Archives de catégorie : dîners ou repas privés

pause dans le Sud entre dux dîners de wine-dinners samedi, 26 mai 2007

Le cœur encore enflammé par les délicieux vins du dîner chez Laurent, je vole vite vers le Sud car un autre dîner de wine-dinners m’attend dans cinq jours. Je ne me consacre qu’à mon bateau et à un nécessaire repos, juste troublé par une Côte Rôtie La Mordorée Chapoutier 1998 que je trouve absolument charmante. Facile à vivre, facile à lire, ce vin donne un plaisir franc. Que demander de plus. Ces vins du Rhône ont une approche qui me convient.

Clos Sainte Hune 1976 et Bienvenue Bâtard Montrachet 1999 mercredi, 23 mai 2007

I had met the director of a magazine specialised in wine, and he had considered the idea that I could write in it on old wines as I do regularly in a Swedish magazine. He had insisted that we have lunch together and the day before, his secretary calls me and says : “Mr XX is happy to have lunch with you. Has the place been decided between you ?”. I say no, and she proposes to reserve in a restaurant, and asks me if there is a place where I feel well. I say “Laurent”, and she sends me an email confirming that she has booked.

This morning, the lady calls me and says that Mr XX wants to talk with me. He says that he is happy that we meet, but says : “I would be happy to know who invites whom. Because if it is you, I will be happy to go to Laurent, but if it is me, I will have to choose another place, as we have rules and budgets for invitations”. I say that there is no problem and I invite him.

I arrive first, and I ask Ghislain to prepare a Riesling Clos Sainte Hune Trimbach 1976, a year that I specially love, and we will choose the other wine with the menu.

I suggest that we have crab with the Sainte Hune, and I propose an unconventional try, which is to associate a pigeon to white wine. Philippe Bourguignon, the remarkable director of the place smiles and says that it should be interesting, and I take a Bienvenue Batard Montrachet Domaine Leflaive 1999.

The Sainte Hune appears a little too cold, so the first sip has citrus and a disagreeable taste of glycerine. But the colour is so nice, of prune gold, that it promises a lot. And the wine expands in the glass and broadens with air and becomes ageless, completely balanced and logically structured. It is a wine of perfection. And the crab enlarges even more the wine.

We are happy.

The Bienvenue has a more pale and green yellow colour, has a smell with a fantastic complexity, and on the taste of the meat of the pigeon, it gains a complexity which is my complete pleasure. My guest is not so much at ease with this association, but personally, I find it quite exciting. The wine has a complexity that is above the one of many Montrachet. It has not the body, the power of a Montrachet, but it compensates it by this extreme variety of directions of tastes. It is obviously a great wine. It is elegant, romantic, playing on its subtlety.

We finish the two wines with cheese and some mignardises.

The restaurant Laurent is obviously a fantastic place which should never had lost one star. We were in the garden and it was delightful. The service is perfect and the food was great. Philippe had added morels to the pigeon to go with the Burgundy.

This was happiness. Will I write in the magazine ? I have probably built the first subject of a future paper, if I forget the beginning of my story.

déjeuner au restaurant Laurent avec un patron de presse mercredi, 23 mai 2007

En plusieurs occasions, j’avais rencontré le directeur de l’une des plus grandes revues du vin en France. Nous trouvant voisins de table au dernier dîner au château de Beaune où furent servis des vins légendaires de la cave de Bouchard Père & Fils, nous convînmes de nous revoir. Je l’invite au restaurant Laurent. Arrivant, comme souvent, très largement avant mon convive et ayant le choix des armes, je cherche dans la belle carte des vins de quoi faire une expérience intéressante. Je demande à Ghislain de préparer un Clos Sainte Hune, riesling Trimbach 1976, d’une année que j’affectionne, et nous déciderons du deuxième vin quand mon invité sera là.

