Après la présentation des vins du domaine de la Romanée Conti par Aubert de Villaine, Pascal Marquet, directeur de Grains Nobles, retient à dîner quelques personnes autour d’Aubert de Villaine, dont Michel Bettane, Bernard Burtschy et moi. Sergio, qui a géré la dégustation et dirige la restauration de l’endroit avec sa femme, est d’origine colombienne. Le jeune chef est aussi hispanique. Il est très motivé, nous a expliqué les plats. Il travaille bien et l’on sent qu’il est ambitieux. Avant de passer à table, j’ouvre le vin que j’ai apporté. A peine ai-je soulevé trois millimètres qu’une affreuse odeur de bouchon envahit mes narines, puis la pièce. Le vin est un Côtes du Jura blanc Robert Jeannin 1973 qui m’avait plu lorsque je l’ai saisi en cave pour sa belle couleur. Il est bouchonné ou en a les apparences et ne revivra pas. Je n’ai pas réussi à ‘audouzer’ mon vin ce qui a permis à Michel et Bernard de faire gentiment un peu d’humour à mes dépens.
Nous commençons par un Champagne Egly-Ouriet rosé grand cru magnum sans année. Alors que je suis un fan des champagnes de cette maison, ce rosé ne me convainc pas du tout. Il n’a pas d’âme. Et le contraste est extrême avec un Champagne Egly-Ouriet Cuvée Brut non dosé qui a passé 61 mois en cave et a été dégorgé en juillet 2004. D’après ce que j’ai compris, ce champagne n’a pas été commercialisé. Il a une personnalité affirmée. Je l’adore. Le temps lui a donné de la souplesse et a rendu beaucoup plus facile à accepter l’absence de dosage. J’aime ce champagne qui raconte des complexités.
Dîner avec Michel Bettane et Bernard Burtschy, c’est fascinant, car on apprend des tonnes de choses nouvelles, en remarquant à quel point ils sont proches dans leurs analyses, mais on prend aussi une sacrée leçon d’humilité, tant on se sent nain à côté de ces géants de la connaissance du vin. Les deux éreintent avec une vivacité rare le Rioja Vina Tondonia 1964 qu’ils trouvent très mal fait. Je peux comprendre leur jugement, tout en étant moins sévère.
A l’inverse, ils encensent le Château Bel Air marquis d’Aligre 1970 en vantant à l’envi ses qualités. Je peux comprendre leur jugement, tout en étant moins laudatif.
Le chef nous a proposé un très bon foie gras au subtil chutney, des coquilles Saint-Jacques délicieuses et un plateau de fromages goûteux. Voilà une bien heureuse surprise.