse cuisson des filets de rougets)

Les champignons de Paris sont maintenant poêlés pour accompagner le petit reste du Richebourg Domaine de la Romanée Conti magnum 1946. Il s’agit du fond de la bouteille qui a été aéré un jour de plus. Nous captons donc une richesse qui ne correspond plus au millésime discret. Ce vin riche enchante nos palais, même si le vin a perdu un peu de ses caractéristiques du domaine de la Romanée Conti.

Mon gendre a adopté une cuisine fondée sur des produits d’une pureté extrême, avec une simplicité de présentation pleine de talent. Va-t-il se mettre à concurrencer Jean-Philippe Durand, l’ami médecin qui cuisine comme un Dieu ? Je me prépare à compter les coups.

Déjeuner au restaurant « l’Ami Louis » vendredi, 4 décembre 2009

Lors de Vinexpo, j’avais rencontré au Château Palmer Louis Gadby, animateur du fameux restaurant « l’Ami Louis ». Nous nous étions promis de nous revoir. Aussi, lorsque Bipin Desai arrive à Paris pour une semaine de dégustations qui se terminera par un dîner de vignerons que j’organise pour la neuvième année consécutive, le rendez-vous est pris à l’Ami Louis. Je quitte le Grand Tasting pour quelques heures. Le taxi de Bipin ayant erré et m’ayant appelé trois fois pour se faire guider (bravo l’artiste), j’ai le temps de goûter le célèbre foie gras sur un champagne Jacquesson cuvée 733 que je trouve doucereux et aigrelet. Nous prenons des coquilles Saint-Jacques à l’ail mordant qui me fait pleurer, puis le traditionnel poulet frites de la maison, à la profusion qui est une marque de fabrique de ce restaurant. Bipin veut choisir un vin qu’il ne connaît pas, alors qu’il connaît tout. Ce sera un Clos de Vougeot Domaine de la Vougeraie 2001. Aucun de nous n’est réellement impressionné par ce vin qui manque un peu d’émotion, même s’il est gouleyant. Il faut une glace vanille pour compenser la pesanteur de ce que nous avons mangé. Le restaurant est attachant, Louis et son équipe ont une belle joie de vivre. Les produits sont de grande qualité et de grande quantité. A revisiter un jour où il n’y a pas de Master Class à suivre !

L’ail perfide niché au sein des coquilles Saint-Jacques délicieuses

déjeuner de conscrits au Yacht Club de France mercredi, 25 novembre 2009

A un rythme que notre grand âge ne ralentit pas, nous tenons notre déjeuner de conscrits, cette fois-ci au restaurant du Yacht Club de France.

Dans une jolie petite salle discrète, nous commentons les caprices du monde et de ceux qui croient le diriger.

Une main qui n’est pas sanctionnée par l’arbitre fait sauter un à un les bouchons du champagne Joseph Perrier, honnête et assez dosé.

Sur la cuisine de ce club, d’une belle inspiration, nous goûtons un joli foie gras suivi d’un fringant turbot sur Château Beychevelle 1998 qui flatte agréablement nos papilles.

Le Chateau Suduiraut 1998 est un bien jeune sauternes pour emporter mon assentiment tant il existe une barrière gustative quasi infranchissable entre ces jeunes boutonneux et les « vrais » sauternes, ceux qui ont les signes ostensibles de la virilité.

Déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol avec Desmond, mon ami chinois mardi, 24 novembre 2009

Déjeuner au restaurant de l’hôtel Bristol avec Desmond, l’homme grâce auquel j’ai réalisé deux dîners en Chine, et son correspondant en France, fils d’un vieil ami. Le menu se compose sans faire appel à la carte : macaronis à la truffe noire, plat emblématique du lieu, suivi d’une poêlée de cèpes sur un lit de persil et ail confit et enfin le lièvre à la royale, qu’il fallait faire découvrir à Desmond.

La carte des vins est riche, mais pour les vins les plus prisés, les prix sont riches aussi. Nous allons donc commencer par un champagne Pierre Gimonnet et Fils Gastronome 2005. C’est un blanc de blancs qui a besoin de s’ouvrir pour perdre l’amertume due au froid. C’est un champagne très agréable premier cru, auquel il manque un peu d’étoffe pour rivaliser avec les plus grands.