Je propose que nous prenions l’araignée qu’Alain Pégouret prépare si élégamment, et que nous fassions l’expérience d’associer un pigeon avec  des vins blancs. Philippe Bourguignon, le remarquable directeur de cet endroit sourit de l’essai que je veux faire et dit : “ça peut marcher”. Je choisis un Bienvenue Bâtard Montrachet Domaine Leflaive 1999.

Le Sainte-Hune apparaît un peu trop froid, aussi le premier contact est acide et glycériné. Mais la couleur est tellement belle, de prune dorée, que ce vin promet d’être grand. Et quand il s’épanouit dans le verre, il devient intemporel, d’un équilibre rare et d’une structure d’une logique profonde. C’est un vin de perfection que l’araignée élargit encore. A ce stade, nous sommes heureux.

Le Bienvenue a une couleur plus pâle tendant vers le jaune citron. Son nez est d’une complexité fantastique. En bouche, sur le pigeon, il trouve un accélérateur de complexité ce qui me comble d’aise. Mon camarade d’essai n’est pas aussi convaincu de la pertinence de la combinaison, mais à mon goût, c’est une association osée que j’adore. Ce Bienvenue a une complexité qui est très supérieure à celle de beaucoup de Montrachet. Il n’a pas le corps et la puissance d’un Montrachet, le sommet de la gamme des blancs de Bourgogne, mais il compense par l’extrême variété des directions gustatives explorées. C’est manifestement un très grand vin, élégant, romantique, jouant sur sa subtilité.

Nous finissons les deux vins sur des fromages et sur des mignardises. Le restaurant Laurent est un endroit au confort naturel. Il est évident qu’il n’eût jamais dû perdre sa deuxième étoile. Nous étions dans le jardin au charme rare. Le service est parfait, l’équipe souriante. Une attention qui montre où nous sommes : sachant que le pigeon serait goûté sur des blancs, Philippe Bourguignon a fait ajouter des morilles au plat. C’est au guide de s’apercevoir qu’on est là au paradis.

déjeuner cosmopolite chez Yvan Roux samedi, 19 mai 2007

Un australien qui contribue (en français dans le texte) sur le forum de Robert Parker m’annonce sa visite en famille dans le Sud de la France. Il est prévu que nous l’accueillions dans notre maison du Sud en même temps qu’un amateur de vins hollandais d’un autre forum accompagné de son fils. Tout ce groupe arrive à l’heure de l’apéritif et j’ouvre un Champagne Salon en magnum 1995. Etait-ce l’importance du groupe, je n’ai pas trouvé dans ce grand champagne l’émotion que j’éprouve habituellement. Il lui manque sans doute quelques années de cave car il n’est pas impossible qu’il connaisse en ce moment un léger repli.

Yvan Roux nous a dressé une table face à la mer et nous a fait l’immense plaisir de n’accepter aucun autre convive. Nous allons être seuls à profiter de son talent. La cuisine étant ouverte sur l’espace qui nous est réservé, nous avons tout loisir d’admirer ce qu’Yvan a préparé avec sa générosité coutumière. Nous prenons force photos et Yvan nous coupe des tranches de Pata Negra qui accompagnent les restes des vins de la veille, le  Chateau Pibarnon Bandol 1990, doux, civilisé, soyeux, charmant, trouvant sa place exacte en bouche et le Châteauneuf-du-Pape Domaine du Vieux Télégraphe 1990 hautement expressif, talentueux, et vibrant de l’accord avec le jambon gras.

Nous nous asseyons à la grande table donnant à tous une belle vue sur les îles et la presqu’île, et nous commençons par Chateauneuf du Pape “Pure” domaine La Barroche 2004 sur des asperges et du poisson quasi cru. Le « Pure » est une bombe. Il a un taux d’alcool extrêmement élevé que je situerais au dessus de 15° mais il est élégant, franc, facile à vivre, et en aucun cas excessif. Comme je savais que mon ami hollandais Harry, qui prépare un livre sur les Châteauneuf-du-Pape, viendrait avec des vins surpuissants, j’ai apporté « R » de Rimauresq, Côtes de Provence 2003. Ces deux vins sont dans la même ligue, des vins à réveiller les maures. J’ai trouvé que le spectre aromatique du vin régional est plus large que celui du vin papal. Les deux vins sont bons, même s’ils n’appartiennent pas vraiment aux types de goûts que je recherche.

