Dîner au restaurant L’Ecu de Francedimanche, 16 octobre 2016

Le restaurant L’Ecu de France à Chennevières a jalonné mon histoire. Cet ancien relais de chasse installé le long de la Marne a accueilli nombre d’événements familiaux forts et aussi de nombreux repas professionnels. J’ai même fait l’un de mes dîners (le n° 48) en ce lieu. Nous l’avions ignoré pendant quelques années non par volonté mais parce que mes pas me portaient vers d’autres horizons. Je rencontrais chaque année Monsieur Brousse et son fils à des présentations de vins car la cave de l’Ecu de France est très bien gérée, aussi l’idée m’est-elle venue de renouer avec ce restaurant. Nous allons y dîner, ma femme et moi.

La décoration n’a pas changé d’un pouce avec des motifs de chasse mais aussi une accumulation de faïences de toutes régions. Il y a un petit côté hors du temps en ce lieu car il n’y a pas le moindre endroit qui serait décoré différemment de ce que j’ai connu il y a un demi siècle. Il y a sans doute eu des transformations, sauf en ce qui concerne l’accueil et le restaurant. La valeureuse Christiane, complice de toutes mes exigences est partie à la retraite en Bretagne. Elle nous manquera.

Je commence à regarder la carte des vins toujours aussi engageante et mes yeux se portent sur un Bonnes Mares Domaine Georges Roumier 2005. Bâtir un menu avec ce vin ne sera pas forcément facile et je choisis : Fraîcheur de homard en habit rouge, crémeux de Bufala à l’huile de pistache / suprême de pigeon rôti, foie gras rôti, caramel de betterave au vin rouge.

Monsieur Brousse m’avait prévenu que Peter Delaboss le chef est né en Haïti, mais jamais je n’aurais imaginé une telle exubérance dans l’exécution de ses plats. Cela me fait penser aux pétards que l’on fait exploser les soirs de réveillon, et qui éjectent des bonbons et des boules de papier dans toutes les directions. Là, c’est un Etna de saveurs amassées et jetées sur l’assiette comme le peintre Matthieu le faisait sur sa toile. Tout est bon, mais c’est exubérant, et c’est le contraire de la cuisine que je recherche pour les vins anciens, où tout doit être simplifié. Ici, c’est le carnaval à Rio des papilles. Lorsque je suis arrivé en fin de repas, il restait encore du vin puisque je suis seul à boire. J’ai demandé un fromage pour pouvoir finir le vin et j’ai souri parce que l’on m’a servi un brie de Meaux affiné aux noix, caviar d’artichaut, pétales de champignons de Paris et pour couronner le tout, un dissocié de fruits rouges. Plus contraire à mes souhaits, il n’y a pas.

Mais il faut reconnaître que tout est bon, les produits sont bons, les saveurs sont belles. Seule l’exubérance est dalinienne. Venons-en au vin. Le nez est vif et plaisant. La bouche est active et racée. On sent qu’on est en présence d’un vin bien construit avec un fruit hyper présent et l’alcool présent aussi. Il faut dire que j’ai bu hier deux bourgognes, de 1966 et 1959. De ce fait, ces aspects de vins jeunes sont plus sensibles pour moi. Le vin est bon, même grand, mais je dois avouer que je suis resté sur ma faim. Le Bonnes Mares Domaine Georges Roumier 2005 est bien, presque parfait dans sa construction, mais « trop » bien. Il manque une petite étincelle qui fait qu’on l’aimerait. Il s’est montré très bon tout au long du repas, mais j’ai attendu le moment où il m’aurait ému. Je suis à peu près sûr que dix ans de plus lui donneraient le charme qu’il doit offrir, car il ne m’a montré aucun signe de défaut. Presque trop parfait serait ma conclusion.

La charge émotionnelle fut assurée par ce lieu, où j’ai tant de souvenirs, des anniversaires, le repas des funérailles de ma mère, des conclusions de contrats ou de reprises d’entreprises. L’attachement à ce lieu s’est immédiatement recréé. Nous avons attendu anormalement longtemps le premier plat, mais cela s’oublie. Cette soirée a fait resurgir beaucoup de belles envies.

étant demi-ardennais, j’ai apprécie la présence à table d’un sanglier !

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