Archives de catégorie : dîners ou repas privés

déjeuner chez Pierre Gagnaire – les photos d’Hervé This vendredi, 21 septembre 2007

le décor lorsqu’on s’assied

je cherche un vin

le menu d’automne

les amuse bouche

le pain et le vin

gelée de bœuf au pain brûlé, boudeuses nature aux oignons, pâte de betterave rouge légèrement fumée, beaufort frais fondu au chorizo

marinière de crevettes impériales au pamplemousse, dominos de poire, noisettes fraîches, aspic de tourteau parfumé de verveine

gras de seiche déclinés, raviole de tomate, poivron vert et rouge, ventrèche de thon et supions grillés à la diable

girolles, cornes d’abondance et datte fraîches au lait de coco, glace de rainette à la tagette

tranche de bar pochée au beurre fondu, feuille d’algue kombu et cresson, bouillon de poireau aux graines d’amarante

poissons de roche : rouget au citron raidi au chardonnay, peau croustillante, lichette de saint-pierre au paprika, soupe d’étrille liée d’avoine, piments noras au fenouil, bouillabaisse glacée, chair d’aubergine violette de Florence

pour mettre en scène le cèpe … volaille gauloise blanche et homard bleu cuisinés – ail doux et gingembre –

le couteau !

fromages cuisinés : chèvre du Gers, crème d’amande, bleu d’auvergne, cœur d’artichaut maco, sirop de porto, infusion gélifiée de cumin grillé, munster fermier, citeaux monastique, navet au vinaigre de riz

les desserts Pierre Gagnaire

 

 

 

Voici ce que nous avons goûté. Un vrai spectacle.

 

entrée dans l’univers gastronomique de Pierre Gagnaire vendredi, 21 septembre 2007

La mémoire encore souriante des saveurs savoyennes, je me précipite au restaurant de Pierre Gagnaire où je retrouve pour déjeuner Hervé This, le pape de la gastronomie moléculaire. Hervé est un ami de Pierre et son complice dans certaines de ses créations. Qui, mieux que lui, pourrait me faire entrer plus profondément dans le monde créatif de Pierre Gagnaire qui a accepté de réaliser prochainement un dîner de wine-dinners ? J’ai eu la chance en effet que Pierre Gagnaire accueille favorablement l’idée, alors que son monde créatif n’est pas naturellement tourné vers les vins anciens.

Hervé et Pierre ont travaillé ensemble ce matin et lorsque j’arrive, Hervé me dit : « connais-tu l’œuf à 62° ? ». Il me décrit les écarts gustatifs entre l’œuf à 62° et l’œuf à 65°. Il avise un maître d’hôtel et lui dit : « pouvez-vous m’apporter un œuf à 65° ? ». Et Hervé prépare l’œuf et me fait constater les textures particulières du blanc comme du jaune, très différentes de ce que l’humain moyen côtoie. Nous rejoignons notre table pour commander le menu d’automne, dont l’intitulé est à peu près aussi long qu’un discours de Fidel Castro. Jugez plutôt : gelée de bœuf au pain brûlé, boudeuses nature aux oignons, pâte de betterave rouge légèrement fumée, beaufort frais fondu au chorizo / marinière de crevettes impériales au pamplemousse, dominos de poire, noisettes fraîches, aspic de tourteau parfumé de verveine / gras de seiche déclinés, raviole de tomate, poivron vert et rouge, ventrèche de thon et supions grillés à la diable / girolles, cornes d’abondance et datte fraîches au lait de coco, glace de rainette à la tagette / tranche de bar pochée au beurre fondu, feuille d’algue kombu et cresson, bouillon de poireau aux graines d’amarante / poissons de roche : rouget au citron raidi au chardonnay, peau croustillante, lichette de saint-pierre au paprika, soupe d’étrille liée d’avoine, piments noras au fenouil, bouillabaisse glacée, chair d’aubergine violette de Florence / pour mettre en scène le cèpe … volaille gauloise blanche et homard bleu cuisinés – ail doux et gingembre – / fromages cuisinés : chèvre du Gers, crème d’amande, bleu d’auvergne, cœur d’artichaut maco, sirop de porto, infusion gélifiée de cumin grillé, munster fermier, citeaux monastique, navet au vinaigre de riz / les desserts Pierre Gagnaire.