Nous avons sur table de fines tranches de poisson juste poêlées avec des fleurs de courgettes. Sur ce plat et sur le Saint-pierre, c’est l’occasion de goûter Ridge Monte Bello Cabernet Sauvignon 1981, cadeau de mon hôte australien et Châteauneuf-du-Pape Domaine de Saint Préfert 1990 de Mr Serre que j’ai pris dans ma cave. Le charme du Chateauneuf est certain, avec une belle personnalité, mais c’est le Ridge qui me conquiert, faisant de l’ombre au Saint-Préfert. Ce Ridge est si beau ! Il a de la douceur, du sucré, sur un corps solide et structuré. Ce nouvel ami ayant demandé que j’ouvre son second cadeau, le Dominus de Christian Moueix 1987, je le fis, mais ce ne fut pas un service à lui rendre, car le Dominus apparaît strict, fermé, sans référence californienne, offrant plutôt des accents de Pomerol, ce qui ne surprend pas.

Yvan nous prépara à ma demande des tranches de mangue juste poêlées qui firent avec Château d’Yquem 1986 un numéro de trapézistes coordonné au millième de seconde. Mes amis n’en reviennent pas.

Sur le dessert au chocolat, où la croûte solide enserre un fondant le Maury La Coume du Roy 1925 conclut cette « séance » où ce sont les accords qui comptent plus que les valeurs intrinsèques des vins.

Ce déjeuner ayant bien duré quatre heures, nous entreprîmes avec les enfants des uns et des autres de jouer au tennis ce qui acheva de me tuer. Les amis australiens nous quittèrent et nous restâmes avec nos hollandais. Il y avait assez de vins à finir. Le champagne Salon a gagné de l’ampleur, le Saint-Préfert est nettement plus épanoui et expressif, alors que le Dominus reste ronchon. Ma femme refit quelques tranches de mangue pour que nous nous pâmions de nouveau sur le reste d’Yquem 1986.

Ce fut intéressant de rencontrer des amateurs de vins avec qui j’échange sur la Toile. L’atmosphère est dans ces cas-là immédiatement chaleureuse, comme si nous nous connaissions de toujours. Le Ridge, qui m’évoque par certains aspects le charme de Vega Sicilia Unico fut la vedette de cette journée.

Salon, Ridge, Dominus, Yquem, and several Chateauneuf with Loren Sonkin and friends samedi, 19 mai 2007

Loren Sonkin had informed me about a trip that he would do in France. We decided that he would come with his wife and his children to our house in the South of France. As a friend of mine, a Dutch man, Harry, had planned to visit us, we organised a meeting by our house with Loren and his family and with Harry and his son.

They arrived for lunch time and we had for aperitif a Champagne Salon in magnum 1995. The champagne is obviously a great champagne, but I was not so impressed, as it did not give the emotion that I like in Salon. What was missing ? I would be unable to say. Probably just only some years of cellaring, despite a convenient format of magnum.

We went to a restaurant near our house which is completely confidential. No sign, no name, no indication to find the place. The restaurant was booked for us only and as the chef is a friend, we could organise the lunch to our will, with our wines.

We looked at what was prepared as the kitchen opens in the dining room, and we drank with a Pata Negra two wines that I had kept after a dinner of 1.5 day before : Chateau Pibarnon Bandol 1990 which is very sweet, civilised, velvety, charming and filling gently the mouth. The other is Chateauneuf-du-Pape Domaine du Vieux Télégraphe 1990, highly expressive, talented wine matching very well the fat ham.

