Archives de catégorie : dîners ou repas privés

L’auberge les Morainières à Jongieux avec des vins de rêve vendredi, 13 octobre 2006

Le lendemain, huit personnes se retrouvent à l’auberge les Morainières à Jongieux. La route qui fait se rejoindre le lac d’Annecy et le lac du Bourget traverse de magnifiques contrées. L’auberge est plantée sur une pente raide où les vignes ont les couleurs les plus belles : du vert encore, beaucoup de jaune, un peu de rouge, voire du rouge sang. La vue est magnifique, le Rhône louvoie paresseusement, attendant en aval de grossir son débit. Les convives partagent tous d’écrire sur un même forum sur le vin. Une solidarité est née entre eux lorsqu’une méchante cabale a agité le site. Ils sont heureux de faire connaissance, car peu d’entre eux se sont déjà vus. Cette connivence va se transformer en amitié. Chacun a été généreux, la palme revenant au régional de l’étape, qui nous a régalés de vins de gros calibres.

Un jeune couple tient cette auberge éloignée de tout. Il faut vite qu’ils obtiennent une étoile – nous écrirons tous au guide qui fait référence – pour couronner un talent et un courage remarquables. Chacun venant avec plus de vins que nous ne pourrons boire, nous sélectionnons ce qui sera bu et avec Jean-Philippe, le cornac de Veyrier du Lac, je décide de l’ordre d’entrée en scène.

La Roussette Marestel Dupasquier 1995 est le vin local, puisque ses vignes nous enserrent presque. Aussi aura-t-il l’honneur d’ouvrir les festivités. On sent les grains surmaturés. Il y a une très belle profondeur, un léger fumé. Quand il s’épanouit dans le verre, on a même des fruits confits.

Le champagne Dom Pérignon 1992 accompagne une délicieuse crème aux champignons et brioche de girolles. Le champagne attaque la bouche sobrement, avec la noblesse de Dom Pérignon. Puis, installé en bouche, il souffre d’un évident manque de coffre. La crème beurrée l’anime, mais cette année de Dom Pérignon est essoufflée.

Sur un foie gras très pur présenté sur une ardoise avec un persil plat caramélisé, le Grain Doux de Marie-Thérèse Chappaz, vin du Valais 2005 plait beaucoup à mes convives. Ils en font de beaux compliments. Je leur confesse que ce type de goûts est hors de portée pour moi. J’ai un blocage mental pour ces vins doux. En revanche, je n’arrête pas de glousser, je m’agite sur mon siège, tant le champagne « Substance » de Jacques Selosse, vin de mélange de plusieurs millésimes, composé ici en 2003 et qui titre 12,5° convient à mon palais. Il ne se décrit pas, il est éblouissant de profondeur, de race, de personnalité, d’expressivité. Je suis absolument sous son charme. C’est un immense champagne.

La langoustine juste saisie est d’une grande délicatesse. Le Montrachet Domaine Ramonet 1985 est impérial. Son nez me suffirait tant le parfum est captivant, dense, sensuel. En bouche, la longueur est infinie, la concentration pèse lourd sur la langue. Ce vin intense, imposant est une leçon de chose. Il y a du citron vert, puis, quand le vin s’épanouit, de la réglisse. Ce vin de grande concentration appartient à la perfection bourguignonne.

L’omble chevalier est goûteux et cuit audacieusement, ce qui lui convient. Trois vins très différents vont être bus ensemble. Le Chinon Varennes du Grand Clos, Charles Joquet 1990 provient de vignes pré phylloxériques.  Il a une belle attaque, expressive comme jamais on ne l’attendrait d’un Chinon. On est stupéfait devant cette précision et cette profondeur. Hélas, le final ne suit pas le rythme. Il délivre une vilaine trace animale qui gâche un peu le plaisir. Cela ne diminue pas la valeur absolue de ce grand vin. Le Cos d’Estournel 1986 a déjà vingt ans. Mais sa couleur est celle d’un enfant de cinq ans. Et en bouche, comment est-ce possible qu’il ait tant de jeunesse ? On se dit qu’il eût été opportun de le garder encore dix ans de plus. On sent quand même comme il sera grand. Je regarde les têtes lorsque l’on goûte le Château La Gaffelière-Naudes 1953. Ce vin est venu en voiture de Paris. Il a louvoyé sur les routes sinueuses de Savoie et n’a pas eu toute sa dose d’oxygène. Aussi le premier contact est rude. Fort heureusement il s’ébroue vite, et délivre enfin ce message de joie, de plénitude, de rondeur que je lui connais. Il est absolument magnifique et j’ai eu la joie que toute la table le comprît.