J’avais envie d’essayer deux Rayas 2003, en blanc et en rouge. Quand Manuel me présente le Chateauneuf-du-Pape Rayas blanc 2003, le nez me paraît civil, aussi fais-je servir le vin. Et c’est le fils de mon ami et ami lui-même qui m’alerte. Effectivement le vin est perlant, amer, déséquilibré, ce qui ne se sent pas au nez. Manuel constate qu’il a redémarré une fermentation. Il faut vite changer pour un Chateauneuf-du-Pape Vieilles Vignes blanc Château de Beaucastel 2004. Ce vin est fumé, dense, et a des allures de vins vieux du fait de sa concentration. Plaisant, joyeux mais hors norme, ce vin joue avec les cèpes un numéro de pur bonheur.

Le lièvre à la royale, avec foie gras et truffe, comme il se doit, est très intelligent et sensible. Sa sauce est diabolique de séduction. Le Chateauneuf-du-Pape Rayas rouge 2003 est une petite merveille qui rafraîchit le palais quand on le boit après la lourde sauce. Et Manuel a été très astucieux de laisser la bouteille dans de l’eau fraîche, pour que le sentiment de fraîcheur du vin, nécessaire face à la lourdeur de plomb (de chasse) du plat, puisse agir pleinement. Comme nous évoquions l’idée d’un dîner de folie sur la base de très vieux Lafite, le vin qui hypnotise les chinois, Desmond et Charles-Edouard me réclamaient gentiment un Lafite sur le plat, mais c’eût été une erreur. La sauce aurait raidi le Lafite alors que le Rayas joue parfaitement son rôle de compensation et de mise en valeur de l’aspect gibier de la viande et conquérant de la sauce.

Mes deux jeunes hôtes ont eu le courage de prendre un somptueux dessert au chocolat à la géométrie dalinienne, tandis que sous couvert de sagesse, je succombais aux mignardises, tentatrices cruautés pour la ligne. De nouveaux plans s’échafaudent. Le délicieux restaurant du Bristol en fut la cigogne et le chou.

déjeuner au Bristol – photos mardi, 24 novembre 2009

Le déjeuner n’est ouvert qu’à 12h30. Avant cette heure, briefing du personnel. Quelle attention ! On dirait une messe.

champagne Pierre Gimonnet et Fils Gastronome 2005

Chateauneuf-du-Pape Rayas blanc 2003

Chateauneuf-du-Pape Vieilles Vignes blanc Château de Beaucastel 2004

Chateauneuf-du-Pape Rayas rouge 2003

amuse-bouche

nouvel amuse-bouche

macaroni aux truffes

assiette de cèpes

lièvre à la royale

un pré-dessert

dessert au chocolat sculptural (sans moi)

la goûteuse cuiller à l’infusion de thé (ou quelque chose de ce genre)

Déjeuner de famille au restaurant Taillevent lundi, 23 novembre 2009

Déjeuner de famille au restaurant Taillevent. Comme souvent, on me demande de choisir le vin. Sur de délicates gougères, nous buvons un Champagne V.O. version originale Jacques Selosse. Etant habitué à boire le « Substance » de la même maison, je voulais rafraîchir mon souvenir de ce champagne. Très typé, ce champagne non dosé est viril et sans concession. Très pur, il a le charme des champagnes insolites que l’on est heureux d’essayer.

Jean-Marie Ancher nous suggère deux demi-entrées, une langoustine et de l’épeautre aux cèpes. Le Riesling Clos Sainte-Hune Trimbach 2001 a besoin de deux à trois minutes pour exprimer sa personnalité. On ne peut qu’être admiratif de la précision de ce beau riesling. C’est l’épeautre qui réagit divinement bien avec le vin lui donnant une ampleur remarquable. Je suis amoureux de ce riesling ciselé.

Ma sœur a pris un gibier à plumes, avec mon frère nous avons choisi le lièvre à la royale, exécuté de façon très classique et très goûteuse, le foie gras équilibrant harmonieusement la saveur appuyée du gibier. Sur ce plat, l’ Hermitage Jean-Louis Chave 1998 est une merveille. Totalement sur le fruit, il est joyeux et animé par les saveurs extrêmes du lièvre. L’accord est d’un naturel confondant. Le nez riche et joyeux et les saveurs de fruits rouges et noirs sont un régal. Ce vin n’aurait pas besoin de vieillir, tant il est beau comme cela.

La salle était pleine, ce qui fait plaisir. Comme d’habitude, dans un élégant décor lambrissé, nous avons passé un agréable déjeuner sur une cuisine appréciée.