(the wines among whom we chose the wines of the lunch)

(Yvan Roux was preparing some small tomatoes and he prepared the accompaniement of our fishes)

We sit at the table with a wonderful view on the sea and the islands, and we begin with Chateauneuf du Pape “Pure” domaine La Barroche 2004, on asparagus and fish.

The “Pure” is a bomb. It has an extremely high level of alcohol, certainly above 15°, but it is elegant, frank, easy going, and by no mean excessive. As I knew that Harry would bring a wine of this kind, I had brought with me “R” of Rimauresq Cotes de Provence 2003. It is in the same league of very expressive wines with an enormous power. I found that the Cotes de Provence has a broader spectrum of tastes than the Chateauneuf du Pape. But the two wines were good, even if they do not belong to the usual tastes that I try to find.

(The "Pure" and the Saint-Prefert)

Then we had flowers of courgette with simply cooked slices of grouper. On that and on John Dory fish, we had a Ridge Monte Bello Cabernet Sauvignon 1981, a gift of Loren, and a Chateauneuf du Pape Domaine de Saint Préfert 1990 of Mr Serre that I had brought. The Chateauneuf is an excellent wine, with a very high personality, but the charm of the Ridge conquers me and makes shadow to the Saint Préfert. It is so nice ! It has sweetness, softness, and has a great personality. I loved this wine, and it made Loren happy. So he asked that we open his other gift, Dominus of Christian Moueix 1987. This wine, after the Ridge seems very strict, stiff, with no Californian reference. It is more Pomerol like.

We had then slices of mango with Chateau d’Yquem 1986 (two halves). The combination is fantastic and my friends laughed when I told them so many times : “chew and sip the smallest quantity of wine” (I said that minimum ten times).

We had then a chocolate dessert, with a solid cake including a liquid chocolate. It went with a Maury La Coume du Roy 1925 which was absolutely delicious and completely adapted to the dessert.

After such a long lunch, we played tennis, which finished killing me. Loren and his family drove back to Aix en Provence. Harry and his son had dinner by our home, and we finished the wines of the lunch. The Saint-Préfert was largely better now, and surpassed the Dominus which remained strict and a little too simple. The Yquem was glorious with mango as we had on the lunch.

This was a good opportunity to meet people that I knew only through their messages on the mark Squires forum, and to meet Harry with whom I had shared some dinners in New York and Paris. The wines were pleasant, and the atmosphere was peaceful and smiling. The wine which made me particularly happy is the Ridge 1981, which, in a way, evokes the Vega Sicilia Unico, as it has density, a sharp structure, and a gentleness which makes me feel well.

We have spent a very friendly day, by a wonderful weather along the sea.

des vins de 1990 à l’hôtel des Roches jeudi, 17 mai 2007

Champagne Pol Roger extra cuvée de réserve et un amuse bouche fort apprécié.

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Dans les verres, c’est de gauche à droite : Châteauneuf-du-Pape Vieux Télégraphe 1990, Châteauneuf-du-Pape Chateau de Beaucastel 1990 et Chateau de Pibarnon Bandol 1990.

 

délicieux petit brick à l’huître, et beau morceau de langouste aux morilles.

 

La chair de la langouste est succulente, et voici qu’arrive une daurade aux beaux yeux sous sa croûtede sel.

 

En fait, il y en a deux ! Merci Matthias Dandine d’avoir laissé la chair du poisson seule dans l’assiette. Les délicieux accompagnements peuvent s’apprécier seuls ou associés, mais pour ces vins immenses, la chair seule et un bonheur.

Plateau de fromages gargantuesque.

Quelques photos envoyées par mes amis :

l’hôtel des Roches vu du catamaran par lequel mes amis sont venus.

 

Olivier semble perplexe devant les deux poissons en croûte de sel, mais je prends les choses en mains, ce qui n’attriste personne !