La chair du cerf est, une fois de plus, délicatement révélée, montrant la sensibilité romantique de ce jeune chef. La Mondeuse Arbin de Charles Trosset 1990 est un vin qui m’épate, car je n’attendrais jamais ce niveau. Je le trouve extrêmement floral, aux épices astucieusement dosées. La Côte Rôtie La Mouline Guigal 1989 est un monument. Je vois notre généreux ami qui s’agite sur son siège. Il rêvait d’ouvrir une Turque. Je l’y encourage. Aussi, une Côte Rôtie La Turque Guigal 1990 vint s’ajouter à ce festin. La première attaque de la Turque, c’est la brutalité. La Turque fonce, quand la Mouline affiche une fraîcheur fabuleuse. Avec un peu de temps, puisque la Turque est juste ouverte, le 1990 s’épanouit. Il étale son boisé, quand le 1989 est rond, fruité et beau. Nous avions eu La Landonne hier soir, voici la Mouline et La Turque ce midi (si l’on peut dire midi, car le lever de table se fit à l’heure où les bêtes rentrent à l’étable), quel florilège des plus beaux vins de cette région du Rhône ! Celui qui coule en bas sait-il qu’il va lécher bientôt des terres qui produisent parmi les plus grands vins du monde ?

Les desserts seront désassortis, soit aux pommes, soit au chocolat. Vous avez dit chocolat ? C’est un appel à l’un de mes vins de réserve. Il va venir. Nous avons en face de nous trois vins : un Ruster Rültander Ausbruch autrichien 1991 qui titre 12°, un « a » ambre, Christophe Abbet, vin du Valais 1997 et Château d’Yquem 1976. L’Ausbruch a une acidité spectaculaire. Il est séduisant au possible. Une fois de plus, j’ai du mal avec le vin du Valais et je ne m’y attarde pas. Ce n’est pas le vin qui est déficient, c’est mon palais qui n’est pas accueillant. Aussi je me concentre pour essayer de comprendre cet Ausbruch diablement tentateur. Mais quand quelqu’un dit qu’il surpasse Yquem, je réagis. Car Yquem, c’est Yquem, et nous verrons bien quand les verres auront donné de la respiration à chacun des deux vins que la concentration d’Yquem et sa structure sont conformes à sa légende. L’année 1976 est belle pour Yquem.

Le Maury La Coume du Roy de Madame de Volontat 1932 est l’ami du chocolat. Ce vin délicieusement arrondi a une trace pérenne en bouche. Il conclut ce repas comme un précieux bonbon.

Quel serait mon classement ? Montrachet 1985 très en avance, suivi par le champagne de Jacques Selosse. Je mettrais la Mouline 1989 puis La Gaffelières 1953. Des amis suggèrent d’inverser l’ordre du troisième et du quatrième. Peu importe. Il y avait tant de grands vins.

L’atmosphère du repas fut magique. Une communion d’idées, d’attitudes nous a tous marqués. Point besoin de juger, d’analyser les vins, de montrer sa science. La volonté de tous était de communier. Noël Dupasquier et le maire de Jongieux nous ont rejoints en fin de repas. Nous sommes allés chez Noël Dupasquier faire le plein de nos coffres avec quelques uns de ses vins. L’un des convives étant de Roanne, le petit groupe devrait se retrouver bientôt autour d’une table de cette cité où l’on compte des étoilés, et promesse fut faite de se retrouver aussi à Paris pour un repas de vins anciens. Nous avions tous le sourire aux lèvres et l’esprit chargé de souvenirs tant le partage généreux entre amateurs forge les amitiés.

Une bien jolie Landonne sur le lac d’Annecy jeudi, 12 octobre 2006

L’ami qui nous a fait découvrir le monde créatif de Marc Veyrat, véritable cornac de nos découvertes et émerveillements organise un déjeuner au restaurant d’Annecy dont le thème sera les champagnes Krug. Ce sera l’occasion d’aller rencontrer la veille des partenaires inconnus, dialoguistes virtuels d’un écheveau de partages d’expériences sur un forum sur le vin. Nous arrivons sur les rives du lac d’Annecy en un lieu qui pousse au romantisme et à la poésie. Une petite commune s’est installée sur une boucle du lac. Une congrégation religieuse s’y était abritée il y a quelques siècles. Nous y dormirons, face à ce bras du lac surplombé d’une dentelle de roches qu’un soleil presque couchant à notre arrivée teinte d’un rose hollywoodien.