La chute de cet texte, « les desserts Pierre Gagnaire » est d’un minimalisme étonnant par rapport à l’infinie variété de ce que nous goûterons. Lorsque j’ai relu ce menu, je me suis rendu compte que tous ces intitulés se justifient, car chaque composante est une pierre d’un édifice cohérent. Hervé a commenté avec Pierre chacun de ces plats pendant la séance de travail qu’ils ont eue ce matin, aussi ai-je le cornac le plus compétent qui se puisse inventer. Ne connaissant pas le sommelier, je préfère suivre ses conseils pour pouvoir mieux comprendre son approche. Dans une proposition vaste et judicieuse, je choisis un vin que je n’ai pas l’habitude de boire, un vin blanc de pays des côtes catalanes domaine Gauby 2004. Le vin a un nez énergique qui montre une petite note de caramel. En bouche on sent un léger côté laiteux, mais aussi minéral, ardoise mouillée, salin.

Malgré l’ampleur du menu, nous recevons des petits amuse-bouche déjà complexes, comme une tuile au parmesan avec une petite saucisse, une tuile de roquette absolument délicieuse, et un wurz à l’ancienne, qui est une mousse de blanc d’œuf montée à la gentiane. A cela s’ajoutent des dés de comté et des grains de maïs. On entre de plain-pied dans un monde fou, fou, fou où les papilles se régalent. Nous avons aussi (nous n’avons toujours pas commencé le repas) une petite choucroute avec une purée de pomme de terre ludique à souhait, qui accompagne délicieusement le vin. Ça démarre bien. Hervé, croyant que je suis capable de comprendre, m’informe d’un élément essentiel : la crème mousseuse est faite au siphon.

Le premier plat est spectaculaire. La gelée de bœuf, la betterave et l’huître forment un goût hors du commun. Le vin se marie très bien à l’huître. Je commence à me sentir confiant, car la cohérence du plat en fait un compagnon certain d’un grand vin. Je pense à un champagne déjà mûr.

Les crevettes et pamplemousses ont des saveurs uniques, formant un kaléidoscope. Ça se croque bien. Ce plat irait très bien avec un vin et je pense à un Meursault. Hervé et moi faisons un contresens, car les gras de seiches déclinés selon plusieurs préparations ne sont que des appendices. Le principal du plat, c’est le thon qui est grillé et laqué. Nous étions troublés par la profusion gustative qui fait partir dans de trop nombreuses directions, mais en fait, comme nous l’explique Pierre, il faut considérer les dés de seiche comme des pauses ludique par rapport au plat. Je verrais bien un vin d’Arbois pour ce plat qu’il faut expliquer aux convives pour éviter que l’on ne s’égare.

Ayant une aversion au lait de coco que je considère comme un ennemi déclaré des vins, je ne vois aucun accord possible avec le plat de girolles. Le bar est délicieux, très doux. La graine d’amarante l’alourdit un peu et le cresson est un peu fort pour un vin ancien. En fait, il ne faut pas prendre le cresson seul mais l’incorporer dans une bouchée. Cette remarque vaut pour beaucoup d’autres plats, car il ne faut pas céder à la tentation de séparer les ingrédients mais au contraire les marier en bouche. Sur le bar, je verrais bien un bordeaux ancien.

Nous bavardons beaucoup et Hervé me dit qu’il considère Pierre comme étant dans une phase « velours », la cuisine de ce chef à l’imagination infinie se coulant dans le moule de sa propre vie, constatation que l’on a pu faire aussi pour Marc Veyrat. Je constate à ce stade que le vin blanc de Gauby se comporte bien avec les plats.

Le plat de poissons de roche est d’une subtilité extrême. Tout est composé, rien n’est dû au hasard, et je suis bien embarrassé pour définir le vin qui accompagnerait ce plat. Le fenouil me pousserait vers un vin rouge, mais les piments accepteraient un grand vin d’Alsace, même en vendanges tardives si le vin a de l’âge. Les recherches terre et mer mettent ensemble un homard et une volaille, liés entre eux par un jus qui reprend les deux. Un bourgogne ancien conviendrait à ce plat. Il faudrait faire attention au gingembre, car l’expérience montre qu’il raccourcit notre blanc. Les fromages cuisinés me semblent difficiles dans le contexte de mes repas, mais l’exercice est brillant, la gelée au cumin est superbe.

Les desserts ne peuvent pas se raconter tant il y en a. Un vieux banyuls irait très bien, à doser cependant pour éviter qu’il n’en écrase certains. Dans un dessert il y a une meringue à l’alcool de sorbier qui se prendrait sans vin mais qui est un délice.