 Matthias Dandine ne semble pas inquiet de ma furtive compétition !

dîner à l’hôtel des Roches jeudi, 17 mai 2007

Des amis viennent passer quelques jours dans le Sud invités par d’autres amis. Ils ont ensemble loué un catamaran pour leur séjour. La solution trouvée pour les rencontrer, c’est d’aller dîner à l’Hôtel des Roches à Aiguebelle lès Lavandou, les deux couples d’amis venant par la mer et nous par la terre. Ce qui donne l’opportunité de retrouver la belle cuisine de Matthias Dandine. Le personnel de l’hôtel a fait la navette entre leur bateau et la terre ferme et recommencera dans la nuit noire après le dîner.

Notre table domine la mer qui est fort agitée depuis plusieurs jours. Pour effacer tout goût salin que nos lèvres pourraient avoir gardé de l’exposition au vent marin, rien de tel qu’un Champagne Pol Roger extra cuvée réserve (non millésimé). Ce champagne joue son rôle mais je ne lui trouve pas une émotion infinie. Le reste du Champagne Dom Pérignon 1998 de la veille, que j’avais pris dans ma musette, montre un écart de séduction entre les deux champagnes, au profit du rescapé d’hier. Ceci semble indiquer que le Pol Roger est un champagne à faire vieillir, comme le Krug Grande Cuvée. Notre repas sera l’occasion de s’amuser à comparer trois vins de 1990. Voici le menu concocté par Matthias Dandine : amuse-bouches, brick à l’huître, langouste aux morilles, daurade aux beaux yeux en croûte de sel, fromages et macarons.

En face de nous, trois verres : Château Pibarnon Bandol 1990, Châteauneuf-du-Pape Le Vieux Télégraphe 1990, Châteauneuf-du-Pape Château de Beaucastel 1990. Nous virevoltons, passant de l’un à l’autre avec un infini bonheur. Chaque vin a son espace de perfection par rapport aux deux autres. Le Bandol est vraiment fait pour la daurade, Le Vieux Télégraphe et le Beaucastel s’amusent sur la langouste. On pourrait bien sûr faire apparaître des écarts entre ces vins, mais à quoi bon. Ils sont riches, heureux, épanouis en bouche. N’est-ce pas cela qui compte.

Champagne et belote mercredi, 16 mai 2007

Des partenaires de belote méritent un magnum de Laurent Perrier Grand Siècle. Le champagne a gagné quelques mois de cave et s’arrondit fort agréablement. Un Dom Pérignon 1998 est aussi fort agréable, et il n’est nul besoin d’opposer ou de comparer les deux champagnes qui ont chacun leur charme propre. Il est assez agaçant de constater que ce sont les femmes qui gagnent.

Yquem et crustacé dimanche, 13 mai 2007

Un ami pêcheur et cuisinier m’avait parlé des saisons de pêche de chacun des fruits de mer que j’apprécie. Pour les cigalons, la saison est finie maintenant, mais pour les gros crustacés, elle commence. Un matin, j’ai sur mon portable le message suivant : "ça y est, j’en ai un gros. Quand viens-tu dans le Sud ?". Deux jours plus tard, j’ai un autre message : "j’en ai deux autres, il faut que tu viennes". Je réserve une table en subodorant de quel animal il s’agit. C’est celui dont la chair est la plus intense. Je prends dans ma valise un peu d’Yquem, et le jour dit, nous nous présentons, ma femme et moi. Nous nous trouvons face à trois belles bêtes que nous allons nous partager. L’homme étant généreux, ce ne sont pas moins de deux kilos de la chair de ce bel animal que nous allons déguster, plus une demie langouste pour chacun, afin de comparer les goûts.