Notre ami nous rejoint en ce lieu pour dîner. En l’attendant, je contemple avec effroi la liste des vins dont on nous dit (c’est écrit) que c’est une cave exceptionnelle. Il n’y a pas de quoi faire une telle déclaration. Mais c’est surtout l’extrême incohérence des prix qui me chagrine. Pourquoi Palmer 1966 serait il plus de quatre fois plus cher que Palmer 1990 ? Pourquoi Mouton 1954 serait-il plus cher que Mouton 1955 ? Et pourquoi les prix seraient-ils dix fois plus chers que ce que j’ai payé lorsque j’ai acquis ces mêmes bouteilles ? J’ai choisi les vins de ce soir surtout en fonction des prix, même si j’aime évidemment les vins que nous allons boire, en exploitant soit de bons achats, soit des erreurs de calcul. Le menu est bien écrit et laisserait penser que l’on dînerait bien. Hélas, il y a loin d’une description alléchante à une cuisine bien faite. Il eût fallu du talent. Ce soir, il était tombé dans le lac. Les coquilles Saint-Jacques avaient des saveurs de cantine (j’exagère bien sûr), le râble devait provenir d’un lièvre qui avait échappé à toutes les battues depuis au moins un siècle. Rajoutons à cela un service balbutiant comme celui du premier mois d’une école hôtelière. On comprend pourquoi je ne cite pas le nom de cette belle demeure aux chambres magnifiques, issues du goût que l’on avait au 17ème siècle, où les espaces étaient intelligents. Il y a la volonté de bien faire dans cette prestigieuse étape. Il faudrait simplement que cette abbaye se souvienne que le repas n’est plus, comme au temps des moines, un sujet de pénitence.

Et le vin ? Le Château Grillet, Neyret Gachet 1997 est conforme à ce que j’en attends. Il a le fumé classique de ce viognier dont l’année tempère l’ardeur, ce que j’adore. Loin de la puissance des Roussane et autres Hermitage, il est subtil, construit, mesuré, équilibré. Intense mais bien poli, il accompagnerait beaucoup de beaux plats de son ananas confit, de son vineux beurré, de son exotisme raffiné. Ce vin ne cherche pas les complications, et je trouve que son expression de 1997 me convient bien. La Côte Rôtie La Landonne Guigal 2000 est sans doute un vin qui pourrait encore attendre en cave avant d’être abordée. Mais c’était la seule année de la carte des vins. Ce vin ravit l’âme. Tout ici est calibré, mesuré, travaillé avec la plus extrême des intelligences. C’est juteux, c’est fruité, c’est terriblement simple d’apparence mais profond dans l’âme. Si l’expression : « le bon vin réjouit le cœur de l’homme » devait s’appliquer à un vin, c’est à celui-ci. Car tout en lui est naturellement joyeux.

Rien que pour ces deux vins je vais réviser à la hausse mon jugement sur le restaurant. Ils ont essayé de bien faire. Souhaitons-leur de savoir progresser. Ils l’ont d’ailleurs fait le lendemain car leur grenadin de veau avait belle allure ainsi que la joue de bœuf servie à mon épouse. Un jugement sur un restaurant ne peut pas être définitif après un seul essai.

un Bonnes Mares Louis Latour 1937 exceptionnel mercredi, 11 octobre 2006

Lorsque je suis allé en Californie pour rencontrer des amoureux du vin d’un forum, c’est une charmante Christine qui avait organisé la dégustation de 68 vins anciens de Californie. Tout le monde était venu en se disant que ce serait bien si la moitié des vins n’étaient pas morts. Aucun ne le fut. J’ai déjeuné avec Christine et un autre contributeur du même forum chez Patrick Pignol.

Nous avons commencé par un Stony Hill Chardonnay Napa Valley 1984 qui sur le premier goût m’évoquait du jus de pomme (chardonnay évolué), mais qui s’est animé sur des cèpes merveilleux pour prendre une belle patine. J’ai fait remarquer à mes convives que ce vin avec les cèpes prenait facilement 4 points Parker !

L’autre ami américain avait apporté un Corton Louis Petitjean propriétaire 1967 qui faisait un peu aigrelet au premier contact. Mais le Corton sur un Saint-Pierre, c’est un accord parfait. Car avec la chair délicieusement cuite (une cuisson d’une dextérité absolue), la légère acidité s’estompe.

Sur un miraculeux pigeon dont la sauce aigrelette avait un léger sucré, le Bonnes Mares Louis Latour 1937 a été spectaculaire. Ouvert à 10 h du matin, bu à 14 h, sa bouteille soufflée à la main impressionne, d’autant que l’étiquette est d’une rare beauté. Niveau très satisfaisant (pas plus de 5 cm sous le bouchon), odeur très agréable (le sommelier Nicolas m’a dit que l’odeur était splendide à l’ouverture, or je n’aime généralement pas trop quand c’est trop bon dès l’ouverture). En bouche, une rondeur, une plénitude fabuleuse. Le fait de prendre en bouche la sauce du pigeon, puis le vin faisait qu’on ne savait plus qui était qui de la sauce ou du vin. Un vin objectivement exceptionnel.

Nous avons fini sur un champagne de Sousa blanc de blancs 1996 que j’adore. Un champagne d’une jeunesse insolente et d’une exactitude de ton absolue.

