Une semaine après le réveillon de la Saint-Sylvestre nous recevons des amis dans notre maison du sud pour fêter l’épiphanie. L’apéritif comprendra du gouda au pesto, une mimolette et un foie gras.
J’ai envie de faire une expérience. J’avais ouvert pour le réveillon un Krug Clos du Mesnil 2004 et un Laurent-Perrier Grand Siècle années 70. Il restait du Krug. Le Grand Siècle n’avait pas été bu au dîner mais bu partiellement le lendemain. Que valent ces deux vins sept jours après avoir été ouverts ?
A notre grande surprise le Krug a encore des bulles fines et vives. En bouche le vin donne l’impression de ne pas avoir souffert du temps, car il est vif, de belle complexité. Quelle surprise. En fait la fatigue n’apparaîtra qu’après quelques minutes, mais, même si l’on ressent la fatigue le champagne est encore très vivant et plaisant à boire.
Le Champagne Laurent-Perrier Cuvée Grand Siècle années 70 est d’une belle couleur ambrée. Nous convenons sans difficulté que ce champagne oxydatif est aussi bon que si on l’avait bu quand il a été ouvert. Il est gourmand, de belle maturité et de grand plaisir. Il n’a pas de signe qui montrerait une faiblesse ou une fatigue liée à son ouverture précoce.
Ces expériences étant faites, nous buvons le Champagne Krug Private Cuvée première édition à étiquette de couleur olive. Ce champagne a été commercialisé en 1981 et 1982 et contient donc des vins des années 70. Je l’avais ouvert il y a trois heures. Il n’avait eu aucun pschitt et son magnifique bouchon était venu entier. Il a une grande personnalité de champagne ancien avec des notes douces combinées à une forte énergie. Il se marie au foie gras de belle façon dans un accord douceur sur douceur.
Le premier plat est des escargots que nos amis adorent. Je les associe à La Petite Sibérie Côtes de Roussillon Villages 2006 d’Hervé Bizeul. Notre amie aurait pensé que les escargots appellent un vin blanc mais la démonstration est faite que ce vin est le compagnon idéal des escargots. Je l’adore. Il titre 15° et a une forte puissance, mais aussi un fruité qui lui donne de la fraîcheur et un finale mentholé, le même que celui des Vega Sicilia Unico. Ce vin a d’énormes qualités et me plait.
Pour les pommes de terre à la crème et à la truffe apparaît la Côte Rôtie La Mouline Côte Blonde Guigal 1984. Il est d’un monde complètement différent du vin de Bizeul. Il brille par sa complexité qui offre des saveurs qui changent à chaque instant et virevoltent. Ce vin est calme et subtil quand la Petite Sibérie est un cheval fou, qui fonce pour montrer sa vivacité. L’accord de la Côte Rôtie avec le plat est une merveille.
Vient ensuite un poulet rôti aux pommes de terre grenaille qui accepte les deux vins dont on peut se régaler, chacun pour son message. La Petite Sibérie, c’est Marcel Cerdan et La Mouline, c’est Gary Cooper.
Pour le camembert Jort il est évident pour moi que le vin du Roussillon créera un accord parfait et c’est le cas.
Comme il se doit, le déjeuner d’épiphanie se conclut par la galette des rois qui ne nécessite pas de vin. Par un hasard que j’ai peut-être un peu aidé, notre amie aura eu les deux fèves. Lors de ce déjeuner amical, la Petite Sibérie s’est montrée sous un jour enthousiasmant.