Il est très rare que je dîne seul avec mon fils au restaurant. Ma femme est dans le sud. Nous nous rendons au restaurant L’Écu de France, lieu qui a accueilli beaucoup de réunions familiales dont mon fils a le souvenir. Monsieur Brousse propriétaire des lieux qu’il gère avec sa femme et son fils Hervé, me dit qu’il a trouvé par hasard en cave un Chambolle-Musigny Roumier 2011 qu’il n’avait jamais commandé et a sans doute pris la place d’un 2012. Pourquoi ne pas prendre ce vin ? Pour le blanc, ce sera un Hermitage Chave blanc 2012.
Nous bâtissons le menu pour ces deux vins, en choisissant : ravioles d’escargots et champignons, échalions au vin rouge, persillade / volaille fermière de Culoiseau, céleri confit, courge et oignon de Roscoff, jus de volaille.
Le vin blanc est beaucoup trop froid, aussi je commande deux coupes de Champagne Veuve Clicquot rosé sans année qui va accompagner l’amuse-bouche, un lit de betteraves, miso et œuf de truite. Le problème de la betterave rouge, c’est qu’elle écrase tout sur son passage, comme Attila roi des Huns. Le champagne est sans histoire.
L’Hermitage Chave blanc 2012 est solide, fort avec une ampleur unique. Et sa solidité, s’exprime en des milliers de subtilités discrètes. Et le goût restant en bouche est impressionnant. C’est un guerrier mais un gentleman.
Comme nous buvons lentement ce vin superbe, je commande du foie gras et arrive un pressé de foie gras, chutney de poire au Xérès, fine gelée à l’hibiscus. Bien évidemment je n’ai mangé que le foie gras, sans les ajoutes et j’ai signalé à Hervé Brousse que la cuisine qui a fait des progrès, devrait s’orienter vers des goûts cohérents lorsqu’elle accompagne des vins de si grande qualité.
La volaille est très bien traitée et les accompagnements sont très adaptés au plat et au vin. Le Chambolle-Musigny Roumier 2011 est tout en subtilités. Il a ce que la Bourgogne peut donner de mieux. Certes il n’a pas la magnificence d’un Musigny, mais il est si délicat qu’il procure un plaisir extrême. Quelle région pourrait donner un charme aussi délicat ? Il y en a, bien sûr, tant il y a de régions qui recèlent des trésors. Ce vin a la politesse d’un grand vigneron.
Nous avons fini les deux vins sur deux fromages. D’instinct j’ai eu le bon choix qui n’est pas évident : le Chambolle-Musigny se marie au brie de Meaux aux brisures de truffes et l’Hermitage blanc se marie à la tomme de Savoie. Sur le papier ce n’était pas évident, mais au palais, oui.
Nous avons eu un dîner avec mon fils au cours duquel la proximité de nos visions, de nos idées pour l’avenir me rend heureux car je sais qu’il y aura une continuité dans ce que j’ai commencé qu’il développera, y compris la collection et la dégustation du vin.
Il n’y a pas eu de gagnant entre le blanc et le rouge, juste un intense moment de partage et d’émotion.