Je ne sais pas si mes amis américains se sont rendu compte de la réelle perfection du Bonnes-Mares. Je dois dire que ce vin, d’un aspect remarquable, m’a complètement époustouflé.

vin d’une splendeur unique

un bel italien avec des amis samedi, 7 octobre 2006

L’ami qui avait accosté devant ma maison du Sud en catamaran, vient dîner chez moi à Paris avec d’autres amis. J’ouvre un champagne Moët & Chandon Brut Impérial sans année vers 1990. Je suis impressionné par lé douceur et l’équilibre que ce champagne a pris avec l’âge. Voici un champagne qu’il faudrait oublier quinze ans en cave pour le boire au sommet de son art. C’est doux, délicat, rassurant, avec une petite pointe de fruit confit. Ayant anticipé l’ordre des champagnes, je deviens inquiet pour le second, tant ce Moët est charmeur. Mais le champagne Charles Heidsieck, mis en cave en 1996 va faire bonne figure. Plus jeune d’aspect, plus sec, à la bulle puissante, il expose une autre version tout aussi sympathique du champagne. Plus austère, plus scolaire mais agréable sur les deux foies gras, l’un nature et l’autre en terrine sous une croûte de pain d’épices, avec une gelée de fleur d’hibiscus.

Nous essayons sur ce même plat un Sauvignon blanc Württemberg Schnaitmann 2004 qui titre 13° dont je n’ai absolument aucune idée de l’origine. Comment était-il en cave ? Le vin est assurément très jeune, jeune puceau imberbe. Un goût de citron, de pomme, de litchi, et une naïveté qui n’est pas déplaisante. C’est assez anecdotique.

Sur une joue de bœuf aux carottes qui me remet en mémoire l’excellente joue que réalisait Benoît Groult à Amphiclès il y a bien longtemps, trois vins vont être bus à l’aveugle, avec une imagination de découvertes qui nous fait voyager dans beaucoup de régions fort étrangères pour ces vins. Le Château Lafite-Rothschild 1965 a très étonnamment une couleur trouble. Le nez est expressif. On sent la trame très dense d’un grand vin, mais, avouons-le, c’est un « Shadow Cabinet ». Ce n’est pas le Lafite tel qu’il pourrait l’être.

Le Grands Echézeaux Domaine de la Romanée Conti 1956 m’avait – une fois encore – montré un bouchon noir et gras. Mais les odeurs promettaient de belles choses. Sa couleur est claire, d’un rouge grenat. En bouche, j’ai rarement bu un vin avec autant de fruits rouges. Ce sont des groseilles, des prunes qui envahissent la bouche. Le résultat est assez probant, même si on ne peut ignorer une fatigue de l’âge.

A l’aveugle, c’est de loin le Gattinara Casa vinicola Luigi Nervi & Figlio  Italie 1964 qui est le plus flatteur. Il a un beau rouge bien vivant, un nez franc, et son goût simple, au discours clair est très plaisant. Bien sûr quand les vins s’épanouissent dans le verre, c’est le Grands Echézeaux qui livre la plus belle complexité bourguignonne. Mais ce petit vin italien m’a bien plu, comme à l’ensemble de mes amis. Sur les fromages, c’est le Grands Echézeaux qui vibrait le plus.

Le vrai choc, c’est Château Climens 1966. Car avec les rouges, on a besoin de réfléchir pour trouver ce qui reste de leur race initiale, car ces vins ne sont pas toujours au mieux de leur forme. Alors qu’avec ce Climens, tout est clair comme lorsqu’un professeur de mathématiques donne la clef d’un problème sur lequel on a bataillé. Quel immense plaisir que ce grand Barsac que j’adore ! Sur une délicieuse tarte Tatin, c’est l’accord parfait.

déjeuner d’amis au restaurant Laurent avec un Haut-Brion blanc 1955 vendredi, 6 octobre 2006

Il n’y a pas de pire traquenard qu’un déjeuner d’amis où chacun doit apporter un vin. Croyez-vous que chacun va se contenter d’apporter une bouteille ? Erreur fatale. Un ami, amateur de vins anciens, converti depuis peu à cette maladie qui s’est propagée très vite sur le spectre de ses envies, invite un expert en vins qui fut mon pourvoyeur et semble devenu le sien, et la directrice d’une école de dégustation de vins. Le lieu choisi est celui de nos folles aventures, le restaurant Laurent. Patrick Lair ayant reçu les bouteilles à l’avance les a ouvertes à 10 heures ce matin ce qui leur a permis de s’épanouir, d’autant que notre charmante convive usant du privilège des jolies femmes sut se faire désirer. Et ce fut justifié, donc pardonné, car elle est fort jolie. Pensant que mon apport serait un peu faible, j’ai dans ma sacoche une demi-bouteille de Corton Grancey Louis Latour 1985. Ouvert au dernier moment, il s’en est très bien sorti. Précis, insistant, de forte trace en bouche, c’est un vin de forte personnalité. Sa longueur est belle et les nouveaux amuse-bouche – Laurent étrenne sa nouvelle carte, saison oblige – chatouille assez bien le vin sans qu’ils se parlent vraiment.

