La société Kaviari, grand spécialiste de caviar, a créé des dîners avec des chefs étoilés qui viennent cuisiner dans leur manufacture à Paris. Ce soir ce sera le tour d’Alain Passard le chef triplement étoilé du restaurant Arpège et « grand jardinier » puisque tous les produits de la terre qu’il cuisine viennent de ses fermes.
Lorsque j’arrive avec mon épouse à l’heure du rendez-vous je demande si Alain Passard est arrivé pour le saluer. On me dit qu’il n’est pas là et je me demande comment un chef peut préparer un repas gastronomique s’il n’est pas déjà au fourneau. Je constaterai à quel point les cuissons de plats sophistiqués sont idéales, ce qui implique une préparation absolument parfaite pour arriver à un tel résultat.
Nous serons une douzaine à table, d’horizons divers et nous commençons par une dégustation de trois caviars aux couleurs très différentes, présentés par Karin Nebot, la directrice de la manufacture et organisatrice de ces dîners passionnants.
Le menu composé par Alain Passard est : chaud-froid d’œuf Arpège au caviar / carpaccio de betterave rouge et oignon rouge à la burrata et au caviar / célerisotto Monarch au chou Romanesco et caviar / velouté de topinambour fuseau et caviar / carpaccio de navet à la truffe tuber magnatum pico d’Alba et crème de caviar / poireau Saint-Victor au raifort et caviar / caviar Kristal du lac Qiando aux mille îles et parfum d’argan / tartare de betterave blanche de pleine terre au caviar / pommes de terre Allians fumées au Mont d’Or du Haut-Doubs, truffe d’Alba et caviar / tarte aux pommes Bouquet de roses et caramiel.
Il y a dans la cuisine d’Alain une grande sensibilité et une volonté de montrer les infinies possibilités des végétaux. L’image qui me vient est celle du dompteur d’un cirque qui veut que ses animaux réalisent des prouesses. Alain est le dompteur des végétaux, voulant qu’ils atteignent des saveurs que nul ne soupçonnerait. On est donc emporté dans un tourbillon, comme les enfants dont les yeux brillent lors des numéros du cirque.
Alain a aussi joué le jeu de Kaviari dans cette expérience puisque tous les plats sauf le dessert ont été accompagnés de caviars. Les champagnes et vins très jeunes ont joué le jeu sans attirer particulièrement mon attention mais ce n’était pas l’essentiel.
Le plat que je trouve le meilleur est celui qu’Alain appelle « célerisotto » suivi du velouté de topinambour. Le poireau cru est tellement fort qu’il est dur à manger. Au contraire, la pomme de terre au Mont d’Or est le berceau idéal pour la truffe d’Alba et le caviar.
Le point culminant du dîner est quand Alain est venu bavarder avec nous, expliquant que la cuisine des légumes est passionnante car elle change tous les trois mois, chaque saison offrant une palette différente de produits. C’est un cuisinier passionné, humain, sensible, au talent exceptionnel.