Le lendemain, veille de la 158ème vente des vins des Hospices de Beaune, la ville de Beaune fourmille de gens venus de toute la planète pour cette fête du vin. C’est aussi le jour des gilets jaunes. A 18 heures, la maison Bouchard Père & Fils reçoit une cinquantaine de personnes en son siège pour une dégustation de millésimes récents avant le dîner qui se tiendra dans l’orangerie du château de Beaune. D’habitude, pour la dégustation des vins récents, nous sommes assis et nous pouvons prendre des notes. Pour cette fois la dégustation se fait debout, ce qui entraîne que l’on est plus enclin à bavarder avec des invités qu’à juger et de plus écrire sur les papiers qui ont été fournis lorsque l’on est debout avec un verre en main est chose difficile. Aussi mes commentaires sur ce qui a été bu seront très succincts et incomplets.
Le Savigny-lès-Beaune Les Lavières Domaine Bouchard Père & Fils 2014 est très rond, doux, agréable et de belle longueur. C’est le premier vin que je bois et mon avis est positif car je reconnais le talent de la maison Bouchard Père & Fils.
Le Volnay Les Caillerets Ancienne Cuvée Carnot Domaine Bouchard Père & Fils 2014 a un nez strict mais en bouche une belle douceur. Il est un peu plus rêche mais il est grand.
Le Beaune Grèves Vigne de l’Enfant Jésus Domaine Bouchard Père & Fils 2014 est un vin que je chéris tout particulièrement à la fois pour son histoire que pour son goût splendide. Ce 2014 est magique, tout doux et grand. Je l’adore.
Le Pommard Les Rugiens Domaine Bouchard Père & Fils 2014 est un peu rêche mais il est ample. Il est puissant et je le considère comme une heureuse surprise par rapport à ce que j’attendais.
Après les premiers crus et avec le Corton Domaine Bouchard Père & Fils 2014 on passe maintenant aux grands crus, et ça se ressent dans ce vin très racé, tout en finesse et très long.
Le Bonnes-Mares Domaine Bouchard Père & Fils 2014 a un nez très doux et une belle mâche. Frédéric Weber, maître de chai, qui présente les vins nous signale les goûts de violette et de myrtille qui sont les marqueurs des Bonnes-Mares.
Le Chambertin Clos de Bèze Maison Bouchard Père & Fils 2014 a beaucoup de charme et de délicatesse. C’est un vin de Bouchard que j’aime particulièrement.
On nous sert ensuite le même vin mais de 2017. Le Chambertin Clos de Bèze Maison Bouchard Père & Fils 2017 est tout aussi délicat, mais l’ambiance étant à discuter, je n’ai pas eu l’occasion d’analyser les différences entre les deux millésimes.
Chez Bouchard on déguste les vins blancs après les rouges et c’est une bonne chose « blanc sur rouge, rien ne bouge, rouge sur blanc, tout fout le camp » dit l’adage. Ainsi le premier blanc paraît délicieux, comme si le palais l’attendait. Le Beaune Clos Saint-Landry Domaine Bouchard Père & Fils 2013 a beaucoup de charme après les rouges et il a un nez très parfumé.
Le Meursault Genevrières Domaine Bouchard Père & Fils 2013 me plait beaucoup il est délicieux et grand.
Le Meursault Perrières Domaine Bouchard Père & Fils 2013 a un nez très soufré, pétrolé. En bouche il a beaucoup de caractère.
Les grands crus viennent maintenant. Le Corton-Charlemagne Domaine Bouchard Père & Fils 2013 n’est pas le plus puissant des Corton-Charlemagne mais il est agréable et très fluide.
Le Chevalier-Montrachet Domaine Bouchard Père & Fils 2013 est puissant et très grand. Le Montrachet Domaine Bouchard Père & Fils 2013 est encore plus grand, il a la majesté d’un vin fabuleux.
Le Chevalier-Montrachet Domaine Bouchard Père & Fils 2017 est un beau vin mais très jeune il est subtil et parfumé.
Après cette dégustation de grands vins au cours de laquelle nous avons plus bavardé que réellement analysé, nous traversons la rue pour nous rendre au château de Beaune. Nous sommes une cinquantaine, tous proches des dirigeants des maisons Henriot et Bouchard. L’apéritif dans le salon intimiste au parquet marqueté en bois précieux se prend avec le Champagne Henriot Cuvée Hemera 2005. La Cuvée Hemera est le nouveau champagne de prestige de la maison Henriot et 2005 est le premier millésime de cette cuvée, appelée à remplacer la cuvée des Enchanteleurs avec une philosophie différente fondée sur la fraîcheur et la légèreté, selon la formule de la maison Henriot : « le temps devient lumière ». Il est fait par moitié de pinot noir et de chardonnay.
Ce grand champagne est encore meilleur après la dégustation que nous venons de faire. Je le sens promis à un bel avenir. Il est délicieux sur les gougères traditionnelles du lieu.
Nous passons à table dans l’Orangerie du château. Le menu est : ravioles de foie gras, consommé de bœuf à la truffe / magret de canard, jus aux baies de cassis / assiette de fromages / saint-honoré.
Sur les ravioles nous avons deux vins. Le Chevalier-Montrachet La Cabotte Domaine Bouchard Père & Fils 2008 est d’une parcelle, la Cabotte qui est incluse dans le territoire du Montrachet et mériterait d’en avoir l’appellation. C’est un vin que j’adore, complexe, riche et généreux. Le 2008 est encore bien jeune.
Le Chevalier-Montrachet La Cabotte Domaine Bouchard Père & Fils 1998 a une couleur plus ambrée que le 2008, d’un ambre léger. Le vin montre une belle maturité. Il est beaucoup plus large et puissant que le 2008. L’accord avec le plat délicieux est surtout trouvé sur le consommé subtil et gourmand qui réchauffe les arômes du vin.
Le Corton Domaine Bouchard Père & Fils 1988 me paraît dévié et Frédéric Weber qui est à ma table confirme que la bouteille n’est pas parfaite. On en apporte une seconde qui est bouchonnée, aussi va-t-il va lui-même chercher une bouteille qui soit parfaite, et elle l’est. Le vin est vif, profond, très long. Il est très expressif. La sauce du magret de canard est trop marquée pour le vin rouge et lorsque j’essaie ce plat avec La Cabotte 1998, l’accord se fait plus naturellement.
Le Beaune Clos de la Mousse Bouchard Père & Fils 1918 est le clou de ce dîner, car c’est un vin qui a juste cent ans. Sa couleur est superbe, d’un rouge sang. Le vin est marqué par une belle acidité et les fruits rouges qui apparaissent sont riches. Le vin est gourmand. Autour de la table les avis sont partagés et Sylvain Pitiot l’ancien directeur du Clos de Tart ne met pas ce vin premier dans son classement alors que je le mets premier comme d’autres convives autour de la table. C’est une question de goût. J’ai eu la chance de boire la lie qui est d’une richesse extrême. C’est l’âme du vin et je suis sous son charme.
Le Champagne Henriot Rosé sans année accompagne le dessert superbement exécuté. Mais il n’est pas le mieux adapté au dessert. J’aurais bien vu une cuvée des Enchanteleurs assez ancienne pour soutenir le beau dessert.
Le thème du dîner était les années en 8 pour accompagner la vedette, un vin de cent ans. La générosité de la maison Bouchard et de son président Gilles de Larouzière est extrême. Ce dîner et l’ambiance sont des souvenirs précieux.
La lie du 1918