Dans le Sud, qui commençait à me manquer, il est « indispensable » d’aller dîner chez Yvan Roux avec des amis. Ils arrivent à la maison et un champagne « R » de Ruinart qui a environ huit à dix ans est particulièrement délicieux. L’âge va décidément bien aux champagnes non millésimés. Le dosage un peu appuyé convient parfaitement aux petits toasts aux anchois, olives, saumon à l’aneth et foie gras. Arrivant à la table d’hôte qui devient presque une halte obligatoire, une montagne d’oursins bien pleins requiert un champagne Laurent Perrier Grand Siècle. Ce champagne a une structure d’une élégance rare, et convient parfaitement aux oursins ainsi qu’aux anémones de mer panées. Sur des crevettes roses à profusion, certaines poêlées d’autres frites, un Côtes du Rhône Cuvée du Président, Rochegude 1976 vin qui a obtenu une médaille d’or dans je ne sais quel concours me surprend totalement. Comment est-il possible que ce vin très ordinaire puisse être aussi bon. Il possède un équilibre, une rondeur et une cohérence que l’on comprendrait d’un grand vin. Je suis ravi, car ce vin que j’avais acheté d’une cave approximative s’ajoute à une série de bonnes surprises. En revanche, le vin dont j’attendais plus de pétulance, un Châteauneuf-du-Pape Les Olivets Domaine Roger Sabon 1971, me déçoit au premier contact. Mais le temps fait son office et progressivement le charme du Châteauneuf-du-Pape s’installe sur des supions cuits à l’encre, tandis que des œufs brouillés aux oursins échappent à sa sphère de compétence. Un carpaccio de dorade coryphène à la coriandre et au gingembre et un filet de Saint-pierre finissent d’assembler les pièces manquantes de cet agréable et puissant Châteauneuf-du-Pape. Sachant l’amour que l’épouse d’Yvan voue au Maury, j’ai apporté un Mas Amiel Cuvée Charles Dupuy 1998 qui conclut ce repas sur un accord diabolique avec un moelleux au chocolat. La griotte, le pruneau, l’impression de bois exotique donnent au chocolat fondant une personnalité rare. Ah, que le Sud est beau même par temps gris.