La cuisine de Pierre Gagnaire est éblouissante, inventive et créatrice sans aucun désir de prouver. C’est l’expression d’un talent libre. Le foisonnement est sain. Avec les explications d’Hervé, ami de Pierre, c’est un privilège d’être ainsi entré dans son monde. J’ai pu constater qu’en grande partie, les plats s’adapteront aux vins anciens. Nous en ferons prochainement l’expérience. Il y aura des mises au point, car la carte de ce jour n’existera plus le jour du dîner. C’est un  beau projet qui se dessine.

un cocktail prestigieux; il a tant de succès que je m’en échappe pour aller dîner chez Guy Savoy jeudi, 20 septembre 2007

Une société financière invite des clients et prospects. Le président est un gourmet et n’envisage que le meilleur : buffet créé par Guy Savoy, vins présentés par 1855 en présence de quelques vignerons dont Alexandre de Lur Saluces. On ne résiste pas à de tels arguments. Mais je ne serai pas le seul, car une foule immense se presse sur le lieu de ce cocktail. Il est quasiment impossible de s’approcher des buffets regorgeant de subtiles nourritures car une foule même distinguée reste toujours une foule. Je demande alors à Guy Savoy qui veut retourner dans ses bases : « puis-je venir dîner ? ». La réservation est vite prise. Avant de quitter cette manifestation de prestige, je bois un délicieux champagne rosé Billecart-Salmon, puis Château Mouton-Rothschild 2001 qui semble s’épanouir, un Hermitage La Chapelle Jaboulet 1998 qui est très plaisant dans les conditions dans lesquelles je le bois. Je vais maintenant aller goûter le talent de Guy Savoy dans le calme feutré de sa belle salle à manger.

Guy me suggère le menu qui sera composé ainsi sans l’intervention de son truculent et pince sans rire adjoint. Je ne peux pas ne pas prendre les petits pois. Ce sera ensuite un quasi de veau et enfin un foie gras avec des cèpes.

Nous discutons avec Eric Mancio du vin qui conviendrait à ce curieux assemblage de saveurs et je jette mon dévolu sur un Hermitage Chave blanc 1997.

Une première bouteille est bouchonnée ce qui nous attriste. La seconde est parfaite. Le petit amuse-bouche se compose d’une crème aux champignons et d’une petite pomme de terre au goût profond. L’Hermitage chante avec le champignon. Comme il est très poivré je demande un des délicieux toasts au foie gras sur pique et l’accord est vibrant. Il y a dans le vin un goût de miel.

Malgré ma légitime appréhension, le vin arrive à mettre en valeur le petit pois, ce qui avouons-le, n’est pas évident. Il exhausse sa crudité alors qu’il se fait réservé sur l’œuf. L’Hermitage a des évocations de lait, de crème, de brioche et un fort poivre. J’avais hésité sur la carte entre le Chave et le Châteauneuf-du-Pape Vieux Télégraphe blanc 1992. Eric m’en apporte un verre. Immédiatement le Vieux Télégraphe apparaît plus ouvert, plus complexe, plus varié. Mais en y revenant on s’aperçoit que le Chave a plus de longueur et de race. Alors ? Comme souvent, il faut aimer les deux.

Je découpe la chair du quasi de veau sous les yeux de Guy qui me demande : « est-il trop ferme ? ». Je dis oui. « Est-il goûteux ? ». Je dis oui. Je fais remarquer à Guy Savoy que le chou farci qui est en garniture pourrait jouer un ton en dessous, car il monopolise le palais. Comme toujours, ce sont des remarques à la marge. Le Chateauneuf est plus rustique, le Chave est plus noble, le Chateauneuf est plus ensoleillé, le Chave est plus tendu. Le bouillon de veau est un bonheur gustatif. Le foie gras qui arrive est accompagné d’une sauce à la betterave, de copeaux de cèpes et de cèpes.

L’accord de l’Hermitage avec les cèpes est tellement éblouissant que j’en redemande une assiette pour partager ma joie avec Guy Savoy. Mais la préparation que j’ai dans l’assiette et faite pour plat ne peut être recommencée, aussi je reçois une assiette de cèpes juste poêlés. Et Guy me fait la gentillesse de venir communier avec moi sur un accord d’anthologie.

