Déjeuner au restaurant Michel Rostang. L’accueil est chaleureux. Le tour de taille des clients déjà présents suggère que c’est un repaire de bons vivants. On vient ici pour la bonne chère et le menu que je vais choisir va confirmer cette orientation. Une bonne initiative est de proposer une courte liste de vins à des prix très tirés. J’y trouve le vin qui accompagnera le repas. Le maître d’hôtel me dit qu’il savait ce que je choisirais.
Mon choix de menu est : cuisses de grenouilles et lièvre à la royale, qui sera le premier de l’année pour moi. Le Château Rayas Châteauneuf-du-Pape 2004 a une belle couleur, pruneau foncé, hésitant entre bordeaux et quetsche. Le nez est précis, racé et plutôt discret.
En bouche le vin n’est pas du tout bordeaux comme il le suggère souvent. Il est résolument rhodanien. Comme il a relativement peu de puissance, on sent mieux la râpe et l’amertume. Le vin a d’autant plus de charme qu’il ne veut pas séduire. C’est un vin de suggestion. Il est net, pur, précis et dose bien ses complexités. C’est intéressant de constater qu’il est à la fois strict et charmeur. Il ne faut pas en attendre de l’exubérance et écouter ses subtilités. S’il est très plaisant tout au long de sa dégustation il ne figure malgré tout pas dans les plus beaux millésimes de Rayas.
Le lièvre à la royale met en valeur le vin et la sauce crée un accord de prolongement qui est d’une exactitude confondante. Comme le maître d’hôtel rajoute et rajoute de la sauce le plaisir n’en est que plus grand .
Les deux plats sont très élaborés. Autant le goût est gratifiant, autant la mâche et l’aspect tactile du plat est un peu moins marqué. Les cuisses de grenouilles sont interprétées dans des sortes de cromesquis, très bons, mais on n’a pas la mâche de la cuisse mêlant habituellement fermeté et tendreté.
De même le délicieux lièvre à la sauce démoniaque et à la farce gourmande donne un toucher de bouche qui est plus celui d’une terrine que celui d’un lièvre. Mais les interprétations du lièvre à la royale sont l’occasion de trésors d’inventivité de tous les chefs.
Les deux plats sont délicieux. Le restaurant Michel Rostand confirme son statut d’étape gourmande pour bons vivants.
le bouchon n’a pas d’indication d’année