Je suis allé faire des emplettes chez le poissonnier de la gare d’Hyères. N’ayant pas la sagesse de ma femme et ayant sans doute les yeux plus gros que le ventre, j’ai acheté beaucoup trop. Ce soir nous aurons profusion de camerones, et le bar de ligne sera reporté au lendemain.
D’instinct, je choisis dans l’armoire fraîche des vins rouges un Clos de Tart 2004. Et je l’ouvrirai au dernier moment. Le bouchon n’est pas imbibé, comme neuf. Le premier parfum est de la fraîcheur pure. On sent la Bourgogne terrienne mais raffinée. En bouche, c’est un petit moment de bonheur. Le vin est frais, pur, délicat, élégant et expressif. Et on ressent son côté bourguignon qui est de ne pas chercher à plaire. Le vin me dit : essaie de me comprendre. Et l’on voit passer dans le cerveau les sillons tracés entre les rangées de vigne, la terre riche et hospitalière, l’amertume de la grappe et ce final du travail bien fait. Pour moi, ce vin est la Bourgogne élégante et délicate qui m’évoque immédiatement celui qui a fait ce vin, Sylvain Pitiot, qui a tant fait pour ce domaine.
Les camerones sont goûteux et leur chair intense se marie très bien avec vin qui est d’un charme rare, tout en suggestion. Le vin ne fait pas partie des puissants, ni des follement complexes, mais j’aime son authenticité.
Il reste du vin le lendemain pour accompagner le bar de ligne de belle taille. Sa chair blanche est fine et raffinée. Comme aucun accompagnement n’a été prévu, la chair ne provoque pas le vin qui montre un peu plus son amertume. Comme il n’est pas conquérant, il reste sage et s’il m’émeut encore, je n’ai plus la vibration de la veille. Clos de Tart 2004 est un vin délicat qui s’écoute religieusement.