Le champagne Deutz 1983 de notre belle convive est absolument ravissant. Le dosage a pris de la rondeur, le champagne est joyeux. Sa bulle est jeune, comme l’or vert de sa robe. Goûteux, charmant, je l’aime beaucoup. J’ai commandé des cuisses de grenouilles pour mettre en valeur un vin qui impose le respect : Château Haut-Brion blanc 1955. La robe dorée est presque cuivrée, mais il y a une couleur qui n’appartient qu’à ce vin, car le cuivre est frotté de peau de citron. Le nez est intense, et en bouche, c’est une invasion sympathique, car le vin de grande race sait taire une partie de sa complexité. Derrière un voile de légère acidité citronnée, il y a le charme du Graves. La longueur est infinie, la trace en bouche insistante. On a en face de soi un vin de première grandeur qui rappelle l’immense Haut-Brion 1949 que j’avais partagé avec des amis américains, généreux donateurs de cette rareté. Ici le donateur est notre ami, organisateur de la rencontre.

Quand arrive le pied de porc, l’envie prend instantanément à ma voisine, comme à moi, de l’essayer avec le blanc. Et c’est un régal culinaire. Le vin qui est prévu, que j’ai apporté est un Beaune Camille Giroud 1928. L’odeur est belle, mais le vin ne peut cacher une certaine fatigue qui gauchit son message. Plus il s’épanouit dans le verre, plus il s’approche de ce qu’on pourrait trouver,  témoignage serein d’une année de légende. Mais je n’ai pas le temps d’attendre, aussi je commande à Patrick Lair de son fond de cave, un Chambolle-Musigny Les Vins Fins 1947. Ce vin ouvert sur l’instant est diablement excitant. Sa robe est jeune, avec un rubis de belle tenue. L’odeur est franche, et en bouche, c’est toute la Bourgogne que j’aime. Cette Bourgogne qui a les pieds lourds de la boue des allées de vignes, qui tranche un pain à la mie pesante pour siffler bruyamment le jus à peine pressé. Cette Bourgogne paysanne, rustique on la trouve dans ce vin dont l’ingratitude est signe de noblesse. J’ai adoré ce Chambolle-Musigny qui paraissait fort jeune face au Beaune mais ne lui faisait pas d’ombre, car entretemps, le 1928 assemblait les pièces de son puzzle et gagnait en homogénéité. Un fromage de chèvre intelligemment choisi mit en valeur le Chambolle-Musigny, rajeunissant son message, même s’il ne peut cacher qu’il est typiquement de 1947, ce qui lui va bien.

Sur un soufflé fort délicat, c’est au tour du Sauternes générique 1929. Son étiquette est la petite sœur déchirée de la bouteille  qui est en tête du bulletin 126, elle aussi d’un Sauternes générique 1929. Hélas un goût bouchonné, même s’il est fugace va empêcher de l’aimer. J’avais réagi par solidarité pour le 1928 en commandant un 1947. Notre ami qui invite, apporteur aussi du 1929, fit de même et commanda un Sigalas-Rabaud 1967. Là, c’est du sérieux. J’ai fait préparer, en plein après-midi, des assiettes de mangues juste poêlées pour savourer ce sauternes intense, lourd, d’un charme exquis. Qui d’autre que le restaurant Laurent aurait cette souriante réactivité ?

Un ami présent au restaurant à une autre table, curieux sans doute de ce que nous buvions, se fit porter deux verres du Haut-Brion 1955. C’était une bonne pioche, car ce vin a illuminé un beau déjeuner. Le classement serait difficile à faire. Je choisirais ainsi dans l’ordre : Haut-Brion blanc 1955, Deutz 1983, Chambolle-Musigny 1947, Sigalas-Rabaud 1967. Mon ami perfidement taquin disait que je défends surtout les vins que j’apporte. Il n’y en a pas un dans ce quarté, preuve de mon indéfectible objectivité!!!Merci généreux amis.

Angélus 1989 et Cheval Blanc 1990 dans de beaux accords mercredi, 4 octobre 2006

Notre groupe de conscrits se réunit une fois de plus dans un des grands cercles parisiens. Un champagne Mumm 1985 montre à quel point l’âge embellit les champagnes quand ils savent ne pas vieillir. Une bulle active, un parfum de fleurs exotiques, et ce goût rare de liqueur de vieux fruits rouges qui enchante le palais. Nous passons à table, et voyant le menu composé à deux options par plat (c’est ça ou ça), je suggère que l’on prenne le saucisson de Lyon et le mignon de veau. Je ne suis pas celui qui invite, mais comme souvent, on me charge du choix des vins.