Il y a dans la salle de beaux bébés, car les rugbymen ou leurs supporteurs irlandais abondent. Le plat est comme eux, d’une grande virilité, mais l’exécution rend les saveurs prodigieuses, et le Chave produit un vrai miracle. Guy me dit que l’essence de l’accord vient de l’acidité. Je pense personnellement que l’accord vient du miel présent dans la cuisson des cèpes et dans le vin. Nous ne nous querellerons pas sur ce sujet car ce qui compte, c’est la perfection de ce que l’on goûte.

Il me faut me battre contre le souriant maître de salle pour ne pas recevoir les desserts ou mignardises. Mon combat est perdu d’avance. Quelle bonne idée que d’avoir décidé au pied levé de venir dans ce tabernacle de la grande cuisine !

de grands vins avec des amis au restaurant Laurent lundi, 17 septembre 2007

Un des amis présents au dîner chez Ledoyen m’invite avec un autre des convives, à déjeuner au restaurant Laurent dans le beau jardin où les feuilles de marronnier qui tombent en virevoltant sont autant de confettis qui donnent à notre table un air de fête. Patrick Lair est tout sourire, et la brigade attentive. Les vins sont déjà préparés et cela me fait tout drôle d’être spectateur alors que lorsque je rencontre ces amis, c’est plus souvent, sinon toujours, sur un programme que j’ai préparé.

Nous commençons par un « Le Montrachet » de Delagrange Bachelet 1988 (personne ne m’a encore expliqué pourquoi Montrachet s’écrit parfois précédé d’un « Le » péremptoire) à la couleur très jeune, au nez discret de belle race. En bouche le vin est charmeur. Son acidité de citron vert qui aurait épousé une liqueur de dosage est absolument séduisante. Il manque à ce vin un peu de gras et de puissance, mais c’est vraiment charmant et romantique. Sur le foie gras à peine poêlé qui est d’une fraîcheur rare, on est dans des tons d’aquarelle.

Il ne faut pas toucher au canapé sur lequel repose le foie qui  gâcherait cette harmonie en légèreté.

Les canons vont maintenant trompeter car  on nous sert l’Ermitage Chave Cuvée Cathelin 1998, le même que celui que j’avais fait goûter à mon hôte lors d’un réveillon dans ma maison du Sud. Ce vin est la définition du bon vin. Il est ample, riche, fruité, mâchu, goûteux et surtout il est simple. On le comprend tout de suite et on se laisse griser par cette limpidité de message qui amplifie le plaisir. On est loin des complexités de certaines cuvées sophistiquées mais on ne perd pas en finesse. Si j’osais une comparaison, ce serait la voix du regretté Pavarotti. Là où d’autres ténors sont obligés de forcer leur talent pour respecter des livrets exigeants, Pavarotti place chaque note avec une facilité incomparable. Il y a un peu de cela dans le Chave où tout est dosé, mesuré, pour le plus beau résultat.

Inutile de dire que mon pigeon est à son aise, même si son pané nuit un peu à la lisibilité, mais le canard de mes amis est peut-être encore plus adapté.

N’aimant pas être en reste, j’offre à mes amis un Riesling Shwarzhofberger Spätlese  Egon Muhler 2005 qui titre 8,5° et je commande le dessert, petite tartelette fine croustillante aux fraises des bois sur une crème légère à l’amande.

La combinaison est diabolique. Ce vin n’est normalement pas dans mes démarches car il fait un peu penser à un vin de glace perlant, dont le sucre insistant marque le final. Mais avec le dessert, c’est éclatant de sensualité. Ce sont les jeunes filles de David Hamilton jouant avec des voilages.

Le jardin du restaurant Laurent est magnifique, le service est l’un des plus engagés de la capitale. Le charme du lieu opère, la cuisine est solide et le tout est enveloppé par une chaude amitié.

un menu d’affaires excellent à Hiramatsu mercredi, 12 septembre 2007

Un ami gastronome me dit : il faut absolument aller à Hiramatsu, leur repas d’affaires à un prix défiant toute concurrence est de grande qualité. Ayant envie de revoir cet ami et de retourner à Hiramatsu, j’accepte avec enthousiasme. La salle de restaurant est spacieuse, de couleurs gaies. On est loin de la confidentialité exiguë mais sympathique de l’Ile Saint-Louis. Attendant mon ami, je scrute la carte des vins abondante et intelligente et j’y repère une envie. Mon ami arrive avec dans sa musette un Apremont 1989. Nous le goûtons sans grande conviction. Nous n’irons pas plus loin.

