Un ami qui vend du vin organise aussi de temps à autre des événements. Il propose que nous déjeunions au restaurant le Grand Monarque de Chartres, sur le thème du Montrachet du Domaine de la Romanée Conti. Le propriétaire du restaurant, que j’ai connu il y a bien longtemps car il était aussi propriétaire du restaurant Le Petit Riche à Paris dans le secteur des banques, a décidé de mettre à notre disposition dix millésimes successifs de Montrachet du Domaine de la Romanée Conti et pour une raison que j’ignore le 2010 ne sera pas présent. Nous aurons donc neuf Montrachet.
Avec deux amis fidèles de mes repas, nous nous rendons au Grand Monarque où Pierre, l’organisateur, a déjà ouvert les vins à 10h30. Les bouchons sont alignés et nous prenons des photos de cet impressionnant alignement.
Comme nous sommes en avance, nous commandons un Champagne Selosse Millésimé 2008 en dehors de notre programme. Ce champagne est d’une invraisemblable noblesse. Puissant, raffiné, sublime, je trouve qu’il surpasse tous les champagnes de 2008 que j’ai eu la chance de boire, de cette immense année.
Les participants arrivent et nous serons dix de divers horizons, Singapour, Belgique, Suisse et autres. Parmi eux le vigneron champenois Jérôme Legras a apporté un Champagne Legras & Haas magnum 2008. Passer après le Selosse pourrait sembler une difficulté infranchissable mais ce champagne délicat et subtil s’en tire remarquablement bien. Ce Blanc de Blancs de Chouilly est d’une grâce particulière.
Le chef Thomas Parnaud, très intéressé par cette expérience a beaucoup travaillé pour les accords. Voici son menu : bouchées apéritives dont un pâté en croûte délicieux / mise en bouche / langoustine Royale triple zéro juste raidie, sauce mousseline coriandre, sarrasin, caviar d’Aquitaine de la maison Perlita / sandre ikéjimé du bassin de la Loire, blettes, feuille de yuzu, jus d’arêtes au safran / ris de veau et homard, jus de veau et émulsion homard, petits pois et morilles / comté de 24 mois et cône de chèvre / prédessert / intemporel millefeuille vanille bleue de la Réunion, caramel beurre salé.
Pierre, l’organisateur, a voulu présenter les Montrachet du Domaine de la Romanée Conti par couples, en juxtaposant deux vins de deux climats différents, une année chaude et une année plus froide et par un hasard arithmétique, la somme des années de chacun des quatre couples de deux Montrachet est 19. Les couples dans l’ordre sont : 2012 et 2007 / 2013 et 2006 / 2014 et 2005 / 2011 et 2008 et le repas se finira sur le 2009.
Le repas ne se prêtait pas à prendre des notes aussi mes commentaires seront-ils succincts. Ce qui m’a frappé le plus c’est l’incroyable diversité de ces vins. Aucun ne ressemble aux autres. La principale cause de variation est l’importance du botrytis qui généralement pour ces vins jeunes entraîne des couleurs plus intenses.
Malgré la difficulté de classer je me suis amusé à hiérarchiser les vins, en fonction de mon palais qui ne prétend pas être universel, comme le démontre chacun de mes dîners où les votes des participants sont vraiment différents, même s’il y a, bien sûr, des tendances communes.
Le premier de mon vote est le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2009 complexe, subtil, au nez incroyable de charme et d’intensité.
Le second est le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2008 superbe et riche, certainement le plus large de tous, mais coiffé au poteau par le 2009 à cause de son parfum.
Vient ensuite le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2005 beau, un peu plus complexe mais moins solaire que le 2008.
Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2013 est subtil, élégant et complexe.
Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2014 est élégant et frais et subtil aussi
Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2012 est très beau, plus calme, élégant.
Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2006 est peut-être le plus gastronomique après le 2008, aidé par le sandre superbe.
Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2011 est un vin plus calme
Le Montrachet du Domaine de la Romanée Conti 2007 a un beau fruit, et se montre agréable.
Avant que nous ne passions à table, je redoutais une certaine fatigue du palais en goûtant à la suite neuf vins aussi riches aussi avais-je suggéré que l’on fasse un intermède avec un vin rouge. Un Château Haut-Brion 1966 avait été ouvert, au nez très rebutant de poussière mais qui s’est épanoui assez rapidement. Lorsqu’on m’a demandé si je maintenais mon désir, j’ai dit non, car nous étions sur une belle lancée. Aussi le Haut-Brion a été servi sur les fromages et j’ai annoncé à l’avance qu’il triompherait sur le chèvre contrairement au Montrachet. Tollé de la part de l’excellent maître d’hôtel mais les faits m’ont donné raison : c’est le Haut-Brion subtil, bien équilibré et solide qui a joué gagnant avec l’excellent chèvre.
J’avais apporté avec moi une bouteille dont la forme suggère un madère, mais n’a aucune indication, ni capsule ni étiquette. Je l’avais ouverte avant le repas et son parfum irréellement brillant indiquait un madère des années 20, sans doute centenaire, d’une bouteille des années 50. Ce Madère inconnu des années 20 absolument sublime, riche et profond a idéalement conclu ce repas.
Mais ce n’était pas fini. Nous avons visité la grande cave du restaurant qui comporte une cave Jacques Puisais et une cave Jean Carmet. On voit donc l’inclination vers la Loire et ses vins. Puis chose incroyable, le sommelier a ouvert quatre alcools du Domaine de la Romanée Conti. J’en ai bu trois, La Fine du Domaine de la Romanée Conti 2000 joyeuse et ensoleillée, le Marc du Domaine de la Romanée Conti 2000 sauvage et viril et le Marc du Domaine de la Romanée Conti 1994 extraordinaire, très au-dessus du 2000, la perfection du Marc.
Cela m’a poussé à accepter le don d’un convive, un cigare BEHIKE de Cohiba. Une petite merveille.
Pierre a fait une organisation parfaite. Le restaurant a été d’une générosité incroyable, le chef, présent souvent pour échanger nos impressions a fait une cuisine bourgeoise du plus haut niveau. En ce lieu qui porte au bonheur, nous avons vécu un repas exceptionnel.
La table
chaque place a ses verres avec indication du vin et le menu
les vins ont été ouverts à 10h30
j’ouvre le Madère que j’ai apporté
avant-programme
le repas