Le Château Carbonnieux blanc 2002 forme un couple avec le saucisson de Lyon d’un érotisme qui fait de Pauline Réage la rédactrice d’une histoire d’eau de rose plutôt que d’une histoire d’ô.

Le caractère citronné, les agrumes secs du Carbonnieux jouent avec facilité sur la pistache du saucisson de Lyon qui a la chance d’avoir pour compère une pomme de terre intelligente.

Sur le mignon de veau, la sauce à peine groseillée, dosée d’un sucre délicat, se marie en un accord Lucullien avec le Château Angélus 1989. La légère sucrosité du vin est intégralement répétée par la sauce. C’est une symbiose magique. Le vin est éblouissant de sérénité, épanoui, avec ce côté doucereux que la sauce met en valeur. On reconnait bien sûr le Saint-émilion dont je viens il y a peu de goûter 20 millésimes, mais ici, c’est la force de l’union qui transcende le vin.

Le Château Cheval blanc 1990 est un vin qui impose le respect. Tout en lui appelle le recueillement. Le nez n’est pas imposant mais annonce une structure d’une trame noble. En bouche, ça démarre comme un bobsleigh : les premiers mètres sont tranquilles. Mais quand la vitesse est acquise, accrochez-vous ! Ce qui frappe dans ce vin, c’est une main de fer dans un gant de velours. Ce vin est d’une sérénité inébranlable. On peut dire tout ce qu’on veut, reconnaître sa densité extrême, il est là, serein, puissant, au bois joliment mesuré. C’est un immense vin. Le saint-nectaire et le reblochon surent se faire discrets pour qu’on s’extasie sans contrainte devant ce vin d’une race inégalable.

Sur un gâteau aux noix, un champagne Laurent Perrier rosé brut sans année est un compagnon reposant de fin de repas. On pourrait se dire que l’on a inscrit le mot fin à cette belle aventure. Mais un de nos conscrits, alors que la table avait diminué de moitié, tant des sexagénaires peuvent être encore indispensables à leurs affaires en cours, déclara qu’il avait soif. Un Château d’Yquem 1987 répondit à sa question. Arrivé un peu chaud sur la table, il a transporté le petit cercle que nous formions dans un nième ciel de félicité. Je crois qu’on ne peut pas s’imaginer à quel point cet Yquem est parfait. Il y a en lui de l’abricot sec, du caramel, distillés avec intelligence. Pas une gorgée qui ne soit synonyme de plaisir parfait.

Nous sommes conscrits, donc cacochymes, mais qu’est-ce qu’on boit bien !

deux beaux Chateauneuf-du-Pape lors d’un dîner d’amis samedi, 23 septembre 2006

Je rejoins le Sud, des voisins m’invitent pour une « langouste-party ». J’ai le temps de prendre en cave deux vins. Le monde est petit car je retrouve l’un des convives du dîner que je viens de faire au Carré des Feuillants il y a deux jours.

Le Chateauneuf-du-Pape blanc de E. Malbec a reçu des médailles d’or à la foire d’Orange et au concours agricole à Paris, les deux en 1971. On peut supposer que c’est un 1969, à une année près. D’un jaune doré, d’un nez franc, il dégage un charme certain qui n’a pas pris une ride. Chaleureux, droit, sincère, c’est un vin magnifique.

Le Chateauneuf-du-Pape de Jean et Jean-Paul Versino 1989 produit un accord avec la chair de la langouste bretonne qui est remarquable. Vineux, viril, de gentille râpe, ce vin joue son rôle à fond. C’est un vin de pur plaisir. Voici deux bonnes pioches qui me réconcilient avec la cave que j’avais achetée un peu comme chat en poche à un retraité d’Orange.

de beaux bourgognes au restaurant Laurent mercredi, 20 septembre 2006

De merveilleux bourgognes de 1947 et autres années

Un ami de mon fils souhaitait partager avec moi une belle bouteille. Nous prenons date. Je pense à apporter aussi une bouteille.  En la choisissant, je décide d’inviter d’autres amis pour avoir un éventail de vins plus large.

Nous allons déjeuner au restaurant Laurent, et j’ai fait ouvrir les bouteilles à l’avance par Patrick Lair. Nous sommes cinq à table, et nous commençons par une demi-bouteille de Chassagne Montrachet rouge Charles Viénot 1947. Le nez est extrêmement bourguignon, viril, tendance animale. On peut avoir deux approches : on décide que ce vin est passé, et on l’oublie. Ou l’on a la tolérance d’accepter une légère acidité (qui va d’ailleurs disparaître), et on a un bourgogne viril, râpeux, terriblement bourguignon.