Le repas d’affaires offre du choix et nous prendrons chacun une branche différente des alternatives. Un sorbet sert d’amuse-bouche, mais ce n’est pas avec du froid qu’on émoustille les papilles. La suite est infiniment plus belle. Le thon rouge en trois préparations est d’une grande finesse. Le turbot est goûteux et joyeux et le dessert, sabayon de whisky, montre une vraie science des desserts. Le service est impeccable souriant et attentionné, l’ambiance générale est très deux étoiles. On peut dire sans hésiter que c’est un sans faute  à un prix imbattable. Oui mais le vin dans tout ça ? Eh bien, j’ai jeté mon dévolu sur un Chambertin Armand Rousseau 1999. Ce domaine fait de sublimes chambertins. Le premier nez est d’une pureté extrême, et nous décidons avec le sommelier de laisser le vin s’épanouir tout seul dans le verre. C’est un vin dans sa pleine jeunesse, rassurant car on le comprend très vite. Le fruit est beau, l’amertume est discrète. Il y a un léger manque de coffre, car j’attendais que cela trompette un peu plus, mais l’élégance et la finesse ravissent le palais.

M. Hiramatsu est venu nous saluer. Il possède une quinzaine de restaurants au Japon, il s’occupe de restaurants de Paul Bocuse au Japon, et il vient tous les deux mois superviser son antenne parisienne. Il fait ici une vraie cuisine française qui fut aujourd’hui d’un niveau de deux étoiles. Une belle expérience.

dîner à l’Hôtel des Roches jeudi, 30 août 2007

Après une partie de cartes endiablée, nos amis décident de nous inviter dans deux jours au restaurant de Matthias Dandine à l’hôtel des Roches. Je retiens une table, et quand nous arrivons, c’est à moi que l’on confie le choix des vins. Fort opportunément Matthias vient nous saluer pendant que nous buvons un Champagne Comtes de Champagne 1997 agréable et qui se boit bien. Le menu se compose alors, d’un ris de veau aux truffes d’été et d’un chapon farci.

Le Bâtard Montrachet Blain Gagnard 1990 a une belle couleur d’or citronné. Le nez est citronné mais avec de l’ampleur. Et en bouche, c’est la complexité qui est la plus évidente. Il y a des notes d’agrumes, des évocations crémeuses, mais c’est surtout l’élégance qui entraîne les suffrages.

Sur la chair du ris aussi bien que sur les truffes l’accord est d’une belle précision. Le grand plaisir, c’est de voir que ce vin serein, bien arrondi par son âge, est le compagnon parfait de ce premier plat remarquablement exécuté.

Sur le chapon à la chair goûteuse, le Châteauneuf-du-Pape Château Rayas 1999 est éblouissant.

C’est un Chateauneuf aux accents bourguignons pleins de charme. La farce étant très appuyée, l’accord se trouve mieux sur la chair pure, qui tend les bras à ce subtil Rayas, d’une puissance agréablement mesurée. La longueur en bouche est spectaculaire.

N’aimant pas être invité sans offrir aussi quelque chose, je fis ouvrir Château d’Yquem 1987 sur des fromages pâtes bleues et sur des petites gelées d’agrumes, mais mon coeur s’assombrit quand mes amis que je n’avais pas consultés m’apprirent qu’ils ne sont pas très friands de liquoreux. La joie d’être ensemble effaça cette passagère tristesse. Matthias Dandine s’affirme de plus en plus et Sébastien, sommelier fidèle, a un humour qui nous réjouit. Il était indispensable de faire cette étape avant de revenir à Paris.

Quintessence ! Vous avez dit Quintessence ? mardi, 28 août 2007

Les fêtes continuent, car nous allons jouer aux cartes chez des amis qui me disent : « tu devrais goûter ce Côtes du Rhône qui est encensé par Parker ». Je regarde la bouteille et je lis « Quintessence ». Déjà, ça part mal, car sur les milliers de vins français qui s’appellent Quintessence, combien sont bons ? Deux Quintessence en deux jours, c’est peut-être trop pour moi. Ensuite, je lis « 15° », ce qui me fait encore plus peur. Je renifle, je porte le verre à mes lèvres. Et je demande à mes amis de boire avec moi en leur posant la question : « dans ce vin, on sent nettement le poivre et le cassis. Mais y a-t-il selon vous autre chose de plus ? ». Force est de convenir que dans ce vin très court, qui pourrait être produit à l’identique dans n’importe quelle région du monde, il n’y a rien. Mon avis ne montrait pas franchement une grande délicatesse, mais mon cri de joie pour le vin qui arrive me fit pardonner. Mon ami tient en main une bouteille de forme bordelaise dont il cache l’étiquette, me sert et je crie : « ah, ça, ça c’est du vin ». C’est Château Chasse-Spleen 1990 qui est d’une délicatesse encore plus mise en valeur par le contraste qu’il forme au chouchou de Parker.