La soirée commence  par le champagne Laurent Perrier Grand Siècle qui s’excite particulièrement sur le plus équilibré de tous les Pata Negra que notre ami a déjà découpés pour nous. L’entrée est un essai pour lequel mon avis est requis. Il y a des asperges vertes, une sauce composite très parfumée, de la roquette, de l’ail confit, du corail, de la chair d’araignée et un macaron à la lavande. Mon goût des vins anciens me porte à des plats simplifiés. J’explique donc que je verrais bien deux entrées dans cet ensemble. La première réunirait seulement la roquette, la chair d’araignée et le macaron à la lavande qui forme une continuité étonnante avec la chair du crabe, et l’autre entrée serait plus centrée sur l’asperge. Cela permettrait de profiter mieux du champagne qui joue avec ces saveurs en leur accordant un accueil généreux.

L’assiette qu’on nous apporte maintenant comprend deux demies cigales, l’une mâle et l’autre femelle. Les deux chairs sont très différentes. La chair du mâle est stricte, profonde, goûteuse mais droite comme un clergyman. La chair de la femelle est plus joyeuse, savoureuse. La cuisson exacte donne à ces chairs des « mâches » exquises. L’accord avec Château d’Yquem 1986 est absolument renversant. J’avais déjà essayé Yquem sur une cigale en un dîner à l’hôtel des Roches d’Aiguebelle où Matthias Dandine avait fait des prodiges. Bien que sachant le plaisir que cet accord donnerait, je le redécouvre comme si c’était une première fois. La première gorgée d’Yquem entraîne sur des pistes inviolées. On est pris comme par surprise par une explosion de saveurs aux douceurs infinies. Le vin de 1986 que je ne prise normalement pas tellement est exactement l’Yquem qu’il faut pour ces deux chairs. Ce qui étonne la femme de mon ami que je détourne des fourneaux, c’est que l’Yquem préserve intégralement la chair des cigales qui est mise en valeur, alors que le palais est fortement imprégné d’un vin sensuel et confortable comme le plus lascif des canapés. Chaque morceau de chair est l’occasion d’une nouvelle gorgée qui nous émerveille de plus en plus. La deuxième assiette comprend la troisième cigale, plus petite, et une demie langouste du même calibre. La comparaison est passionnante, car la cigale est beaucoup plus complexe, avec un spectre gustatif plus large, mais la langouste est rassurante, car son goût très pur est chaleureux. L’Yquem continue à nous ravir, imprimant au palais un message indélébile tout en jouant son rôle de faire-valoir de façon spectaculaire. Chaque gorgée surprend comme la belle rouge ou la belle bleue d’un feu d’artifice. Ce repas face à la mer que nous surplombons, dans une atmosphère amicale faite d’immense générosité, autour d’un crustacé que je vénère pour sa concentration de goût profond, fut un grand moment de gastronomie. Tout était sourire, nous étions bien.

L’entrée à la chair d’araignée et macaron à la lavande. L’arrivage des langoustes.

 

Les trois cigales. A droite cigale mâle et femelle.

 

Comparaison cigale et langouste. la preuve que l’Yquem 1986 est là !

 

déjeuner au restaurant « les Ronchons » jeudi, 10 mai 2007

Le restaurant "les Ronchons" est quai de la Tournelle, une trentaine de mètres après la Tour d’Argent. J’y ai retrouvé Vincent Bouvet, auteur d’un livre passionnant :

"Un Siecle de Gastronomie et d’Hotellerie en Mayenne"

Je repère dans la carte un vin annoncé "Grand Cru". Je demande au patron s’il en est sûr. L’étiquette n’a aucune mention de Grand Cru. Mais le patron mérite bien le nom de son restaurant ! Il va chercher un guide et nous le montre :

 

Corton "Le Rognet" de Chevalier Père & Fils 1986 qui, malgré le livre, ne justifie pas de l’appellation Grand Cru en Corton.

 

Un pied de porc et une joue de boeuf puisque nous parlions de l’histoire de la gastronomie. Qu’y a-t-il de plus français que cela ?

Le patron nous a offert un armagnac parce que nous avons sympathisé.

Agréable petit restaurant sans prétention mais efficace.

Voici une des folies de Vincent Bouvet :

 Quelqu’un qui construit un ferry-boat dans son jardin ne peut qu’être sympathique à mes yeux !