Sur un foie gras poêlé absolument délicieux, le Corton Jacques Bouchard 1957 me surprend par sa jeunesse folle. Et le Viénot 1947 sert de faire-valoir à ce beau bourgogne au message clair, qui laisse le négociant en vins de notre table (l’ami de mon fils) quasiment pantois : comment trouver dans un tel vin une grille d’analyse qui s’inspire de la grille d’analyse des vins qu’il juge au quotidien. Ce que relève mon ami, c’est surtout la jeunesse de ce vin, qui le trouble. De mon côté, je suis très surpris qu’un 1957, d’une année ingrate, puisse atteindre ce niveau là.

Les pieds de porc sont le plat le plus confortable qui soit. Sa sécurité gustative autoriserait toutes les audaces avec les vins (un blanc serait très tentant).

Le Corton du Roy Faiveley probable 1947 (car il a perdu sa collerette d’année) a un nez resplendissant. C’est la pourpre cardinalice. En bouche le premier contact est tellement chaleureux que je me mets à penser à 1929. Un tel charme ne peut appartenir qu’à 1929. Mais dans le merveilleux jardin du restaurant Laurent dont nous profitons pour une des dernières fois de l’année, la température relativement fraîche va limiter l’ardeur de ce Corton qui redevient plus probablement un 1947, mais le doute subsiste, car la chaleur gustative de ce vin est du calibre de 1929. Lorsque je ferai en fin de repas une nouvelle analyse de tous les vins que nous avons bus, c’est la générosité, la spontanéité de ce Corton qui le placera nettement au dessus des autres vins. On sent des fruits rouges, du jus chaud et vivifiant dans ce vin chaleureux à la longueur très remarquable pour un vin de plus de cinquante ans.

L’apport de l’ami de mon fils, La Romanée, du Château de Vosne Romanée 1966 a une couleur très troublée qui résulte sans doute du voyage depuis Bordeaux. Le nez est un peu acide. En bouche c’est assez joli, mais très « en dedans ». On peut penser qu’avec quelques heures de plus d’ouverture, ce vin aurait développé son message. Ici il se contente d’un texte simplifié, annonciateur quand même du potentiel qu’il aurait pu exprimer.

Dans un repas aussi amical et enjoué, je peux prendre des risques plus grands pour le choix des vins. Sur un saint-nectaire, la  demi-bouteille de Pontet Canet 1924 est morte, sans qu’il soit envisageable de lui trouver le moindre rayon de soleil. En revanche, la demi-bouteille de Gruaud Larose 1922, même si elle ne fait plus partie des vins acceptables, indique, sous ses blessures, qu’il aurait été un jour un vin de grande  valeur.

Pour nous consoler de ces deux bouteilles qui ont dépassé depuis longtemps la validité de leur ticket, le Château Salins, Rions 1ères Côtes de Bordeaux 1941 séduit toute la table sur un soufflé aux pêches. Sa couleur est d’un or joyeux, son nez est discret, mais élégant. Il évoque le coing. En bouche, c’est délicatement liquoreux, avec des évocations de pêche, de fruits blancs, d’agrumes légers. Il est presque sec dans son doucereux. Sa longueur est prudente, mais son plaisir est immense. Dénicher des vins inconnus qui se montrent sous un tel jour est un plaisir certain.

Ce repas m’a donné l’envie de faire ainsi de temps à autre une table amicale où l’on ouvrirait des bouteilles représentant plus de risques, soit pour ne plus prolonger une inutile agonie, soit pour leur permettre de déployer leurs ailes d’anges.

cinq Richebourg Méo Camuzet et trois Salon au Carré des Feuillants mardi, 12 septembre 2006

Après la belle verticale de Château l’Angélus, le groupe cornaqué par Bipin Desai allait poursuivre une semaine de débauche gastronomique : Tan Dinh le lendemain midi, Carré des Feuillants au dîner, dîner à Lille le lendemain et déjeuner au restaurant Guy Savoy le jour d’après. On me propose de me joindre au groupe au Carré des Feuillants, je ne me fais pas prier.

La salle du sous-sol, lorsqu’on a dépassé la cave dont on devine les trésors, est accueillante. Portrait et statue clin d’œil du maître, évocations du Sud-ouest rugbystique, c’est chaud au cœur. Nous buvons champagne Delamotte 1999 et Didier Depond qui assiste à ce dîner nous dira que nous sommes les premiers au monde à le déguster, car il fait sa première sortie en public. Ça ne change évidemment pas le goût du champagne, mais ça fait plaisir. Le vin est un peu dosé à mon goût, mais on s’habitue, et on découvre que Delamotte, c’est un « bon plan ». Vivant longtemps à l’ombre de Salon, il n’en a pas la cote, mais il est un vrai champagne à part entière, de belle expression. Je sens un peu de litchi et de fruits roses.

Nous passons à table et le hasard fait bien les choses, je suis assis près de Didier Depond.