encore et encore ! samedi, 25 août 2007

Les amis de nos amis avec qui nous avons déjeuné chez Yvan Roux étaient arrivés avec un crémant de Bourgogne domaine d’Azenay de Georges Blanc. Comme d’autres amis nous rendent visite, c’est l’occasion d’ouvrir l’une des deux bouteilles. Ce pétillant sans longueur ne peut convenir que pour faire des coupages avec une liqueur de cassis par exemple, car il est exempt d’émotions. Nous buvons ensuite un rosé Tibouren Côtes de Provence 2004. De couleur très foncée, il est extrêmement plaisant en bouche, joyeux sur une friture de petits poissons.

Pour le poulet, nous commençons par un Vacqueyras domaine de la Garrigue A. et L. Bernard 1970 qui est extrêmement plaisant, dense, et qui constitue une fort agréable surprise. C’est le contraire pour le Châteauneuf-du-Pape La Nerte 1974 qui est fatigué. C’est lui que j’attendais et c’est le Vacqueyras qui ramasse la mise.

Le repas se finit sur un Dom Pérignon 1998, pour que le souvenir de ce dernier repas – c’est ce que je croyais – soit joyeux.

Les amis partent, ma fille qui avait partagé notre demeure pour que grandisse sa petite Lise pendant six semaines s’en retourne à Paris avec son mari, mon fils repart aussi avec sa famille. C’est un grand vide qui se crée que devrait compenser l’espoir que mon foie se repose. Je vais en mer et au retour, je vois accoudé à la balustrade de la terrasse de nos voisins qui surplombe la mer, un de leurs amis qui est aussi le nôtre. Il me fait signe. Je m’avance vers lui et après quelques propos de retrouvailles je lui dis : « il me reste une demie bouteille de Dom Pérignon que je comptais jeter. Le mieux serait que tu en profites avec tes hôtes ». Je précise aux âmes sensibles que j’en avais effectivement l’intention, malgré la sainte horreur que j’ai que l’on gâche la nourriture. Mais un ange veillait. Et voilà que se met en place un dîner impromptu.

Nous arrivons chez nos amis avec la demie bouteille de Dom Pérignon 1998 à laquelle j’ai ajouté une entière. Nous constatons que la bouteille qui est ouverte depuis une journée est beaucoup plus plaisante. Car la faiblesse de la bulle, encore vivace malgré tout, met en valeur la beauté du vin, lui donnant de la douceur et un charme accru. J’ai aussi apporté un Châteauneuf-du-Pape Pauljean 1971 qui est absolument splendide, joyeux, soyeux, riche en bouche en gouleyant. Mon ami ouvre un Quintessence rouge de Rimauresq 2004 un peu frais, qui rebute tant le contraste est fort avec le Chateauneuf. Mais il s’ouvre petit à petit, montrant des qualités nettement supérieures à celles du premier contact inamical. Les glaces de chez Ré, le pâtissier et glacier qui compte à Hyères, se dégustent sur un Laurent Perrier Grand Siècle. Est-ce qu’un jour les occasions de festoyer et de boire vont réellement cesser en cette fin d’été ?

les vins rouges se goûtent sur homard et loup mercredi, 22 août 2007

L’arrivée d’amis donne encore le prétexte de retourner chez Yvan Roux. Le Pata Negra qu’ilvient de recevoir est particulièrement réussi et jongle avec Laurent Perrier Grand Siècle. Cela devient un rite.

(avant et après)

Sur un très beau homard remarquablement cuit et préparé, au corail délicieux le Château Lynch-Bages 1978 brille car ses tanins se combinent de façon précise à la chair blanche. Un très gros loup juste cuit accueille un Château Figeac 1988 au goût très prononcé et à la trame très dense.

Encore un rite avec le moelleux au chocolat et le Maury Mas Amiel Vintage 1998. Ce sont les derniers jours de l’été, alors chaque minute compte.