Dîner à quatre mains au restaurant Keimardi, 3 décembre 2013

Je ne sais pas comment j’ai appris la nouvelle, mais je l’ai retenue. Le chef Kei Kobayashi a eu l’heureuse idée d’inviter son prédécesseur de la rue du Coq Héron, le grand chef Gérard Besson, pour faire pendant une courte période des dîners à quatre mains.

Il faut à Kei une belle dose d’ouverture d’esprit pour faire revenir Gérard aux fourneaux qu’il a pratiqués pendant tant d’années. Lorsque nous arrivons au restaurant Kei, les deux chefs nous saluent avec de grands sourires. On sent qu’ils sont heureux de cette expérience.

Le menu qu’ils ont concocté est : amuse-bouche / soupe de lentilles et foie gras / terrine de lièvre, légumes crus et cuits / Saint-Jacques snackées, oseille et sabayon agrumes / biche, condiment pomme et poire, sauce poivrades / interprétation de l’oreiller de la belle Aurore / consommé de gibier / tarte aux agrumes, mousseux chocolat et son sorbet.

La décoration du lieu a été rajeunie par Kei. Le service de table, épuré, est de grand raffinement. Et les deux cuisines cohabitent bien. Kei, c’est l’exploration de saveurs pointillistes, suggérées et protéiformes, proposant des rêveries et des variations infinies. Gérard, c’est le raffinement de la cuisine bourgeoise, solide et de dextérité.

La biche est superbe, la terrine est une madeleine de Proust et l’oreiller de la belle Aurore, traité en petites portions pour deux, plus coussinet qu’oreiller, est emblématique. Je m’y sens bien, emporté par les saveurs multiples des cinq ou six composantes goûteuses du plat.

Avec Gilles Josso, pilier du restaurant, j’ai choisi un Chambertin domaine Ponsot 2000. Le nez est très subtil et bourguignon. Gilles m’avait dit que le vin serait très fruité. Or en bouche, c’est une forte râpe doublée d’une amertume qui envahit mon palais. J’attends que le vin s’élargisse, mais c’est bien lent. Il devient ce qu’il pourrait être, mais ce ne sont que des confidences, sur l’oreiller. Au total, ce vin n’est pas porteur de plaisir. Bien sûr les grappes sont entières, ce qui donne des tons rêches de rafle que j’accepte volontiers, mais le vin manque de vivacité et reste sur des notes beaucoup trop strictes.

Ce n’était pas suffisant pour brider le grand bonheur d’avoir vu ces deux chefs travailler ensemble. En sortant, nous les avons félicités pour cette idée d’une grande fécondité. Bravo aux deux chefs d’avoir aussi facilement additionné leurs talents. Ils nous ont dédicacé notre menu.

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