Voici le menu élaboré par Alain Dutournier : l’huître, caviar d’Aquitaine, tartare d’algues et écume crémeuse / crevette sauvage tiède en « crème de tête », billes de melon en chutney et gaspacho safrané / cuisses de grenouilles épicées, roquettes et girolles en tempura / rouget barbet au plat, bohémienne d’aubergine, citron de Menton / tendron de veau de lait dans son jus, cèpe debout / vieux gouda travaillé, truffe de bourgogne râpée / pêche rôtie au poivre de Séchuan et marasquin, blanc-manger, brioche dorée, glace au miel de bruyère. Je trouve Alain Dutournier au sommet de son art, à un niveau de maturité qui sera forcément récompensé.

Le champagne Salon 1996 est d’une douceur incomparable. C’est un champagne policé. La race est là, et le champagne est déjà réellement buvable. Le 1995 était rude au même stade. Le 1996 a un charme et une délicatesse qui sont rares.

Le champagne Salon 1988 a déjà gagné en maturité. Je le trouve plus évolué que ceux que j’ai en cave. La séduction est extrême. Goût de toast, de fumé, c’est magnifique.

Le champagne Salon 1976 servi en magnum a une approche un peu stricte, mais il va s’ouvrir. Ce qui est d’ailleurs intéressant avec ces trois champagnes, c’est qu’ils ne cessent d’évoluer dans le verre. Il n’y aura donc jamais une photographie unique de leur identité.

Avec l’huître et le caviar, le 1996 est de la vraie gourmandise. Le sel du caviar lui donne une longueur infinie. Je commence à classer 96 / 88 / 76. Mais il y a dans le 1988 qui m’est servi une légère amertume que n’avait pas le premier verre d’une autre bouteille, et comme le 1976 s’ouvre et offre des parfums exotiques raffinés, je classerai 96 / 76 / 88 en écrivant sur mon petit carnet : le 1996, c’est mon amour.

Nous allons goûter trois Savigny « Narbantons » Domaine Leroy. Le 2001 a un nez très fort, sous-tendu par une charpente solide. Le 1999 a un nez américain. C’est trop pour moi. C’est une sorte de soupe de framboise. Le 1997 a un nez plus balancé, plus subtil, tout en restant dans la ligne de 1999. Mon impression première est que ces vins sont trop travaillés. Au nez, c’est le 2001 qui apparait comme le plus traditionnel, ce qui semble paradoxal. Il convient de dire que ces vins très solides sont de grands vins. Seul l’excès de travail me gêne.

Sur les grenouilles délicieuses, le 1997 est absolument excellent. Le 1999 en fait trop, envahissant le palais. Le 2001 est très bourguignon, sauvage. Je classe 1997 / 2001 / 1999. Le 1997 c’est du plaisir, le 2001 est authentique et le 1999 plus caricatural. A noter à quel point la grenouille est un partenaire intéressant pour les vins, qu’ils soient rouges comme ici, ou blancs.

Nous goûtons ces mêmes vins sur un rouget goûteux. Le 2001 est beau, pur. Le 1997 reste un vin de plaisir, et le 1999 commence à me plaire. Si je ne l’avais découvert que maintenant, je dirais que c’est un bon vin.

Nous abordons maintenant une belle série de Richebourg Domaine Méo Camuzet. J’aurais évidemment aimé que Jean Nicolas Méo soit là comme l’est Didier Depond pour Salon car j’aurais aimé confronter nos jugements. La première approche est celle des nez. Le 2001 affiche son alcool et sa richesse. Le 1999 est d’une subtilité olfactive absolue. Il est parfait. Le 1996 est fatigué et a évolué vers la truffe. Le 1993 est timide et le 1991 un peu faible. L’examen des nez devient évidemment impossible lorsque l’assiette du plat est posée.

En bouche le 2001 a un râpeux que j’aime, très bourguignon. Le 1999 est éblouissant, absolument parfait, le 1996 est devenu acide et déséquilibré, mais on sent un belle structure en arrière-plan, cachée par l’acidité comme ça se passe avec des vins anciens. Je me dis de ne pas le condamner trop vite. Le 1993 est animal, au goût de viande et d’intestins. Le 1991, si l’on accepte la légèreté structurelle est intéressant et joliment parfumé.

Le classement sera celui-ci : 1999 / 2001 / 1991, sachant que le 1999 est très largement au dessus de tous les autres.

Le Château Nairac 1997 est un Barsac simple, de structure prévisible. Il s’anime sur certaines composantes du dessert pour devenir charmant. Le goût de coing domine. C’est un vin fort agréable dont je comprends le choix.

La cuisine d’Alain Dutournier a été absolument resplendissante de sérénité. Les goûts sont marqués de forte personnalité, et d’une intelligence culinaire extrême.

Bipin Desai fait profiter ses amis de la justesse de ses choix de vins. Et puis, boire tant de Richebourg d’un domaine que j’aime et tant de Salon, mon chouchou, il faudrait être fou pour demander plus !